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01/01/2010

réparer par sa bienveillance (s’il est possible) l’opprobre dont Elle m’a comblé.

Mes bonnes résolutions pour 2010 et au delà :

 

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  Je vous souhaite d'avoir une année passionnée, passionnante, comme cette musique.

http://www.youtube.com/watch?v=xlcVu8SLDdo&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=8gdUWdDVriI&NR=1

http://www.youtube.com/watch?v=4o3eiEHmJUA&feature=ch...

 

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Je vous souhaite de ne pas connaitre les affres de la disgrâce que connait Volti et qui lui donnent bien du tourment ce jour de l'an 1753 .

« Au chevalier Charles-Nicolas de La Touche

 

1er janvier  [1753]

 

                            J’ai l’honneur de vous confier, Monsieur, la copie de la lettre que j’envoie au roi de Prusse et que j’ai minutée devant vous [V* s’y disait « obligé de mettre aux pieds (du roi) (s)on sort et les bienfaits et les distinctions dont (il) (l’)av(ait) honoré » -ordre du mérite et clé de chambellan – «  (s)a résignation est égale à sa douleur . (Il) ne (s)e souviendra que de ces mêmes bienfaits »…]. Elle n’est pas d’un homme qui ait à se reprocher d’avoir jamais manqué personnellement à Sa Majesté. Elle ne peut me refuser la liberté de sortir de ses Etats. J’ose espérer même qu’après m’avoir arraché à ma patrie et à tout ce que j’avais de plus cher, après m’avoir demandé au roi par son ministre, après m’avoir donné des assurances si réitérées et si tendres de me rendre heureux, elle ne me laissera point partir sans quelques paroles de consolation. Elle doit cet adoucissement à mon état, et je l’attends de la générosité de son caractère ; et je me mets sous votre protection, Monsieur, comme un Français, comme un domestique du roi, comme un officier de sa maison. Je n’ai jamais cessé de lui appartenir ; il me fait même une pension, outre le brevet de son gentilhomme ordinaire qu’il m’a conservé. Il ne m’a cédé à Sa Majesté prussienne qu’en me conservant tous mes droits dans ma patrie. Vous êtes ici le protecteur des Français ; je vous demande instamment , Monsieur, de couronner vos bontés ; de parler à M. de Podevils d’une manière touchante, et de l’engager par la plus pressante sollicitation à représenter au roi son maître combien il est digne de sa grandeur et de sa bonté de laisser sortir à son gré un étranger malheureux et malade, qu’il a eu deux ans et demi auprès de sa personne, et qui conservera toujours pour ses anciennes bontés la plus respectueuses reconnaissance, et combien il est digne encore d’un monarque tel que lui d’adoucir par des paroles de bienveillance le tort à jamais irréparable qu’il m’a fait.

 

                            Personne n’est plus en état que vous, Monsieur, de me rendre les meilleurs offices, et par le poste que où vous êtes et par la confiance qu’on doit avoir en vous. Je vous supplie d’ajouter cette marque de bonté à toutes celles que vous m’avez données. Je ne peux vous offrir que les tristes témoignages d’une reconnaissance aussi tendre, aussi respectueuse qu’inutile ; mais c’est assez pour une âme aussi belle que la vôtre.

 

                            V.

 

                            J’ajoute que je vous supplie de demander le secret à M. de Podevils jusqu’à mon départ, comme j’ose le demander au roi de Prusse.

 

 

 

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« A Frédéric II, roi de Prusse

 

[1er janvier 1753]

 

                            Sire,

 

                            Ce n’est sans doute que dans la crainte de ne pouvoir plus me montrer devant Votre Majesté que j’ai remis à vos pieds des bienfaits qui n’étaient pas des liens dont j’étais attaché à votre personne [clé de chambellan et ordre du mérite]. Vous devez juger de ma situation affreuse, de celle de toute ma famille. Il ne me restait qu’à m’aller cacher pour jamais et déplorer mon malheur en silence. M. Federsdoff [a rapporté de la part du roi clé et croix] qui vient me consoler dans ma disgrâce me fait espérer que Votre Majesté daignerait écouter envers moi la bonté de son caractère, et qu’Elle pourrait réparer par sa bienveillance (s’il est possible) l’opprobre dont Elle m’a comblé. Il est bien sûr que le malheur de vous avoir déplu n’est pas le moindre que j’éprouve. Mais comment paraître ? comment vivre ? Je n’en sais rien. Je devrais être mort de douleur. Dans cet état horrible, c’est à votre humanité à avoir pitié de moi. Que voulez-vous que je devienne et que je fasse ? Je n’en sais rien. Je sais seulement que vous m’avez attaché à vous depuis seize années. Ordonnez d’une vie que je vous ai consacrée et dont vous avez rendu la fin si amère. Vous êtes bon, vous êtes indulgent, je suis le plus malheureux homme qui soit dans vos Etats, ordonnez de mon sort.

 

                            V. »

 

 

 

 

 

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« Au chevalier Charles-Nicolas de La Touche

 

A vous seul [1er janvier 1753]

 

                            Voici, Monsieur, une aventure que je vous confie avec le secret qu’on me recommande, et avec un abandonnement entier à votre protection et à vos conseils. J’ai renvoyé au roi ma clef et mon ordre et ma pension à trois heures et demie. Il m’a envoyé Federsdoff à quatre me dire de n’en rien faire, qu’il réparerait tout, que je lui écrivisse une autre lettre. Je lui ai écrit, mais sans démentir la première, et je ne prendrai aucune résolution sans vos bontés et sans  vos conseils. Comme j’ai eu l’honneur de vous prendre à témoin de mes sentiments dans ma première lettre, et que le roi sait que selon mon devoir je vous ai confié mes démarches, ce sera à vous à être arbitre. Vous êtes actuellement un ministre de paix, on la propose, dictez les conditions. Je ne peux sortir, je ne peux que vous renouveler ma respectueuse reconnaissance.

 

                            V.

 

                            On parle de souper, je ne peux être assez hardi, si vous n’y êtes pas pour me seconder. Moi, souper ?

 

 

 

 

 

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31/12/2009

lui mettre d’autre sang dans les veines ; celui qu’il a est un composé de vitriol et d’arsenic

 

 arsenic1.jpgSurprise ?

http://www.youtube.com/watch?v=wrEX6nSP1-c

Je ne veux cependant pas la mort du lecteur ! A consommer avec modération ! s'il en est encore temps, méfiez vous de la galette des rois "faite maison" !.... 

 

 

 

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville  vitriol1.jpg

 

31è décembre 1764

 

                            Les gens de bien, et surtout mon cher frère, doivent savoir que Jean-Jacques a fait un gros libelle [Lettres écrites de la montagne, de JJ Rousseau en réponse aux Lettres de la campagne de Tronchin (automne 1763) ] contre la parvulissime république de Genève, dans l’intention de soulever le peuple contre les magistrats [V* en citait ce passage à François Tronchin : « Quand vous prendriez un mauvais parti, prenez-le tous ensemble, par cela seul, il deviendra le meilleur » ; V* commente : « ce qui veut dire : si vous êtes tous d’accord pour poignarder le Conseil, vous aurez raison ».]. Le Conseil de Genève est occupé à examiner le livre, et à voir quel parti il convient de prendre.

 

                            Dans ce libelle, J.-J. fâché qu’on ait brûlé Emile m’accuse d’être l’auteur du Sermon des Cinquante [qui est effectivement de V*].Ce procédé n’est pas assurément d’un philosophe ni d’un honnête homme. Je voudrais  bien savoir ce qu’en pense M. Diderot ; et s’il ne se repent pas un peu des louanges prodiguées à Jean-Jacques dans l’Encyclopédie [dans le Discours préliminaire de l’Encyclopédie]. Vous remarquerez que pendant que J.-J. faisait cette belle manœuvre à Genève, il faisait imprimer le Sermon des cinquante, et d’autres brochures, par son libraire d’Amsterdam Marc-Michel Rey, sous le titre de Collection complète des œuvres de M. de V. [V*, le 24 novembre a écrit une lettre de reniement à M.-M. Rey]. Cela peut être adroit, mais cela n’est pas honnête.

 

                            Mon cher frère avait bien raison de me dire quand Jean-Jacques maltraita si fort les philosophes dans son roman d’Emile, que cet homme était l’opprobre du parti. Je prie mon cher frère de me mander s’il a reçu le paquet du médecin anglais. Ce médecin aurait dû faire l’opération de transfusion à J.-J. et lui mettre d’autre sang dans les veines ; celui qu’il a est un composé de vitriol et d’arsenic. Je le crois un des plus malheureux hommes qui soit au monde, parce qu’il est un des plus méchants.

 

                            Omer travaille à un réquisitoire [prononcé le 9 mars 1765] pour le Dictionnaire philosophique. On continue toujours à m’attribuer cet ouvrage auquel je n’ai point de part. Je crois que mon neveu qui est conseiller au parlement, l’empêchera de ma désigner [« Mme Denis ma nièce a écrit à d’Hornoy mon neveu … et lui a insinué d’elle-même qu’il devait aller, si cela était nécessaire, parler à Omer au palais, et lui dire que s’il fait une sottise il ne doit pas au moins me nommer dans sa sottise ; qu’il offenserait … une famille nombreuse qui sert le roi dans la robe et dans l’épée ; qu’il est sûr que le Portatif n’est point de moi, et que cet ouvrage est d’une société de gens de lettres… »].

 

                            Voilà, mon cher frère, toutes les nouvelles que je sais. La philosophie est comme l’ancienne Eglise, il faut qu’elle sache souffrir pour s’affermir et pour s’étendre.

 

                            Je crois  qu’on commence aujourd’hui l’édition de la Destruction, [ouvrage de d’Alembert Sur la destruction des Jésuites en France…] c’est un livre qui ne sera point brûlé, mais qui fera autant de bien que s’il l’avait été.

 

                            J’embrasse tendrement mon cher frère, et je me recommande à ses prières dans les tribulations où les méchants m’ont mis. Les orages sont venus des quatre coins du monde, et ont fondu sur ma petite barque que j’ai bien de la peine à sauver.

 

                            Voltaire. »

 

 

30/12/2009

Laissons passer les fadeurs du jour de l’an

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental

 

30è décembre 1774

 

Ah ! mon cher  ange ! il faut que je vous gronde . M. de Thibouville, M. de Chabanon, Mme du Deffand m’apprennent que je venais vous voir au printemps . Oui, j’y veux venir, mais …

 

                            Je n’y vais que pour vous, cher ange que vous êtes . Je ne puis me monter à d’autres qu’à vous . Je suis sourd et aveugle, ou à peu près . Je passe les trois quarts de la journée dans mon lit, et le reste au coin du feu . Il faut que j’aie toujours sur la tête un gros bonnet, sans quoi ma cervelle est percée à jour . Je prends médecine trois fois par semaine, j’articule très difficilement, n’ayant pas, Dieu merci, plus de dents que je n’ai d’yeux et d’oreilles .

 

Jugez d’après ce beau portrait qui est très fidèle, si je suis en état d’aller à Paris in fiochi ? Je ne pourrais me dispenser d’aller à l’Académie et je mourrais de froid à la première séance.

 

                            Pourrais-je fermer ma porte, n’ayant point de portier, à toute la racaille des polissons soi-disant gens de lettres qui auraient la sotte curiosité de venir voir mon squelette ? et puis , si je m’avisais à l’âge de quatre vingt et un ans de mourir dans votre ville de Paris,, figurez-vous quel embarras, quelles scènes et quel ridicule ! Je suis un rat de campagne qui ne peut subsister à Paris que dans quelque trou bien inconnu . Je n’en sortirais pas dans le peu de séjour que j’y ferais . Je n’y verrais que deux ou trois  de vos amis, après qu’ils m’auraient prêté serment de ne point déceler le rat de campagne aux chats de Paris ?. J’arriverais sous le nom d’une de mes masures appelées terres, de sorte qu’on ne pourrait m’accuser d’avoir menti si j’avais le malheur insupportable d’être reconnu .

 

Gardez-vous donc bien , mon cher ange, d’autoriser ce bruit affreux que je viens vous voir au printemps . Dites qu’il n’en est rien, et je vais mander expressément qu’il n’en est rien.

 

                            Cependant consolez-vous de vos pertes, jouissez de vos nouveaux amis, de votre considération, de votre fortune, de votre santé, de tout ce qui peut rendre la vie supportable. Vous êtes bien heureux de pouvoir aller au spectacle ; c’est une consolation que tous vos vieux magistrats se refusent je ne sais pourquoi . C’était celle de Cicéron et de Démosthène . Notre parterre de la Comédie n’est rempli que de clercs de procureurs et de garçons perruquiers . Nos loges sont parées de femmes qui ne savent jamais de quoi il s’agit, à moins qu’on ne parle d’amour . Les pièces ne valent pas grand chose, mais je n’en connais pas de bonne depuis Racine, et avant lui il n’y a qu’une quinzaine de belles scènes, tout au plus .Mais je ne veux pas ici faire une dissertation.

 

                            Mon jeune homme m’occupe beaucoup . Si je puis parvenir seulement à écarter un témoin imbécile et très dangereux, je suis sur qu’il  gagnera son procès tout d’une voix. Il faudrait un avocat au Conseil bien philosophe, bien généreux, bien discret, qui prît la chose à cœur, et qui signât une requête au garde des Sceaux, pour obtenir la liberté de se mettre en prison, et de se faire pendre si le cas y échoit .Ces lettres du Sceau après les cinq ans de contumace ne se refusent jamais . Laissons passer les fadeurs du jour de l’an, et le tumulte du carnaval, après quoi nous verrons à qui appartiendra la tête de cet officier . Son maître commence à prendre la chose fort à cœur, mais non pas si chaudement que moi .Je regarde son procès comme la chose la plus importante et qui peut avoir les suites les plus heureuses, mais il faut que d’Hornoy m’aide . Ce sera à lui de disposer les choses de façon que rien ne traîne, et que ce ne soit qu’une affaire de forme . Je vais travailler de mon côté à écarter ce sot témoin, seul obstacle qui m’embarrasse ; si je ne réussis pas dans cette entreprise très sérieuse, je parviendrai du moins à procurer quelque fortune à cet officier auprès de son maître . Les Fréron et les Sabatier ne m’empêcheront pas de faire du bien tant que je vivrai.

 

Adieu, mon cher ange, amusez-vous, secouez-vous, occupez-vous, aimez toujours un peu le plus vieux, sans contredit, de tous vos serviteurs, qui vous aimera tendrement tant qu’il aura un souffle de vie .

 

                            Voltaire. »

25/12/2009

On me vole, on me défigure en prose et en vers

http://www.youtube.com/watch?v=DlgJ5i1J_kk&feature=re...

http://www.youtube.com/watch?v=nYtauVttsuI

 

 

 

 

 

« A Nicolas-Claude Thiriot

 

                            Je vous supplie mon ancien ami, de ma mander au juste ce que c’est que la Jeanne qui parait imprimée. Voici une lettre en réponse à La Guerre de 1741. On me vole, on me défigure en prose et en vers. Ecrivez-moi toujours à la même adresse. Je passerai mon hiver à Montriond à l’autre bout du lac près de Lausanne. J’y suis bien  chaudement. Mrs de Lausanne viennent dîner avec moi, le reste du temps m’appartient. Ma maison est simple et propre. J’y fais bonne chère. Je voudrais que vous y fussiez.

 

                            V.

 

         A Montriond 25 [décembre 1755]

22/12/2009

Le fracas et les plaisirs de Lyon nuisaient à ma santé et à mon travail

 Je peux vous garantir qu'au XXI ième siècle le fracas de Lyon est essentiellement automobile et use en effet les nerfs des usagers obligés chaque jour de trainer dans des bouchons, qui pour être lyonnais , n'en ont pas l'agrément de leurs homonymes aux tables bien garnies .

Les plaisirs de Lyon, je vous le confesse, n'ont pas sur moi le même effet délétère que sur Volti !

Au contraire, ils sont pour moi source vivifiante et j'en redemande sans retard . Vous comprendrez quand vous serez plus grands !

Entre autres adresses, une qui m'est chère depuis quelques semaines ...

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« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine

 

Au château de Prangins,

22 décembre 1754

 

Je dicte ma lettre ma chère nièce, non pas que je sois plus malade qu’à l’ordinaire, mais parce que je suis dans mon lit fort frileux et fort paresseux. Je ne doute pas que vous n’ayez fait rendre à M. de Prangins [Jean-Georges Guiguier, baron de Prangins] la première lettre que je vous envoyai. Je n’ai point la force d’aller prendre actuellement les bains d’Aix en Savoie ; la saison est trop rigoureuse ; il faut attendre un temps plus doux . Si je pouvais me flatter que vous vinssiez ici au printemps avec le maître de la maison, je ne chercherais pas d’autre retraite jusqu’au printemps où vous en partiriez, et je ne pourrais pas en imaginer une plus agréable. La situation est d’après les romans, et le bâtiment est de l’histoire moderne [vers 1723]; il n’y a rien de si beau à 50 lieues à la ronde. Tout ce que nous craignons Mme Denis et moi, c’est de causer un peu d’embarras aux régisseurs de ce beau château. Surtout nous vous prions de présenter à M. de Prangins nos remerciements et nos excuses. Je voudrais qu’il sentît tout le plaisir qu’il me fait. Cette habitation est précisément tout ce qui me convient dans l’état douloureux où je suis. Ma santé et mes études en avaient besoin. Le fracas et les plaisirs de Lyon nuisaient à ma santé et à mon travail [lettres du 20 novembre et 2 décembre à d’Argental]. Vous ne sauriez croire l’obligation que je vous ai d’avoir trouvé une retraite si convenable à mon goût et à mon état. Il ne me manque que de  vous y voir. C’est la seule chose  que je désire dans ce monde. Il y a d’ailleurs des eaux minérales, qui, je crois, seraient fort bonnes pour vous, surtout au printemps. Flattez-nous au moins de cette espérance ; mandez-nous si M. de Prangins a reçu nos lettres. Vous devez regarder comme votre affaire propre notre séjour dans ce château, puisque c’est vous qui nous l’avez procuré. Je suis fâché que vous n’ayez plus la consolation de voir tous les jours votre frère ; je me flatte que vous en avez d’autres auxquelles je m’intéresse.

 

                            J’ai apporté avec moi votre Léda. Apportez-nous le portrait de votre fils avec quelques-uns de vos petits chefs-d’œuvre ; mais songez que vos lettres nous font pour le moins autant de plaisir que vos crayons et vos pinceaux. Ce n’est plus le temps d’être paresseuse avec des gens qu’on a confinés dans un château sur les bords d’un lac. Ecrivez-nous, rassurez-nous contre la crainte d’abuser des bontés du maître de maison, et encore plus de la crainte de ne vous point voir ce printemps.

 

                            Adieu mon aimable nièce.

 

                            Voltaire. »

 

 

 

 

Exposition de papier découpé au Château de Prangins, dont les œuvres de Jean Huber qui s’est particulièrement dédié à Voltaire.

http://google.mini60.com/

 

 

Château de Prangins

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21/12/2009

on dit qu’il y a des aveugles qui donnent des coups de pied dans le ventre de ceux qui veulent leur rendre la lumière

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« A Michel-Ange-André Le Roux Deshautesrayes

 

21 décembre [1760 ]

 

                                      Monsieur,

                            J’avais déjà lu vos Doutes [Doutes sur la dissertation de M. de Guignes, qui a pour titre : Mémoire dans lequel on prouve que les Chinois sont une colonie égyptienne.]. Ils m’avaient parus des convictions. Je suis bien flatté de les tenir de la main de l’auteur même. Les langues que vous possédez et que vous enseignez sont nécessaires pour connaître l’Antiquité, et cette connaissance de l’Antiquité nous montre combien on nous a trompé en tout. C’est l’empereur Camhi [Kyang-Hi (1661-1721)], autant qu’il m’en souvient, qui montra à frère Parennin, jésuite de mérite et mandarin, un vieux livre de géométrie dans lequel il est dit que la proposition du carré de l’hypothénuse était connue du temps des premiers rois [ce que Parennin a écrit à Dortous de Mairan (Lettres édifiantes et curieuses). V* ajoute ce fait en 1761 en l’honneur des Chinois dans l’Essai sur les Mœurs.]. Les Indiens revendiquent cette démonstration. Ce petit procès littéraire au bout du monde dure depuis 4 ou 5  mille ans, et nous autres qu’étions-nous il y a 20 siècles ? Des barbares qui ne savions pas écrire, mais qui égorgions des filles et des petits garçons à l’honneur de Teutatès, comme nous en avons égorgé en 1572 à l’honneur de st Barthélemy.

 

                            Un officier qui commande dans un fort près du Gange [Louis-Laurent de Féderbe, chevalier de Maudave] et qui est l’ami intime d’un des principaux bramines m’a apporté une copie des 4 Vedams qu’il assure être très fidèle [L’Ezour-Veidam que V* va donner à la bibliothèque royale l’été 1761, est un apocryphe écrit sans doute par les jésuites de Pondichéry pour amener les Indiens vishnouistes au catholicisme. V* ajoutera un chapitre sur les brahmanes, le Veidam et l’Ezour-Veidam dans son Essai et indiquera cette addition le 3 mars 1761 dans le Journal encyclopédique.]. Il est difficile que ce livre n’ait au moins 5 mille ans d’antiquité. C’est bien à nous qui ne devons notre sacrement de baptême qu’aux usages des anciens Gangarides qui passèrent chez les Arabes et que N.S. J.-C. a sanctifiés, c’est bien à nous vraiment de combattre l’antiquité de ceux qui nous ont fourni du poivre de toute antiquité ! Le monde est bien vieux. Les habitants de la Gaule cisalpine sont bien jeunes et souvent bien  sots  ou bien fous. Si quelqu’un peut les rendre plus raisonnables c’est vous, Monsieur, mais on dit qu’il y a des aveugles qui donnent des coups de pied dans le ventre de ceux qui veulent leur rendre la lumière. Je suis plein d’estime pour vous, Monsieur, et des plus respectueux sentiments.

 

                            V. »

19/12/2009

le suppliant espère en la miséricorde de son héros, et en ses plaisanteries.

 

 

http://www.youtube.com/watch?v=qQIO3pBFfXI&feature=fvw

phil collins et genesis : in too deep

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« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

 

19è décembre 1764 à Ferney

 

Remontre très humblement François de V. l’aveugle à son héros :

         1° Que son héros n’a pas autant de mémoire que d’imagination et de grâces ; qu’il daigna mander le 1er sept. A son vieux courtisan : Vous êtes, et serez toujours le maître des rôles de toutes vos pièces. C’est un droit qui vous serait moins disputé qu’à personne, et une loi où l’on obéira en vous battant des mains ; je le veux absolument.

 

                   Voilà les propres  paroles de monseigneur le maréchal.

 

         2° Que ces propres paroles étaient en réponse d’un placet présenté par l’aveugle, dans lequel ledit aveugle avait supplié son héros de lui permettre de faire une nouvelle distribution de ces rôles.

 

         3° Que ledit suppliant a été depuis environ quarante ans en çà berné par son dit héros, lequel lui a donné force ridicules le plus gaiement du monde [cf lettre à d’Argental le 1er mai 1736].

 

         4° Que ledit pauvre diable ne mérite point du tout le ridicule d’être accusé d’avoir entrepris quelque chose de sa tête dans cette importante affaire, et qu’il n’a rien fait, rien écrit que muni de la permission expresse de son héros, de son ordre positif, qu’il garde soigneusement.

 

         5° Qu’il écrivit en conséquence au grasseyeur Grandval, qu’il instruisit ledit grasseyeur de la permission de monseigneur le maréchal, et que partant, il est clair que le berné n’a manqué à aucun de ses devoirs envers son héros le berneur.

 

6° Qu’il n’a consulté en aucune manière Parme et Plaisance [D’Argental, représentant du duc de Parme à Paris, et sa femme ], sur les acteurs et actrices du tripot de Paris, mais que sur le rapport de plusieurs farceurs, grands connaisseurs, barbouilleurs de papier et autres grands personnages, il a distribué ses rôles selon toute justice sous le bon plaisir de monseigneur le maréchal [il confiait des rôles « à Mlles Doligny et Luzy » et écrivait aux d’Argental le 27 novembre :  « je crois (le) goût (de M. de Richelieu) pour Mlle d’Epinay (de l’Epinay) passé. » Alors que le 22 octobre, après avoir recommandé à Richelieu « un acteur excellent …nommé Aufresne », il ajoutait : « Je vous en donne avis ; Monsieur le premier  gentilhomme de la chambre fera ce qu’il lui plaira. »], et des autres gentilshommes de la chambre, ce qu’il a expressément recommandé dans toutes ses lettres aux connaisseurs représentant le parterre.

 

7° Qu’il n’a envoyé au grasseyeur se dernières disposition sous une enveloppe parmesane que pour éviter les frais de la poste au grasseyeur, et pour lui faire parvenir la lettre plus sûrement, une première ayant été perdue. [ le 7 décembre V* se plaint aux d’Argental de la perte d’un paquet, à eux adressé, qui contenait « les provisions des dignités comiques pour Grandval et les demoiselles Doligny et Luzy » ]

 

         Ces sept raisons péremptoires étant clairement exposées, le suppliant espère en la miséricorde de son héros, et en ses plaisanteries.

 

         Il supplie son héros d’examiner la chose un moment de sang-froid, sans humeur et sans bons mots, et de lui rendre justice.

 

         Il y a plus de quinze jours que j’ai écrit pour faire venir quatre exemplaires de ce cher Julien l’Apostat  [Défense du paganisme par l’empereur Julien, en grec et ne français, avec des dissertations et des notes pour servir d’éclaircissement au texte et pour en réfuter les erreurs, par M. le marquis d’Argens (Berlin 1764)] pour vous en faire parvenir un par la voie que vous m’avez ordonnée.

 

         Vous croyez bien que j’ai reçu de mon mieux l’ambassadeur de Mme d’Egmont [fille de Richelieu]. Je vois que votre voyage dans mon pays de neiges est assez éloigné encore ; mais si jamais Mme d’Egmont veut passer le mont Cenis et aller à Naples, je me ferai prêtre pour l’accompagner en qualité de son aumônier Poussatin [personnage des Mémoires du comte de Gramont, de Hamilton ]. Je suis honteux de mourir sans avoir vu le  tombeau de Virgile, la ville souterraine, Saint Pierre de Rome, et les facéties papales [ vus par ses personnages de contes : Princesse de Babylone (1768) et Amabed (1769)].

 

         Je me mets aux pieds de mon héros avec une extrême colère, un profond respect, et un attachement sans bornes.

 

                   V. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En lisant les pages qui vont suivre, écoutez :

http://www.youtube.com/watch?v=v2E8bhDHESk

Question de frivolité, de distraction, au XVIIIème ! Profitez de cette recherche avec Mme d'Egmont comme sujet :

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