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31/01/2011

je ne m'attendais pas que je serai encore en vie en 1760, et que j'aurais soin de la vie des autres

 

 

 

 

« A Monsieur le docteur Théodore Tronchin

à Genève

 

[janvier 1760]

 

Les maladies continuent dans les campagnes, ce sont des fièvres doubles, tierces ou continues avec redoublement 1. Plusieurs malades sont attaqués d'un flux de sang, sont fort agités, et ont beaucoup d'inquiétude dans les jambes . Le domestique qui m'est mort aux Délices, et qui avait éprouvé tous ces symptômes commença, dès qu'il se sentit attaqué, par s'aller faire saigner à Genève, sans consulter personne, prit beaucoup de quinquina et augmenta beaucoup son mal. Un de ses frères, fermier dans le pays, lui amena un médecin fort fameux du village de Chêne 2. Cet illustre médecin qui, je crois, ne sais pas lire, a fait languir le malade tout le moins qu'il a pu.

 

J'ai traité le jeune garçon dont je prends soin en suivant de point en point les ordres de Monsieur Tronchin. Il est dans la convalescence; je traiterai de même les fièvres qui ne sont pas accompagnées de flux de sang, mais pour ces dernières qui courent aussi dans Genève, et dont Monsieur Tronchin a connu le caractère, pourrait-il avoir la bonté de me prescrire une méthode générale que je tâcherai de proportionner aux différents tempéraments, en donnant , par exemple, des doses plus fortes aux tempéraments plus robustes ?

 

Notre pays de Gex n'est pas assez peuplé pour y tuer nos laboureurs et nos vignerons.

 

Mon cher docteur, quand je vins ici je ne m'attendais pas que je serai encore en vie en 1760, et que j'aurais soin de la vie des autres . Vous avez raison de dire que la vie qui reste aux Français est bien malheureuse . On les a traités comme le médecin de Chêne a traité mon domestique. N'êtes-vous pas dans le cas de souffrir beaucoup des remèdes de nos ministres ? n'avez-vous pas une suppression d'annuités et de billets ? J'ai peur que le mal ne soit incurable.

 

A dimanche. »

1 Fièvres diverses : page 12 et suivantes : http://books.google.be/books?id=rCQ-AAAAcAAJ&pg=RA8-P...

 

2 Village en banlieue Est de Genève.

30/01/2011

je n'ai jamais jusqu'à présent fait errer ainsi des femmes et des filles .

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

envoyé de Parme, etc. en son hôtel, quai d'Orsay à Paris

 

30è janv[ier] 1773 à F[erney]

 

C'était Paris, et non pas Lausanne i qu'il fallait craindre mon cher ange. Il y a huit ou dix jours qu'un fripon de libraire nommé Valade débite impunément une édition des Lois de Minos ii.

 

Il faut avouer que la pièce n'est pas tout entière de moi. On y trouve entre autres une mère et une fille errantes dans tes bras ; et je n'ai jamais jusqu'à présent fait errer ainsi des femmes et des filles .

 

Les autres vers qu'on iii a substitués aux miens sont aussi mauvais que si je les avais faits moi-même . On a ôté

 

Respectons plus Minos – aimons plus la justice.

 

qui n'était pas si mauvais, pour mettre à la place quelque chose d'assez commun , et qui énerve toute la force du dialogue . Je n'ai pas eu le courage de lire le reste. J'écris à M. de Sartines iv, pour le prier de mettre un frein à ces friponneries qui sont trop communes. Vous pourriez très aisément savoir comment Valade est parvenu à s'emparer d'une copie de la pièce, soit de celle qui était entre vos mains v, soit de celle de M. de Thibouville, soit de celle de Lekain.

 

Voilà un accident dont je ne me consolerai guère . Ceci est la fable de la laitière et du pot au lait. J'avais imaginé qu'on jouerait cette pièce à la cour ; qu'on me saurait gré d'avoir peint le roi de Suède vi, quoique Brizard ne lui ressemble point du tout ; qu'enfin j'aurais la consolation de vous voir vii. Mon pot au lait est renversé . Il faut abandonner Minos à Fréron, et attendre un temps plus favorable.

 

Un malheur ne vient jamais seul ; j'en essuie de plus d'une façon. C'est la destinée de notre pauvre nature humaine.

 

La poste qui va partir m'empêche d'écrire à monsieur de Thibouville ; je vous prie de lui communiquer ma lettre .

 

Bonsoir, mon cher ange, je mourrai donc sans vous revoir !

 

V. »

 

 

i V* avait « craint » le libraire Grasset de Lausanne , frère du Grasset qui travaillait pour Cramer à Genève ; il écrivit à d'Argental le 4 janvier «  le Grasset de Genève a probablement envoyé à son frère à Lausanne ... » Voir Page 130 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f135.image.p...

 

 

ii « Valade la débite publiquement sous les titre Les Lois de Minos ou Astérie, tragédie en cinq actes par M. de Voltaire, à Genève et se trouve à Paris chez Valade rue saint Jacques » écrira V* à Cramer.

 

 

 

iii « On » = MM. D'Argental et de Thibouville sans doute ; cf. lettre à Richelieu du 1er février : « Vous me faisiez beaucoup d'honneur de joindre vos vers aux miens ; mais en vérité vous deviez m'en avertir . L'art des vers est plus difficile qu'on ne pense. » Page 147 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800416/f152.image.p...

 

iv De Sartines lieutenant général de police ; dans sa lettre du 1er février à d'Argental : « ... il est certain que M. de Sartines aurait puni le vol de Valade et confisqué sa marchandise, si on lui avait dit un mot. Je lui ai écrit ... »

 

v Dans sa lettre du 1er février à d'Argental : « L'imprimé est certainement d'après le manuscrit qui était chez vous . J'en juge par ce vers : « tout pouvoir a son terme » Vous avez voulu absolument terme au lieu de borne... »

 

vi Voir la lettre à d'Alembert du 13 novembre 1772 pour le sens des Lois de Minos : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/11/12/j...

 

vii Voir par exemple la lettre à Richelieu du 1er février au sujet de ce voyage envisagé à Paris pour la représentation.


29/01/2011

Vous savez que je dis toujours ce que je pense.

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« A Pierre Lullin

 

[30 janvier 1766]

 

Vous verrez, monsieur, que je dois être plus content de la lettre de M. Freudenreik 1 que de la vôtre 2. J'envoie à Paris la copie dont j'ai l'honneur de vous dépêcher la minute . Je ne m'ingère point dans les affaires qui ne me regardent pas, mais je dois repousser les calomnies qui m'offensent et qui outragent vos seigneurs autant que moi-même.

 

Si dans les premiers moments on m'avait aidé à détruire ces bruits dangereux qui ont irrité tant de citoyens, vous ne seriez pas où vous en êtes. On se conduisit alors très mal, et on me devait plus d'égards. Vous savez que je dis toujours ce que je pense.

 

Votre très humble et très obéissant serviteur.

 

V. »

 

1 Voir lettre du même jour au même : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/01/30/5...

Pierre Lullin, futur premier syndic de Genève,est conseiller au Petit Conseil et secrétaire d'Etat, V* le reçut à Ferney.

Voir aussi page 62 : http://www.archivesfamillepictet.ch/bibliographie/documen...

2 Lullin a écrit le 29 : «  ... Mesgrs ont été étrangement surpris de l'imputation. ... Cette calomnie retomberait plutôt sur eux que sur vous ; et leur intégrité est trop connue pour qu'on puisse croire qu'aucun particulier influe jamais sur leurs jugements. D'aileurs ... vous connaissez mieux que personne ce qu'exige la bienséance, qui ne vous aurait jamais permis de vous ingérer dans une affaire qui vous est entièrement étrangère. »

Voir lettre D13141 page 62, et suivantes : http://www.archivesfamillepictet.ch/bibliographie/documen...

28/01/2011

On est tenté de se faire débaptiser quand on lit les Saint Barthélémy, les massacres d'Irlande, et l'histoire des Calas

Un cauchemar trop vrai , la nuit de la St Barthélémy :

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Bien sur, il y a les guerres d'Irlande ...

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Et l'injustice , omniprésente :

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fonts baptisamaux st bathélémy liège 800px-Renier_de_Huy_JPG01.jpg

Fonts baptismaux du XIIè siècle qui réunissent ce paradoxe de se trouver dans l'abbatiale St Bathélémy et où l'on voit, entre autres, ici le baptème de Corneille ( ancien romain qui a peu à voir avec Pierre ! ). Volti aurait pu les voir s'il avait été punaise de sacristie croisé grenouille de bénitier.

 

 

 

 

 

 

 

« A Paul-Claude Moultou

 

[27 janvier 1763 ?]

 

Voici, Monsieur, un mémoire qu'on m'envoie 1; il avait été fait à Toulouse , il y très longtemps . Je suis bien fâché que les avocats de Paris ne l'aient pas connu ; il y a des choses bien essentielles dont ils auraient fait usage . Votre indignation et votre pitié redoubleront, s'il se peut, à la lecture de ce mémoire . On est tenté de se faire débaptiser quand on lit les Saint Barthélémy, les massacres d'Irlande, et l'histoire des Calas. On aurait du moins de bonnes raisons de se décatholiciser.

 

Je vous renvoie la lettre de votre ami, qui me parait faire fort peu de cas de l'arithmétique.

 

Je vous supplie , Monsieur, de vouloir bien envoyer le mémoire Calas à M. Debrus 2, quand vous l'aurez lu. Vous savez que l'affaire ne sera rapportée 3 que le 8 février. Je ne dormirai point la nuit du 7 au 8. Mon Dieu, que d'abominations !

 

Je prends la liberté de vous embrasser de tout mon cœur. »

 

1 Il s'agit d'un mémoire « que M. de Lavaysse a envoyé » écrit V* à Debrus . François-Alexandre Gaubert Lavaysse, fils de l'avocat toulousain David Lavaysse, était chez les Calas le soir où Marc-Antoine Calas fut retrouvé pendu.

2 Philippe Debrus, avocat et négociant à Genève.

3 Au Conseil du roi.

27/01/2011

Tout ce qu'on pourra faire sera d'éclairer peu à peu la jeunesse qui peut avoir un jour quelque part dans le gouvernement, et de lui inspirer insensiblement des maximes plus saines et plus tolérantes

Je ne résiste pas au plaisir de faire paraitre cette lettre de Volti qui montre ses idées de progrès pour un meilleur monde, et lui, agé de 82 ans qui voit, encore une fois, cet avenir aux mains de jeunes bien formés .

Depuis le XVIIIè siècle, qu'en est-il de ces idées généreuses ?

Faut-il en arriver à la révolte/révolution des jeunes ?

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"Il faut bien lui laisser le plaisir de se faire valoir." , petite citation que je réserve ce jour à un petit nerveux en costume sombre qui veut faire la leçon à d'autres gugusses dans la même tenue , tout ça pour qu'on vote à nouveau , -ce qu'à Dieu ne plaise-, pour le garder cinq ans de plus !

Ici, je suis particulièrement injuste, je l'avoue, car cette phrase est applicable à tant de nos hommes/femmes politiques dont je vous laisse le libre choix , et à ceux qui s'amusent au petit jeu des amendements juste pour prouver qu'ils existent (tant à droite qu'à gauche ),et à ceux qui lancent des grèves liberticides et crétines (scieurs de branches sur lesquelles ils sont assis ). Privilèges de nantis !


 

 

« A Marie-Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet

 

27è janvier 1776

 

Votre lettre du 16 janvier, mon cher et respectable philosophe, est arrivée saine et sauve, et vous pouvez écrire en toute assurance à ce vieux malade qui vous sera tendrement attaché jusqu'à sa mort.

 

Je me doutais bien que le prétendu refroidissement entre deux grands hommes i, faits pour s'aimer, était une de ces absurdes calomnies dont votre ville de Paris est continuellement inondée. Une nouvelle plus vraie me désole, c'est la goutte et la fièvre du meilleur ministre des Finances que jamais la France ait eu ii. Je suis tombé dans le malheureux contretemps de lui envoyer un long mémoire en qualité de commissionnaire de nos petits États iii. Je ne pouvais deviner qu'un accès de goutte le mit au lit, dans le même temps que je lui écrivais. Je l'avais prié de me faire réponse par M. Dupont iv en marge de mon mémoire, et si vous voyez M. Dupont je vous serai très obligé de vouloir bien lui en dire un mot.

 

Je ne crains point la compagnie du métier de saint Matthieu, que vous appelez la canaille du sel v, notre grand ministre nous en a délivrés pour nos étrennes vi, et probablement pour jamais. Sa déclaration est enfin enregistrée au parlement de Dijon. Ce parlement s'est réservé de faire des remontrances ; mais elles seront peu importantes et assez inutiles . Il faut bien lui laisser le plaisir de se faire valoir.

 

Les deux canailles vii dont vous me parlez, me font toujours trembler . J'ai été trop heureux de tirer d'Etallonde des griffes de l'une viii; mais je vois avec douleur qu'on ne pourra jamais ôter à l'autre le droit de faire du mal, surtout quand ces deux canailles sont jointes ensemble pour nuire au genre humain. Vous avez bien vu par l'aventure arrivée à La Harpe combien cette réunion est à craindre ix.

 

Je vous conjure encore une fois de ne pas souffrir qu'aucun de vos amis x se donne le funeste plaisir de m'imputer des ouvrages qui m'exposent à la fureur de ces persécuteurs éternels. Soyez très sur que le ministère n'oserait jamais soutenir un homme qui serait poursuivi par eux . Vous avez vu que M. Turgot lui-même n'a pu, ni voulu, défendre dans le Conseil un petit ouvrage qui était uniquement à sa gloire xi, et qu'il a laissé condamner M. de La Harpe pour avoir loué cet ouvrage dans le Mercure.

 

Il y a une autre canaille à laquelle on sacrifie tout ; et cette canaille est le peuple . C'est elle, il est vrai, que les trois autres réduisent à la mendicité, mais c'est pour elle qu'on va à la messe, à vêpres et au salut ; c'est pour elle qu'on rend le pain bénit ; c'est pour elle qu'on a condamné le chevalier de La Barre et d'Etallonde au supplice des parricides . On voudra toujours mener cette canaille par le licou qu'elle s'est donnée elle-même. C'est pour elle qu'on touchera toujours les écrouelles xii, c'est pour elle même qu'on laissera subsister les moines qui dévorent sa substance. Nous ne pourrons jamais détruire les abus qu'on a le malheur de croire nécessaires au maintien des États, et qui gouvernent presque toute l'Europe. Ces abus sont le patrimoine de tant d'hommes puissants qu'ils sont regardés comme des lois fondamentales . Presque tous les princes sont élevés dans un profond respect pour ces abus. Leurs nourrices et leurs précepteurs leur mettent à la bouche le même frein que le cordelier et le récollet mettent à la gueule du charbonnier et de la blanchisseuse. Tout ce qu'on pourra faire sera d'éclairer peu à peu la jeunesse qui peut avoir un jour quelque part dans le gouvernement, et de lui inspirer insensiblement des maximes plus saines et plus tolérantes. Ne nous refroidissons point, mais ne nous exposons pas . Songez que les premiers chrétiens mêmes laissaient mourir leurs martyrs . Soyez sûr qu'on soupait gaiement dans Carthage le jour qu'on avait pendu saint Cyprien.

 

Vous me parlez des esclaves de Franche-Comté xiii. Je vous assure que ces esclaves ne feraient pas la guerre de Spartacus pour sauver un philosophe. Cependant, il faut les secourir puisqu'ils sont hommes . J'attends le moment favorable pour faire présenter une requête à M. Turgot, et à M. de Malesherbes xiv. Nous avons retrouvé un édit minuté sous Louis XIV par le premier président Lamoignon, bisaïeul de M. de Malesherbes : cet édit abolissait la mainmorte pour tout le royaume, selon les vues de saint Louis, de Louis Hutin, et de plusieurs de nos rois . L'accomplissement d'un tel ouvrage serait bien digne du gouvernement présent. Je ne doute pas que vous n'en parliez à ces deux dignes ministres , avec votre éloquence de la vertu, quand cette requête sera envoyée dans un temps favorable.

 

J'attends les nouveaux ouvrages de M. Turgot xv, contre lesquels on se déchaîne sans les connaître . Il ne faut courir ni deux lièvres, ni deux édits à la fois.

 

Je vous embrasse tendrement, vous et votre digne ami M. d'Alembert . Je vous demande en grâce de m'écrire ce que vous pensez tous deux de ma lettre . Conservez-moi l'un et l'autre une amitié qui fait la consolation de mes derniers jours.

 

V. »

 

i D'Alembert et Condorcet.

 

ii Turgot.

 

iii Prières et Questions adressées à M. Turgot, contrôleur général, envoyées le 13 janvier : page 441 : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres...

V* demande pour le pays de Gex la permission pour des achats avantageux de sel, et permission de faire participer les commerçants au paiement des tente milles livres d'indemnités aux fermiers généraux, l'exemption d'impôt sur la marque des cuirs, l'application du décret de liberté de commerce des blés . Le 19 janvier, par Bouvard de Fourqueux, il a envoyé une Supplique à M. Turgot pour demander entre autres « la permission de faire venir toutes les marchandises de Marseille avec la même exemption de droits dont Genève jouit. » ; page 443 : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres...

 

iv Dupont de Nemours.

 

v Les fermiers généraux.

 

vii Le parlement et les dévots.

 

viii Le parlement.

 

ix Le parlement avait condamné le censeur Louvel et le Mercure parce que La Harpe avait fait dans ce journal compte-rendu et citations de la Diatribe à l'auteur des Éphémérides, de V*.L'Assemblée du clergé avait fait condamner la Diatribe elle-même par le Conseil ; cf. lettre à La Harpe du 3 septembre 1775 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/09/03/e...

et Page 369 : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres...

 

x Allusion à l'affaire de l'Épitre adressée à Tressan, dans laquelle V* a même soupçonné Condorcet ; Cf. lettre à Condorcet et d'Alembert du 8 avril 1775 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/04/08/l...

 

 

xi La Diatribe de V* concernant le commerce des blés.

 

xii Cf. lettre à Frédéric II du 7 juillet 1775 : voir deuxième lettre de la note http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/07/06/l...

 

xiii Paysans de Saint-Claude (Jura) soumis à la mainmorte par les moines.

 

xiv En première intention, Christin, avocat , a perdu leur procès au parlement de Besançon .

 

xv Nouveaux édits en préparation : 1° suppression des corvées, 2° suppression des droits établis à Paris sur les grains, 3° suppression des offices inutiles créés sur les ports, quais, halles et marchés de Paris, 4° suppression des jurandes, maîtrises et corporations, 5° suppression de la caisse de Poissy*, 6° diminution des droits sur les suifs.

Voir par exemple : *Caisse de Poissy : page 175 : http://books.google.be/books?id=MYYCAAAAMAAJ&pg=PA175...

 

 

Je sais que le bien que l'on dit d'un homme ne passe guère la porte de la chambre où on en parle, et que la calomnie va à tire-d'aile jusqu'aux ministres

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 Et chantez les premières phrases de cette lettre sur cet air : 

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

Conseiller au parlement , rue Neuve-saint Augustin à Paris.

 

A Amsterdam ce 27 janvier 1737

 

Respectable ami, je vous dois compte de ma conduite. Vous m'avez conseillé de partir, et je suis parti, vous m'avez conseillé de ne point aller en Prusse, et je n'y ai point été. Voici le reste que vous ne savez pas. Rousseau i apprit mon passage par Bruxelles, et se hâta de répandre et de faire insérer dans les gazettes que je me réfugiais en Prusse, que j'avais été condamné à Paris à une prison perpétuelle etc ii. Cette belle calomnie n'ayant pas réussi, il s'avise d'écrire que je prêche l'athéisme à Leyde iii. Là-dessus il forge une histoire, et on envoie ces contes bleus à Paris, où sans doute la bonté du prochain ne les laissera pas tomber par terre. On iv m'a renvoyé de Paris une des lettres circulaires qu'il a fait écrire par un moine défroqué qui est son correspondant à Amsterdam v. Ces calomnies si réitérées, si acharnées et si absurdes ne peuvent ici me porter coup, mais elles peuvent beaucoup me nuire à Paris. Elles m'y ont fait déjà des blessures, elles rouvriront les cicatrices. Je sais par expérience combien le mal réussit dans une belle et grande ville comme Paris, où l'on n'a guère d'autre occupation que de médire. Je sais que le bien que l'on dit d'un homme ne passe guère la porte de la chambre où on en parle, et que la calomnie va à tire-d'aile jusqu'aux ministres. Je suis persuadé que si ces misérables bruits parviennent à vous , vous en verrez aisément la source, et l'horreur, et que vous préviendrez l'effet qu'ils peuvent faire. Je voudrais être ignoré, mais il n’y a plus moyen. Il faut se résoudre à payer toute ma vie quelques tributs à la calomnie. Il est vrai que je suis taxé un peu haut ; mais c’est une sorte d’impôt fort mal réparti. Si l’abbé de Saint-Pierre vi a quelque projet pour arrêter la médisance, je le ferai volontiers imprimer à mes dépens.

Du reste je vis assez en philosophe, j’étudie beaucoup, je vois peu de monde, je tâche d’entendre Newton, et de le faire entendre. Je me console, avec l’étude, de l’absence de mes amis. Il n’y a pas moyen de refondre à présent l’Enfant prodigue. Je pourrais bien travailler à une tragédie le matin, et à une comédie le soir ; mais passer en un jour de Newton à Thalie, je ne m’en sens pas la force.

 

         Attendez le printemps, Messieurs ; la poésie servira son quartier ; mais à présent c’est le tour de la physique. Si je ne réussis pas avec Newton, je me consolerai bien vite avec vous. Mille tendres respects, je vous en prie, à M. votre frère. Je suis bien tenté d’écrire à Thalie vii ; je vous prie de lui dire combien je l’aime, combien je l’estime. Adieu ; si je voulais dire à quel point je pousse ces sentiments-là pour vous, et y ajouter ceux de mon éternelle reconnaissance, je vous écrirais des in-folio de bénédictins.

 

V.

 

Quand vous aurez quelques ordres à me donner, adressez vos lettres à MM. Ferrand et Darty, négociants à Amsterdam , sans autre nom, sans autre enveloppe, la lettre me sera surement rendue. »

 

ii La Gazette d'Utrecht a annoncé le 3 janvier que V* a sans doute quitté définitivement la France puisque pour échapper à l'emprisonnement il était parti sur le territoire lorrain, à Cirey en 1734.

iii Le 1er mars, V* précise : « C'est lui qui écrivait et qui faisait écrire ... que j'avais soutenu une thèse d'athéisme à Leyde contre M. Sgravesende, qu'on m'avait chassé de l'université etc. Vous êtes instruit de la lettre de M. Sgravesende dans laquelle cette indigne et absurde calomnie est si pleinement confondue. »

Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/pages/Annee_1737_Partie...

iv Formont peut-être ?

v Jean-Baptiste de La Varenne, rédacteur entre autres de l'Observateur. Voir 5.1.3 page 247 : ttps://openaccess.leidenuniv.nl/.../Thèse+complète+Leyde+revue+bis.pdf

vi Charles-Irénée Castel, abbé de Saint-Pierre, auteur d'un Projet de paix perpétuelle.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k105087z

http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Ir%C3%A9n%C3%A9e_Cas...

 

 

Je ne connais pas le talent de chanteuse de Mlle Quinault, mais j'ai de la tendresse pour Isabelle Aubret :

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26/01/2011

nous n'avons point le goût sophistiqué, comme on l'a dans Paris, et nos lumières ne sont point obscurcies par la rage de critiquer mal à propos

 Note rédigée le 1er juin 2011 , jour de sortie du film d'animation Le Chat du rabbin, félin pour qui j'ai une grande affection, déjà en temps que matou, ensuite pour son histoire qui aurait satisfait Volti par son ambiance de tolérance .

 http://musique.fnac.com/a3530364/Bande-originale-de-film-...

 

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

26 janvier 1762, aux Délices

 

Ô mes anges ! Je vous remercie d'abord, vous , et M. le comte de Choiseul de l’éclaircissement que je reçois sur les propositions de mariage faites en 1725 entre deux têtes couronnées 1. Je vous prie de dire à M. le comte de Choiseul qu'un jour le maréchal Keit me disait : Ah ! Monsieur, on ment dans cette cour là encore plus que dans la cour de Rome .

 

Mais vous m'avouerez que si les Scythes savent mentir, ils savent encore mieux se battre, et qu'ils deviennent un peuple bien redoutable . Je suis leur serviteur, comme vous savez, et un peu le favori du favori, mais j'avoue qu'ils mentent beaucoup, et je ne l'avoue qu'à mes anges .

 

Il est fort difficile de trouver à présent les Sermons du Rabbin Akib. On tâchera d'en faire venir de Smyrne incessamment 2.

 

À l'égard du capitaine de chevaux 3, si les fiançailles ne sont pas épousailles, désir passager n'est pas fiançailles : on attendra tranquillement que Dieu et le hasard mettent fin à cette belle aventure .

 

Je vais tâcher, tout malingre que je suis, d'écrire un mot à M. le président de La Marche, et le remercier de son beau zèle pour mon nom 4. Vous devriez bien le détourner du malheureux penchant qu'il semble avoir encore pour cette secte abominable 5 contre laquelle le rabbin Akib semble porter de si justes plaintes .

 

Les jésuites et les jansénistes continuent à se déchirer à belles dents . Il faudrait tirer à balle sur eux, tandis qu'ils se mordent, et les aider eux-mêmes à purger la terre de ces monstres . Vous me trouverez peut-être un peu sévère dans ce moment, mais c'est que la fièvre me prend, et je vais me coucher pour adoucir mon humeur .

 

Je vous demande en grâce, mes divins anges, de me renvoyer mes deux Cassandre 6, et si la fièvre me quitte vous aurez bientôt un Cassandre selon vos désirs . Mille tendres respects .

 

Encore un mot tandis que j'ai le sang en mouvement . Je suis douloureusement affligé qu'on ait retranché l'homme qui paie noblement quand il perd une gageure, et la réponse délicieuse à mon gré : Ai-je perdu ?7 Nous nous gardons bien sur notre petit théâtre de supprimer ce qui est si fort dans la nature, car nous n'avons point le goût sophistiqué, comme on l'a dans Paris, et nos lumières ne sont point obscurcies par la rage de critiquer mal à propos, comme c'est la mode chez vous, à une première représentation . Il faut avoir le courage de résister aux premières critiques, qui s’évanouissent bientôt .

 

Je crois que ce qui me donne la fièvre est qu'on ait retranché dans Zulime le J'en suis indigne 8 du cinquième acte 9, qui fait chez nous le plus grand effet, et qui vaut mieux que Eh bien mon père ! dans Tancrède 10. Puisqu'on m'a ôté ce trait de la pièce, qui est le meilleur, je n'ai plus qu'à mourir, et je meurs (du moins je me couche). Adieu . »

 

1 Entre Louis XV et Élisabeth de Russie « alors pauvre princesse ».

2 Sermon du rabbin Akib prononcé à Smyrne le 20 novembre 1761 : http://www.voltaire-integral.com/Html/24/44_Rabbin.html

voir lettre du 27 novembre 1761 à Richelieu : page 392 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800358/f398.image.r=.langFR

et du 15 janvier 1762 à Mme de Fontaine : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/01/14/652f902d8fb0d0cb912f2134ab4e50b5.html#more

3 Colmont de Vaugrenand, prétendant éventuel à la main de Marie-Françoise Corneille.

4 Il avait écrit le 13 septembre à V* qu'il avait trouvé « au château de Voltaire (car Ferney n'aura plus , s'il-vous-plait, d'autre nom) » ce qu’il n'avait pas trouvé dans sa patrie . Le 14 septembre, à d'Argental dira : « M. de La Marche a été d'une humeur charmante ; il n'y parait plus . C'est, de plus, une belle âme ; c'est dommage qu'il ait certains petits préjugés de bonne femme. »

5 Les jésuites .

7 Dans Le Droit du seigneur ; III , 11 :

http://www.voltaire-integral.com/Html/06/01LEDROI.htm

8 Parole que prononce Zulime avant de se tuer ; la suppression est bien visible sur le manuscrit conservé à la Comédie française .

9 Voir lettre du 14 septembre 1761 à d'Argental : page 338 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800358/f344.image.r=.langFR

10 Dit par Arménaïde, vers 1561, V, 5 .