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03/04/2023

pour moi, je suis trop petit pour ne me pas défendre

... Qu'on se le dise !

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

14è auguste 1767, à Ferney.

Madame,

Je suis pénétré jusqu'au fond du cœur des lettres dont Votre Altesse sérénissime m'honore 1. Vos bontés devraient sans doute bannir de mon esprit toute idée d'un La Beaumelle. S'il n'était question que de moi, je n'y penserais pas; mais daignez songer, madame, que je dois répondre au tribunal de l'Europe des vérités que j'ai dites dans le Siècle de Louis XIV, siècle heureux, où toute la branche Ernestine, dont vous êtes aujourd'hui l'ornement, était la meilleure alliée de la France. Je trahirais lâchement mon devoir si je laissais subsister les calomnies que La Beaumelle réimprime contre presque tous ceux qui ont illustré ce beau siècle. Je sais que Votre Altesse sérénissime est trop instruite et trop juste pour se laisser séduire par ces impostures, mais combien de lecteurs, madame, ne sont ni justes ni éclairés ! Considérez, madame, qu'il n'y a pas une seule cour qui ne s'empresse de réfuter, dans les papiers publics, les mensonges des gazettes. Ces combats durent quelquefois des mois entiers. Voudriez-vous ravir aux particuliers le droit de se défendre? Non, sans doute, et ce n'est pas même comme simple particulier que je dois agir, mais comme un homme qui a été chargé de la cause publique. Je dirai plus encore. Votre Altesse sérénissime sait avec quelle insolence La Beaumelle a parlé de votre auguste maison. Voudriez-vous que je l'oubliasse, parce que vous lui pardonnez? Je ne le puis, madame. La vérité ne pardonne point mais elle ne punit qu'en se montrant. C'est par sa lumière qu'elle confond ceux qui veulent l'obscurcir. Les princes auxquels ce misérable a jeté de la boue feront ce que leur grandeur et leur clémence pourront leur dicter; mais, pour moi, je suis trop petit pour ne me pas défendre.

La reconnaissance que je dois à toutes vos bontés, madame est le sentiment le plus profond qui m'occupe. Vous êtes ma protectrice et ma consolation. Je suis également dévoué à la vérité et à Votre Altesse sérénissime, avec le plus profond respect et la plus vive reconnaissance.

Votre vieux Suisse. »

1 La duchesse a écrit à V* le 10 août 1767 où elle blâme sévèrement ses attaques contre La Beaumelle .

Voir : https://www.persee.fr/doc/dhs_0070-6760_2002_num_34_1_2489

02/04/2023

Adieu le théâtre, adieu tout

... Quoique, après tout , à Paris et autres villes : https://tpa.fr/actualite-theatre-paris/

 

 

« A Henri-Louis Lekain

A Ferney, 14 auguste 1767

Je vous envoie, mon cher ami, la distribution des rôles que vous me demandez. Je tâcherai de vous faire parvenir incessamment Les Scythes. Je crois qu'il ne les faut jouer qu'une ou deux fois tout au plus avant Fontainebleau. La nouvelle édition de Lyon, qui est la huitième, est très bien reçue; mais l'interruption du commerce de Lyon avec Genève m'a empêché jusqu'ici de l'avoir ; vous l'aurez probablement à Paris avant moi.

J'apprends dans le moment, par les lettres de Paris, que Mme d'Argental est à l'extrémité; elle est peut-être morte. Que va devenir M. d'Argental ? Je suis au désespoir. Adieu le théâtre, adieu tout; adieu, mon cher ami.

V. »

01/04/2023

je ne lui suis attaché que par mon admiration pour lui et par les bontés dont il m'honore

... Emmanuel Macron , merci !

...Poisson d'avril !...

 

 

« A Gustav Friedrich Wilhelm Grossmann 1 etc, chez M. Thorman Secrétaire des

postes

à Berlin

Au château de Ferney par Genève 14è auguste 1767 2

Si M. Lessing, monsieur, écrit aussi bien en allemand que vous écrivez en français, ses feuilles doivent être mieux reçues à Hambourg 3 que celles de Fréron à Paris . Mon grand âge et ma mauvaise santé ne me permettent guère de revenir sur l'édition de Pierre et de Thomas Corneille . J'ai chez moi leur nièce qui me console dans la décrépitude où je suis tombé . Les gens de lettres éclairés augmentent encore cette consolation . Je vois que vous l'êtes, et je m'en rapporte à vous .

Vous m’honorez du titre de chambellan du roi de Prusse, je ne lui suis attaché que par mon admiration pour lui et par les bontés dont il m'honore .

J'ai l'honneur d'être, avec tous les sentiments que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi de France . »

3 Lessing vient de s'établir à Hambourg et de commencer à y publier la Hamburgische Dramaturgie, 1767-1768.

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gotthold_Ephraim_Lessing

31/03/2023

Il y aura toujours de l'ignorance, de la sottise, et de l'envie, dans ma patrie; mais il y aura toujours aussi de la science et du bon goût

... Reste à savoir la proportion de chacun des ingrédients cités .

 

 

« Au prince Dmitri Mikhaïlovitch Golitsin

14 auguste 1767, à Ferney

Monsieur le prince,

Je vois, par les lettres dont Sa Majesté impériale et Votre Excellence m'honorent, combien votre nation s'élève, et je crains que la nôtre ne commence à dégénérer à quelques égards. L'impératrice daigne traduire elle-même le chapitre de Bélisaire que quelques hommes de collège calomnient à Paris. Nous serions couverts d'opprobre si tous les honnêtes gens, dont le nombre est très grand en France, ne s'élevaient pas hautement contre ces turpitudes pédantesques. Il y aura toujours de l'ignorance, de la sottise, et de l'envie, dans ma patrie; mais il y aura toujours aussi de la science et du bon goût. J'ose vous dire même qu'en général nos principaux militaires et ce qui compose le Conseil, les conseillers d'État et les maîtres des requêtes, sont plus éclairés qu'ils ne l'étaient dans le beau siècle de Louis XIV. Les grands talents sont rares, mais la science et la raison sont communes. Je vois avec plaisir qu'il se forme dans l'Europe une république immense d'esprits cultivés. La lumière se communique de tous les côtés. Il me vient souvent du Nord des choses qui m'étonnent. Il s'est fait, depuis environ quinze ans, une révolution dans les esprits qui fera une grande époque. Les cris des pédants annoncent ce grand changement comme les croassements des corbeaux annoncent le beau temps.

Je ne connais point le livre 11 dont vous me faites l'honneur de me parler. J'ai bien de la peine à croire que l'auteur, en évitant les fautes où peut être tombé M. de Montesquieu, soit au-dessus de lui dans les endroits où ce brillant génie a raison . Je ferai venir son livre; en attendant, je félicite l'auteur d'être auprès d'une souveraine qui favorise tous les talents étrangers, et qui en fait naître dans ses États. Mais c'est vous surtout, monsieur, que je félicite de la représenter si bien à Paris.

J'ai l'honneur, etc. »

1 Le livre de Le Mercier de La Rivière ; voir la lettre du 8 août 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/03/29/je-vous-l-avais-bien-dit-qu-il-fallait-passer-sa-vie-a-comba-6435778.html

30/03/2023

L'idée et l'exécution doivent vous faire également honneur

... M. Rima Abdul Malak , j'espère que le contrat signé avec M. Roland Lescure ne sera pas votre seul acte honorable dans le monde de la culture  :

https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Rima-Abdul-Malak-ministre-de-la-Culture-et-Roland-Lescure-ministre-delegue-charge-de-l-industrie-signent-le-contrat-2023-2027-du-comite-strat

Je vous saurai gré de vouloir bien tout faire pour que la statue "Premier Désir" d'Emile Lambert , qui a disparu du parc du château de Voltaire à Ferney, soit retrouvée au plus tôt . Il est absolument intolérable qu'on ait pu voler cette oeuvre sans que le/la gardien.ne n'ait réagi ; ou alors à quoi sert la protection de vidéo-surveillance ?

 

 

« A Charles Eisen 1

Je commence à croire, monsieur, que La Henriade ira à la postérité, en voyant les estampes dont vous l’embellissez . L'idée et l'exécution doivent vous faire également honneur. Je suis sûr que l'édition où elles se trouveront sera la plus recherchée. Personne ne s'intéresse plus que moi aux progrès des arts; et plus mon âge et mes maladies m'empêchent de les cultiver, plus je les aime dans ceux qui les font fleurir . Soyez persuadé des sentiments d'estime et de reconnaissance avec lesquels j'ai l'honneur d'être,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

gentilhomme ordinaire

de la chambre du roi.

Au château de Ferney par Lyon, 14 août 1767. 2»

2 Copie Beaumarchais-Kehl ; édition La Henriade (Duchesne, 1770 ) dont le texte a été suivi . Ce billet consacre la réconciliation – ménagée par Thieriot – entre V* et la veuve Duchesne, précisément grâce aux illustrations d'Eisen .

Nous ne savons si cette lettre est ici bien à sa date. Les estampes d'Eisen furent faites pour l'édition de la Henriade qui parut en 1770. (Georges Avenel)

29/03/2023

Je vois avec douleur qu'on a une bibliothèque nombreuse contre la religion chrétienne, qu'on devrait respecter. Vous savez que je ne l'ai jamais attaquée, et que je la crois, comme vous, utile à l'Europe

... Non seulement à l'Europe, ajouterais-je ! Si tant est qu'une religion puisse être utile .

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

14è auguste 1767

Mon cher ami, votre lettre du 8 ne m'a pas laissé une goutte de sang . Je crains que Mme d'Argental ne soit morte . C'est une perte irréparable pour ses amis. Que deviendra M. d'Argental ? Je suis désespéré, et je tremble.

M. le maréchal de Richelieu m'écrit sur l'aventure de Sainte-Foix . Croyez-moi 1 la chose est très sérieuse. J'espère qu'à la fin l'innocence des protestants sera plus reconnue au parlement de Bordeaux qu'à celui de Toulouse. Il me mande que La Beaumelle n'est point de son département. Ce La Beaumelle n'a été que fortement réprimandé et menacé par le commandant du pays de Foix, au nom du roi et que s'il était de la province de Bordeaux il aurait été plus que menacé . Ce n'est pas le silence de ce coquin que je demande, c'est une rétractation sans quoi on lui apprendra à calomnier. Ne tient-il qu'à débiter des impostures atroces, pour se taire ensuite, et laisser le poison circuler ? Lavaysse doit le renoncer pour son beau-frère, s'il ne se repent pas.

Il paraît tous les huit jours, en Hollande, des livres bien singuliers. Je vois avec douleur qu'on a une bibliothèque nombreuse contre la religion chrétienne, qu'on devrait respecter. Vous savez que je ne l'ai jamais attaquée, et que je la crois, comme vous, utile à l'Europe.

Il y a un monsieur Giraud avocat qui m'a envoyé un projet d'une école de déclamation, avec une lettre à laquelle je dois répondre depuis trois mois ainsi qu'à deux cents autres lettres . J'envoyais enfin ma réponse et je l'adressais à M. d'Argental qui le connaît . Mais l'état de Mme d'Argental m'oblige de m'adresser à vous . Faites parvenir, je vous prie, ma lettre à ce M. Giraud dont j'ignore la demeure .

Permettez que je vous prie d'envoyer à M. de Laleu ce certificat qui assure que votre ami est encore en vie, quoique cela ne soit pas tout à fait vrai. Mais, tant qu'il aura un souffle, il vous aimera.

V. »

1 Ces deux mots manquent dans toutes les éditions suivant la copie Beaumarchais .

28/03/2023

Nous sommes dans des transes mortelles

... Au sens propre : https://www.liberation.fr/societe/sante/fin-de-vie-la-con...

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

13 auguste 1767 1

Ah mon Dieu! on me mande que Mme d'Argental est à l'extrémité. Je venais de vous écrire une lettre de quatre pages, je la déchire, je ne respire point. Mme d'Argental est-elle en vie ? Mon adorable ange, ordonnez que vos gens nous écrivent un mot. Nous sommes dans des transes mortelles. Un mot par un de vos gens, je vous en conjure.

V. »

1 Le manuscrit autographe est passé à la vente Dubrunfaut le 12 décembre 1884 à Paris .