Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/02/2014

Il me semble que l'hiver passé nous menions une vie plus douce

... Il me semble aussi, mais ma mémoire est incertaine et tend à éliminer les choses désagréables, je suis donc un piètre témoin, terriblement partial .

 DSCF2081 hiver plus doux.png

 

 

« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches

Major des gardes de M. le

prince d'Orange

à Lausanne

A Ferney 8 février [1759]

Vous risquez toujours votre vie en Suisse, monsieur . On vous a coupé des artères chez moi 1, vous deviez naturellement vous attendre à un coup de fusil de la part du fou Watteville2 , et son pauvre gouverneur , qui sûrement n'a pas une si belle femme, a payé pour vous . Cette aventure horrible nous a fait frémir . Il me semble que l'hiver passé nous menions une vie plus douce . Vous m'avez reproché mon velours de trois couleurs, avouez que la couleur de Lausanne est un peu rembrunie . Au lieu de venir applaudir à vos talents, et de jouir de vos charmants spectacles, un précepteur de M. Constant devenu ministre fait des libelles ; des associés de scandale impriment des impertinences ; un Grasset voleur public à Genève et chassé de sa ville les imprime . Le conseil de Berne fait des perquisitions . Rien de tout cela ne se passe dans mes châteaux, la paix, le travail, l'abondance y habitent . Il ne m'y manque que votre société délicieuse . J'en jouirai sûrement avant votre départ . J'espère que monsieur Constant me conservera toujours les mêmes sentiments et que Madame d'Hermenches et ces dames me conserveront toujours les mêmes bontés .

Que dites-vous du roi de Prusse qui m'envoie deux cents vers sur la mort de sa sœur ?3 »

2 Charles-Emmanuel-François de Watteville (ou Wattenwyl ) avait tué à coups de fusil son tuteur et un domestique ; voir page 388-392 : La vie lausannoise au XVIIIè siècle d'après Jean-Henri Polier de Vernand, lieutenant baillival : http://books.google.fr/books?id=8rzPEVTo8_cC&pg=PA618&lpg=PA618&dq=Charles-Emmanuel-Fran%C3%A7ois+de+Watteville+%28ou+Wattenwyl&source=bl&ots=Jn85WnlJR6&sig=YiNuhl1H6S5D9fdqA71WJ24KtbE&hl=fr&sa=X&ei=4ZEQU5OGE4iV7Abn7oEY&ved=0CC4Q6AEwAA#v=onepage&q=Charles-Emmanuel-Fran%C3%A7ois%20de%20Watteville%20%28ou%20Wattenwyl&f=false

3 Frédéric II écrivait de Breslau à V* le 23 janvier 17459 : « Je vous envoie des vers faits dans un camp [Rodewitz, le 12 octobre 1758], et que je lui [Wilhelmine , morte le 14 octobre 1758] envoyai un mois avant cette cruelle catastrophe qui nous en prive pour jamais . » Voir Œuvres de Frédéric le Grand ; Épître à ma sœur de Bayreuth : page 101-107  : http://friedrich.uni-trier.de/fr/oeuvres/12/101/page/

 

27/02/2014

je ne m'embarrasse guère des sottises qu'on fait dans les pays où je ne suis pas

... Celles de mon pays suffisent amplement à meubler les journaux télévisés que j'évite autant que possible de regarder .

La radio suffit à mon bonheur [sic] de citoyen informé qui fait tout pour ne pas être désinformé par la boîte à image qui tend à nous pourvoir en prémâché et prédigéré . Il y a longtemps que que je n'ai plus besoin de bouillie ni petit pot et que je sais trier ce qui m'intéresse .

 babel début des sottises.jpg

 Babel , début de la sottise , mère des frontières, des étrangers et de leurs coïonneries

 

« A Jacques-Abram-Elie-Daniel Clavel de BRENLES.
Ferney, 8 février 1759.
Mon cher ami, nos lettres se sont croisées. Moi, renoncer à Lausanne, parce qu'un fripon genevois, M. G*** 1, présenté au pape, a mérité le carcan ! Moi, renoncer à vous, qui m'avez fait Suisse ! Je ne suis pas capable d'une telle inconstance; je serais surtout très-ingrat, si je prenais pour vous quitter le temps où l'on m'accable de bontés. Je méprise si souverainement toutes ces misères que je n'ai jamais lu le Mercure suisse où l'on avait fourré tant de rapsodies sur Calvin, Servet, et moi. Mais qu'on fasse un beau recueil 2 en forme, à Lausanne, sous mon nom ; mais que, dans ce recueil, il y ait des choses dangereuses sur la religion et sur le roi de Prusse, c'est un attentat qu'il faut réprimer; et j'aurai toute ma vie la plus profonde reconnaissance pour le gouvernement de Berne, qui a daigné m'honorer d'une si prompte justice, et pour vous en vérité, mon cher ami, qui m'avez marqué dans cette petite affaire une affection si courageuse. Je vous supplie de présenter mes très-humbles remerciements à monsieur le bailli ; je ne doute pas qu'il n'ait étouffé jusqu'aux moindres traces de la friponnerie de ce Grasset. Ce misérable était destiné à me faire du mal. C'est par lui seul que le prétendu poème de la Pucelle parut dans le monde, rempli de platitudes et d'horreurs. Chassé de Genève pour avoir volé, il a trouvé grâce devant le pape et devant Bousquet, et l'on me dit que Bousquet avait enfin reconnu le caractère du maraud. J'espère revoir bientôt votre ville purgée de ce monstre, et y retrouver les charmes de votre société. Soyez sûr que mes petits ermitages, appelés châteaux, n'auront point la préférence sur la ville de Lausanne, à qui je dois mes jours les plus heureux.
Je ne sais ce que c'est que ces prétendues Lettres imprimées par ce fou de Néaulme 3; mais je ne m'embarrasse guère des sottises qu'on fait dans les pays où je ne suis pas. J'étais fâché d'être honni dans la ville de Lausanne, où j'aime à vivre, et à vivre avec vous.

Vale4.

V. » 

2 La Guerre littéraire, etc

3 Ouvrage non identifié .

4 Porte toi bien .

 

26/02/2014

ce qui est neuf n'est pas toujours vrai

... Ce qui est dix/dit non plus, d'ailleurs !

 "Faire du neuf avec du vieux ne nous approche pas plus de la vérité que l'approche d'un tas de foin ne nous coupe la soif " dit maître Aliboron ( ou Ali Boron) .

 

quoi de neuf.jpg

What's up doctor ?

 

« A Nicolas-Claude Thieriot

Au château de Tournay par Genève

7 février [1759]

J'ai reçu, mon ancien ami, les cartes géographiques . Ma nièce de Fontaine vous paiera à son retour tous vos petits déboursés et vous présentera mes remerciements . Je vous prie instamment de dire à MM. Le Roy et Gravelot, combien je suis touché de leur attention 1.

On peut, dans une séance académique, reprocher à l'auteur du livre intitulé de l'Esprit, que l'ouvrage ne répond point au titre; que des chapitres sur le despotisme sont étrangers au sujet 2; qu'on prouve avec emphase quelquefois des vérités rebattues, et que ce qui est neuf n'est pas toujours vrai ; que c'est outrager l'humanité de mettre sur la même ligne l'orgueil, l'ambition, l'avarice, et l'amitié 3; qu'il y a beaucoup de citations fausses, trop de contes puérils, un mélange de style poétique et boursouflé avec le langage de la philosophie, peu d'ordre, beaucoup de confusion, une affectation révoltante de louer de mauvais ouvrages, un air de décision plus révoltant encore, etc., etc. On devrait aussi, dans la même séance, avouer que le livre est plein de morceaux excellents.
Mais on ne peut voir sans indignation qu'on persécute, avec cet acharnement continu, un livre que cette persécution seule peut rendre dangereux, en faisant rechercher au lecteur le venin caché qu'on y suppose. On dit que cette vexation odieuse est le fruit de l'intrigue des jésuites 4, qui ont voulu aller par Hélvétius à Diderot. J'estime beaucoup ces deux hommes, et les indignités qu'ils éprouvent me les rendent infiniment chers.
Je vous prie de me dire quel est le conseiller ou président géomètre, métaphysicien, mécanicien, théologien, poète, grammairien, médecin, apothicaire, musicien, comédien, qui est à la tête des juges de l'Encyclopédie 5. Il me semble que je vois l'Inquisition condamner Galilée. L'esprit de vertige est bien répandu dans votre pauvre ville de Paris.
Quelle pitié de fourrer dans leurs caquets un poème sur la Religion naturelle!6 Les gens un peu instruits savent qu'il y a un poème sur la loi naturelle, dans un recueil d'ouvrages assez connus 7, et que le poème tronqué de la Religion naturelle est une mauvaise brochure dans laquelle l'auteur est estropié. Mais l'auteur ne s'en soucie guère, et sait ce qu'il doit penser des sots et des fous. Il y a longtemps que j'ai mis entre eux et moi un fil long de plus d'une brasse.
Quand vous serez démontmorenciè 8, vous feriez bien de venir philosopher, avant ma mort, dans mes retraites. Il vaut mieux vivre avec ses amis que d'aller, jusqu'au tombeau, de gîte en gîte, et de protection en protection. Je vous embrasse de tout mon cœur. »

1 Le 25 janvier 1759 Thieriot écrit à V* : « L’atlas que je vous ai envoyé, mon très illustre ami, a té fait avec les bons offices de deux des plus habiles gens dans la géographie, ce sont MM. Danville et l'abbé Huguin […] Nous avons jugé tous trois qu'il valait mieux vous envoyer toutes ces cartes pour les faire relier comme il vous conviendrait, parce qu'il y a dit-on à Genève de très bons relieurs et qu'il vous en coûterait beaucoup moins qu'ici . […] M. Gravelot m'a remis pour vous donner des marques de son estime et de son attachement, un exemplaire de ses étrennes de l’École militaire dont les dessins et les vers sont de sa façon . M. Leroi, horlogeur, m'a prié d'y joindre son petit almanach chronologique qui est fort instructif et bien exposé pour la connaissance du temps . »

2 Dans le livre III, chapitre xvii-xxi ; ces chapitres ne sont pas aussi étrangers à l'argumentation d'Helvétius que V* veut le dire ; il est vrai cependant qu'ils sont développés d'une façon excessive par rapport au propos de l'ouvrage .Voir page 380 et suivantes : http://pedagogie.ac-toulouse.fr/philosophie/textes/helvetiusesprit.htm

4 Louis, dauphin (père des rois Louis XVI, Louis XVIII et Charles X), partisan déclaré des jésuites, donna le premier signal de la persécution excitée contre Helvétius, en montrant à la reine les belles choses que faisait imprimer le maître- d'hôtel de cette princesse. (Clogenson.) . Pour « l'ancien chambrier », voir note 7 suivante .

6 L'interdiction du 23 janvier 1759, suivie le 6 février de la condamnation, portait sur toute une liste d'ouvrages au nombre desquels figuraient De l'Esprit, l'Encyclopédie, le Pyrrhonisme du sage, la Philosophie du bon sens et la dernière œuvre de Gabriel-François Coyer, Lettre au révérend père Berthier , sur le matérialisme ; voir l'Arrêt de la cour du Parlement portant condamnation de plusieurs livres et autres ouvrages imprimés […] du 23 janvier 1759, Joly de Fleury . Il est à noter que l'Encyclopédie n’était pas condamnée à être brûlée en public . Le Poème sur la loi naturelle faisait partie des œuvres condamnées ; Thieriot dira le 23 février 1759 à V* : « M. d'Argental a dû vous écrire qu'on avait réclamé en faveur du Poème sur la loi naturelle, et je puis vous certifier qu'un ancien chambrier de plus de quatre-vingts ans rapportant à deux évêques dans un dîner de quinze personnes dont j'étais combien il était ridicule d'avoir proscrit cet ouvrage dit qu'il l'avait toujours sur sa table et qu'il ne passait pas une semaine sans le lire avec transport et édification . »

L'abbé Coyer, voir : http://oll.libertyfund.org/index.php?option=com_staticxt&... et pour ses œuvres voir : http://www.idref.fr/026804360

7 Les éditions des Ouvres de Voltaire, en 17 volumes , publiées par les Cramer; voir lettre du 11 février 1758 au comte de Tressan : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/06/12/j-ai-pris-l-enorme-liberte-monsieur-de-vous-envoyer-une-bibl.html

8 Thieriot qui logeait alors chez le duc de Montmorency, rue Saint- Honoré, était sur le point de le quitter pour aller demeurer chez le marquis de Paulmy, à l'Arsenal.

 

25/02/2014

quelle rage ! Le monde est sot et fou

... Et les mots sont faibles ! Je pense en ce moment particulièrement à cette fichue CentrAfrique , centre d'une actualité meurtrière entretenue par de stupides appartenances religieuses , Caïns et Abels modernes , tantôt victimes et tantôt assassins .

La France avec ses militaires va se retrouver entre deux feux , le rôle d'arbitre ne peut être joué que si les deux camps connaissent les règles et acceptent les décisions . L'escalade votée ce jour me rappelle tristement celle des USA au Viet Nam, on sait comment ça a fini !

 2442241_centrafique.jpg

 

« A François de Chennevières

[7 février 1759]

Je vous supplie mon cher ami de donner cours au paquet pour M. d'Argental et à la lettre pour Thieriot . Mille tendres respects à madame votre femme .

A propos, vous m'avez envoyé des vers charmants . Je suis hors de combat mais je ne suis point ingrat . Pardonnez à ma pauvre prose .

Eh mon Dieu pourquoi tant persécuter Helvétius et Diderot ? quelle rage ! Le monde est sot et fou .

Je vous embrasse .

V.

Accusez-moi je vous prie la réception du paquet . »

M. de Voltaire mon voisin , pour qui j'ai les plus grands égards, et dont je n'ai jamais reçu que des politesses

... Vous accueille sans faiblir et  en beauté depuis plus de cinq ans

 , et je le prouve : http://www.monsieurdevoltaire.com/

 Encore bravo Mam'zelle Wagnière et tous mes voeux de bonne santé retrouvée , je le souhaite .

 DSCF5610 monsieur de voltaire.png

 Suivez mon regard !

 

« A Théodore Tronchin

[vers le 6 février 1759] 1

Cette déclaration que je propose à Vernet de signer me paraît bien honnête, mon cher grand homme . Je lui offre une éponge pour le débarbouiller et un croc pour le tirer de la boue . J'envoie copie à M. Saladin . Si vous m'approuvez agissez .

Quelles nouvelles des jésuites portugais ?

tuus V.

Nous désapprouvons tous ici, et moi particulièrement, la brochure anonyme intitulée Guerre littéraire, dont les exemplaires ont été saisis par messieurs les scolarques,2 dès qu'ils sont arrivés ; je suis surtout très fâché de voir mon nom mêlé dans cette brochure en plusieurs endroits . Je déclare qu'il est faux que j'aie jamais eu le moindre démêlé avec M. de Voltaire mon voisin , pour qui j'ai les plus grands égards, et dont je n'ai jamais reçu que des politesses . »

1 Ecrite en tout état de cause avant le 10, certains voulant la dater entre le 10 et le 12 .

2 Nom, en certains pays , des directeurs des écoles. Littré .

 

je vous serai très obligé de me mander s'il y a quelque chose de nouveau à faire

... What else ?

Le lait le sucre et le café :

 http://canalstreet.canalplus.fr/emissions/clips-musique/clip-en-exclusivite-4759

 what else einstein.jpg

 Tout est bien là !

 

« A Élie Bertrand premier

pasteur de l’Église française

à Berne

Aux Délices 6 février 1759

Je vous remercie bien tendrement mon cher ami, de tous vos soins obligeants ; premièrement le fripon 1 dont vous me parlez est très connu à Genève dont il a été chassé, il avait volé les Cramer, et son procès criminel existe encore .

A l'égard de messieurs les curateurs de l'Académie de Lausanne 2 je ne sais si je dois leur écrire, m'étant adressé déjà à M. de Freudenrick et craignant de paraître douter de ses bontés et de son crédit ; M. de Freudenrick a eu la bonté d'écrire à M. le bailly de Lausanne ; je vous serai très obligé de me mander s'il y a quelque chose de nouveau à faire .

Je vous embrasse de tout mon cœur, et vous supplie de dire à M. et Mme de Freydenrick qu'il n'y a personne sur la terre qui leur soit plus attaché que moi .

V. »

 

24/02/2014

Un ministre de France doit être bien instruit

... Cela va de soit, c'est un minimum requis que de savoir ce qui se passe, ce qui peut se passer, ce qui doit se passer . De plus un minimum d'esprit de décision éclairée doit permettre un minimum de progrès dans la vie des citoyens . Comme dit Voltaire "prions Dieu pour la conversion de la société" !

 vacances-des-ministres-en-france-et-dans-le-monde.jpg

OK ! c'est l'équipe précédente, mais elle n'a pas été performante, si bien que je ne vois pas pourquoi elle se fiche de l'équipe actuelle qui est un peu à la ramasse, avouons le . Prions Dieu etc., etc.

 

 

« A Théodore Tronchin

[vers le 5 février 1759]

Le gazetier d'Amsterdam très anti-jésuitique , ne dit pas un mot des révérends-pères, le résident de France jure que la chose n'est pas vraie . Un ministre de France doit être bien instruit . On m’assure la nouvelle de Paris mais ce sont des philosophes, gens suspects, qui la débitent . En attendant prions Dieu pour la conversion de la société .

Mon cher Esculape, Dieu ne m'a donné ni votre corps ni votre sagesse, cependant je vis grâce à vos conseils et à mon régime . Je supporte mes maux . Je jouis des intervalles et je vous aime de tout mon cœur .

V. »