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21/12/2010

Notre chute des anges qui a produit le diable qui a produit la damnation du genre humain, et la mort de Dieu pour une pomme, ne sont qu'une misérable et froide copie de l'ancienne théologie indienne

 

Rédigé le 20 juillet 2011 pour parution le 21 décembre 2010

 

 

 

« A Frédéric II, roi de Prusse

 

A Ferney , le 21 décembre [1775]

 

Sire,

Il n'y a jamais eu ni de roi ni de goutteux plus philosophe que vous . Il faut que vous soyez comme celui qui disait : Non , la goutte n'est pas un mal 1. Vos réflexions sur cette machine qui a, je ne sais comment, la faculté d'éternuer par le nez et de penser par la cervelle valent mieux que tout ce que les docteurs en grec et en hébreu ont jamais dit sur cette matière .

 

Votre majesté est actuellement dans le cas de Xénophon, qui s'occupait de l'agriculture dans le loisir de la paix . Mais ce n'est pas après une retraite de dix mille, c'est après des victoires de cinquante mille .

 

Je crois que vous aurez un peu de peine à faire produire à votre sablonnière du Brandebourg d'aussi riches moissons que celles des plaines de Babylone, quoique à mon avis vous valiez beaucoup mieux que tous les rois de ce pays-là . Mais du moins vos soins rendront la Marche et la nouvelle Marche 2 et la Poméranie plus fertiles que le pays de Salomon, qu'on appela si mal à propos la Terre promise, et qui était encore plus sablonneux que le chemin de Berlin à Sans-Souci .

 

Votre Majesté est trop bonne de daigner jeter les yeux sur mes petits travaux rustiques . Elle m'encourage en m'approuvant . Je n'ai qu'un petit coin de terre à défricher, et encore est-il un des plus mauvais d'Europe . Vous daignez encourager de même ma chétive faculté intellectuelle, en me persuadant qu'une demi- apoplexie n'est qu'une bagatelle : je ne savais pas que Votre Majesté eût jamais affaire à un pareil ennemi 3. Vous l'avez vaincu comme tous les autres, et vous triomphez enfin de la goutte qui est plus formidable . Vous tendez une main protectrice du haut de votre génie à ma petite machine pensante : je serai assez hardi dans quelque temps pour mettre à vos pieds des lettres assez scientifiques, assez ridicules, que j'ai pris la liberté d'écrire à M. Paw sur ses Chinois, ses Egyptiens et ses Indiens 4.

 

La barbare aventure du général Lally, le désastre et les friponneries de notre Compagnie des Indes m'ont mis à portée de me faire instruire de bien des choses concernant l'Inde et les anciens brahmanes . Il m'a paru évident que notre sainte religion chrétienne est uniquement fondée sur l'antique religion de Brahma . Notre chute des anges qui a produit le diable qui a produit la damnation du genre humain, et la mort de Dieu pour une pomme, ne sont qu'une misérable et froide copie de l'ancienne théologie indienne . J'ose assurer que Votre Majesté trouvera la chose démontrée .

 

Je ne connais point M. Paw . Mes lettres sont d'un petit bénédictin tout différend de M. Pernetty 5. Je trouve ce M. Paw un très habile homme, plein d'esprit et d’imagination, un peu systématique à la vérité, mais avec lequel on peut s'amuser et s'instruire .

 

J'espère mettre dans un mois ou deux ce petit ouvrage de saint Benoît à vos pieds .

 

On me mande qu'on a imprimé à Berlin une traduction fort bonne d'Ammien Marcellin avec des notes instructives 6 ; comme cet Ammien Marcellin était contemporain du grand Julien, que nos misérables prêtres n'osent plus appeler apostat, souffrez, Sire, que je prenne une liberté avec celui auquel il n'a manqué, selon moi, pour être en tout très supérieur à ce Julien, que de faire à peu près ce qu'il fît 7, et que je n'ose pas dire .

 

Cette liberté est de supplier Votre Majesté d'ordonner qu'on m'envoie par les Michelet et Gérard un exemplaire de cet ouvrage . Je vous demande très humblement pardon de mon impudence : tout ce qui regarde ce Julien m'est précieux , mais vos bontés me le sont bien davantage .

 

Je me mets à vos pieds plus que jamais ; je me flatte qu'ils ne sont plus enflés du tout . »

 

1 Mot attribué à Posidonius lors d'une visite de Pompée ; http://www.cosmovisions.com/Posidonius.htm

voir lettre à Bertrand, pasteur, du 18 février 1756 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/18/l-optimisme-est-desesperant-c-est-une-philosophie-cruelle-so.html

2 Respectivement le Brandebourg et les territoires pris à la Pologne lors du partage .

3 En 1747, Frédéric l'en avait alors informé .

4 Lettres chinoises, indiennes et tartares, de V* présentées comme adressées à « M. Paw par un bénédictin » . http://books.google.com/books?id=8jIHAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

Sur Paw, voir lettre du 5 septembre 1774 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/05/24-jour-de-la-st-barthelemy-je-ne-sais-par-quelle-fatalite-s.html

5 Cornélius de Pauw avait publié en 1768-69 à Berlin des Recherches philosophiques sur les Américains, ou mémoires intéressant pour servir à l'histoire de l'espèce humaine ; une nouvelle édition avait paru en 1770 « augmentée d’une dissertation critique, par dom Pernety, et de la défense de l'auteur des Recherches contre cette dissertation ». http://www.archive.org/details/recherchesphilos17701pauw

6 Ammien Marcellin, ou les dix-huit livres de son histoire qui nous sont restés, traduits en français (par Guillaume de Moulines) , 1775. http://catalog.hathitrust.org/Record/008587933

7 Julien abjura le christianisme , il fut tolérant, mais devant l'attitude des chrétiens il alla jusqu'à leur interdire l'enseignement et les emplois civils et militaires .

faire encor de si beaux coups, Et d'être entre les deux genoux D'une coquine fraiche et belle .

Rédigé le 22 juillet 2011 pour parution le 21 décembre 2010

 

Dieu seul sait, et encore il n'en est pas sûr, ce qui se passa dans la chambre de Volti, une froide, -mais peut-être aussi torride,- journée de décembre 1772 ! Acceptons la version du principal intéressé . Un jour peut-être aurai-je aussi tous mes membres qui trembleront en compagnie d'une belle jeune femme ? Je fais des voeux pour ne pas m'évanouir .

 

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 http://melaniegribouillis.ultra-book.com/portfolio#imagin...

 

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

 

A Ferney, 21è décembre 1772

 

Quoi ! Toujours la cruelle envie

Poursuit ma réputation !

On dit qu'une nymphe jolie

Dans ma dernière maladie

M'a donné l'extrême-onction,

Et que j'emporte en l'autre vie

Ce peu de satisfaction ;

Voyez l'horrible calomnie !1

 

Seigneur, il n'appartient qu'à vous,

A votre jeunesse immortelle

De faire encor de si beaux coups,

Et d'être entre les deux genoux

D'une coquine fraiche et belle .

 

Je sens que je suis au tombeau.

Cet état me fait de la peine,

Mais il ne faut pas qu'un roseau

Vive aussi longtemps que le chêne.

 

Mon héros exige que je lui conte le fait, parce qu'il veut être instruit de ce que ses sujets jeunes et vieux font dans son empire . Je lui dirai donc comme devant mon Dieu que Mme Denis faisant les honneurs d'un grand dîner, je mangeais dans ma chambre un plat de légumes, ainsi que vous en usâtes quand vous honorâtes mon taudis de votre présence . Une belle demoiselle de la compagnie plus grande que Mme de Ménage 2 de deux doigts, plus jeune, plus étoffée, plus rebondie, vint me consoler . Les Genevois sont malins, et les calvinistes sont toujours bien aises de jeter le chat aux jambes des papistes, mais le fait est que cette auguste demoiselle me faisait trembler tous les membres, et que si je m'évanouis, c'était de crainte et de respect .

 

Je vous jure que j'aurais plutôt fait la scène de Sylla, de César et de Pompée 3 dont vous me parlez que je n'aurais fait un couplet avec cette belle personne . Depuis que j'ai des lettres de capucin 4, je mets toutes ces impostures au pied de mon crucifix, et je ne dis à personne : ouvrez le loquet .

 

Au reste je présume toujours que les princesses de la comédie sont partout sous vos lois ainsi que dans leurs lits, et que vous êtes toujours le maître des autres à table, au lit et à la guerre .

 

Comme je crois que vous l'êtes aussi au spectacle, j'ai rapetassé toute la Sophonisbe, et j'aurai l'honneur de vous en envoyer deux exemplaires, l'un pour vous, l'autre pour la Comédie . Je ne suis pas bien sûr que vos ports soient francs de Lyon à Paris ; je sais seulement qu'ils sont exorbitants . Je vous demande vos ordres pour savoir si je dois faire partir ce paquet sous votre nom ou celui de M. le duc d'Aiguillon .

 

Je suis bien sensible à toutes les peines que mon héros daigne prendre d'écarter les sifflets préparés pour Les Lois de Minos . A l'égard de Sylla, cette entreprise était aisée pour le père de La Rue 5 et est fort difficile pour moi . Je vous avoue que je baisse beaucoup quoi qu'en disent mes panégyristes et ceux de la belle demoiselle qu'on suppose avoir eu pour moi tant de bontés . Il me semble que le goût de ma chère nation est un peu changé ; et si vous me permettez de vous le dire , je crois qu'elle n'est pas plus digne d'entendre Sylla, Pompée et César, que je ne suis digne de les faire parler . Cependant , s'il me venait quelque idée heureuse, je l'emploierais bien vite pour vous faire ma cour, mais les idées viennent comme elles veulent . Ma plus chère idée serait de ne point mourir sans avoir la consolation de vous revoir encore ; je ne suis le maître ni de chasser cette idée ni de l'exécuter . Je suis bien sûr seulement que ma destinée est de vous être attaché jusqu'à la mort avec le plus tendre respect.

 

Le vieux malade de Ferney

à qui on fait trop d'honneur . »

 

 

 

1 La Correspondance littéraire parle des « étranges bruits qui ont couru sur la conduite du seigneur patriarche pendant le mois dernier », et rapporte le « conte » que l'on a « bâti », donne le nom de la demoiselle : Mlle de Saussure, parente de la nouvelle Mme de Florian,

(Mme Rilliet de Saussure)

et ajoute « M. le maréchal de Richelieu a voulu tenir la vérité des faits du prétendu coupable lui-même, en l'assurant que le roi voulait qu'il se ménageât davantage ».

V* écrit à Hennin le 20 janvier : « On m'a fait mille fois trop d'honneur . Cette belle calomnie a été jusqu’au roi »

Selon Du Pan : « On a presque autant parlé à Paris de l'aventure de V* que du détronement de sa Catau »

2 Rappel du fait que , comme le rappelle Du Pan , le maréchal « étant à Ferney … s'enferma pendant un grand diner avec Mme Ménage »

3 Le maréchal lui a demandé de corriger la fin du quatrième acte de sa Sophonisbe .

4 Il a été fait père temporel des capucins de Gex ; voir lettre à Choiseul du 18 février : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/02/23/le-dieu-d-israel-est-irrite-contre-les-enfants-de-jacob-qui.html

5Auteur d'une tragédie nommée Sylla «  remplie de … brailler et (de) raisonné », qu'on attribua à Corneille à la suite d'une erreur de lecture, comme le racontait V* à Richelieu le 2 décembre : page 106 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f111.image.r=.langFR

 

Je déteste les poules mouillées, et les âmes faibles

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Dédicace du XXIè siècle à l'insomniaque du XVIIIè :

http://www.deezer.com/listen-7928223

 

Continuons à prendre sans modération l'antidote à la morosité : Voltaire, et suivons ses conseils diététiques avec modération, tout comme lui : un demi-setier de bon vin par repas !

 En cette période où l'on parle plus de dinde et de chapon (l'eunuque, neuneu, qui va se faire dévorer puceau ! ),  n'oublions pas celle qui fit l'oeuf qui nous embrouille : La Poule :

http://www.deezer.com/listen-7928223

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise du Deffand

 

21è décembre 1768

 

Madame, Madame, les imaginations ne dorment point i, et quand même elles prendraient en se couchant une dose des oraisons funèbres de l'évêque du Puy ii et de l'évêque de Troyes iii, le diable les bercerait toujours. Quand la marâtre nature nous prive de la vue, elle peint les objets avec plus de force dans le cerveau . C'est ce que la coquine me fait éprouver. Je suis votre confrère des Quinze-Vingts dès que la neige est sur mon horizon de quatre-vingt lieues de tour. Le diable alors me berce beaucoup plus que dans d'autres saisons. Je n'ai trouvé à cela d'autre exorcisme de celui de boire ; je bois beaucoup, c'est-à-dire un demi-setier à chaque repas iv ; et je vous conseille d'en faire autant ; mais il faut que ce soit d'excellent vin. Personne de mon temps n'en avait de bon à Paris.

 

L'aventure du président Hénault est assurément bien singulière v. On s'est moqué de moi avec des Beloste et des Bélestat vi. On m'assure aujourd'hui que c'est un homme d'un très grand nom, et que vous connaissez vii. Je ne veux rien croire, ni même chercher à croire. L'abbé Boudot a eu la bonté de fureter à la bibliothèque du roi . Il en résulte qu'il est très vrai qu'aux premiers états de Blois dont vous ne vous souciez guère, on donna trois fois au parlement le titre d'états généraux au petit pied viii. Je ne pense point du tout que les parlements représentent les états généraux sur quelque pied que ce puisse être et quand même j'aurais acheté une charge de conseiller au parlement pour quarante mille francs, je ne me croirais point du tout partie des états généraux de France. Mais je ne veux point entrer dans cet discussion, et me brouiller avec tous les parlements du royaume, à moins que le roi ne me donne quatre ou cinq régiments à mes ordres. De toutes les facéties qui sont venues troubler mon repos dans ma retraite, celle-ci est la plus extraordinaire .

 

L'A.B.C. est un ancien ouvrage traduit de l'anglais, imprimé en 1762 ix. Cela est fier, profond, hardi. Cette lecture demande de l'attention. Il n'y a point de ministre, point d'évêque en deçà de la mer à qui cet A.B.C. puisse plaire. Cela est insolent, vous dis-je, pour les têtes françaises. Si vous voulez le lire, vous qui avez une tête de tout pays, j'en chercherai un exemplaire et je vous l'enverrai ; mais l'ouvrage a un pouce d'épaisseur. Si votre mère a ses ports francs comme votre beau-père x, je le lui adresserai pour vous .

 

Il faut que je vous conte ce qu'on ne sait pas à Paris. Le singe de Nicolet, qui demeure à Rome xi, s'est avisé de canoniser non seulement Mme de Chantal xii à qui St François de Sales avait fait deux enfants, mais il a canonisé un frère capucin nommé frère Cucufin d'Ascoli. J'ai vu le procès-verbal de la canonisation xiii. Il y est dit qu'il se plaisait fort à se faire donner des coups de pied dans le cul par humilité, et qu'il répandait exprès des œufs frais et de la bouillie sur sa barbe, afin que les profanes se moquassent de lui, et qu'il offrit à Dieu leurs railleries.

 

Railleries à part, il faut que Rezzonico soit un grand imbécile. Il ne sait pas encore que l'Europe entière rit de Rome comme de St Cucufin.

 

Je sais pourtant qu'il y a encore des Hottentots, même à Paris ; mais dans dix ans il n'y en aura plus, croyez moi sur parole . Quoiqu'il en soit, Madame, buvez, dormez, amusez-vous le moins mal que vous le pourrez, supportez la vie, ne craignez point la mort que Cicéron appelle la fin de toutes les douleurs ; Cicéron était un homme de fort bon sens. Je déteste les poules mouillées, et les âmes faibles . Il est trop honteux d'asservir son âme à la démence et à la bêtise de gens dont on n'aurait pas voulu pour ses palefreniers. Souvenons-nous des vers de l'abbé de Chaulieu :

Plus j'approche du terme et moins je le redoute.

Sur des principes sûrs mon esprit affermi,

Content, persuadé, ne connait plus le doute,

Des suites de ma fin je n'ai jamais frémi.xiv

 

Adieu, Madame, je baise vos mains avec mes lèvres fort plates ; et je vous serai attaché jusqu'à mon dernier moment. »

 

i Mme du Deffand s'est plainte d'insomnies dans sa lettre du 13 décembre et demanda « du Voltaire » pour les supporter.

 

ii Jean-Georges Lefranc de Pompignan, qui a prononcé l'oraison funèbre de la reine le 11 août 1768.

iii Mathias Poncet de La Rivière qui a prononcé entre autres l'oraison funèbre de Louise-Élisabeth de France, duchesse de Parme, le 12 février 1760.

iv Soit un peu moins d'un quart de litre.

v Voir les reproches faits à l'œuvre historique de Hénault dans l'Examen critique ... attribué à Bélestat et attribué à La Beaumelle par V* ; cf. lettres du 18 septembre à d'Argental, et du 26 octobre à Mme Denis. http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/18/d...

http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/26/m...

vi Le 28 novembre, à Marmontel , il dit « qu'il n'y a point de marquis de Bélestat » bien qu'il ait reçu de Montpellier deux lettres signées de ce nom. Il va recevoir une lettre datée du 20 décembre où le marquis revendique la paternité de l'ouvrage en spécifiant qu'il n'a pas à en rougir.

vii Le 13 décembre, Mme du Deffand lui demandait de citer le nom de l'auteur qu'il avait « découvert » après avoir parlé de « La Beaumelle, Beloste, Bélestat » et « détruire » ainsi les soupçons qui pesaient sur lui .

viii Cette affirmation que V* a remarquée dans l'Examen critique ..., était complétée de « qu'il est étrange qu'aucun historien n'ait parlé d'un fait si public. »

ix L'A.B.C., dialogue curieux traduit de l'anglais de M. Huet, daté 1762, en réalité de Genève 1768, de V*. http://www.voltaire-integral.com/Html/27/16_A-B-C.html

Et voir Note 26 page 286 : http://books.google.fr/books?id=MwHgAAAAMAAJ&pg=PA287...

x Duc et duchesse de Choiseul , cette dernière étant nommée le plus souvent comme « la grand-maman » dans les lettres à Mme du Deffand (qui en fait a quarante ans de plus que la duchesse).

xi Nicolet , directeur de la Comédie italienne, avait effectivement un singe savant, mais ici V* parle du pape Clément XIII, né Rezzonico.

xii Jeanne-Françoise Frémyot, baronne de Chantal, fondatrice avec saint François de Sales de l'ordre de la Visitation, canonisée en 1767 . http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_de_Chantal

http://home.infionline.net/~ddisse/chantal.html

xiii Cf. sa Canonisation de saint Cucufin. http://www.voltaire-integral.com/Html/27/19_Cucufin.html

xiv Le dernier vers est réellement : « Je ne suis libertin, ni dévot à demi . », premier quatrain de la deuxième des Trois Façons de penser sur la mort .Page 12 : http://books.google.fr/books?id=zpw-AAAAYAAJ&pg=PA3&a...

 

20/12/2010

Les Juifs ont toujours aimé l’Égypte quoi qu'on dise dans leur impertinente histoire

 Rédigé le 22 juillet 2011 pour parution le 20 décembre 2010

 

Les Juifs peut-être, mais de nos jours les Juifs Israeliens restent bloqués par une politique de rejet, un toujours immense appétit de gain, un terrible compexe de supériorité de soi-disant peuple élu ; je suis certain que le jour du vote , ils ont fait, comme en Corse, voter les morts , et pour augmenter leurs chances, éliminé la concurrence . Peuple élu, laissez-moi rire ...

 

 

kien long.jpg

Kien Long ne respire pas la joie de vivre ! Non ?

 

 

« A Frédéric II , roi de Prusse

 

20 décembre 1770

 

Sire,

En vérité ce roi de la Chine écrit de jolies lettres 1. Mon Dieu comme son style s'est perfectionné depuis son Éloge de Moukden !2 qu'il rend bien justice à ce saint flibustier juif nommé David, et à nos badauds de Paris ! Je soupçonne sa majesté Kienlong de n'avoir chez lui aucun mandarin qui l'entende, et de chanter comme Orphée devant de beaux lions, de courageux léopards, des loups bien disciplinés, des faucons bien dressés . J'allai autrefois à la cour du roi, je fus émerveillé de son armée mais cent fois plus de sa personne et je vous avoue, Sire, que je n'ai jamais fait de soupers plus agréables que ceux où Kienlong le Grand daignait m'admettre . Je vous jure que je prenais la liberté de l’aimer autant qu'il me forçait à l'admirer, et sans un Lapon 3 qui me calomnia je n'aurais jamais imaginé d'autre bonheur que de rester à Pékin .

 

Il est vrai que j'ai fait une très grande fortune dans l'Occident et quoique un abbé Terray m'en ait escamoté la plus grande partie 4(ce qui ne me serait point arrivé à Pékin) il m'en reste assez pour être plus heureux que je ne mérite . Cependant je regrette toujours Kienlong que je regarde comme le plus grand homme des deux hémisphères .

 

Comme il parle parfaitement le français (qu'il n'a pourtant point appris de révérends pères jésuites 5), comme il écrit dans cette langue avec plus de grâces et d'énergie que les trois quarts de nos académiciens, j'ai pris la liberté de lui adresser par le coche trois livres nouveaux 6, avec cette adresse : au Roi ; car il n'y en a pas deux à ce qu'on dit, et on parlera peu du sultan et du mogol d'aujourd'hui . On a écrit sur l'adresse : pour être mis à la poste dès que le paquet sera dans ses États . C'est un tribut payé à la bibliothèque du Sans-Souci de la Chine . Je ne crois pas ce tribut digne de Sa Majesté, mais c'est la cuisse de cigale que ne dédaigna pas le grand Y ha o.7

 

Sa Majesté est voisine de ma grande souveraine russe . Je suis toujours fâché qu'ils n' aient pu s'ajuster pour donner congé à Moustapha . Je suis encore dans l'erreur sur Ali Beg . Elle-même y est aussi 8. Pourquoi n'a-t-elle pas envoyé quelque Juif sur les lieux s'informer de la vérité ? Les Juifs ont toujours aimé l’Égypte quoi qu'on dise dans leur impertinente histoire .

 

Je savais très bien ce que faisaient des ingénieurs sans génie, et j'en étais très affligé 9. Je trouve tout cela aussi mal entendu que les croisades . Il me semble qu'on pouvait s'entendre ; et qu'il y avait de beaux coups à faire .

 

J'ai bien peur que les Welches et même les Ibères n'échouent 10. Leurs entreprises depuis longtemps n'ont abouti qu'à nous ruiner .

 

Je frappe trois fois la terre de mon front devant votre trône du Pegu, voisin du trône de la Chine . »


Le 4 décembre, par plaisanterie, Frédéric lui écrit « qu'un vaisseau revenu de la Chine … lui a apporté une lettre en vers de l'empereur » Kienlong qu'il a fait traduire, et il lui a envoyé ses Vers de l'empereur de la Chine. V* écrit le lendemain à d'Alembert : « Frédéric a écrit des vers à faire mourir de rire de la part du roi de la Chine ».

2 Éloge de la ville de Moukden et de ses environs …, de Kien Long ; voir les lettres à Catherine II du 26 novembre :26/11/2010

à Thieriot du 26 novembre : 25/11/2010

à Mme d'Argental du 7 décembre : 9/12/2008

3 Maupertuis qui a fait une expédition scientifique en Laponie, s'est fait peindre en Lapon, et fut une des causes du départ de Prusse de V*.Voir la fameuse Diatribe du docteur Akakia .

4 L'argent des rescriptions.

5 Rapport au fait que Frédéric a accueilli des jésuites chassés d'autres États ; voir lettre du 27 avril 1770 à Frédéric : 15/4/2011

6 Trois volumes des Questions sur l'Encyclopédie .

7 Dans la Philosophie de l'histoire, V* écrit que « I ha o » est le nom le plus sacré des Égyptiens, emprunté ensuite par les hébreux pour désigner Jéhovah .

8 Le 22 décembre, V* écrit à Catherine : « Le roi de Prusse prétend qu'Ali Beg (Ali Bey) n'est point du tout roi d’Égypte ».

9 On avait envoyé des ingénieurs français avec le baron de Tott pour renforcer les défenses turques de Constantinople, ce que Frédéric signalait à V* le 4 décembre .

10 L’Angleterre réclamait à l'Espagne (qui cèdera en 1771) les iles Falkland que la France lui avait cédées en 1767 . Des rumeurs de guerre avec l'Angleterre circulaient .

 

Continuez, sœurs aimables, à me parler de cuisse . Cela console les vieux malheureux

Note rédigée le 27 juillet 2011 pour parution le 20 décembre 2010 .

 

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 Emue, peut-être par la vue d'autres cuisses remarquables (plus que les miennes, c'est sur !) à voir ci-après ...

 

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

et à

Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine

 

Colmar 20 décembre [1753]

 

Mesdames mes deux nièces, je reçois vos consolantes lettres qui m'apprennent que le mal de Mme Denis est sans danger, et qui me font supporter tous les miens . Que Dieu le rende aux deux sœurs de m'avoir écrit en même temps . Mon pied deviendra ce qu'il pourra, mais que la cuisse dont il s'agit se désenfle 1. Continuez, sœurs aimables, à me parler de cuisse . Cela console les vieux malheureux .

 

Cette prétendue Histoire universelle jusqu'à Charles Quint, qui est poussée jusqu'à notre Charles VII, cette sottise si sottement imprimée est un des effets du lutin qui préside à ma destinée . Le roi de Prusse est fait de toute façon pour me persécuter . Ce manuscrit très incorrect qu'il avait à la bataille de Sore tomba avec tous son bagage dans les mains des houzards du prince Charles 2. Un valet de chambre de ce prince l'a vendu à un faquin de libraire de Hollande 3, et je crois que ce sont les houzards qui ont conduit l'impression . Je tremble plus que jamais pour Jeanne 4 et pour sa cuisse et gorge nue .

 

Franchement je ne sais pas comment tout ceci finira, et je crains de finir aussi tristement que j'ai vécu .

 

Je crois être bien instruit que Cernin 5 a écrit à ce pauvre Ericard . Le pauvre homme, le sot qu'Ericard !6 C'est un plat personnage . En avez-vous des nouvelles ? Comment va son tripot ?

 

Je suis actuellement occupé à rédiger , à mettre en ordre des lettres à une certaine Mme Daurade 7. C'est un manuscrit du XVIè siècle qu'un fureteur m'a confié ; on peut faire de ce rogaton un ouvrage dans le goût de Paméla, une espèce d'histoire intéressante et suivie qui sera curieuse pour le XIXè siècle 8.

 

Pour ce siècle où nous vivons, il me paraît un tant soit peu absurde, et méprisable . Je le quitterai bientôt . Les frais en sont faits . Je me regarde comme un homme déjà mort . Je ne m'aperçois que je suis en vie, ma chère enfant, qu'à ma tendresse pour vous .

 

Pied pourri vous embrasse de tout son cœur . Votre frère 9 s'est avisé de m'écrire de Nantes où je cois qu'il court des bénéfices et des filles.

 

Adieu, je ne suis pas en état de courir .

 

V. »

 

1 Celle de Mme Denis .

3 Jean Néaulme . Bien que ce libraire « qui a une boutique à Berlin comme à La Haye jure qu'il a acheté le manuscrit d'un valet du prince Charles », V* soupçonnera Frédéric ; le 25 décembre 1753, V* dit « que le roi de Prusse a donné à ce libraire le second manuscrit que je lui avais confié, et qu'il l'a fait dans le dessein de me perdre en France et de me forcer à recourir à lui ».

Le 30 décembre à Richelieu : « On m'assure que le prince Charles rendit au roi de Prusse … jusqu'à son chien . Il me demanda depuis un nouvel exemplaire . Je lui en donnai un plus correct et plus ample . Il a gardé celui-là . Son libraire Jean Néaulme a imprimé l'autre . »; page 102 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f106.image.r=.langFR

Après avoir lu cet Abrégé de l'histoire universelle … , il écrira le 13 janvier 1754 à Walther : « C'est un … manuscrit … que j'avais pris la liberté de donner au roi de Prusse sur la fin de 1739 » ; page 102 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f106.image.r=.langFR

Le roi lui écrira le 18 mars qu'il se trompe  car il a encore le manuscrit confié par V* et celui-ci doit être tranquille sur tout ce qu'il lui a confié . 

Voir aussi lettre à Néaulme du 28 décembre 1753 : page 100 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f104.image.r=.langFR

4Des fragments de La Pucelle se trouvaient à Sohr avec l'Histoire universelle dans la « cassette grise-rouge de l'avare » écrit V* à d'Argental le 21 ; page 99 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f103.image.r=.langFR

5 Frédéric II.

6 Louis XV.

7 Mme Denis ; voir lettres précédentes .

8 C'est l’œuvre vengeresse, les lettres de Prusse à Mme Denis réécrites, à publier après sa mort, ou alors l'ébauche du conte Les Lettres d'Amabed, où il est question de l'Inquisition , de femme incarcéré et violée, et qui est censé être la transcription d'un manuscrit du XVIè siècle . Le 9 janvier 1754, V* donnera des précisions qui peuvent s'appliquer à l'un ou l'autre hypothèse : «  … de ces occupations la plus agréable et la plus chère a été de mettre en ordre nos lettres, de les ajuster, et d'en faire un recueil qui compose une histoire suivie, assez variée et assez intéressante . Elles sont naïves, c'est comme Paméla une histoire en lettres ; il n'y a point d'humeur, cela fourmille d'anecdotes . Tout est dans la plus exacte vérité . Une cinquantaine de lettre composent le recueil . Cernin n'y gagnera pas, et la postérité jugera . »

9 L'abbé Mignot.

 

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« A Marguerite-Madeleine du Moutier, marquise de Bernières

[Mme la présidente de Bernières à Rouen]

 

Ce 20 [décembre 1723]

 

Je reçus votre dernière lettre hier 19, et je me hâte de vous répondre, ne trouvant point de plus grand plaisir que de vous parler des obligations que je vous ai ; vous qui n'avez point d'enfants vous ne savez pas ce que c'est que la tendresse paternelle et vous n'imaginez point quel effet font sur moi les bontés que vous avez pour mon petit Henri i. Cependant l'amour que j'ai pour lui ne m'aveugle pas au point de prétendre qu'il vienne à Paris dans un char trainé par six chevaux ; un ou deux bidets avec des bâts et des paniers suffisent pour mon fils, mais apparemment que votre fourgon vous apporte des meubles et que Henri sera confondu dans votre équipage . En ce cas, je consens qu'il profite de cette voiture, mais je ne veux point du tout qu'on fasse ces frais uniquement pour ce marmouset. Je vous recommande très instamment de le faire partir avec plus de modestie, et moins de dépense. Martel ii est surtout inutile pour conduire ce petit garçon. Je vous ai déjà mandé, par ma dernière lettre que vous eussiez la bonté d'empêcher qu'on ne lui fit ses deux mille habits iii; ainsi il sera prêt à partir avec vous et il pourra vous suivre dans votre marche avec deux chevaux de bât qui marcheront derrière votre carrosse et qui vous quitteront à Boulogne où il faudra que mon bâtard s'arrête. Ayez la bonté, je vous en supplie, de me faire savoir avec votre exactitude ordinaire si vous avez donné vos ordres au sujet de tous les articles dont je vous ai parlé dans ma dernière lettre iv; il n'y a pas un moment de temps à perdre, le jour de votre départ s'avance et je crois que vous ne reculerez pas . Je n'aurai jamais en ma vie de si bonnes étrennes que celles que me prépare votre arrivée pour le jour de l'an.

 

Je vous prie de me mander si vous pourrez me prêter pour quelques mois un lit et quelques fauteuils v, car je vais vendre tous mes meubles cette semaine pour payer des dettes pressantes que j'ai vi, aimant bien mieux n'avoir point de lit que d'avoir des créanciers . Faites, je vous prie, bien mes compliments à M. de Bernières et aux personnes qui sont chez vous. Thiriot ne vous écrit point cet ordinaire parce qu'il est auprès de son père à qui on administre le sacrement de l'extrême-onction. »

 

i   La Henriade ou La Ligue ou Henri le Grand. V* a renoncé à l'édition de luxe conçue en Hollande et a proposé aux souscripteurs de les rembourser. Chez Mme de Bernières il a fait connaissance d'un imprimeur rouennais, Abraham Viret qui accepta fin mars de faire une édition clandestine et en octobre quatre mille exemplaires sont imprimés. http://wapedia.mobi/fr/La_Henriade http://www.voltaire-integral.com/Html/08/02_Beuchot_H.html http://books.google.be/books?id=zDqwv-eTdBAC&pg=PR5&a...

http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Henriade

 

 

 

 

ii   C'est un homme de confiance qui dissimule à Rouen ou environs deux mille exemplaires en feuilles et deux mille brochés.

 

iii   Deux mille reliures de plus .

 

iv   Quatre recommandations : donner à un homme sûr la lettre envoyée pour Boulogne et en accuser réception ; informer V* du jour de départ et d'arrivée à Boulogne ; demander à Viret un mémoire de ce qu'il a reçu de V* ; dire à martel qu'il ne veut que deux mille reliures, qui valent 50 livres tournois, et que s'il en fait davantage il paiera le surplus .

 

v  V* ira s'installer quelque temps rue de Beaune chez le marquis et la marquise de Bernières à qui il loue un appartement.

 

vi  V* a eu la variole, a failli en mourir et les soins lui ont coûté fort cher et il a aussi dû faire des avances pour l'impression de La Henriade. Récit de sa maladie page 61, lettre au baron de Breteuil janvier 1724 : http://books.google.fr/books?id=3RJEAAAAYAAJ&pg=PA61&...

 

 Et pour moi et quelques archer(e)s du club, en ce jour, nous chantons : http://www.deezer.com/listen-4615381

 

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si je voulais transcrire les paroles favorables que vous m'avez écrites pour Bing,

 Note rédigée le 25 juillet 2011 pour parution le 20 décembre 2010.

 

 

« A Louis François Armand du Plessis, duc de Richelieu

 

Aux Délices près de Genève

20 décembre [1756]

 

Je suis honteux, Monseigneur, d'importuner mon héros 1, qui a bien autre chose à faire qu'à lire mes lettres . Mais je ne demande qu'un mot de réponse pour le fatras ci -dessous .

 

1° Un Anglais 2 vint chez moi ces jours passés se lamenter du sort de l'amiral Bing 3 dont il est ami . Je lui dis que vous m'aviez fait l'honneur de me mander que ce marin n'était point dans son tort et qu’il avait fait ce qu'il avait pu . Il répondit que ce seul mot de vous pourrait le justifier, que vous aviez fait la fortune de Blackney par l'estime dont vous l'avez publiquement honoré, et que si je voulais transcrire les paroles favorables que vous m'avez écrites pour Bing, il les enverrait en Angleterre . Je vous en demande la permission . Je ne veux et je ne dois rien faire sans votre aveu .

 

Voilà pour le vainqueur de Mahon .

 

Voici une autre requête pour le 1er gentilhomme de la chambre, c'est qu’il ait la bonté d'ordonner qu'on joue Rome sauvée à la cour cet hiver sous sa dictature . La Noue quitte à Pâques, et M. d'Argental prétend que cette faveur de votre part est de la dernière importance .

 

Ce tendre d'Argental me mande qu'il a poussé bien plus loin ses sollicitations . Mais ce serait étrangement abuser de vos bontés qu'il ne faut certainement pas hasarder en ce temps-ci 4. J'apprends que La Beaumelle avant de faire pénitence 5 avait apporté une édition de La Pucelle où il a fourré un millier de vers de sa façon, qu'on la vend publiquement 6, qu'elle est remplie d'atrocités contre les personnes les plus respectables, et que c'est l'ouvrage le plus criminel qu'on ait jamais fait en aucune langue . On donne cette horreur sous mon nom . Elle est si maladroite qu'il y a dans l'ouvrage deux endroits assez piquants contre moi-même . Il y a bien des choses dignes des halles . Mais il suffira d'un dévot pour m’attribuer cette infamie . Je crois que c’est un torrent qu'il faut laisser passer . La vérité perce à la longue . Mais il faut du temps et de la patience .

 

Vous en avez beaucoup de lire mes lettres au milieu de vos occupations . Votre nouvel hôtel, la Guyenne, l'année d'exercice !7 vous ne devez pas avoir du temps de reste . J'en abuse, je vous en demande pardon ; j'ose attendre deux petits mots . Je vous renouvelle mon tendre respect et Mme Denis se joint à moi .

 

V.

 

Il y a des choses affreuses contre le roi dans l'abominable ouvrage de La Beaumelle et de ses associés ; et on laisse vendre dans Paris de telles horreurs qui sont des crimes de lèse-majesté ! »

2 Thomas Pitt, frère de William Pitt le nouveau premier ministre anglais . V* avait mentionné sa présence le 8 : page 403 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f407.image.r=.langFR

3 Byng, qui commandait l'escadre anglaise envoyée au secours de la garnison de Minorque, fut considéré comme responsable de la défaite, relevé de son commandement dès la prise de Mahon par Richelieu, et incarcéré .

4Il s'agit toujours d'interventions en faveur du retour de V* ( voir lettre à Richelieu du 10 octobre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/09/69aa3a4200e7571393e5028d3b2d4248.html

et à d'Argental du 20 septembre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/17/le-reste-du-jour-est-necessairement-donne-aux-processions-de.html)

Le bruit en court et V* enverra un démenti à la duchesse de Lutzelbourg le 27 décembre : page 410 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80033k/f414.image.r=.langFR

5 A savoir , avant d'être enfermé à la Bastille .

6 Edition débitée à Paris en août, et V* l'apprend en octobre .

7 Richelieu est devenu gouverneur de Guyenne et c'est aussi son tour de diriger le Théâtre en 1757, comme premier gentilhomme de la chambre en service .