19/09/2023
Soyez sûr que je serai à vos ordres dès que je verrai le moindre jour à réussir
... Tant il est vrai qu'on ne prête qu'aux riches, il y a aussi ceux qui n'aident que ceux qui réussissent : mouches du coche !
http://escapadeautomnale.centerblog.net/452-le-coche-et-l...
« A Claude-Ignace Pajot de Vaux
Conseiller maître de la Chambre des
comptes de Dôle, chevalier de
Saint-Louis à Lons-le-Saulnier
8è février 1768 à Ferney 1
Les temps changent, monsieur, soyez très sûr M. le duc de Choiseul ne s'exposera pas deux fois à un refus de monsieur le vice-chancelier 2. Il m'est impossible de vous servir dans le moment présent . Je suis franc, quoique je ne sois pas franc-comtois . Il faut absolument attendre des circonstances plus favorables . Soyez sûr que je serai à vos ordres dès que je verrai le moindre jour à réussir . Ce sera toujours pour moi un devoir et un plaisir bien sensible d'obéir à vos volontés et à celle de Mme Pâté . Comptez l'un et l’autre sur les sentiments inviolables avec lesquels je serai pour le reste de ma vie, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire. »
1 Original signé , mention de service « acquittée à Lons-le-Saulnier » (effectivement la lettre fut réexpédiée à Dole), cachet « Genève » (Ferney).
2 Pajot sollicitait une vétérance ; voir lettre du 13 janvier à Mme Pajot de Vaux : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/08/09/il-n-y-a-rien-que-je-ne-fisse-pour-tacher-de-rendre-quelques-6456051.html
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18/09/2023
La nature se moque des individus . Pourvu que la grande machine de l'univers aille son train, les cirons qui l'habitent ne lui importent guère
... Voilà ce que devrait savoir et penser tout vrai écologiste . Les "cirons" accélèrent les dérèglements qui mènent à leur disparition, brouillons et égoïstes qu'ils sont .
https://www.goodplanet.info/2023/09/18/le-monde-veut-sauv...
https://www.philomag.com/articles/elizabeth-kolbert-linventivite-humaine-nous-met-part-de-la-nature
« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand
8è février 1768 à Ferney
Je n'écris point, madame, cela est vrai et la raison en est que la journée n'a que vingt-quatre heures, que d'ordinaire j'en mets dix ou douze à souffrir, et que le reste est occupé par des sottises qui m'accablent comme si elles étaient sérieuses. Je n'écris point, mais je vous aime de tout mon cœur. Quand je vois quelqu'un qui a eu le bonheur d'être admis chez vous, je l'interroge une heure entière. Mon fils adoptif Dupuits est pénétré de vos bontés 1. Il a dû vous rendre compte de la vie ridicule que je mène. Il y a trois ans que je ne suis sorti de ma maison; il y a un an que je ne sors point de mon cabinet, et six mois que je ne sors guère de mon lit. M. de Chabrillant a été chez moi six semaines. Il peut vous dire que je ne me suis pas mis à table avec lui une seule fois. La faculté digérante étant absolument anéantie chez moi, je ne m'expose plus au danger. J'attends tout doucement la dissolution de mon être, remerciant très sincèrement la nature de m'avoir fait vivre jusqu'à soixante-quatorze ans, petite faveur à laquelle je ne me serais jamais attendu.
Vivez longtemps, madame, vous qui avez un bon estomac et de l'esprit, vous qui avez regagné en idées ce que vous avez perdu en rayons visuels, vous que la bonne compagnie environne, vous qui trouvez mille ressources dans votre courage d'esprit, et dans la fécondité de votre imagination.
Je suis mort au monde. On m'attribue tous les jours mille petits bâtards posthumes que je ne connais point. Je suis mort, vous dis-je; mais, du fond de mon tombeau, je fais des vœux pour vous. Je suis occupé de votre état. Je suis en colère contre la nature, qui m'a trop bien traité en me laissant voir le soleil, et en me permettant de lire, tant bien que mal, jusqu'à la fin mais qui vous a ravi ce qu'elle vous devait. Cela seul me fait détester les romans qui supposent que nous sommes dans le meilleur des mondes possibles . Si cela était, on ne perdrait pas la meilleure partie de soi-même longtemps avant de perdre tout le reste. Le nombre des souffrants est infini . La nature se moque des individus . Pourvu que la grande machine de l'univers aille son train, les cirons qui l'habitent ne lui importent guère. Je suis, de tous les cirons, le plus anciennement attaché à vous; et, comme je disais fort bien dans le commencement de ma lettre, malgré mon respect pour vous, madame, je vous aime de tout mon cœur.
V. »
1Voir lettre du 5 février 1768 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/09/12/ah-que-de-peines-dans-ce-monde-6460932.html
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s'il y a des cas où le fond doit faire taire la forme, c'est assurément quand il s'agit de la vie des hommes
... Le drame des émigrés pose ce genre de problème . Que va-t-il advenir ? Va-t-on laisser les Italiens sans aide, sans partager l'accueil , au moins temporaire, de cette foule inattendue de migrants ?
« A Etienne-Noël Damilaville
8è février 1768 1
Le malheur des Sirven fait le mien . Je suis encore atterré de ce coup. Je conçois bien que la forme a pu l'emporter sur le fond. Le Conseil a respecté les anciens usages mais, mon cher ami, s'il y a des cas où le fond doit faire taire la forme, c'est assurément quand il s'agit de la vie des hommes.
Quelle forme enfin reprendra votre fortune? que deviendrez-vous ? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est que je suis profondément affligé.
Nos chagrins redoublent par la quantité incroyable d'écrits contre la religion chrétienne, qui se succèdent aussi rapidement en Hollande que les gazettes et les journaux. L'infâme Fréron, le calomniateur Coger, et d'autres gens de cette espèce, ont la barbarie de m'imputer, à mon âge, une partie de ces extravagances, composées par des jeunes gens et par des moines défroqués.
Tandis que je bâtis une église où le service divin se fait avec autant d'édification qu'en aucun lieu du monde, tandis que ma maison est réglée comme un couvent, et que les pauvres y sont plus soulagés qu'en aucun couvent que ce puisse-être; tandis que je consume le peu de force qui me reste à ériger à ma patrie un monument glorieux, en augmentant de plus d'un tiers le Siècle de Louis XIV, et que je passe les derniers de mes jours à chercher des éclaircissements de tous côtés pour embellir, si je puis, ce siècle mémorable, on me fait auteur de cent brochures, dont quelquefois je n'ai pas la moindre connaissance. Je suis toujours vivement indigné, comme je dois l'être, de l'injustice qu'on a eue, même à la cour, de m'attribuer le Dictionnaire philosophique, qui est évidemment un recueil de vingt auteurs différents; mais comment puis-je soutenir l'imposture qui me charge du petit livre intitulé Le Dîner du comte de Boulainvilliers, ouvrage imprimé il y a quarante ans, dans une maison particulière de Paris ouvrage auquel on mit alors le nom de Saint-Hyacinthe 2, et dont on ne tira, je crois, que peu d'exemplaires? On croit, parce que je touche à la fin de ma carrière, qu'on peut m'attribuer tout impunément. Les gens de lettres, qui se déchirent et qui se dévorent les uns les autres, tandis qu'on les tient sous un joug de fer, disent: « C'est lui voilà son style. » Il n'y a pas jusqu'à l'épigramme contre M. Dorat que l'on n'ait essayé de faire passer sous mon nom 3; c'est un très mauvais procédé de l'auteur. Il faut être aussi indulgent que je le suis pour l'avoir pardonné. Quelle pitié de dire « Voilà son style, je le reconnais bien » ! On fait tous les jours des livres contre la religion, dont je voudrais bien imiter le style pour la défendre. Y a-t-il rien de plus plaisant, de plus gai, de plus salé, que la plupart des traits qui se trouvent dans la Théologie portative 4 ? Y a-t-il rien de plus vigoureux, de plus profondément raisonné, d'écrit avec une éloquence plus audacieuse et plus terrible, que Le Militaire philosophe 5, ouvrage qui court toute l'Europe? Concevez-vous rien de plus violent que ces paroles qui se trouvent à la page 84 : « Voici, après de mûres réflexions, le jugement que je porte de la religion chrétienne , je la trouve absurde, extravagante, injurieuse à Dieu, pernicieuse aux hommes, facilitant et même autorisant les rapines, les séductions, l'ambition, l'intérêt de ses ministres, et la révélation des secrets des familles. Je la vois comme une source intarissable de meurtres, de crimes et d'atrocités commises sous son nom. Elle me semble un flambeau de discorde, de haine, de vengeance, et un masque dont se couvre l'hypocrite pour tromper plus adroitement ceux dont la crédulité lui est utile. Enfin j'y vois le bouclier de la tyrannie contre les peuples qu'elle opprime, et la verge des bons princes quand ils ne sont point superstitieux. Avec cette idée de votre religion, outre le droit de l'abandonner, je suis dans l'obligation la plus étroite d'y renoncer et de l'avoir en horreur, de plaindre ou de mépriser ceux qui la prêchent, et de vouer à l'exécration publique. ceux qui la soutiennent par leurs violences et leurs superstitions.6 »
Certainement les dernières Lettres provinciales ne sont pas écrites d'un style plus emporté.
Lisez la Théologie portative, et vous ne pourrez vous empêcher de rire, en condamnant la coupable hardiesse de l'auteur.
Lisez L'Imposture sacerdotale , traduite de Gordon et de Trenchard 7, vous y verrez le style de Démosthène.
Ces livres malheureusement inondent l'Europe . Mais quelle est la cause de cette inondation? Il n'y en a point d'autre que les querelles théologiques, qui ont révolté tous les laïques. Il s'est fait une révolution dans l'esprit humain que rien ne peut plus arrêter . Les persécutions ne pourraient qu'irriter le mal. Les auteurs de la plupart des livres dont je vous parle sont des religieux qui, ayant été persécutés dans leurs couvents, en sont sortis pour se venger sur la religion chrétienne des maux que l'indiscrétion de leurs supérieurs leur avait fait souffrir. On aurait prévenu cette révolution si on avait été sage et modéré. Les querelles des jansénistes et des molinistes ont fait plus de tort à la religion chrétienne que n'en auraient pu faire quatre empereurs de suite comme Julien 8.
Il est certain qu'on ne peut opposer au torrent qui se déborde d'autre digue que la modération et une vie exemplaire. Pour moi, qui ai trop vécu, et qui suis près de finir une vie toujours persécutée, je me jette entre les bras de Dieu, et je mourrai également opposé à l'impiété et au fanatisme.
Renvoyer Sirven au plus vite ; il aura au moins de quoi vivre et il sera justifié dans toute l'Europe . »
1 Copie envoyée à d'Argental ; sur le premier manuscrit la lettre porte entête : à M. d'Argental – le 15 février 1768 --, sans doute parce que c'est la copie envoyée avec la lettre du 15 février à d'Argental . Le nom et la date furent alors changés en Damilaville et 8 février et le texte absorbé dans cette lettre-ci . Ce texte correspond aux manuscrits 2 et 3, ce qui est sans aucun doute correct .
2 L'attribution à Saint-Hyacinthe est moins nette que d’habitude.
3 Voyez lettres du 21 décembre 1767 à Chabanon : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/07/12/on-dit-que-ces-jesuites-ont-emmene-avec-eux-deux-cents-petit-6451991.html
et 25 décembre au-même : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/07/17/il-ne-faut-point-troubler-les-menages-on-doit-respecter-l-am-6452701.html
4 D'Holbach ; voir lettre du 22 août 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/04/18/je-sais-monsieur-que-vous-vous-amusez-quelquefois-de-littera-6438954.html
et voir : https://www.amazon.fr/th%C3%A9ologie-portative-Dictionnaire-religion-chr%C3%A9tienne/dp/2849670367
V* en parle dans sa lettre du 15 juin 1769 à Biord, évêque d'Annecy : voir page 73 de https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome28.djvu/83
5 Voir https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/125
6 Le texte cité par V* est très fidèle à celui de l’édition de 1768 . Mais celle-ci n'est pas fidèle au manuscrit – déjà remanié – d'après lequel Naigeon a composé l'ouvrage . Les différences, insignifiantes jusque vers le milieu du texte cité par V* deviennent ensuite importantes . Voici le texte du manuscrit, y compris le dernier paragraphe, que Naigeon a purement et simplement supprimé : « Elle me semble un flambeau de discorde, de haine, de vengeance, un masque propre à l'hypocrisie, et à tous ces malheureux vêtus de noir qui vantent cette religion ou ses effets prétendus . Enfin ,j'y vois dans son tronc l’idolâtrie , la superstition et les fraudes pieuses . Après cette idée que votre religion, outre le droit de l'abandonner, je suis dans l'obligation la plus étroite d'y renoncer et de l'avoir en horreur ; de plaindre ou de mépriser ceux qui la prêchent, et anathématiser ceux qui la soutiennent par leurs violences . Si je ne me trompe, ce n'est pas ma faute si j'ai [le manuscrit porte : je n'ai ] cette idée : j'ai donné toute mon attention et employé toute ma capacité à en bien juger, avec la même bonne foi et la même circonspection dont j'ai agi dans les occasions de ma vie les plus intéressantes [...] »( texte du manuscrit 1163 de la Bibliothèque Mazarine, publié par Roland Mortier, Difficultés sur la religion proposées au P. Malebranche, 1971.)
7 De l'Imposture sacerdotale, ou Recueil de pièces sur le clergé, traduit de l'anglais (ou plutôt composé par le baron d'Holbach), 1767, petit in-12. On a quelquefois confondu ce volume avec l'ouvrage traduit de l'anglais de Trenchard et de Gordon, et refait en partie par le baron d'Holbach, intitulé Esprit du clergé ou le Christianisme primitif vengé des entreprises et des excès de nos prêtres modernes, 1767, deux volumes in-8°. (Beuchot.)
8 Cette fois le jugement est très exact . Ces querelles avaient déjà produit sur Challe, qui écrivait en 1710, une impression très fâcheuse . Aux jésuites il reprochait leurs empiétements sur le pouvoir royal et leur esprit de politique ; aux jansénistes, il ne pardonnait pas de nier en fait la liberté humaine, ce qui à ses yeux ruinait la morale . Après la querelle de la bulle Unigenitus, le scandale de ces divisions parut plus grand encore .
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17/09/2023
nous nous sommes flattés au contraire que la supériorité était indulgente, et que les grâces ne rebutaient pas la naïveté
... Bon dimanche !
« Voltaire et Marie-Françoise Dupuits
à Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul 1
8è février 1768 à Ferney
Madame, un vieillard presque aveugle, et une jeune femme qui serait bien fière si elle avait des yeux comme les vôtres, vous supplient de daigner agréer leurs hommages et leurs remerciements. Nous devons à votre protection tout ce que M. le duc de Choiseul a bien voulu accorder à M. Dupuits 2. Si le vieux bonhomme et moi nous avions quelque petite partie de la succession de Pierre Corneille, nous la dépenserions en grands vers alexandrins pour vous témoigner notre reconnaissance . Mais les temps sont bien durs, et la plupart des vers qu'on fait le sont aussi. Nous nous défions même de la prose. Nous entendons si peu les livres qu'on nous envoie de Paris que nous craignons d'avoir oublié notre langue.
Nous sommes très honteux l'un et l'autre d'exprimer notre extrême sensibilité dans un style si barbare mais, madame, nous vous supplions de considérer que nous sommes des Allobroges. Des gens arrivés de Versailles nous ont dit qu'il fallait absolument avoir de la finesse, de la justesse dans l'esprit, des grâces et du goût, pour oser vous écrire . Nous ne les avons point crus. Nous ne sommes pas de votre espèce, et nous nous sommes flattés au contraire que la supériorité était indulgente, et que les grâces ne rebutaient pas la naïveté.
Nous sommes, dans cette confiance, avec un profond respect,
madame,
vos très humble s et très obéissants serviteurs
Corneille Dupuits,
Voltaire. »
1 Voir : https://data.bnf.fr/10736301/louise_honorine_crozat_du_chatel_choiseul/
et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louise_Honorine_Crozat_du_Ch%C3%A2tel
2 Voir lettre du 5 février 1768 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/09/12/ah-que-de-peines-dans-ce-monde-6460932.html
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16/09/2023
Voyez si je me trompe
... Suivons l'argumentaire d'Emmanuel Macron, qui , certains l'oublient, est un chef d'Etat et doit certains égards à un autre chef d'Etat fut-ce le Pape . Qu'ont dit les bas de plafond de gauche lors de la participation à des cérémonies autrement plus désagréables accueillant des sommités fort peu démocratiques , mais à caresser dans le sens du poil pour raisons financières et un semblant de paix ?
https://www.francetvinfo.fr/monde/vatican/pape-francois/v...
Viva il Papa ! Viva Emmanuel !
« A Charles-Jean-François Hénault
A Ferney 6 février 1768
J'allais vous écrire, monsieur, lorsque M. Dupuits, mon cher gendre adoptif, m'apporte le beau présent dont vous m'honorez 1. Je dis toujours qu'il vive autant que sa gloire 2.
Comme je travaille à une nouvelle édition du Siècle de Louis XIV, j'ai été obligé d'examiner d'assez près l'ordre chronologique des ministres . Je trouve que le maréchal-duc de La Meilleraye 3 fut surintendant des Finances en 1648 pendant l'exil de Particelli dit Emeri 4, que votre imprimeur a orthographié Perticelli .
Voyez si je me trompe, et si vous avez le temps encore de faire un carton .
Voyez encore si dans la même page 575 vous ne pourriez pas placer Abel Servien surintendant conjointement avec Foucquet .
Il me paraît aussi absolument nécessaire de ne pas omettre que le marquis de La Vieuville 5 fut créé surintendant et duc et pair en 1651 . Je pense qu’en serrant un peu vous pourriez aisément réformer ces bagatelles . Il ne s'agirait que d'un seul feuillet .
Je ne prendrais pas la liberté de vous faire cette prière à l'occasion d'un autre règne que celui de Louis XIV, mais ce règne est si beau et si grand en tout genre, il est tellement devenu l'époque de la gloire de la nation par la foule des grands homme qui l'ont illustré, qu'on ne peut ce me semble négliger aucun des hommes qui ont eu part à l'administration . Le maréchal de La Meilleraye d'ailleurs était un homme dans le goût du duc de Sully, un peu brutal, mais vrai juste, économe . Il lui manqua un Henri IV . Il n'avait qu'un Mazarin .
Votre ouvrage sera un des beaux monuments de ce grand siècle, car vous êtes né sous Louis XIV . On vous continuera un jour, on vous imitera, mais on ne vous ressemblera pas .
Il y a plus de six mois que je n'ai écrit à Mme Du Deffand, mais je n'ai pas eu un moment à moi . Les maladies et les travaux m'accablent . Ce n'est point vous qui avez quatre-vingt ans, c'est moi . Mais j'aime encore les belles-lettres comme si je n'en avais que vingt-cinq. Elles font le charme des derniers jours de ma vie . Je présente toujours requête à la nature pour qu'elle prolonge vos jours, qu'elle adoucisse l'état de Mme Du Deffand, et qu'elle la dédommage s'il se peut de ce qu'elle lui a ôté . Mon gendre me donne dans l'instant une lettre d'elle . La poste va partir . Je ne lui écrirai que lundi, mais je lui serai tendrement attaché comme à vous jusqu'au dernier moment de ma vie .
V. »
1 L'édition de Paris , 1768, du Nouvel abrégé chronologique : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56063559
2 Réminiscence approximative d'un vers de V* lui-même, dans une lettre en vers mêlée de prose à Hénault ; le vers exact était : Qu'il vive autant que son ouvrage . Lettre du 4 décembre 1763 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/11/27/qu-il-vive-autant-que-son-ouvrage.html
3 Charles de La Porte, duc de La Meilleraye ; voir : https://data.bnf.fr/fr/11682171/charles_de_la_porte_la_meilleraye/
et https://fr.wikipedia.org/wiki/Armand-Charles_de_La_Porte_de_La_Meilleraye
4 Michel Particelli, seigneur d'Emery : https://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Particelli_d%27%C3%89mery
5 Charles, duc de La Vieuville : https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Ier_de_La_Vieuville
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15/09/2023
je ne m'y connais pas
... Telle est la franche réponse actuelle des spécialistes en prévisions des tremblements de terre :https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/maroc/seisme/se...
ça va péter ! mais quand et où ?
« A François de Chennevières
[vers le 6 février 1768]
Je vous prie, mon cher ami, de faire rendre sur-le-champ cette lettre à M. de Taulès 1.
Voici un petit ouvrage 2 d'un commis des finances, que je vous prie de faire lire à ceux qui savent calculer. Mandez-moi si les calculs sont justes, car je ne m'y connais pas.
V. »
1 Voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/09/14/il-n-y-a-que-les-superstitieux-a-qui-la-verite-deplaise-6461379.html
2 L'Homme aux quarante écus .
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Il n'y a que les superstitieux à qui la vérité déplaise
...
« Au chevalier Pierre de Taulès
6 février 1768 à Ferney
Si vous vous intéressez, monsieur, à la gloire du plus beau siècle que la France ait vu naître, si vous voulez l'enrichir de vos connaissances, il n'y a pas un moment à perdre. Cela est plus digne de la postérité que les tracasseries de Genève ; l'ouvrage tire à sa fin . J'avais eu l'honneur de vous mander 1 que j'ai prévenu M. le duc de Choiseul ; je ne doute pas que, si vous lui dites un mot, il ne vous permette de m'envoyer des vérités ; il les aime, il sait qu'il est temps de les rendre publiques. Il n'y a que les superstitieux à qui la vérité déplaise. Si vous me secourez, le Siècle de Louis XIV vous aura obligation, et moi aussi, qui suis de ce siècle l'homme du monde qui vous est le plus attaché. Les Genevois ont brûlé le théâtre de ce pauvre Rosimond 2, que ne brûlaient-ils celui de Paris? On dit qu'il est détestable. Je n'aime pas les incendiaires cela peut aller loin. Rome fut brûlée sous Néron, et Genève pourrait bien être brûlée sous le vieux Du Luc.
Votre très humble et très obéissant serviteur.»
1Lettre du 18 janvier 1768 à Taulès : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/08/22/tant-que-je-respirerai-dans-le-tres-mediocre-siecle-ou-nous-6457712.html
2Le théâtre brûla dans la nuit du 29 au 30 janvier 1768 . Hennin et d'autres soupçonnèrent un incendie criminel . Rousseau s'imagina que V* l'avait accusé ( lettres du 26 avril 1768 à François-Henri d'Ivernois et du 29 avril 1768 à Du Peyrou ).
Voir : https://www.cairn.info/revue-historique-2009-4-page-831.htm
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