Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/10/2023

vos confrères feront bien mieux d'obtenir la suppression de tous ces offices ridicules qui ruinent l’État, et qui le déshonorent

... Voir le rapport de la Cour des Comptes : https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc...

 

 

« A Alexandre-Marie-François de Paule de Dompierre d'Hornoy

1er mars 1768 1

Mon cher magistrat, maman, Mme Dupuits feront bientôt ce que je voudrais faire, elles vous embrasseront . Il faut absolument que maman passe quelque temps à Paris pour ses gencives qui sont dans un état menaçant et il faudra que j'aille moi-même mettre un ordre invariable dans mes affaires avec M. le duc de Virtemberg, qui ne me devra jamais douze années comme les maréchaux de France .

Je vous prierai de partager entre elle et moi tout ce que me doit M. le maréchal de Richelieu qui se monte à 27425 livres à ce que je crois 2. Il conviendra que le tout soit payé à la fois . Maman qui a beaucoup vécu avec lui, se fera mieux payer qu'un sergent à verge . Il est vrai qu'elle n'est plus dans l'âge qui ouvre la bourse des ducs et pairs ; mais une ancienne liaison est toujours respectée 3. Certainement vous viendrez tous deux à bout de dégraisser l'abbé Blet 4.

Mes compliments au Turc du Grand conseil . Vous verrez par le petit écrit ci-joint 5 qu'on fait des compliments à de plus puissants seigneurs, et qu'on est fort poli dans ce siècle . Je ne sais pas qui est le complimenteur, mais il me paraît fort honnête .

Au reste, je ne suis pas tout à fait de l'avis de mon confrère Séguier, sur l'histoire impartiale des jésuites 6 . Mon confrère me paraît un peu partial .

Je vous embrasse, mon gros magistrat, le plus tendrement du monde .

Ah ! que vos confrères feront bien mieux d'obtenir la suppression de tous ces offices ridicules qui ruinent l’État, et qui le déshonorent . C'est un sujet qui doit être traité avec beaucoup de force, et l’éloquence la plus attendrissante 7. Mais vous avez plus de Catons que de Cicérons .

N. B. – Il serait plaisant d'énoncer qu'il ne serait répandu un libelle diffamatoire contre la maison de France, etc., sous le nom de bulle 8, etc., et que pour venger l'honneur du Saint-Père si horriblement compromis on ordonne qu'on brûlera icelle au pied du grand escalier . »

1 La première édition est limitée aux deux premiers paragraphes .

2 V* a ajouté les derniers mots de cette phrase dans la marge .

3 Allusion curieuse . Il ne semble pas qu'on ait tenté de l’éclaircir .

5 Lettre de l'archevêque de Cantorbery ...

6 Le réquisitoire de l'avocat général Antoine-Louis Séguier contre l'anonyme Histoire impartiale des jésuites depuis leur établissement jusqu'à leur première expulsion, 1768 (attribué à Simon-Nicolas Henri Linguet : https://fr.wikipedia.org/wiki/Simon-Nicolas-Henri_Linguet )

Voir : https://books.google.fr/books?id=0ZL2rrUjkioC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et https://books.google.fr/books?id=1W2ntv0xxOYC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

7 Ce qui sera fait plus tard ; voir https://books.openedition.org/pumi/29538?lang=fr

8 Allusion à la bulle papale du 30 janvier 1768 excommuniant l'infant de Parme qui avait saisi des biens ecclésiastiques ; la même bulle excommuniait aussi ceux qui prenaient part ) l'expulsion des jésuites de Parme . À la suite de quoi les différends rois de la maison de Bourbon saisirent Avignon, Bénevent et Ponte-Corvo.

Voir Le Siècle de Louis XV : https://fr.wikisource.org/wiki/Pr%C3%A9cis_du_si%C3%A8cle_de_Louis_XV/Chapitre_39

14/10/2023

C'est à vous à savoir quels sont vos ennemis

... N'attendez pas les injonctions des dictateurs , ils sont légions, et tous plus détestables les uns que les autres , y compris cette plaie moderne que sont les influenceurs.ceuses. Je vous souhaite d'avoir encore assez d'esprit pour les reconnaitre et les bannir .

 

 

« A Claude-Joseph Dorat, ancien Mousquetaire

du roi, etc.

Barrière Vaugirard

à Paris

1er mars 1768, au château de Ferney 1

J'ai toujours sur le cœur, monsieur, la calomnie qui m'impute mille ouvrages que je ne connais pas, et la mauvaise foi qui se sert de mon nom pour faire courir des épigrammes que je n'ai ni faites ni pu faire. Cette mauvaise foi m'a été extrêmement sensible.

J'appris, il y a quelques mois, qu'on prétendait que j'avais récité une épigramme 2, ou plutôt des vers contre vous, qui me paraissent très injustes, quoique assez bien faits 3. Cette imposture fut confondue, mais je fus très affligé. J'en écrivis à Mme Necker 4, qu'on me dit être votre amie . Je vous en écris aujourd'hui à vous-même, monsieur. Quoique j'aie eu quelques légers sujets de me plaindre de vous 5, je l'ai entièrement oublié, et les excuses que vous avez bien voulu me faire m'ont infiniment plus touché que le petit tort dont j'avais sujet de me plaindre ne m'avait été sensible. Il m'était impossible, après cela, de rien faire qui pût vous déplaire. J'étais d'ailleurs malade et mourant quand cette épigramme parut. Songez au temps où elle fut faite . Pouvais-je alors deviner que vous eussiez une maîtresse à l'Opéra? Était-ce à moi de la faire parler? Je n'ai jamais vu les vers que vous aviez composés pour elle . En un mot, monsieur, je suis trop vrai et j'ai trop de franchise pour n'être pas cru, quand j'ai juré à Mme Necker, sur mon honneur, que je n'avais nulle part à cette tracasserie.

C'est à vous à savoir quels sont vos ennemis. Pour moi, je ne le suis pas . J'ai été très affligé de cette imposture. J'ai des preuves en main qui me justifieraient pleinement mais je ne veux ni compromettre ni accuser personne. Je me bornerai à mon devoir c'est celui de repousser la calomnie.

Voilà, monsieur, ce que la vérité m'oblige à vous écrire, et cette même vérité doit en être crue quand je vous assure de toute l'estime et de tous les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.

Permettez que M. le chevalier de Pezay trouve ici les assurances des sentiments que je lui dois . »

1 Original signé, post scriptum autographe .

3 C'est l'épigramme de La Harpe, qui commence par ce vers « Bon Dieu, que cet auteur est triste en sa gaîté » . Voir : https://www.france-pittoresque.com/spip.php?article7698

13/10/2023

Il y a une destinée sans doute, et souvent elle est bien cruelle ... Si je meurs, je meurs tout entier à vous, et si je vis ma vie est à vous

... Belle déclaration d'amour touchante de ce septuagénaire qu'est Voltaire . Philosophe , oui, mais homme sensible d'abord et toujours , ce qui en fait ce patriarche aimable que j'apprécie et continue à suivre , et faire suivre au jour le jour .

 

 

« A Marie-Louise Denis

A Ferney mardi 1er mars [1768] à 2 heures après midi 1

Il y a une destinée sans doute, et souvent elle est bien cruelle . Je suis venu trois fois à votre porte, vous avez frappé à la mienne . J'ai voulu promener ma douleur dans le jardin . Il était 10 heures, je mettais l'aiguille sur dix heures au globe solaire, j'attendais que vous fussiez éveillée . J'ai rencontré M. Mallet . Il m'a dit qu'il était affligé de votre départ . J’ai jugé qu'il sortait de votre appartement . J'ai cru que vous dîneriez au château comme vous l'aviez dit . Aucun domestique ne m'a averti de rien, ils croyaient tous que j’étais instruit . J'ai fait venir Christin et père Adam . Nous nous sommes entretenus jusqu'à midi . Enfin je retourne chez vous . Je demande où vous êtes . Wagnière me dit : « Eh quoi vous ne savez pas qu'elle est partie à 10 heures ! » Je me retourne plus mort que vif vers père Adam . Il me répond comme Wagnière : « J'ai cru que vous le saviez ! » Sur le champ, j'envoie chercher un cheval dans l'écurie . Il n'y avait personne . Ainsi dans la même maison avec vingt domestiques nous nous sommes cherchés sans nous voir . Je suis au désespoir, et cette obstination de mon malheur m'annonce un avenir bien sinistre . Je sais que le moment de la séparation aurait été affreux; mais il est plus affreux encore que vous soyez partie sans me voir , tandis que nous nous cherchions l'un l'autre . J'ai envoyé vite chez Mme Racle pour pleurer avec elle . Elle dîne avec Christin, Adam et son mari ; et moi je suis très loin de dîner . Je me dévore et je vous écris . J'espère que ma lettre et les paquets pour M. de Choiseul et pour Marmontel 2vous serons rendus vendredi matin par M. Tabareau . Je les tenais tout prêts . J'avais encore d'autres papiers à vous communiquer quand vous êtes partie .

Voici bien une autre preuve des persécutions de ma destinée : la Harpe est cause de mon malheur . Qui m'aurait dit que La Harpe me ferait mourir à cent lieues de vous n'aurait pas été cru . Enfin tout est avéré . Damilaville est allé chez cet Antoine qui demeure rue Hautefeuille . Cet Antoine que La Harpe disait lui avoir donné copie de cette misère en question, cet Antoine qui ne lui avait donné qu'une copie infidèle sur laquelle il rectifia celles que lui La Harpe fit courir (parce qu'apparemment La Harpe en avait une copie fidèle ) . Remarquez bien tout cela : Antoine a répondu que La Harpe en avait menti ; et n'a pas ajouté à son nom des épithètes bien honorables . La Harpe ne s'est guère mieux conduit dans sa tracasserie avec Dorat 3 . Enfin voilà l'origine de mon malheur . Voilà ce qui ouvre à Ferney le tombeau que j'y ait fait bâtir . Je ne me plaindrai point de La Harpe ; je n'accuserai que cette destinée qui fait tout, et je pardonne entièrement à La Harpe .

Vous verrez MM. de Choiseul, de Richelieu, d'Argental . Vous adoucirez mes malheurs ; c'est encore là votre destinée . Vous réussirez à Paris dans vos affaires et dans les miennes , vous reverrez votre frère et votre neveu . Si je meurs, je meurs tout entier à vous, et si je vis ma vie est à vous . J'embrasse tendrement M. et Mme Dupuits . Je les aime, je les regrette, j'ai le cœur percé . »

1Édition Besterman K. avec fac similé reproduisant la totalité du texte . L'écriture de cette lettre est , pour V*, irrégulière . C'est pour la première fois l'écriture d'un vieil homme . Le matin du même jour où elle fut écrite, Mme Denis signait une procuration permettant à V* d'administrer (c mais non de vendre ) Ferney . Le même jour encore, Dupan écrit à Freudenreich : « On donnait hier pour nouvelle sûre que Mme Denis, la petite Corneille et son mari avaient quitté Ferney pour aller à Paris, que l'oncle et la nièce se sont brouillés, que Voltaire a exigé de sa nièce une reconnaissance que la terre de Ferney, quoique achetée sous son nom, appartenait à Voltaire, etc. En un mot, on dit qu'il est tout seul. » Le lendemain on ajoutait, : « Mme Denis ne partit qu'hier . Voltaire lui a donné 60 mi[lle] livres, 300 louis pour son voyage et une bonne partie de sa vaisselle . On dit même qu'il lui a promis une grosse pension . Il ne lui est resté qu’un complaisant ex-jésuite . Il s'est ennuyé de tenir une auberge, il veut vivre seul . Il a congédié tout à la fois sept maîtres, outre les enfants et les domestiques. »

2 Si ces paquets contenaient des lettres, comme probablement, celles-ci ne sont pas connues .

Presque tout le monde mange actuellement fort salé dans la plus grande partie de l'Europe

... Un arrière-goût de Mer Morte , sans doute .

 

 

« A Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul

1er mars 1768

Madame,

Dans la lettre dont vous avez honoré une de vos protégées, vous avez souhaité avoir un petit ouvrage de feu M. de Saint-Hyacinthe 1qui passait pour le fils de l'évêque de Meaux Bossuet, et qui en ce cas était un fils dénaturé . Ce petit écrit fut imprimé en 1728 en Hollande . Vous le reconnaîtrez aisément par le papier . On n'en tira que peu d'exemplaires qui ne se trouvent plus que dans la cabinets des curieux . Mais que ne trouverait-on pas pour vous plaire, madame ? Si vous me demandiez le commerce de lettres de Jésus et de Marie-Madeleine 2 , vous les auriez je crois au bout de quinze jours . Un esprit comme le vôtre peut tout lire et doit tout lire ; la conversation amuse, mais les livres instruisent . Je hasarde ce petit envoi par la poste ne doutant pas qu'on ne respecte votre nom et que le paquet ne vous arrive en droiture . Si vous ordonnez qu'on vous en adresse de plus considérable, ayez la bonté, madame, de donner vos ordres, on fera ponctuellement ce que vous prescrirez .

Permettez-moi de vous confier, madame, que je regarde comme un grand bonheur que tant de solidité se trouve chez vous avec tant de grâces dans le pays de la frivolité . Le repas dont il est question n'est pas composé de meringues ou de crème fouettée, ce sont de la chère et de grosses viandes qu'un estomac aussi bien que le vôtre digérera facilement . Je connais des dames dans votre pays qui n'en pourraient pas avaler une bouchée . Je ne suis qu'un vieux garçon cuisinier, mais je puis encore vous fournir des hors-d’œuvre.

Agréez, madame, les sentiments véritables de la plus haute estime et du profond respect du vieux aide de cuisine .

P. S. – Presque tout le monde mange actuellement fort salé dans la plus grande partie de l'Europe, mais il y a encore des gens de l'ancien temps qui font brûler le rôti . »

1 Le Dîner du comte de Boulainvilliers .

2 Plaisanterie qui de réalisera un siècle plus tard

12/10/2023

J'ai été profondément affligé mais je pardonne tout à ceux qui n'ont point eu d'intention de nuire

... Et nul ne pardonnera quoi que ce soit aux terroristes du Hamas et leurs complices et financiers . La loi du Talion est désormais appliquée et fait passer la guerre en Ukraine pour un évènement de second ordre . Le premier meurtre suffit à rendre fou . Un  seul espoir, c'est qu'un jour la paix revienne comme elle a pu  revenir entre la France et l'Allemagne débarrassée (suffisamment ) du nazisme . Israeliens (débarrassés de leurs "faucons" ) et Palestiniens (débarrassés de leurs terroristes ) en paix , c'est bien aussi nécessaire que lutter contre le dérèglement climatique . Toujours trop de sang versé ! Combien de générations pour s'accorder ?

 

 

« A Michel-Paul-Guy de Chabanon

1er mars [1768]

Maman verra donc Eudoxie 1 avant moi, mon cher confrère . Elle part pour Paris, elle fera Mme Dupuits juge si on joue mieux la comédie à Paris qu'à Ferney. Ce qui me désespère, c'est qu'elle sera logée très loin de vous, chez sa sœur. Elle va arranger sa santé, ses affaires, et les miennes. Tout cela s'est délabré pendant vingt ans qu'elle a été loin de Paris 2. Je suis menacé plus que jamais d'un voyage dans le Virtemberg. Voilà Ferney redevenu un désert comme il l'était avant que j'y eusse mis la main. Je quitte Melpomène pour Cérès et Pomone. Braves jeunes gens, cultivez les beaux-arts, et gorgez-vous de plaisirs, j'ai fait mon temps.

Voici une drôlerie 3 qui vient, dit-on, de Lyon, elle pourra vous amuser. Je suis bien sûr de votre discrétion. Vous ne ressemblez pas aux gens qui font courir les bagatelles sous mon nom, et qui disent toujours : «  C'est lui, c'est lui. » Non, messieurs, ce n'est point moi.

Plût au juste ciel qu'on n'eût jamais publié certain second chant d'une baliverne 4 qui était enfermée dans ma bibliothèque! Mais, encore une fois, tout le monde n'a pas votre discrétion, mon cher confrère. J'ai été profondément affligé mais je pardonne tout à ceux qui n'ont point eu d'intention de nuire. Adieu je vous embrasse bien fort. Mme Denis et l'enfant 5 vous embrasseront mieux. »





1 Tragédie de Chabanon.

2Mme Denis a quitté Paris au début de juillet 1754 pour retrouver V* à Plombières et n’y est jamais retournée depuis .

3 Lettre de l’archevêque de Cantorbery à l'évêque de Paris .

4 Deuxième chant de la Guerre civile de Genève .

5 Mme Dupuits .

11/10/2023

je ne veux pas payer pour lui

... Paroles de socialiste désavouant son appartenance à NUPES et niant toute allégeance à ce fichu Mélenchon : https://www.euractiv.fr/section/assemblee-nationale/news/...

560x315_sc_560x315-jouteurs.jpg

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

1er Mars [1768]

Quoique vous ne soyez qu’un excommunié, mon divin ange, vous voyez bien pourtant que je brave les foudres de Rome, pour vous écrire. Votre prince et ses ministres sont bien honteux, comme je le présume 1.Voici une petite pièce qui court dans Lyon 2. Irez-vous croire encore que cela est de moi ? Vous seriez bien loin de compte. L’auteur de la Lettre au docteur Pansophe 3, de l’Ode contre les rois belligérants 4, du Catéchisme 5, etc., est un plaisant plus goguenard que moi, et je ne veux pas payer pour lui.

Madame Denis va vous voir avec M. et Mme Dupuits. Leur voyage est nécessaire . Que ne puis-je en être !... Mais…

Par Dieu, comment se porte madame d’Argental ? »

1 Voir, sur les affaires de Parme avec le pape, le chap. XXXIX du Précis du Siècle de Louis XV. (Georges Avenel.) : https://fr.wikisource.org/wiki/Pr%C3%A9cis_du_si%C3%A8cle_de_Louis_XV/Chapitre_39

2Lettre de l'archevêque de Cantorbery à l'archevêque de Paris : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/09/facetie-lettre.html

3Sur cette lettre, voir lettre du 31 décembre 1768 à d'Alembert : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/correspondance-avec-d-alembert-partie-51.html

Wilkes attribue dès l'origine , en 1766, la Lettre à V*, ainsi qu'il l'écrit à Suard le 20 mai 1766 . V* l'attribue à Bordes .

5 On attribuait généralement cette œuvre antireligieuse à V* ; lui-même l'avait plus d'une fois utilisée dans ses travaux . Mais il semble que Bordes en est l'auteur, quoique V* l'eût éditée ; voir Georges B. Watts « Voltaire and Le Catéchumène » Kentucky foreign language quarterly, 1957.

10/10/2023

Il y a des monstres auxquels il ne suffit pas de leur rogner les ongles, il faut leur couper la tête

... Le Hamas en fait indéniablement partie et il ne faut pas tarder .

 

 

« A Pierre-Michel Hennin

Mardi matin, 1er mars [1768] à Ferney

Soyez très sûr, très aimable Résident, que votre Languedochienne 1 avec ses beaux yeux n'avait point vu la deuxième baliverne 2. J'avais abandonné aux curieux la première et la troisième ; mais pour la seconde, je l'avais toujours laissée dans mon portefeuille ; et j'avais des raisons essentielles pour ne point la faire paraître. Si votre dame aux grands yeux l'a eue, ce ne peut être que depuis le mois de novembre, car La Harpe partit au mois d'octobre, et c'est au commencement de novembre qu'il la donna à trois personnes de ma connaissance. Les copies se sont peu multipliées, attendu qu'on ne se soucie guère à Paris de Tollot 3 l'apothicaire, de Flournois, de Rodon, du prédicant Buchon, et autres messieurs de cette espèce 4.

Si quelqu'un avait pu me faire cette infidélité, c'était ce polisson de Gallien 5, cependant il ne l'a pas faite.

S'il était vrai que cette coïonnerie eût paru à Paris avant la voyage de La Harpe au mois d'octobre, comme il l'a dit à son retour pour se justifier, il m'en aurait sans doute averti dans ses lettres. Il m'instruisait de toutes les anecdotes littéraires; il n'aurait pas oublié celle qui me regardait de si près il n'aurait pas manqué de prévenir par cet avertissement les soupçons qui pouvaient tomber sur lui. Cependant il ne m'en dit pas un seul mot; au contraire, il donna une copie à M. Dupuits 6, et le pria de ne m'en point parler. Dupuits, en effet, ne m'en parla qu'à son retour, lorsqu'il fallut éclaircir l'affaire. La Harpe ne se justifia qu'en disant qu'il n'avait donné le manuscrit que parce qu'il en courait des copies infidèles. Il en avait donc une copie fidèle, et cette copie fidèle, je ne la lui avais certainement pas donnée.

On lui demanda de qui il la tenait. Il répondit que c'était d'un jeune homme dont il ne dit pas le nom. Huit jours après, il dit que c'était d'un sculpteur qui demeurait dans sa rue.

Je ne lui ai fait aucun reproche, mais sa conscience lui en faisait beaucoup devant moi. Il ne m'a jamais parlé de cette affaire qu'en baissant les yeux, et son visage prenait un air de pâleur qui n'est pas celui de l'innocence. Son procès est instruit. Il s'en faut beaucoup que je l'aie condamné rigoureusement, je suis trop partisan de la proportion entre les délits et les peines, et je sais qu'il faut pardonner.

Non seulement j'ai eu le bonheur de lui rendre des services essentiels, mais je lui en rendrai toujours autant qu'il dépendra de moi. Je serrerai seulement mes papiers, si jamais Mme Denis le ramène à Ferney.

Voilà, aimable Résident, l'histoire au juste. Plût à Dieu qu'il n'y eût pas de plus grande tracasserie dans le monde ! J'espère que vous verrez bientôt finir celles de Genève. Voulez-vous bien avoir la bonté de donner au porteur cette gazette de France où il est parlé des rodomontades espagnoles contre l'Inquisition? Il y a des monstres auxquels il ne suffit pas de leur rogner les ongles, il faut leur couper la tête.

Tuus sum, et semper ero.7 

V.»

2 Le second livre de La Guerre civile de Genève .

3 Jean-Baptiste Tollot, pharmacien amateur de littérature, que V* met en scène dans La Guerre civile de Genève sous le nom de Dolot ( II, 62 et suiv. : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome9.djvu/534 ) ; voir lettre à lui adressée le 21 mai 1768 : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/07/correspondance-annee-1768-partie-17.html

4 Allusion à un passage de La Guerre civile (II, 24-30 et suite ) : « Le fier Rodon, l'intrépide Flournois ,[...] : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome9.djvu/533

Dans la première édition, les noms étaient un peu différents ; on avait Roson pour Rodon, Paillart pour Pallard, Flavière pour Clavière .

5 Dans une lettre, Hennin disait à V* le 4 janvier 1768 : « Je vous ai caché jusqu'aujourd'hui, monsieur, une sottise du sieur Gallien qui vous touche […] » , voir 7119 de https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k411361p/texteBrut

V* savait à quoi s'en tenir sur Gallien .

6 Dupuits est alors effectivement à Paris ; voir lettre du 3 février 1768 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/09/09/tout-cela-est-peut-etre-une-belle-chimere-mais-on-pourrait-e-6460597.html

7 Je suis et je serai toujours à toi .