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30/01/2018

je doute que madame sa femme puisse venir pendant qu'on touchera à des parties si intéressantes

... Je laisse à chaque épouse le soin de définir les parties intéressantes de son conjoint .

 

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 25 février 1763]

Je ne pus hier renvoyer la 3è feuille de la Tolérance avec la première d'Oedipe . Il y a une très grande faute dans la feuille d'Oedipe, et je prie qu'on me la renvoie ; j'attends D, et E de la Tolérance .

Mme Denis a été bien mal . Quand Mme Cramer pourra venir nous voir, nous l'amuserons avec un petit feu d'artifice, mais il faut que Mme Cramer la mère se porte bien . Nous faisons mille compliments à toute la famille . Mais je doute que madame sa femme puisse venir pendant qu'on touchera à des parties si intéressantes 1. »

Votre jeunesse est faite pour éclairer tous les âges .

... Emmanuel Macron est il une lumière  pour d'autres que son épouse ? C'est à voir, comme dit Gilbert Montagné !

 

 

« A Paul-Claude Moultou

25è février 1763 1

Je suis en peine, monsieur, d'Olympie, et de la Tolérance ; je trouve qu'il y a beaucoup à faire au premier ouvrage, et que le second est bien délicat . Je vous soumets l'esquisse d'un nouveau chapitre ; il ne tient qu'à vous qu'il soit meilleur .

N'auriez-vous point quelque bon livre sur ce sujet, et voudriez-vous me le prêter ? mais quelques lignes de votre main vaudraient mieux que tous les livres .

Renvoyez-moi , je vous supplie, le plus tôt que vous pourrez, ce croquis que j'ai dicté, et dont je n'ai point de copie .

Je suis sûr que monsieur le contrôleur général, M. le duc de Praslin, M. le duc de Choiseul, Mme de Pompadour, ont de très bonnes intentions ; il faut assurément en profiter . Ne pourriez-vous point quelque jour venir en causer avec moi ? Votre jeunesse 2 est faite pour éclairer tous les âges .

V. »

1 L'édition Gaberel donne une version incomplète et mal datée .

29/01/2018

La cour, sans avoir égard à tous les fatras qu’on vient d’écrire contre vous, et à toutes les sottises que vous avez écrites depuis deux cent cinquante ans, vous déclare innocents de tout ce que les parlements disent contre vous aujourd’hui, et vous

... déclare coupables de ce qu’ils ne disent pas ....

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

25 février 1763, à Ferney

Plus anges que jamais, madame Denis est toujours malade, et moi toujours aveugle, et vous ne me dites rien de vos yeux. L’âge avance ; on n’est pas plus tôt sorti du collège qu’on a soixante ans . En un clin-d’œil on en a soixante-dix ; on voit tomber ses contemporains comme des mouches. Mes nouveaux mariés, qui sont à vos pieds, ne savent rien de tout cela. Je voudrais que vous eussiez vu la crainte où était Marie de ne point avoir son Dupuits . « Mon père m’a signifié que je ne devais pas me marier ; qu’il n’y consentirait point. » Mes anges, que vouliez-vous que je pensasse ? Vous voulez que je commente François Corneille ; c’est bien assez de commenter Pierre. Ce Pierre me fait passer de mauvais quarts-d’heure ; je suis outré contre lui. Il est comme les bouquetins et les chamois de nos montagnes, qui bondissent sur un rocher escarpé, et descendent dans des précipices. J’avais cru que Racine serait ma consolation, mais il est mon désespoir. C’est le comble de l’insolence de faire une tragédie après ce grand homme-là. Aussi après lui je ne connais que de mauvaises pièces, et avant lui que quelques bonnes scènes.

Au nom de Dieu, laissez là votre Adélaïde. Elle est détestable, je vous en avertis 1; que veut dire ce héros blessé ? à quoi sert sa blessure ? à rien du tout, et je vous répète qu’il est impertinent d’imputer à un prince du sang le crime qu’il n’a point commis ; cela détruit tout intérêt.

Laissons un peu dormir Zulime ce carême. C’est bien dommage que cette Zulime ressemble à toutes les femmes délaissées qu’on a tant mises sur le théâtre : avec cela, elle pourrait être passable.

J’aime assez le Droit du Seigneur, je vous l’avoue ; mais je voudrais qu’il y eût un peu plus de ces honnêtes libertés que le sujet comporte, et que les dames aiment beaucoup, quoi qu’elles en disent.

Mariamne est médiocre, malgré mon Essénien 2.

Olympie est prodigieusement supérieure à cette Mariamne, et n’est pas encore trop bonne ; tout m’humilie et me chagrine ; je suis difficile pour moi-même comme pour les autres. Il est dur de sentir la perfection et de n’y pouvoir atteindre.

Ne remplissez pas mes vieux jours d’amertume ; ne me faites point mourir, en ressuscitant Adélaïde ; empêchez-moi de boire ce calice ; je vous le demande avec la plus vive instance.

Mes divins anges, je vous supplie d'engager M. le président de La Marche à mettre la dernière main à ma pièce de Marie-Corneille et de Claude Dupuits . Il est absolument nécessaire que j'aie le contrat qu'il m'a promis et il est ridicule que je ne l'aie pas ? Voilà une plaisante façon de procéder en affaire .3

Eh bien ! a-t-on enfin rapporté l’affaire des Calas ? Je vois qu’il est beaucoup plus aisé de rouer un homme que d’admettre une requête. Il me semble que M. de Crosne ne demande pas mieux que de parler, et assurément, il parlera bien. J’aurais fait trois ou quatre actes depuis le temps qu’on fait languir cette pauvre veuve. J’avoue que son aventure ne contribue pas à me faire aimer les parlements. Malheur à qui a affaire à eux ! fût-on jésuite, on s’en trouve fort mal.

Puisque j’ai du papier de reste, il faut que je dise à mes anges que j’ai jugé les jésuites. Il y en avait trois 4 chez moi, ces jours passés, avec une nombreuse compagnie. Je m’établis premier président ; je leur fis prêter serment de signer les quatre propositions de 1682 5, de détester la doctrine du régicide, du probabilisme, de renoncer à tout privilège contraire à nos lois, et d’obéir au roi plutôt qu’au pape. Ils firent serment, après quoi je prononçai : « La cour, sans avoir égard à tous les fatras qu’on vient d’écrire contre vous, et à toutes les sottises que vous avez écrites depuis deux cent cinquante ans, vous déclare innocents de tout ce que les parlements disent contre vous aujourd’hui, et vous déclare coupables de ce qu’ils ne disent pas ; elle vous condamne à être lapidés avec les pierres de Port-Royal, sur le tombeau d’Arnaud. » Tout le monde convint que j’avais raison, et les jésuites l’avouèrent aussi. Et vous, mes anges, qu’en pensez-vous ?

Respect et tendresse.

V. »

1 Phrase omise par l'édition de Kehl .

2 Sohème , « prince asmonéen » et non essénien, qui a remplacé Varus dans la nouvelle édition . Voir : http://www.theatre-classique.fr/pages/programmes/edition.php?t=../documents/VOLTAIRE_MARIAMNE.xml

3 Ce paragraphe entier manque dans l'édition de Kehl .

4 Y compris le père Adam .

5 La Déclaration des quatre articles du 19 mars 1682 avait consacré la défaite du parti ultramontain : https://www.pimido.com/histoire-et-geographie/histoire-moderne/commentaire-de-texte/declaration-quatre-articles-19-mars-1682-charte-gallicanisme-402854.html

et voir lettre du 6 novembre 1761 à La Chalotais : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/05/correspondance-annee-1762-partie-30.html

28/01/2018

Je ne peux plus souffrir le boursoufflé et une autre grandeur hors de nature

... Le premier étant Kim Jung Un, l'autre Donald Trump, leurs positions étant parfaitement interchangeables , ces  personnages sont des dangers publics dont on se serait volontiers passé .

 

 

« A Claude-Henri de Fusée de Voisenon

Ferney 23 février 1763 1

Mon très cher et très aimable confrère en même temps que c'est à ce que vous avez déjà fait connaître de vos talents que 2 etc . Voilà une belle phrase ! Il me paraît que mon cher évêque a un tout autre style . Je ne sais pas si votre teint était jaune ce jour-là, mais le coloris de votre discours était fort brillant.

En vous remerciant de la félicité et de la fleurette dont vous m'honorez 3, voulez-vous que je vous parle net 4? Ni Crébillon , ni moi ne méritons tant de bontés . Entre nous, je ne connais point une bonne pièce depuis Racine et aucune avant lui , où il n'y ait d'horribles défauts . Si vous avez jamais pu vous résoudre à lire tout Corneille, ce qui est une très rude pénitence, vous verriez que c'est lui qui a toujours cherché à être tendre ; il n'y a pas une de ses pièces, j'en excepte Chimène et Pauline où il n'y a ni ait un amour postiche et ridicule, très ridiculement exprimé .

C'est Racine qui est véritablement grand, et d'autant plus grand qu'il ne paraît jamais chercher à l'être . C'est l'auteur d'Athalie qui est l'homme parfait . Je vous confie qu'en commentant Corneille, je deviens idolâtre de Racine . Je ne peux plus souffrir le boursoufflé et une autre grandeur hors de nature .

Vous savez bien, fripon que vous êtes, que les tragédies de Crébillon ne valent rien et je vous avoue en conscience que les miennes ne valent pas mieux 5. Je les brûlerais toutes si je pouvais, et cependant j'ai encore la sottise d'en faire comme le président Lubert jouait du violon à 70 ans quoiqu'il ne jouât fort mal et qu'il fût cependant le meilleur violon du parlement 6.

Savez-vous la musique ? Tenez, voilà ce qu'on m'envoie 7, je vous le confie, mais ne me trahissez pas .

Vous embrassez Mme Denis . Eh bien elle vous embrasse aussi, mais elle est bien malade . Je lui lirai votre discours dès qu'elle se portera mieux . J'ai envie de vous faire une niche, de copier tout ce que vous me dites de la duchesse de Gramont et de lui envoyer ; je n’ai l'honneur de la connaître que par ses lettres où il n'y a jamais rien de trop, ni de trop peu et dont chaque mot marque une âme noble et bienfaisante . Je lui ai beaucoup d'obligation, elle a été la première et la plus généreuse protectrice de Mlle Corneille . Il s'est trouvé heureusement que Mlle Corneille en était digne . C'est la naïveté, l'enfance, la vérité, la vertu même . Je rends grâce à Fontenelle de n'avoir pas voulu connaître cette enfant là .

Mon cher confrère, je ne souhaite plus qu'une chose, c'est que vous soyez bien malade, que vous ayez besoin de Tronchin, et que vous veniez nous voir . Je vous embrasse de tout mon cœur et en vérité je vous aime de même . Je vise à être un peu aveugle . Dieu me punit d'avoir été quelquefois malin, mais vous me donnerez l’absolution. »

1 Une copie contemporaine donne Diderot comme destinataire . Les éditions manifestent un flottement sur la date : janvier corrigé en février sur la copie Beaumarchais, et 28 puis 25 et enfin 23 pour quantième . La lettre de Voisenon n'est pas connue .

2 Allusion à la réception de Voisenon à l'Académie le 22 janvier 1763 (voir lettre du 9 janvier 1763 à Cideville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/11/22/vous-etes-a-paris-a-la-source-de-tout-et-nous-ne-sommes-dans-6001833.html ) . les mots en italique figurent vers le début du discours de Saint-Aignan . L' « évêque » de Montrouge est Voisenon .

3 L’hommage rendu à V* dans son discours de réception : http://www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-de-labbe-voisenon

4 Réminiscence du Misanthrope , II, 1 .

5 Les jugements critiques de V* peuvent lui faire plus d'honneur que ses tragédies .

6 Voir Desnoireterres : La Comédie satirique au XVIIIè siècle, 1885 , p. 27-28 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4114432/f30.image

7 L’Hymne chanté au village de Pompignan .

27/01/2018

Nous n'avons, encore une fois, aucun besoin de l'ambassadeur d'Angleterre

... Et à propos à quoi sert Mr Edward Llewellyn en France ? J'ai encore en mémoire Richard Llewellyn dont j'ai lu , adolescent, le célèbre "Quelle était verte ma vallée" ; quel lien de parenté avec notre Edward susnommé ?

Brexit ou pas brexit , what's up doc ?

Voir : https://www.gov.uk/world/organisations/british-embassy-pa...

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« A Philippe Debrus

Mécredi 1 [23 février 1763] 2

Je renvoie à monsieur Debrus les lettres qu'il a eu la bonté de me confier . Les trois avocats de Mme Calas et de ses enfants demandent au Conseil qu'il soit ordonné que toutes les minutes du malheureux procès soient apportées à Paris, parce qu'on craint qu'à Toulouse les copies ne soient falsifiées . Il paraît qu'en effet ce serait la seule ressource des assassins en robe noire .

Nous n'avons, encore une fois, aucun besoin de l'ambassadeur d'Angleterre ; on doit s'être assemblé chez M. d'Argental, le rapporteur 3 est aussi bien disposé qu'il peut l'être, et le cri public est si violent, que les juges n'oseraient, je crois, refuser la révision . Espérons tout . J'embrasse de tout mon cœur monsieur Debrus . »

1 Cette forme mécredi est souvent attestée à l'époque ; elle correspond certainement à une prononciation largement répandue .

2 L'édition Lettres inédites place la lettre , à tort, entre le 16 et le 25 août 1762 .

3 Ce rapporteur est Louis Thiroux de Crosne, dont le rapport au grand conseil fit ordonner à celui-ci le 7 mars que le parlement de Toulouse lui transmette les documents concernant l'affaire .

26/01/2018

les forcer à travailler pour leur bien à un chemin qui leur est absolument nécessaire, et qu'ils ont la bêtise de rendre impraticable

...  Ce qui est le cas des Zadistes de Notre-Dame-des-Landes et leurs sympathisants .

 

 

« A Joseph-Marie Balleidier, Procureur

à Gex

Je remercie monsieur Balleidier de ses soins . Je le prie de me mander ce que vaut la pièce de Pasteur qu'il s'agit de subhaster, et ce qu'il faudra donner outre les cinq louis, et au nom de qui on fait subhaster cette partie de pré .

Je lui recommande de la manière la plus pressante d'envoyer un sergent aux syndics de Prégny et Chambesy, et de les forcer à travailler pour leur bien à un chemin qui leur est absolument nécessaire, et qu'ils ont la bêtise de rendre impraticable .

Je le prie aussi de m'instruire si on avait payé l'expédition pour laquelle Vuaillet a rançonné si indignement la veuve Burdet . Je lui fais mes compliments .

Voltaire .

A Ferney, 23 février 1763.1 »

1 Balleidier a noté sur la lettre « faut faire écrire à M. Fabry p[ou]r les chemins » . Vézinet a imprimé quelques fragments de cette lettre .

le peuple ne se mêle de rien, que de brailler de mauvais latin qu'il n'entend pas

... Tout comme nos catholiques intégristes contemporains qui braillaient dans les "Manif' pour tous ! " .

 

 

« A Pierre Mariette, Avocat au

Conseil

Rue Simon-Lefranc

à Paris

Ne jugez point, monsieur, de notre petit pays par le vôtre, ni de notre âge d'or par votre siècle de fer . Nous n'avons ni marguillier, ni œuvre, ni communauté qui se mêle de notre paroisse . Le seigneur fait toutes les dépenses, le peuple ne se mêle de rien, que de brailler de mauvais latin qu'il n'entend pas . Nous avons fait notre accord avec le curé . Sans aucune discussion, tout est dans les plus grandes règles selon nos usages . Nous sommes de bons Suisses à qui il ne faut pas tant de cérémonies . Nous croyons que les lettres patentes du Conseil les plus courtes , sont les meilleures . Nous ne demandons même ces lettres patentes que par une précaution surabondante . Quand vous aurez fini l'affaire des Calas, rendez-moi, je vous prie, ce petit service . Je suis sûr que cette affaire des Calas vous fera infiniment d'honneur . Il est bien triste qu'on soit réduit à craindre la falsification des procédures . Cela est aussi humiliant pour les huit juges de Toulouse, que leur arrêt est abominable . On ne pourrait que plaindre la France, si on laissait subsister un pareil arrêt .

J'ai l’honneur d'être, monsieur, avec bien de l'estime et de l'attachement, votre très humble et très obéissant serviteur .

Voltaire."