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14/11/2023

Les chagrins, les inquiétudes, les repentirs, les craintes, aigrirent son sang et pourrirent son cul...il était haï du public...dans le temps qu'il était loué par des lâches

... Je verrais bien ce constat concernant  Poutine, et quelques autres tel Erdogan, Bachar al-Assad, Xi Jin Ping, Kim Jung un, Trump, et tant d'autres encore :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Dictature

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https://www.nicolasvadot.com/fr/chroniques/la-dictature-de-linstantaneite/

 

 

« Au chevalier Pierre de Taulès

21è mars 1768

J'ai déjà eu , monsieur, l'honneur de vous répondre 1 sur l'accord honnête de deux puissants monarques pour partager ensemble les biens d'un pupille. Je vous ai dit même, il y a longtemps, que j'avais déjà fait usage de cette anecdote. Je ne vous ai pas laissé ignorer que, dans la nouvelle édition du Siècle de Louis XIV (commencée il y a plus d'un an, et retardée par les amours du chauve Gabriel Cramer), il est marqué2 expressément que ce fait est tiré du dépôt improprement nommé des Affaires étrangères. Les Anglais disent archives, ils se servent toujours du mot propre ; ce n'est pas ainsi qu'en usent les Welches. Je vous répéterai encore ce que j'ai mandé à M. le duc de Choiseul 3, c'est que la vérité est la fille du temps 4, et que son père doit la laisser aller à la fin dans le monde.

Comme il y a assez longtemps que je ne lui ai écrit, et que ma requête en faveur de la vérité était jointe à d'autres requêtes touchant les grands chemins de Versoix, il n'est pas étonnant qu'il ait oublié les grands chemins et les anecdotes.

A l'égard du cardinal de Richelieu, je vous jure que je n'ai pas plus de tendresse que vous pour ce roi ministre. Je crois qu'il a été plus heureux que sage, et aussi violent qu'heureux. Son grand bonheur a été d'être prêtre. On lui conseilla de se faire prêtre lorsqu'il faisait ses exercices à l'Académie, et que son humeur altière lui faisait donner souvent sur les oreilles. J'ajoute que, s'il a été heureux par les événements, il est impossible qu'il l'ait été dans son cœur. Les chagrins, les inquiétudes, les repentirs, les craintes, aigrirent son sang et pourrirent son cul. Il sentait qu'il était haï du public autant que des deux reines, en chassant l'une et voulant coucher avec l'autre, dans le temps qu'il était loué par des lâches, par des Boisrobert, des Scudérys, et même par Corneille. Ce qui fit sa grandeur abrégea ses jours. Je vous donne ma parole d'honneur que, si j'avais vécu sous lui, j'aurais abandonné la France au plus vite.

A l'égard de son testament, s'il en est l'auteur, il a fait là un ouvrage bien impertinent et bien absurde un testament qui ne vaut pas mieux que celui du maréchal de Belle-Isle.

Si, parmi les raisons qui m'ont toujours convaincu que ce testament était d'un faussaire, l'article du comptant secret n'est pas une raison valable, ce n'est, à mon avis, qu'un canon qui crève dans le temps que tous les autres tirent à boulets rouges; et pour un canon de moins, on ne laisse pas de battre en brèche.

Demandez à M. le duc de Choiseul, supposé (ce qu'à Dieu ne plaise!) qu'il tombât malade, et qu'il laissât au roi des mémoires sur les affaires présentes, s'il lui recommanderait la chasteté ? s'il lui parlerait beaucoup des droits de la Sainte-Chapelle de Paris ? s'il lui proposerait de lever deux cent mille hommes, quand on en veut avoir cent mille ? et s'il ferait un grand chapitre sur les qualités requises dans un conseiller d'État ? etc.

Certainement, au lieu d'écrire de telles bêtises dignes de l'amour-propre absurde du petit abbé de Bourzeis, conseiller d'État ad honores, M. le duc de Choiseul parlerait au roi du pacte de famille, qui lui fera honneur dans la postérité; il pèserait le pour et le contre de l'union avec la maison d'Autriche, il examinerait ce qu'on peut craindre des puissances du Nord, et surtout comment on s'y peut prendre pour tenir tête sur mer aux forces navales de l'Angleterre. Il ne s'égarerait pas en lieux communs, vagues, et pédantesques, il n'intitulerait pas ce mémoire du nom ridicule de testament politique, il ne le signerait pas d'une manière dont il n'a jamais signé. Il est plaisant qu'on ait fait dire au cardinal de Richelieu, dans ce ridicule testament, tout le contraire de ce qu'il devait dire, et rien de ce qui était de la plus grande importance ; rien du comte de Soissons, rien du duc de Weimar ; rien des moyens dont on pouvait soutenir la guerre dans laquelle on était embarqué ; rien des huguenots qui lui avaient fait la guerre, et qui menaçaient encore de la faire ; rien de l'éducation du dauphin, etc., etc., etc.

Je ne finirais pas, si je voulais rapporter tous les péchés d'omission et de commission qui sont dans ce détestable ouvrage. Les hommes sont, depuis très longtemps, la dupe des charlatans en tout genre.

Je ne suis point du tout surpris, monsieur, que l'abbé de Bourzeis se soit servi de quelques expressions du cardinal. Corneille lui-même en a pris quelques-unes. J'ai vu cent petits-maîtres prendre les airs du cardinal de Richelieu, et je vous réponds qu'il y avait cent pédants qui imitaient le style du cardinal.

Si le cardinal a souvent dit fort trivialement qu'il faut tout faire par raison, malgré le sentiment du Père Canaye, il est tout naturel que l'abbé de Bourzeis ait copié cette pauvreté de son maître.

Au reste, monsieur, je hais tant la tyrannie du cardinal de Richelieu que je souhaiterais que le testament fût de lui, afin de le rendre ridicule à la dernière postérité. Si jamais vous trouvez des preuves convaincantes qu'il ait fait cette impertinente pièce, nous aurons le plaisir, vous et moi, de juger qu'il fallait plutôt le mettre aux Petites-Maisons que sur le trône de France, où il a été réellement assis pendant quelques années. Je vous garderai le secret et vous me le garderez. Je vous demande en grâce de faire mes tendres compliments au philosophe orateur et poète, M. Thomas, dont je fais plus de cas que de Thomas d'Aquin.

Je vous renouvelle mes remerciements et les assurances de mon attachement inviolable.

Laissons là le cardinal de Richelieu, tant loué par notre Académie, et aimons Henri IV, votre compatriote et mon héros. 

V.»

3 Lettre inconnue .

4 Dans la Conversation du maréchal d'Hocquincourt avec le P. Canaye, de Saint-Evremond : https://fr.wikisource.org/wiki/Conversation_du_mar%C3%A9chal_d%E2%80%99Hocquincourt_avec_le_p%C3%A8re_Canaye

 

13/11/2023

Satis est, domine, satis est

... Requête d'Emmanuel Macron (et quelques autres chefs d'Etats ) à Netanyahou qui pratique une guerre où les bombes tuent innocents et coupables comme d'habitude, Allah et Iaweh,-- s'ils existent,-- se chargeant de reconnaitre les justes .

Dans le même temps le ramassis d'assassins du Hamas hurle  "Amplius, domine, amplius" . Saleté de guerre .

 

 

« Au chevalier Jacques de Rochefort d'Ally

A Ferney 21 mars 1768 1

Satis est, domine, satis est 2. Vous me donnez, monsieur, plus de vin de champagne que jamais le prince de Condé n'en donna à Santeul 3 ; et cet ivrogne disait encore , Amplius, domine, amplius 4 ; mais moi qui suis moins bon poète que Santeul et qui bois beaucoup moins de vin, je vous assure , monsieur, que vous m'en donnez beaucoup trop et et que je ne sais comment m'y prendre ni pour vous remercier ni pour le boire . Je ne tiens plus de maison. Nous allons peut-être, Mme Denis et moi, vendre Ferney . La fin de ma vie sera retirée, et probablement assez triste avec une santé déplorable . La nature m'a fait présent de soixante et quatorze ans, et la maladies de quatre-vingt-dix .

Jouissez, vous et madame votre femme, de votre brillante jeunesse . Buvez, s'il se peut, plus de vin de Champagne que vous ne m'en donnez . Je me flatte que vous voyez quelquefois M. d'Alembert . Il a eu avec moi des procédés charmants qui m'ont pénétré l'âme . Ô que j'aime qu'un philosophe soit sensible ! Pour moi je suis plus sensible que philosophe et je le suis passionnément à vos bontés, à votre mérite .

Je présente mes respects au couple heureux qui mérite tant de l'être . »

1 L’édition Supplément au Recueil, II, 104-105, donne , par suite d'une mauvaise lecture, 21 mai comme date .

2 Assez, monsieur, assez .

4 Encore, monsieur, encore .

12/11/2023

Il n'y a rien que je ne fasse pour adoucir l'état où vous êtes

... Hélas ! hélas, à quoi servent ces paroles, fussent-elles celles d'un président de la République, pour faire adopter une trêve entre Israël et le Hamas à Gaza ? A rien !

Une minorité d'islamistes fanatiques à allumé un feu qui rend fou et impitoyable , dans les deux camps . A quels extrêmes Netanyahou va-t-il forcer d'aller son armée ? Il va se retrouver seul, ayant coupé la branche de ceux qui l'appellent à la raison humanitaire . TROP DE HAINE ! Et aussi trop d'intérêts en jeu .

 

 

« A Catherine-Josèphe de Loras du Saix, baronne de Monthoux

21 mars 1768 à Ferney 1

Madame,

Il n'y a rien que je ne fasse pour adoucir l'état où vous êtes, j'ai proposé à votre homme d'affaires tous les tempéraments qui pourraient vous plaire ; j'attendrai d'ailleurs le terme de trois mois que vous prescrivez, et je tâcherai de vous témoigner en toute occasion les sentiments respectueux avec lesquels j'ai l'honneur d'être, madame,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Le manuscrit se trouve dans la collection Camille-Clermont ; édition Pommier .

Le même jour La Harpe écrit à Hennin de Paris : « Personne ne connaît encore ici […] quels motifs il [V*...] a pu avoir pour se séparer de tout ce qui devait lui être le plus cher . […] ce qui m'afflige le plus, c'est de le voir livré à un moine, à un ex-jésuite, le plus bas de ses valets et le plus dangereux des imposteurs . C'est un étrange spectacle pour l'Europe que de voir M. de Voltaire tête-à-tête avec le Père Adam. » La Harpe ne faisait alors qu'exprimer à Hennin les pensées de Mme Denis .

11/11/2023

pariez toujours qu'il n'y a pas un mot de vrai dans tout ce que l'on dit dans le monde et vous ferez en peu de temps une grande fortune

... La malice du cerveau humain ne suffisant pas à fournir suffisamment de mensonges, le dit cerveau a créé l'IA pour épauler ses manigances . On ne croyait plus ce qu'on lisait, ce qu'on entendait, ce qu'on voyait, et maintenant on sait faire revivre des morts . Plus besoin de faire tourner les tables dans des chambres obscures pour converser avec des disparus, l'IA est là à volonté . Géniale et pire des inventions . Bombe dont le détonateur n'est pas dans les mains de philanthropes , mais plus que souvent dans celles de bipèdes malveillants : https://www.boitmobile.fr/les-derives-de-lintelligence-ar... 

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https://www.youtube.com/watch?v=298dZWW-t3A&ab_channe...

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

21 mars 1768

Mon très cher et très vertueux ami, pariez toujours qu'il n'y a pas un mot de vrai dans tout ce que l'on dit dans le monde et vous ferez en peu de temps une grande fortune . Tout ce qu'on vous a conté du père Adam, de Mlle Guimard et de l'honnête criminel sont des romans à mettre dans Les Mille et une nuits . Le bon Adam est précisément tout le contraire du portrait qu'on a fait de lui . Il ne sait quelquefois ce qu'il dit, mais d'ailleurs c'est un très bon diable . Il est des nôtres et il travaille même actuellement à une conversion ; par conséquent jugez s'il est honnête homme .

Soyez très sûr mon cher ami, que le voyage de maman était d'une nécessité absolue . Vous ne savez pas à quel excès de fureur se portent les fanatiques et surtout le bœuf au cœur de tigre .

Il y a un autre excès bien funeste, c'est celui de l'acharnement à m'imputer tout ce que ce coquin de Marc-Michel Rey imprime depuis dix ans . Il n'y avait que maman qui pût opposer une digue à ce torrent très dangereux .

Voici la copie de ce que j'écris à M. le duc de Choiseul 1 . C'est un tour dont je me sers quelquefois avec lui . Ce tour est nouveau et lui a paru plaisant comme à moi .

Je vous envoie ma lettre pour La Harpe 2. Il a fait une énorme sottise par une légèreté condamnable . Il l'a soutenue par un orgueil féroce qu'on lui reproche . Mais j'en reviens toujours à dire qu'il n'a pas voulu me nuire, que cette leçon le corrigera, qu'il a du talent, qu'il faut lui pardonner, qu'il faut le gronder et l'aider, et surtout lui envoyer ma lettre . Je lui mande qu'on ne doit haïr que les Fréron et les ennemis de la société , et j'ai raison .

Je vous remercie tendrement, mon vertueux ami d'avoir vu maman, j’ai quelque espérance de passer avec vous la fin de ma vie . Cela me soutient et j'ai besoin d'être soutenu, du moins c'est la plus douce de mes illusions . »

2 S'agit-il encore de la lettre du 17 mars 1768 ? Voir en effet la lettre du 18 mars 1768 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/11/07/je-suis-excede-6469648.html

 

10/11/2023

Je suis actuellement très dévot, mais je crois que l'affaire du salut n'entre pour rien dans les affaires de la guerre ni dans les affaires des finances, j'oserais même dire dans celles de la politique, mais ce serait trop fort

... Non, non, ce n'est pas trop fort . Je suis heureux que notre président ne soit pas un de ces dévots et soit capable d'accorder un peu de son temps au pape comme à la franc-maçonnerie .

Il est heureux qu'il ne soit pas comme ces culs bénis américains qui prêtent serment sur la bible et puis se comportent comme des maffieux style Trump . Et dire que ce pourri risque de reprendre les rênes U.S. Ce n'est vraiment pas rassurant d'avoir pour alliés des désaxés de cet acabit .

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« A Etienne-François de Choiseul-Stainville, duc de Choiseul

Vieux bavard, vieux radoteur, ne me remerciez point . J’ai accordé le congé gratis à votre cuisinier bonne sauce, soldat du régiment de Conti, car enfin puisque vous êtes dans un désert comme saint Pacôme, je veux au moins que vous ayez à manger, ce que Pacôme n'avait guère .

Je me suis souvenu de votre ami Damilaville, brave gentilhomme ci-devant garde du roi, lequel ainsi que Taulès se sert aussi bien de sa plume que de son épée : c'est un homme d'une probité rigide . Je suis fâché qu'il ne soit que premier commis des bureaux du vingtième, et j'ai été encore plus fâché qu'on ait voulu par dévotion le priver d'une meilleure place qu'il a méritée . Je suis actuellement très dévot, mais je crois que l'affaire du salut n'entre pour rien dans les affaires de la guerre ni dans les affaires des finances, j'oserais même dire dans celles de la politique, mais ce serait trop fort . Je donnerai volontiers un petit moment d'audience à votre nièce . Je sais qu'elle est venue à Paris après quinze ans d'absence pour arranger vos affaires et les siennes que quinze ans ont délabrées . De quoi vous mêlez-vous aussi de donner des fêtes comme M. de Pompignan qui mandait au roi qu'il avait donné un dîner de vingt couverts dans son marquisat de Le Franc ?

On dit que vous voulez m'envoyer encore des soumissions d'artisans pères de famille qui s'engagent à habiter ma ville de Versoix . Pour Dieu attendez qu'elle soit bâtie, vous êtes vif comme un jeune homme etc., etc. Comment trouvez-vous mes bonnets de cuir bouilli ? Etc., etc.

Le duc de Choiseul.

21 mars [1768] 1»

1 Copie contemporaine Darmstadt B. . Cette plaisanterie est la suite de la lettre du 16 mars 2023 .

Avant d'avoir reçu la réponse, V* écrivait à Choiseul la lettre que celui-ci était censé lui avoir écrite . La copie de Darmstadt est intitulée : « Drôle de minute ; l'original est parti : secret profond. ». Voici la lettre réelle de Choiseul, que celle-ci pastiche par avance, si on peut dire :

« Ce 21 mars [1768]

Je ne vous écrirai pas la lettre dont vous m'envoyez le projet, je la garde pour moi ; savez-vous que l'on est venu me dire que vous vous étiez fait chartreux ? Je me prosternais vis-à-vis ce coup de la Grâce, il n'aurait pas été petit . L'arrivée de Mme Denis a fait à Paris une sensation . Je ne sais pas si nous imitons le siècle de Louis XIV, mais je suis sûr que nous honorons et que nous chérissons, autant que l'on pouvait le faire alors, le seul grand génie que nous possédions . Ce que je désire plus que tout, c'est que vous soyez heureux et que l'on ne vous fasse rien ni que vous fassiez rien qui puisse vous empêcher de l'être . Si vous pouviez me mander les époques dont vous auriez besoin pour Le Siècle de Louis XIV, il me serait aisé de vous les procurer . Aimez-moi, ma cher marmotte ; soyez sage sur les objets délicats pour des consciences timorées, et comptez, je vous prie, sur ma tendre amitié à jamais . »

il est essentiel d'avoir dans Paris une femme active et courageuse qui pare les coups et qui sache parler fortement aux ministres

... Non ! non ! non ! ce n'est certainement pas Anne Hidalgo.

Possiblement l'héroïne de "A Woman of Paris" de Charlie Chaplin , qui a ma préférence ? De 1923 . Qui sait ?

https://www.youtube.com/watch?v=9iSnTixkHos&ab_channe...

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« A Jean Le Rond d'Alembert

21è mars 1768

Mon très cher et très vrai philosophe, oui je vous avoue que La Harpe m'a fait un tort qu'il ne pourra jamais réparer . Mauvaise honte, fille d’orgueil l'a empêché pendant trois mois de m'avertir du précipice où il m'avait jeté, et c'est de la même source que partit la lettre injurieuse qu'il m'écrivit de sa chambre à la mienne, lettre dans laquelle il me menaçait de faire un mémoire public . Je vous jure que je n'ai pas eu contre lui la moindre aigreur . J'ai plaint son état . J'ai aimé ses talents . Il est tombé avec moi de faute en faute, sans intention de me nuire, conduit d'abord par son imprudence, ensuite inspiré, par une fierté dure, qui tôt ou tard le perdra dans le monde . Mais que voulez-vous ? Lui et sa femme m'ont écrit de Paris . J'ai été touché, j'ai pardonné . Quand je me fâcherais, le mal qu'il fait ne sera pas réparé, je lui nuirais cruellement, sans en souffrir moins, et j'aime mieux souffrir que lui nuire . En un mot son intention n'ayant jamais été de me faire du mal, je ne lui en ferai certainement pas . C'est là votre arrêt, c'est mon avis, il faut être indulgent avec la jeunesse . Cette aventure lui servira de leçon . Qu'il fasse seulement une bonne tragédie, le public pardonne tout quand il a du plaisir, et j'en use de même .

Le voyage de maman était nécessaire . Nous étions ruinés . Des grands seigneurs fort aimables me devaient dix ou douze ans de mes pauvres rentes . Maman avait tout fricassé en bal, ballet et comédie, en festins donnés à deux cents personnes, dont personne ne nous sait gré . Vraiment c'était bien pis que le dîner à vingt-cinq couverts du grand Pompignan, et encore qui que soit n'en a parlé dans la chambre du roi . Les grands seigneurs qui nous doivent nous feront quelques politesses mais il faut qu'ils comptent avec maman .

De plus la fureur de l'homme au mufle de bœuf et au cœur de tigre 1 est si grande, son infâme barbarie est si pleinement développée dans une relation qu'un avocat a imprimé en Hollande, qu'il est essentiel d'avoir dans Paris une femme active et courageuse qui pare les coups et qui sache parler fortement aux ministres . Elle est venue à propos pour adoucir Tronchin qui est au désespoir du second chant publié par La Harpe . Ce qui contribue le plus à ma consolation, mon cher ami, c'est la tendresse que vous me témoignez . Je n'avais connu que Clairaut qui fût un géomètre tendre . Vous êtes le second . J'en suis pénétré.

Soyez sûr que je vous chéris,

De l'amitié dont Toxaris

Veut qu'on aime en son dialogue, etc.

comme dit Chapelle 2.

Où pourrait-on trouver la petite géométrie de Clairaut 3 que j'appelais la Physiométrie naturelle? »

1 Dans son poème de Michel et Michau, dont un fragment est conservé dans la Correspondance littéraire de La Harpe (lettre 147), Turgot a dit de Pasquier :

Deux gros yeux blous, ou la férocité
Prête de l’âme à la stupidité,
L’ont fait depuis surnommer le bœuf-tigre.

Voir : https://www.institutcoppet.org/oeuvres-de-turgot-xii-amis-de-turgot-caractere/#_ftnref14

Et voir lettre du 23 juillet 1766 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/07/23/se-venger-ou-du-moins-de-quitter-un-pays-ou-se-commettent-to.html

3 Voir lettre au futur Frédéric II de Prusse , vers le 1er novembre 1739 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1739/Lettre_1214

09/11/2023

Lisez et jugez

... Hardi donc, au Sénat !

https://www.lejdd.fr/politique/loi-immigration-le-senat-supprime-la-mesure-du-gouvernement-sur-les-regularisations-dans-les-metiers-en-tension-139518

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Pour info

 

 

« A Charles de Brosses, baron de Montfalcon

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien excuser ma courte lettre et mon long mémoire . Je me flatte que vous ne mépriserez ni mon amitié, ni l'estime du public, ni la mienne, ni l'attachement que j'ai pour vous . Lisez et jugez . Vous sentez bien que ma famille est obligée de présenter requête pour faire casser la clause insérée par Girod et pour demander réparation . Pour moi je ne demande que votre amitié, un peu de justice, et un procédé généreux dont vous n'aurez pas à vous repentir . Si vous m'aviez connu, monsieur, j'aurais fait à Tournay le même bien que j'ai fait à Tournay 1. Je méritais plus votre confiance que Girod . Tout dépendra de vous . J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments qu'un procédé noble fortifiera dans mon cœur,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.

À Ferney 20 mars 1768. 2»

1 Lapsus évident pour Ferney.

2 Le même jour, Mme Du Deffand écrit à Crawford : « J'ai vu hier Mme Denis et M. et Mme Dupuits [,,,] ; ils prétendent que Voltaire les a envoyés à Paris solliciter le paiement des rentes qui lui sont dues [,,,] ; il est très possible qu'il se soit dégoûté d'eux et qu'il ait été bien aise de faire maison nette . Il n'a avec lui présentement que le père Adam jésuite, un avocat suisse et un Genevois ; son cuisinier est renvoyé ; il ne veut plus avoir un état de maison . L'ennui, l'avarice et quelques abus de sa confiance, en lui volant des manuscrits qu'un nommé La Harpe a rendus publics, peuvent être les véritables causes de leur bannissement. »