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16/06/2017

Je passe les jours et les nuits à écrire à tous ceux qui peuvent se servir de leur crédit pour obtenir une justice qui intéresse le genre humain, et qui me paraît nécessaire à l'honneur de la France

... Mon pauvre Voltaire, tu aurais un travail écrasant pour convertir ceux qui qui dirigent (autoproclamés, le plus souvent) des partis politiques et ont souvent des idées de la justice aberrantes . Ils / elles braillent "la grandeur de la France" et grenouillent petitement pour gagner des voix et des finances, faire peur comme la Marine et se poser en sauveurs , oh ! le bel ouvrage ! oh ! que je me sens protégé ! 

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« A Dominique Audibert, chez MM. Tourton et Baur, banquiers à Paris .

Aux Délices 26 juillet 1762 1

Je n'ai que le temps de vous remercier, monsieur, de toutes vos bontés ; je ne sais comment les reconnaître . Je vois que vous n'avez pas voulu faire à M. de Saint-Tropez la remise dont je vous avais fait l'arbitre . Vous voulez apparemment que cet argent serve pour les pauvres Calas , et vous avez raison . Je ne conçois pas comment on n'a point encore imprimé à Paris les lettres de la mère et du fils , qui montrent la vérité dans tout son jour . Je me flatte qu'à la fin on permettra qu'elles soient publiées . Je passe les jours et les nuits à écrire à tous ceux qui peuvent se servir de leur crédit pour obtenir une justice qui intéresse le genre humain, et qui me paraît nécessaire à l'honneur de la France .

Nous avons ici Pierre Calas ; je l'ai interrogé pendant quatre heures ; je frémis et je pleure ; mais il faut agir .

Je vous embrasse tendrement . Votre très humble et très obéissant serviteur . »

1 Audibert a écrit longuement à V* le 20 juillet 1762, lui rapportant après les comptes qu'il avait tenu à rencontrer la veuve Calas  : «Voici les deux particularités les plus intéressantes que j'ai pu recueillir […] . 1° Dans la recherche des motifs secrets qui peuvent avoir déterminé Calas fils à se tuer, sa mère n'en présume pas d'autre que celui d'une ambition mécontente . Il était d'un caractère indépendant, mélancolique ; ses goûts et ses talents le portaient à la méditation et à l'étude . Il s’était distingué dans des examens . Il avait pris le grade de bachelier . On ne voulait pas le recevoir avocat à cause de sa religion ; ce fut pour lui une grande mortification . Il voyait , avec envie, des amis plus riches et moins habiles que lui , posséder des charges ou remplir des emplois dont il avait la douleur de se voir exclu . 2° Ce ne fut que quatre jours après l’exécution de Calas, que les prêtres l'annoncèrent à sa pauvre veuve, et depuis cet instant, ils la tourmentèrent pendant onze jours de suite pour la préparer à la mort, et la forcer à changer de religion dans l'espoir d'obtenir sa grâce ; les conséquences de ce fait sont aisées à déduire . On prévoit bien des difficultés pour obtenir la communication des pièces . […] il serait important de se procurer le rapport du chirurgien, sur le corps du délit . Cette pièce n'est point secrète , et elle doit être répréhensible en plusieurs points . Je n'ai pu parler encore au jeune Lavaysse, il a changé de nom, et on le tient caché . J’ai insisté fortement pour qu'il fît cause commune avec la veuve […] . »

 

 

15/06/2017

la méprise vient de ce que mon cher Gabriel ne m'a point dit que le billet qui promettait le mémoire , venait par la poste

... Mon cher Voltaire, les retards postaux n'ont parfois pas de limite raisonnable ...

https://www.zejournal.info/infos-insolites/1-articles-inf...

 

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 25 juillet 1762]

Mon cher Gabriel me mande que j'aurai le mémoire après dîner . J'envoie après dîner . Mon cher Gabriel ma fait dire que c'est pour sept heures . J'envoie à sept heures . Il me remet au lendemain matin . Enfin il m'écrit qu'on travaille à ce mémoire à cent lieues d'ici . Pourquoi traiter ses amis d'une façon si cruelle ?

Toutes réflexions faites, je juge que la méprise vient de ce que mon cher Gabriel ne m'a point dit que le billet qui promettait le mémoire , venait par la poste . Il a promis des feuilles de Corneille, et j'entendais le mémoire des Calas . »

 

14/06/2017

le fond de la religion est entièrement semblable dans tous les cœurs bien nés

... lesquels ne sont pas majoritaires, hélas !

 

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 25 juillet 1762]

Dans le mémoire de Donat Calas après l'exorde qui finit je crois par ces mots :

nous attendons en silence que les grâces que ce silence même méritera

mettez

Il n'appartient pas à un jeune homme , à un infortuné de décider laquelle des deux religions est la plus agréable à l'être suprême . Tout ce que je sais c'est que le fond 1 de la religion est entièrement semblable dans tous les cœurs bien nés, que tous aiment également Dieu, leur prince et leur patrie 2.

Je prie instamment monsieur Cramer de vouloir bien m'envoyer l'épreuve ce soir . »

1 V* a d'abord écrit ici : c'est qu'un fonds de .

2 Le Mémoire de Donat Calas pour son père, sa mère et son frère (œuvre de Voltaire) est daté du 22 juillet 1762 et contient aussi une « Déclaration de Pierre Calas » datée du jour suivant . L'addition que l'on a ici fut légèrement modifiée avant la publication .

 

13/06/2017

Je vous souhaite, monsieur, l’avancement que vous méritez

... et "beaucoup d’officiers qui pensent comme vous" !

Dans le même temps, je serais plus que satisfait, monsieur le président, si vous pouviez éviter d'assister à des matchs de foot qui sont prétextes à des concentrations d'intolérants notoires : les supporters, genre d'humains au fanatisme difficilement compréhensible, extrêmistes moutonniers . J'ose espérer que notre vie diplomatique et notre protocole républicain vous dispenseront de ce pensum improductif .

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Foot = sport complet qui fait travailler tout le corps excepté le cerveau (ce serait trop demander à ces gougnafiers )

 

 

« A Joseph-Augustin-Prosper de La Motte-Geffrard

Aux Délices le 25 juillet 1762

Vous m’avez envoyé un trésor 1, monsieur, j’en ferai bientôt usage . Il y a des mots de Henri IV qui pénètrent l’âme. Il y a des anecdotes curieuses, mais les paroles de ce grand roi sont plus curieuses encore. Il aimerait mieux, dit-il, être turc que catholique 2; mais dans quel temps s’exprime-t-il ainsi ? C’est lorsque les prédicateurs canonisaient en chaire l’empoisonneur du prince de Condé 3, et qu’ils excitaient les bons catholiques à empoisonner ou à assassiner le grand Henri 4. Dieu préserve son successeur des billets de confession, et des Damiens, et de la guerre avec les Anglais ! Je vous souhaite, monsieur, l’avancement que vous méritez, et au roi, beaucoup d’officiers qui pensent comme vous. Recevez les très humbles et très respectueux remerciements de votre obligé serviteur.

V. »

2 Ce qu'a écrit Henri IV est : « Si je n'étais pas huguenot, je me ferais turc », ce qui est assez différent ; voir l'Essai sur les mœurs,CLXXIV (5ème lettre ) : voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Essai_sur_les_m%C5%93urs/Addition

4 Ici Henri IV, et non Henri de Condé .

 

12/06/2017

Vous verrez combien l'esprit de fanatisme est plus funeste que l'esprit de corps

... Et il est bien nécessaire de s'en souvenir en période électorale , les extrêmistes ayant un projecteur démesuré en cette occasion .

 

 

 

« A Germain-Gilles-Richard de Ruffey

J'ai l'honneur de vous envoyer, monsieur, votre numéro 16 . Tout ce que j'ai lu sur cette affaire achève de me prouver que toutes nos lois ont comme Janus deux visages, ou plutôt, que nous n'avons point de lois, et qu'aucun état en France n'a de bornes reconnues . Le numéro 16 m'a fait bâiller, mais je crois que les pièces que je vous envoie vous ferons pleurer et frémir . Vous verrez combien l'esprit de fanatisme est plus funeste que l'esprit de corps . Cette affaire commence à faire à la cour le bruit qu'elle mérite, et peut-être ne fera-t-elle que du bruit .

Encore une fois, plus je vois tout ce qui se passe dans le monde, et plus j'aime ma retraite . Il est vrai que Jean-Jacques brûlé à Genève, et banni de Berne, est retiré dans une vallée inconnue de Neufchâtel , mais je doute que ses paradoxes et ses contradictions politiques plaisent au roi de Prusse 1. Ce petit bonhomme a voulu être singulier, et ne sera jamais que singulier . On dit qu'un jour le chien de Diogène rencontra la chienne d'Érostrate, et lui fit des petits dont Jean-Jacques est descendu .

Adieu, monsieur, les tracasseries de votre parlement finiront, parce qu'il faut que tout finisse . Je vous embrasse tendrement .

V.

21è juillet 1762 aux Délices. »

1 La principauté de Neuchâtel relevait du roi de Prusse .

 

11/06/2017

La superstition est le plus abominable fléau de la terre

... Et allez , zou ! allez ! vous dis-je, lire votre horoscope, gogos dangereux pour vous et vos concitoyens . Que le diable vous patafiole, s'il pouvait exister .

 

 

 

« A Isaac Pinto, etc .,Rue Coquillière, vis-à-vis la Rue des Vieux-Augustins à Paris.

Aux Délices par Genève 21è juillet 1762 1

Les lignes dont vous vous plaignez, monsieur, sont violentes et injustes 2. Il y a parmi vous des hommes très instruits et très respectables, votre lettre m'en convainc assez . J'aurai soin de faire un carton dans la nouvelle édition 3. Quand on a un tort il faut le réparer et j'ai eu tort d’attribuer à toute une nation les vices de plusieurs particuliers .

Je vous dirai avec la même franchise, que bien des gens ne peuvent souffrir ni vos lois, ni vos livres, ni vos superstitions ; ils disent que votre nation s'est fait de tout temps beaucoup de mal à elle-même, et en a fait au genre humain . Si vous êtes philosophe, comme vous paraissez l'être, vous pensez comme ces messieurs, mais vous ne le direz pas . La superstition est le plus abominable fléau de la terre ; c'est elle qui de tous les temps a fait égorger tant de juifs et tant de chrétiens ; c'est elle qui vous envoie encore au bucher chez des peuples d'ailleurs estimables . Il y a des aspects sous lesquels la nature humaine est la nature infernale . On sécherait d'horreur si on regardait toujours par ces côtés . Mais les honnêtes gens en passant par la Grève où l'on roue, ordonnent à leur cocher d'aller vite , et vont se distraire à l'opéra du spectacle affreux qu'ils ont vu sur leur chemin .

Je pourrais disputer avec vous sur les sciences que vous attribuez aux anciens Juifs, et vous montrer qu'ils n'en savaient pas plus que les Français du temps de Chilpéric 4; je pourrais vous faire convenir que le jargon d'une petite province, mêlé de chaldéen, de phénicien et d'arabe, était une langue aussi indulgente et aussi rude que notre ancien gaulois, mais je vous fâcherais peut-être et vous me paraissez trop galant homme pour que je veuille vous déplaire . Restez juif, puisque vous l’êtes, vous n'égorgerez point quarante-deux mille hommes pour n'avoir pas bien prononcé shibboleth 5, ni vingt-quatre mille pour avoir couché avec des Madianites 6 ; mais soyez philosophe, c'est tout ce que je peux vous souhaiter de mieux dans cette courte vie .

J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec tous les sentiments qui vous sont dus, votre très humble et très obéissant serviteur.

V.

chrétien, gentilhomme ordinaire de la

chambre du roi très chrétien »

1 Copie contemporaine sur laquelle on lit deux mentions : l'une de Malesherbes, « J'ai fait copie de cette lettre sur l'original que M. Pinto m'a communiqué . » ; l'autre , d'une autre main, notant que le manuscrit original est autographe à partir de J'ai l'honneur . La copie a été suivie ici .

2 Pinto avait annoncé vers le 10 juillet 1762 à V* ses Réflexions critiques sur le 1er chapitre du tome VIIè des Œuvres de M. de Voltaire, 1762, . Le passage qu'il visait est au début du volume V( et non VII) de la Collection complète, 1756 . Il forme maintenant la première section de l'article « Juifs » du Dictionnaire philosophique . Sur Pinto, voir Arthur Hertzberg, The french enlightment and the Jews, 1968 . sur ses relations avec V* voir J. S. Wijler, 1923 .

3 V* ne tint pas cette promesse et ne fit pas de carton .

4 C'est largement le sujet du Taureau blanc .

5 Juges , XII, 6 .

6 Nombres, XXV, 6 .

 

 

10/06/2017

Vous avez jeté des germes qui produiront un jour plus qu’on ne pense

... Monsieur le président .

... Du moins nous le souhaitons .

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"Pourvu qu'il ait la main verte" aurait dit Nicolas Hulot !

 

 

« A Louis-René de Caradec de La Chalotais

Aux Délices, le 21 juillet 1762

Je crois, monsieur, que c’est à vos bontés que je dois la réception de votre nouveau chef-d’œuvre 1. Tous les deux sont d’autant plus forts, qu’ils sont ou paraissent être plus modérés. Les jésuites diront : hœc est œrugo mera 2. Tous les bons Français vous doivent des remerciements de ces mots : en un mot, des maximes ultramontaines.

Ces deux ouvrages sont la voix de la patrie, qui s’explique par l’organe de l’éloquence et de l’érudition. Vous avez jeté des germes qui produiront un jour plus qu’on ne pense. Et quand la France n’aura plus un maître italien 3 qu’il faut payer, elle dira : c’est à M. de La Chalotais que nous en sommes redevables.

Vous m’avez donné tant d’enthousiasme, monsieur, que je m’emporte jusqu’à prendre la liberté de recommander à votre justice l’affaire de M. Cathala, négociant de Genève. Il implore le parlement pour être payé d’une dette. C’est un très honnête homme, très exact, et incapable de redemander ce qui ne lui est pas dû. Je sais bien qu’en qualité d’huguenot, il sera damné ; mais en attendant, il faut qu’il ait son argent en ce monde.

Pardonnez-moi, monsieur, la démarche que je fais auprès de vous. Je sais qu’il est très inutile de vous solliciter, mais je n’ai pu m’empêcher de vous dire combien j’estime la probité de mon huguenot. Je ne suis point suspect de favoriser les mécréants, puisque je viens de faire bâtir une église.

Je n’ai point d’expressions pour vous dire avec quel respect j’ai l’honneur d’être, etc.»



2 Voilà du pur vert-de-gris ; Horace, Satires, I, 100-101 . Voir , au figuré : http://www.cnrtl.fr/definition/vert-de-gris

3 Le pape .