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23/02/2014

employer tout pour obtenir une chose si juste devenue nécessaire

... Est ce qu'il faut, pour que justice soit faite, actuellement et toujours, en tout temps et tout lieu, en particulier en Ukraine .

Poutine, dit Stone Face Ier, peut être fier du travail des milliers de Russes qui ont permis de réaliser des JO sans anicroche,-et je salue cette réussite-, mais que son autosatisfaction cesse en même temps que son influence néfaste chez ses voisins . Qu'il fiche la paix aux nations qui n'ont pas l'heur de lui lècher les bottes financièrement parlant, bien évidemment . Que les pro-Russes et les pro-Europe vivent en bonne intelligence, il y va de leur survie au sens premier du terme .

 ioulia-timochenko.jpg

 http://lci.tf1.fr/monde/europe/ukraine-ioulia-timochenko-...

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 5 février 1759]

Par des lettres que je reçois de Berne, il est important que j'aie l'attestation que je demande 1. Ce Grasset était donc né pour me tourmenter ! Tel est l'arrangement des choses de ce monde .

Je supplie instamment mon cher Gabriel de vouloir bien communiquer ma pancarte à M. de Châteauvieux, et d'employer tout pour obtenir une chose si juste devenue nécessaire . »

 

celui qui gère un bien de campagne et qui vend du foin, et qui est chargé de me payer des redevances, est mon vassal

... Quand Voltaire fâché, lui , parler sèchement , comme ça ! Et il a bien raison , les malfaisants doivent être remis à leur place sans rémission.

 vassal.png

 

 

 

« A monsieur le docteur

Théodore Tronchin, professeur à

Genève

[vers le 3 février 1759]

Mon très cher professeur, vous ne laisserez pas votre ouvrage imparfait . J'ai enfin lu le grossier et impertinent libelle de Vernet intitulé Réponse d'une société de gens de lettres 1, libelle dans lequel on me dit que je suis bien heureux de n'être pas né dans le siècle de Servet, etc. Je serai le 22 février 2 en état de faire afficher ma réponse à la porte de sa maison de Chambési 3, et de lui parler moi-même . Nous verrons si celui qui a supposé des lettres et un testament de Giannone 4 pour voler ses manuscrits chez M. Turrettin, si celui dont j'ai les lettres par lesquelles il me presse de lui donner mon histoire à imprimer, et l'ôter aux Cramer, si celui qui ...etc. osera soutenir ma présence ou celle de mes valets .

Je ne demande que la paix . Je ne demande qu'un mot honnête dans lequel, sans parler de religion, il désavoue tout ce qu'on peut lui avoir imputé sur mon compte dans les journaux suisses, et dans le libelle intitulé Guerre littéraire . Je ne veux que ce mot qui finira tout . On lui fait dire qu'il n'est point mon vassal, que c'est son frère qui l'est ; je veux bien qu'il sache que je suis comte de Tournay par un acte authentique qui va être enregistré au parlement de Dijon, et que la terre appartiendra à mes héritiers dès que l'affaire du dénombrement qui est en bon train sera finie , que celui qui gère un bien de campagne et qui vend du foin, et qui est chargé de me payer des redevances, est mon vassal .

Mais je ne suis pas assez fat pour insister sur ces titres, je suis assez bon seulement pour vouloir la paix avec un voisin 5 , et pour prévenir dans ce pays un scandale horrible qui arrivera infailliblement . Voilà une maladie qu'il faut que vous guérissiez, en faisant passer la conviction dans l'âme de M. Saladin 6, et la honte dans celle de Vernet . Je vous embrasse tendrement .

V. »

1 C'est la « Lettre à M. de Voltaire à Lausanne » reproduite par le Journal helvétique, Neuchâtel, juin 1757 ; d'après lequel les auteurs sont des « personne respectables auxquelles nous devons de la considération et des égards » . l'ouvrage conservé à Lausanne de la brochure sous le forme de laquelle ce texte avait été publié à part porte une note manuscrite contemporaine identifiant l'auteur comme Jacob Vernet . Voir page 132 : http://books.google.fr/books?id=X1ZixOxS2M8C&pg=PA132&dq=%C2%A0journal+helv%C3%A9tique+juin+1757&hl=fr&sa=X&ei=2rEIU5WxCoSr0QW4yICACg&ved=0CEkQ6AEwBA#v=onepage&q=%C2%A0journal%20helv%C3%A9tique%20juin%201757&f=false

2 Date à laquelle V* comptait prendre possession de sa terre de Tournay .

3 Terre qui jouxte Tournay au nord-est .

5 Avec un voisin est ajouté au dessus de la ligne .

6 Syndic d'Onex (situé sur la république de Genève)

 

22/02/2014

j'ai fait des enfants, bâti des maisons, et planté des arbres . Je ne sais pas bien exactement, monsieur, si j'ai rempli le premier devoir mais je me vois au moins deux tiers d'Indou , et de Chinois, je plante et je bâtis

... Voilà un beau programme  , oeuvre de création et de transmission de vie , présenté ici par ordre décroissant de soucis potentiels  ! Ceux qui ont fait les trois points sont sans doute d'accord avec mon classement proposé .

 arbre-cathedrale.jpg

 Il faut avoir gardé une âme d'enfant pour construire dans un arbre .

 http://lgirafes.blogspot.fr/2012/08/vivre-dans-un-arbre.html

 

« A Jacques-Bernard Chauvelin 1

Aux Délices route de Genève

3è février 1759 2

Vous allez être étonné, monsieur, qu'au lieu de vous demander des lumières sur des objets de littérature, selon mon ancien usage, je me borne à vous demander votre protection sur le centième denier . J'ai commencé à être honteux sur la fin de ma vie de l'avoir employée à barbouiller du papier . On prétend que les Chinois et les Indiens disent à Dieu en mourant , Tu n'as rien à me reprocher, j'ai fait des enfants, bâti des maisons, et planté des arbres . Je ne sais pas bien exactement, monsieur, si j'ai rempli le premier devoir mais je me vois au moins deux tiers d'Indou , et de Chinois, je plante et je bâtis . Je fais plus, je laboure, et je crois que l'invention du semoir est très utile à l’État. Mais en mettant beaucoup de deniers dans ces opérations je ne pense pas que je doive le centième denier exigé par M. Girard 3. Je crois que M. Girard n'est ni un homme de génie, ni un homme de bonne compagnie . C'est ce qui fait, monsieur,que je m’adresse à vous de préférence à lui ; je vois crois d'ailleurs beaucoup plus juste qu'un Girard . Je n'ai pas l'honneur de vous écrire de ma main, et vous pardonnerez cette insolence à un vieux malade, mais tant que les facultés de sentir et de penser me resteront, je vous serai toujours attaché avec le plus tendre respect .

Voltaire . »

2 Sur la copie de cette lettre, Chauvelin qui était intendant des finances a noté, à l'intention de son premier commis Vincent , « V. m'en parler. »

3 Fermier général qui est en cause dans une requête de V* concernant Tournay : « ainsi le sieur Girard, receveur ou directeur de la ferme du domaine à Dijon, n’est pas recevable dans l’évaluation qu’il fait ; ledit Girard abusant d’autant plus de son emploi, qu’il demande ce paiement injuste avant même que le complaignant soit en possession de la terre dont il ne doit jouir que le 22 Février. »

 

21/02/2014

S'il ne sert que suivant l'argent que son maître lui donne, il fera une besogne bien médiocre

... Ce qui est l'avis de tous (ou presque ) les salariés .

Et on entre alors dans cette fameuse spirale de la médiocrité : "je ne suis pas payé autant que j'estime le mériter, donc je travaille moins", du coup le patron n'augmente personne "ils sont bien payés pour le peu qu'ils font", et le serpent se mord la queue ! ça fait mal !! Je suggère que la tête et la queue retrouvent leur place respective et vivent en bonne entente pour leur bien réciproque .

 

serpent mord sa queue.jpg

 

 

« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de LUTZELBOURG

à l'île Jard

à Strasbourg.
Aux Délices, 2 février [1759]
Comment va votre santé, madame? comment vous trouvez- vous du plus doux des hivers? N'êtes-vous pas étonnée qu'on ne prenne pas en Allemagne un si beau temps pour s'égorger ? Connaissez-vous milord Maréchal, ancien conjuré anglais, ancien réfugié en Espagne, aujourd'hui gouverneur ad honores 1 de la petite principauté de Neufchâtel ? Il passa hier par Genève pour aller, de la part du roi son maître prussien, allumer, s'il le peut, quelques flambeaux de la discorde dans l'Italie. S'il ne sert que suivant l'argent que son maître lui donne, il fera une besogne bien médiocre. Les nouvellistes du pays que j'habite, qui ont des correspondances dans toute l'Europe, disent toujours que la conspiration du Portugal 2 n'est que la suite des amours du roi et de la jalousie d'un homme du vieux temps, qui a trouvé mauvais d'être cocu. Vous voyez, mesdames, que, depuis Hélène, vous êtes la cause des plus grands événements; mais les jésuites vous disputent votre gloire. Ils se sont mêlés de cette affaire, qui ne les regardait pas. De quoi s'avisent-ils d'entrer dans la vengeance de la mort d'une femme ?3 Ils disent pour raison qu'ils étaient depuis longtemps en possession d'assassiner, et qu'ils n'ont pas voulu laisser perdre leurs privilèges. La mort prochaine du roi d'Espagne, les attentats contre les têtes couronnées, les amis du roi de Suède mourant par la main du bourreau 4, l'Allemagne nageant dans le sang, forment un tableau horrible. Cependant on ne songe à rien de tout cela dans Paris. On y est toujours aussi fou qu'auparavant, toujours se plaignant, toujours riant, toujours criant misère, et plongé dans le luxe ; et moi, madame, toujours vous aimant avec le plus [ten]d[r]e 5 respect . »

 

1 Honoraire .

3 Charrot écrit : « Je crois qu'il faut lire : « de l'amour d'une femme ». Il s'agit de la comtesse Ataïde d'Atougina qui passait pour avoir été la maîtresse du roi du Portugal et qui n'était pas morte . Le Précis du Siècle de Louis XV, chap. xxxviii » (  dans lequel V* écrit Atouguia)

5 Le papier de la lettre est déchiré .

 

20/02/2014

les grâces et le bon goût sont bannis de France, et ont cédé la place à la métaphysique embrouillée, à la politique des cerveaux creux, à des discussions énormes sur les finances, sur le commerce, sur la population

... L'histoire est un éternel recommencement, et les défauts français une constante ridicule . Comment peut-on être aussi bête au XXIè siècle qu'au XVIIIè ? Le progrès ne se serait-il donc limité qu'à nos moyens de locomotion , de télécommunication, de faire de l'esbrouffe ?

Pitoyable gouvernement aux mains de pitoyables fonctionnaires !

 http://www.contrepoints.org/2013/07/18/131119-pendant-que-la-maison-brule-letat-peint

pitoyable fonctionnaire.jpg

 Je vois aussi l'Etat feignant !

 

« A Marie-Anne Fiquet du BOCCAGE.

Aux Délices, 2 février 1759.



Qui les a faits, ces vers doux et coulants, 1
Qui comme vous ont le talent de plaire?
Pour moi, j'ai dit en voyant ces enfants :
A leurs attraits je reconnais leur mère.

Quoi! vous louez ma retraite, mes goûts,
Les agréments de mon séjour champêtre !
Vous prétendez que, même loin de vous,
Je suis heureux, et sage aussi peut-être.

Il est bien vrai que la félicité
Devrait loger sous l'humble toit du sage.
Je la cherchai dans mon doux ermitage;
Elle y passa; mais vous l'avez quitté.



Ou les vers en et en age que j'ai reçus de Paris sont de vous, madame, ou il y a quelqu'un qui vous ressemble et qui vous vaut bien. Pardonnez-moi si je vous ai soupçonnée sans hésiter. J'ai cru reconnaître votre écriture, et j'ai la vanité de croire que je ne me méprends pas à votre style; ce n'est point un jugement téméraire d'accuser les gens des actions qu'ils sont accoutumés de commettre.
Je ne trouve rien à dire contre ma retraite, sinon que vous habitez Paris. Je suis comme le renard 2 sans queue qui voulait ôter la queue à ses camarades.
Je voudrais que les personnes à grands talents me justifiassent, moi qui ai pris le parti de me retirer parce que je n'en ai que de petits. Je vois qu'en général petits et grands ne trouvent guère que des jaloux et de très-mauvais juges. Il me paraît que les grâces et le bon goût sont bannis de France, et ont cédé la place à la métaphysique embrouillée, à la politique des cerveaux creux, à des discussions énormes sur les finances, sur le commerce, sur la population, qui ne mettront jamais dans l'État ni un écu ni un homme de plus. Le génie français est perdu ; il veut devenir anglais, hollandais, et allemand. Nous sommes des singes qui avons renoncé à nos jolies gambades, pour imiter mal les bœufs et les ours. La Tocane et La Goutte 3 de Chaulieu, qui ne contiennent que deux pages, valaient cent fois mieux que tous les volumes dont on nous accable. On croit être solide, on n'est que lourd et lourdement chimérique.
Est-il vrai, madame, que le parlement 4 fait brûler le livre de l'Esprit ? Passe encore pour des mandements d'évêque; mais de gros in-quarto scientifiques ! Sont-ce là des procès à juger dans la cour des pairs ?
M. de Cideville est-il à Paris ? Je lui ai écrit dans sa rue de Saint-Pierre ; peut-être n'y est-il plus. Voyez-vous souvent le grand abbé du Resnel ? Ces deux messieurs me paraissent à moitié sages ; ils passent six mois au moins hors de Paris. Pardon, madame ; non, ils ne sont point sages du tout, ni moi non plus ; ils vous quittent six mois, et moi pour toujours !
Daignez m'écrire, si vous voulez que je ne sois pas à plaindre. Pardonnez, madame, à un malingre, s'il n'a pas l'honneur de vous écrire de sa main ; son corps est faible, mais son cœur est rempli pour vous des sentiments les plus vifs d'estime et d'attachement. Il en dit autant à M. du Boccage. »

1 Il n'y en a pas de trace dans le Recueil des œuvres de Mme du Boccage, 1770 .

3Sur la première attaque de goutte que j'eus : http://www.verse.fr/show.php?table=poems&id=1756

4 De l'esprit avait paru à la fin juillet 1758 ; le 10 août 1758 le privilège avait été retiré ; en septembre, Helvétius avait envoyé un exemplaire du livre à V* (voir lettre du 23 septembre 1758 à de Brosses : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/11/03/mon-grand-plaisir-serait-de-n-avoir-affaire-de-ma-vie-ni-a-u.html

L'ouvrage fut dénoncé à la Sorbonne mais la condamnation officielle n'intervint que le 9 avril 1759 ; la nouvelle dont fait état V* est donc prématurée . L'arrêt du parlement est du 6 février, mais le réquisitoire d'Omer Joly de Fleury est du 29 janvier 1759.

 

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 Bon  anniversaire Monsieur François-Marie de VOLTAIRE

PS- J'ai failli oublier le premier 320è  anniversaire (car il y en aura un deuxième  cette année,  qui pourtant n'est pas bissextile ) de naissance du grand homme afin de respecter sa décision d'avoir le 20 février 1694 pour date de mise au jour .

19/02/2014

quand on a fortement résolu de réussir, il est rare qu'on échoue. Il faut discrétion, protection, courage, patience

... Combien de candidats aux élections de toutes sortes n'ont pas l'ombre d'une des qualités précitées et pourtant sont élus, ce qui , à mes yeux, est un encouragement à la médiocrité au mieux, à la malfaisance au pire.

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 La race des lapins crétins a un superbe président (bling bling de pacotille, à la Ségéla/Sarko)

 

« A Cosimo Alessandro COLLINI.

gouverneur
de M. le comte de Sauer

à l'hôtel de Noailles

à Strasbourg
Si vous voulez entreprendre et suivre l'affaire de la restitution de vos effets, mon cher Colini, il faut courage et patience, et vous en viendrez à bout. Il est nécessaire que vous alliez à Francfort, dussiez-vous y aller en pèlerin. M. de Sauer doit vous aider; je vous ferai toucher quelque argent à Francfort ; vous aurez des lettres de recommandation pour Vienne, et Mme de Bentinck pourra vous y être utile. Il n'est point étonnant que vous ayez attendu le moment favorable qui se présente 1. Vos anciennes protestations subsistent. Votre petite cassette, où étaient vos effets, était dans une des malles dont on s'empara. Vous pouvez me citer, j'agirai en temps et lieu. Il est certain qu'un homme qui s'est emparé des malles et effets d'un voyageur, sans faire d'inventaire et sans forme juridique, est tenu de rendre tout ce qu'on lui redemande. Il n'est question que d'aller secrètement à Francfort avec des lettres de recommandation, et de bien songer que, quand on a fortement résolu de réussir, il est rare qu'on échoue. Il faut discrétion, protection, courage, patience, et vous avez tout cela.

[2 février 1759] »

 

18/02/2014

Je quitterai mes épinards et mon persil pour vos trois mille plantes de l'Asie et de l'Afrique

... S'écria Popeye dans un dernier éclair de lucidité, ou de folie devant une boutique d'herboriste chinois .

 

popeye.jpg

 

 http://www.viesaineetzen.com/recette/le-popeye-c%C3%A9leri-rave-%C3%A9pinard-persil-orange

 

 

« A Caroline-Louise de Hesse-Darmstadt, margravine de BADEN-DOURLACH.
Aux Délices, 2è février 1759.
Madame, la lettre 1 dont Votre Altesse sérénissime m'honore est un bienfait nouveau qui me remplit de reconnaissance, et un nouveau charme qui m'attache à elle. Vos pastels 2, madame, votre plume, vos bontés, vous font des sujets ou plutôt des esclaves dans un pays libre.

 


Tout me plaît en vous, tout me touche;
Parlez, belle princesse, écrivez ou peignez;
Les Grâces, par qui vous régnez,
Ou conduisent vos mains, ou sont sur votre bouche.


 


J'ai une bien forte tentation, madame, de quitter dans les beaux jours de l'été mes petits ermitages, mes petits châteaux ou chaumières, pour venir me mettre aux pieds de Vos Altesses sérénissimes, dans le palais du meilleur goût que j'aie jamais vu. Je quitterai mes épinards et mon persil pour vos trois mille plantes de l'Asie et de l'Afrique; mes petits bois pour votre immense forêt 3 de Dodone ; mes lièvres pour vos chevreuils ; enfin ma liberté pour les belles chaînes dont vous enchaînez tous ceux qui ont l'honneur de vous approcher.
J'ai perdu dans Mme la margrave de Baireuth une princesse qui m'honora toujours d'une bonté inaltérable ; je retrouve en vous, madame, son esprit, ses talents, et ses grâces, et tout cela très-embelli ; je voudrais mériter d'y retrouver la même bienveillance.
Fasse le ciel que le Saint-Empire romain, qui est sens dessus dessous depuis trois ans, puisse être aussi tranquille, l'été prochain, qu'on l'est dans le beau séjour du Repos de Charles 4 ! Le midi de l'Allemagne est bien heureux : il ne se ressent point des horreurs de la guerre, et il vous possède. On attend la mort du roi d'Espagne pour troubler le reste de l'Europe. Milord Maréchal, ou M. Keith, gouverneur de Neufchâtel, vient de passer par nos Alpes pour aller négocier en Italie; on dit que ce n'est pas pour la pacification générale. Mais, madame, pourquoi vous parler de nouvelles ? Il est plus doux de s'entretenir de monseigneur le margrave 5 et de vous.

Je suis avec le plus profond respect,

madame,

de Votre Altesse sérénissime,

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.
Elle pardonnera à un pauvre malade qui ne saurait écrire de sa main. »

1 « De madame la margrave de Baden-Dourlach.
A Carlsruhe, le 17 janvier [1759].
Monsieur, je commets peut-être une indiscrétion de vous dérober des moments dont vous savez faire un meilleur usage ; mais pouvez-vous penser que je puisse recevoir vos vers * charmants, que j'admire en rougissant, et en étouffer ma reconnaissance? Non, en vérité, je ne le puis. Je ne suis pas digne de votre lyre, monsieur, je le sais, mais réellement de votre amitié.
Ne la refusez donc point à l'estime la plus pure et la plus vraie. Je fais de bien sincères vœux pour votre santé. Tout m'y intéresse ; et la promesse que vous me donnez, monsieur, de vous revoir ** chez nous me les fait redoubler d'ardeur. J'y mets même une telle confiance que je sens déjà toute la joie de pouvoir vous assurer de vive voix de cette considération et de cette estime distinguée que l'on vous doit, et avec lesquelles j'ai l'honneur d'être plus que personne au monde, monsieur, votre, etc.
Caroline, margrave de Bade-Dourlach.
P. S. Lé margrave, transporté de joie d'oser espérer de vous revoir cet été, monsieur, et pénétré de vos mérites, m'ordonne de vous tenir compte de ses sentiments, et de vous dire combien il est sensible à ceux que vous voulez bien témoigner pour lui. »

*. Ces vers, et la lettre qui les accompagnait sans doute, nous sont inconnus. (Clogenson.)
**. Voltaire, lors de son voyage à Schwetzingen (juillet et août 1758), avait passé par Carlsruhe. (Clogenson.)

3 Celle de Hardtwald.

4 Ce qui est la traduction de Karls ruhe , ville fondée en 1715 par le margrave Charles-Guillaume.

5 Charles-Frédéric, né en 1728, fils et successeur de Charles-Guillaume.