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01/06/2021

Je demande un peu de diligence... Enfin faites comme pour vous

... Je vaccine, tu vaccines, il ou elle ou on vaccine, petits et grands, jeunes ou vieux, il y a beaucoup d'appelés, combien d'heureux élus ?

 

 

« A Joseph-Marie Balleidier

15è février 1766 1

J'envoie à M. Balleidier le contrat passé avec Bétens . Je le prie de présenter requête pour saisir son domaine de Valavrant, requête fondée :

sur ce que je lui prêtai de l'argent en 1757 sans intérêt pour le tirer des prisons de Genève où il était détenu pour dettes comme il appert par sa lettre du 10 août 1757.

qu'ensuite je lui prêtai une somme plus considérable par le contrat ci-joint, que je lui remis encore une partie de cette somme, ainsi que le prouve la déclaration du 15 novembre 1764 ci-jointe 2.

que le dit Bétens n'ayant répondu à tant de bontés que par de l'ingratitude, et ne m'ayant jamais payé, je dois rentrer de plein droit dans le domaine de Valavrant selon qu'il est porté dans le contrat ci-joint 3.

Je prie aussi M. Balleidier de ne point oublier l'affaire de Pasteur qui continue à couper tous les arbres de la haie qui est entre la pièce subhastée par Truches, et le pré et champ de l'ancien domaine .

Je demande un peu de diligence.

Voltaire.

 

Le nom de la pièce subhastée par feu Destruches contenant trois seytines 4 se nomme Verney, autrefois pré, à présent champ, et le pré et champ du propre domaine de l'ermitage, séparé du ci-dessus par la haie en question, se nomme aussi pré Verney . Le nom de Pasteur est Abraham, je ne sais pas celui de sa servante .

On a coupé l'arbre le jour que Ducemetière alla vous faire son rapport .

On vous sera très obligé si vous voulez bien avoir la bonté de faire avoir des bourneaux percés 5; non seulement cinquante toises, mais cent si l'on peut . Tâchez d'en faire le prix . On les a payées à Venare 2 florins la toise . Enfin faites comme pour vous .

Vous devez avoir je crois encore la subhastation de Destruches. »

1 L'édition Vézinet ne contient que trois brefs extraits.

2 Reproduite par Besterman, app. D 239.

3 Le manuscrit porte ici les mots suivants qui ont été biffés : « J'envoie aussi le contrat de bail de l'ermitage fait avec le suisse Bouquet qui .

4 W. Pierrehumbert, dans son Dictionnaire historique du parler neuchâtelois et suisse romand, 1926, enregistre le mot seytine ( dans l'article seiteur ) comme un ancien mot genevois désignant une mesure de terrain équivalent à une « pose », la pose de Lausanne valant quarante-cinq ares, selon Littré .

5 Bourneau, apparenté à l'allemand Brunnen, fontaine, est un terme jurassien et savoyard désignant diverses variétés de tuyaux d’arrosage .

31/05/2021

insérer à l’article Dieu un gros papier blanc sur lequel il y aurait ces mots : que la calomnie rougisse, et qu’elle se repente

... Dieu seul est assez fort pour cette entreprise , ou à défaut que passe la justice humaine (diablement plus concrète, même si ce n'est pas toujours efficace ).

La médisance sur Internet | Chappatte.com

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

12 février 1766 1

Mon cher frère, je n’ai pas encore pu lire Vingtième 2, et j’en suis bien fâché ; Vingtième me tient au cœur : les relieurs sont bien lents. Je vous envoie une lettre pour un M. d'Orville 3 que je n’avais pas l’honneur de connaître, mais à qui j’ai beaucoup d’obligations. C’est une bonne âme à qui Dieu a inspiré de me peindre au public en miniature. Lisez, je vous prie, la réponse que je lui fais : je voudrais que vous en prissiez une copie, et que vous la fissiez lire à Platon.

Ne pourrais-je point, par votre protection, avoir de Merlin une douzaine d’exemplaires de ce recueil ? je les lui payerais exactement. Il faut que je joue un tour honnête à ce malheureux archevêque d’Auch 4. Il n’y aurait qu’à mettre pour lui à la poste le premier tome de ce recueil, et insérer à l’article Dieu un gros papier blanc sur lequel il y aurait ces mots : que la calomnie rougisse, et qu’elle se repente. Faites-lui cette petite correction, je vous en supplie ; je lui en prépare d’autres, car je n’oublie rien.

J’ai grande impatience de savoir ce que vous pensez du mémoire d’Élie. Je vous réponds que je lui donnerai des ailes pour le faire voler dans l’Europe.

Est-il vrai que l’Encyclopédie est débitée dans tout Paris sans que personne murmure 5 ? Dieu soit loué ! On s’avise bien tard d’être juste.

Vous m’aviez promis de petits paquets par la diligence, adressés à MM. Lavergne et fils, banquiers à Lyon, avec lettre d’avis. Souvenez-vous de vos promesses, et ne laissez point mourir votre frère d’inanition. »

1 Dans une copie contemporaine de Darmstadt, il manque la première phrase . L'édition C.L. n'indique pas le destinataire .

2 Article de Damilaville dans l'Encyclopédie, qu'il a signé Boulanger . Voir https://fr.wikisource.org/wiki/Grand_dictionnaire_univers...)

5 On lit dans les Mémoires secrets de Bachaumont , au 29 mars 1766 : « Enfin l’Encyclopédie parait tout entière ; il y a dix nouveaux volumes. Par un arrangement bizarre, le libraire les a fait venir de Hollande aux environs de Paris, où ils sont imprimés, et c’est aux souscripteurs à les faire entrer ici à leurs risques, périls et fortune ; il est à présumer cependant que le gouvernement, sans vouloir prêter son autorité à cette publicité, ferme les yeux là-dessus, et que le tout se fait avec son consentement tacite. » Voir page 22 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6336835k/f26.item.texteImage

30/05/2021

je vous supplie de lui dire que je prends la liberté d’être horriblement fâché contre lui

... Oui, comment se fait-il Monsieur le Président qu'on ait commémoré le décès de Napoléon en grande pompe et qu'il n'y ait pas un mot aujourd'hui pour exprimer la tristesse d'avoir perdu le 30 mai 1778 l'extraordinaire Voltaire ? Est-ce parce qu'il n'a fait tuer aucun de ses concitoyens, qu'il s'est battu contre l'injustice, pour la liberté ? Et vous, Roselyne Bachelot n'avez-vous rien à dire ? Non ? il est vrai qu'un concert d'Indochine est suffisant pour décérébrer tout mammifère bipède, seule excuse que je vous concèderai .

https://www.academie-francaise.fr/les-immortels/francois-...

http://www.cosmovisions.com/Voltaire.htm

Voltaire méconnu" - Pèlerinage de Chartres Pentecôte - Notre-Dame de  Chrétienté

VIVE VOLTAIRE !

Cet homme est aimable .

 

 

 

 

« A Claire-Josèphe-Hippolyte Léris de La Tude Clairon

Ferney, 12 février 1766

Je vois d’ici, mademoiselle, quel sera le résultat de l’assemblée de vos amis. J’en félicite le public ; mais tâchez que la déclaration du roi, qu’on sollicite et qui est préparée par un excellent mémoire, soit donnée avant votre rentrée. Votre triomphe alors sera complet, et ce sera une grande époque dans l’histoire des beaux-arts. Je ne vois nul obstacle à cette déclaration ; elle est déjà minutée. J’ai été la mouche du coche dans cette affaire. J’ai fourni quelques passages des anciens jurisconsultes en faveur des spectacles, et j’en suis encore tout étonné. Si dans cette aventure vous voyez M. le maréchal de Richelieu, je vous supplie de lui dire que je prends la liberté d’être horriblement fâché contre lui. Que deviendra, s’il vous plaît, un premier gentilhomme de la chambre quand il aura encouru la disgrâce des auteurs et des actrices ? »

 

On espère que cette protection pourra s’étendre jusqu’à faciliter aux Genevois les moyens d’acquérir des terres dans le pays de Gex...nos terres tripleraient de prix...Vous me direz que je suis un peu intéressé à tout cela ... Je l’avoue.

... Ami Voltaire, ton idée a fait long feu mais elle est d'actualité depuis quelques dizaines d'années maintenant, les propriétaires gessiens ont profité de l'aubaine du franc suisse cher, ont vendu aux Suisses bien nantis qui ont maintenant le beurre et l'argent du beurre, et les Français qui travaillent côté français n'ont que les yeux pour pleurer . L'immobilier est digne des exorbitants prix  parisiens .

https://www.lepaysgessien.fr/916/article/2019-10-27/pays-...

Qui sont les 300 plus riches de Suisse en 2018? - Bilan

De bleu de bleu !https://www.rts.ch/play/tv/12h45/video/geneve-est-connue-pour-son-fameux-juron--de-bleu-de-bleu?urn=urn:rts:video:6147058

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

A Ferney 12è février 1766

Il est vrai, mes anges gardiens, que M. le duc de Praslin ne pouvait faire un meilleur choix que celui de M. le chevalier de Beauteville ; la convenance y est tout entière. Vous savez que je suis intéressé plus que personne à tous les arrangements qu’on peut faire à Genève. J’ai quelque bien dans cette ville, mes terres sont à ses portes, beaucoup de Genevois sont dans ma censive 1. Je vous supplie donc d’obtenir de M. le duc de Praslin qu’il ait la bonté de me recommander à monsieur l’ambassadeur.

Quant à l’objet de la médiation, je puis assurer qu’il n’y a qu’un seul point un peu important ; et je crois, avec M. Hennin, que la France en peut tirer un avantage aussi honorable qu’utile. Il s’agit des bornes qu’on doit mettre au droit que les citoyens de Genève réclament de faire assembler le Conseil général, soit pour interpréter des lois obscures, soit pour maintenir des lois enfreintes.

Il faut savoir si le Petit Conseil est en droit de rejeter, quand il lui plaît, toutes les représentations des citoyens sur ces deux objets ; c’est ce qu’on appelle le droit négatif.

Vous pensez que ce droit négatif, étant illimité, serait insoutenable ; qu’il n’y aurait plus de république ; que le petit conseil des Vingt-Cinq se trouverait revêtu d’un pouvoir despotique, que tous les autres corps en seraient jaloux, et qu’il en naîtrait infailliblement des troubles interminables ; mais aussi il serait également dangereux que le peuple eût le droit de faire convoquer le Conseil général selon ses caprices.

Il est très-vraisemblable que les médiateurs, éclairés et soutenus par M. le duc de Praslin, fixeront les cas où le Conseil général, qui est le véritable souverain de la République, devra s’assembler. J’ose espérer que les médiateurs, étant garants de la paix de Genève, demeureront toujours les juges de la nécessité ou de l’inutilité d’assembler le Conseil général. L’ambassadeur de France en Suisse, étant toujours à portée, et devant avoir naturellement une grande influence sur les opinions de Zurich et de Berne, se trouvera le chef perpétuel d’un tribunal suprême qui décidera des petites contestations de Genève.

Il me semble que c’est l’idée de M. Hennin. Lorsque, dans les occasions importantes, la plus nombreuse partie des citoyens qui ont voix délibérative au conseil général demanderont qu’il soit assemblé, le conseil des Vingt-Cinq, joint au conseil des Deux-Cents, sera juge de cette réquisition en premier ressort ; monsieur l’ambassadeur de France, l’envoyé de Berne, et le bourgmestre de Zurich, seront juges en dernier ressort, et ils prononceront sur les mémoires que les deux partis leur enverront.

Si ce règlement a lieu, comme il est très vraisemblable, Genève sera toujours sous la protection immédiate du roi, sans rien perdre de sa liberté et de son indépendance.

On espère que cette protection pourra s’étendre jusqu’à faciliter aux Genevois les moyens d’acquérir des terres dans le pays de Gex. Plus le roi de Sardaigne les moleste vers la frontière de la Savoie, plus nous profiterions, sur nos frontières, des grâces que Sa Majesté daignerait leur faire. Le pays produirait bientôt au roi le double de ce qu’il produit ; nos terres tripleraient de prix, les droits de mouvance seraient fréquents et considérables ; les Genevois rendraient insensiblement à la France une partie des sommes immenses qu’ils tirent de nous annuellement, et ils seraient sous la main du ministère.

Ce qui empêche jusqu’à présent les Genevois d’acquérir dans notre pays, c’est que non-seulement on les met à la taille, mais on les charge excessivement. M. Hennin et M. Fabry croient qu’il sera très aisé de lever cet obstacle, en imposant, sur les acquisitions que les Genevois pourront faire, une taxe invariable qui ne les assujettira pas à l’avilissement de la taille, et qui produira davantage au roi.

J’ajoute encore que, par cet arrangement, il sera bien plus aisé d’empêcher la contrebande ; mais cet objet regarde les fermes générales.

Il ne m’appartient pas de faire des propositions ; je me borne à des souhaits. Vous me direz que je suis un peu intéressé à tout cela, et que Ferney deviendrait une terre considérable . Je l’avoue ; mais c’est une raison de plus pour que je demande la protection de M. le duc de Praslin, et ce n’est pas une raison pour qu’il me la refuse. Je vous supplie donc instamment, mes divins anges, de lui présenter mes idées, mes requêtes, et mon très respectueux attachement.

N. B. – Je ne sais pourquoi les Genevois disent toujours le roi de France notre allié. Addison prétend que, quand il passa par Monaco, le concierge lui dit ,  Louis IV et monseigneur mon maître ont toujours vécu en bonne intelligence, quand la guerre était allumée dans toute l’Europe.2 

Je me mets à l’ombre de vos ailes.

V. »

1La censive est le territoire d'un fief comprenant des terres assujetties au cens . Le cens est, dans le régime féodal, la rente foncière dont un héritage était chargé envers le seigneur du fief dont il dépendait .

2 Anecdote rapportée par Addison dans ses Remarks on Several Parts of Italy ( Remarque sur divers endroits d'Italie, 1722 ) . Voir The Works of […] Joseph Addison, 1854-1856, I, 360 ;

29/05/2021

Chaque siècle a ses vices dominants . Je crois que la calomnie est celui du nôtre 

... Philippe Geluck – Le Chat – Philippe Geluck : le site officiel – Le chat

Réseaux sociaux que de mal on fait grâce [sic] à vous !

 

 

« A André-Guillaume Contant d'Orville 1

A Ferney 11è février 1766

Je reçus hier, monsieur, le premier volume du recueil que vous avez bien voulu faire 2; il était accompagné d’une lettre en date du 24è décembre dernier. Je me hâte de vous remercier de votre lettre, du recueil, de l’épître dédicatoire à Mme la comtesse de Buturlin 3, et de l’avis de l’éditeur 4. Ce sont autant de bienfaits dont je dois sentir tout le prix. Vous m’avez fait voir que j’étais plus ami de la vertu, et même plus théologien que je ne croyais l’être. Il y a bien des choses que la convenance du sujet et la force de la vérité font dire sans qu’on s’en aperçoive ; elles se placent d’elles-mêmes sous la main de l’auteur. Vous-avez daigné les rassembler, et je suis tout étonné moi-même de les avoir dites.

Il faut avouer aussi que ceux qui m’ont persécuté ne doivent pas être moins étonnés que moi. Votre recueil est un arsenal d’armes défensives que vous opposez aux traits des Frérons, et des lâches ennemis de la raison et des belles-lettres.

Ma vieillesse et mes maladies m’avaient fait oublier presque tous mes ouvrages . Vous m’avez fait renouveler connaissance avec moi-même. Je me suis retrouvé d’abord dans tout ce que j’ai dit de Dieu. Ces idées étaient parties de mon cœur si naturellement que j’étais bien loin de soupçonner d’y avoir aucun mérite. Croiriez-vous, monsieur, qu’il y a eu des gens qui m’ont appelé athée ? C’est appeler Quesnel moliniste. Chaque siècle a ses vices dominants . Je crois que la calomnie est celui du nôtre ; cela est si vrai que jamais on n’a dit tant de mal de Bayle que depuis une trentaine d’années. L’insolence avec laquelle on a calomnié le Dictionnaire encyclopédique est sans exemple. Le malheureux 5 qui fournit des mémoires contre cet important ouvrage poussa l’absurdité jusqu’au point de dire que, si on ne découvrait pas le venin dans les articles déjà imprimés, on le trouverait infailliblement dans les articles qui n’étaient pas encore faits 6. Cela me fait souvenir d’un abbé Desfontaines, écrivain de feuilles périodiques, qui, en rendant compte du Minute Philosopher du célèbre Barclay, évêque de Cloane, crut, sur le titre, que c’était un livre de plaisanteries contre la religion, et traita le vieil évêque de Cloane comme un jeune libertin, sans avoir lu son ouvrage 7.

Ce Desfontaines a eu des successeurs encore plus ignorants et plus méchants que lui, qui n’ont cessé de calomnier les véritables gens de lettres. Jamais la philosophie n’a été plus répandue, et jamais cependant elle n’a essuyé de plus cruelles injustices. Ce sont ces injustices mêmes qui augmentent l’obligation que je vous ai.

Je ne sais, monsieur, si Mme de Buturlin, à qui vous me dédiez, est sœur de M. le comte de Voronzoff, que j’ai eu l’honneur de voir chez moi, et qui est actuellement ambassadeur à la Haye . Je vous supplie de vouloir bien lui présenter mes respects.

J’ai l’honneur d’être avec la plus sincère reconnaissance, monsieur, votre. »

1 André-Guillaume Contant Dorville, né à Paris en 1730, mort avant 1820. Voir : https://data.bnf.fr/fr/11994425/andre-guillaume_contant_d_orville/

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Dorville_(auteur)

2 Les Pensées philosophiques de M. de Voltaire, 1766, deux volumes in-8°, ou deux volumes in-12 ; on lit sur les faux-titres : Voltaire portatif. On fit de nouveaux frontispices en 1776, du moins pour le format in-12. Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8546541

3 Les Pensées philosophiques sont dédiées À Son Excellence Mme la comtesse de Butturlin, née comtesse de Woronzoff, ambassadrice de Russie en Espagne. Elle est l'épouse du comte Pyotr Jona Alexandrovitch Buturlin, ministre plénipotentiaire en Espagne de 1762 à 1766 .

4 N'étant pas nommé, il doit s'agir de d'Orville .

5 Abraham Chaumeix, auteur des Préjugés légitimes contre l’Encyclopédie, voir page 115 de la lettre du 23 décembre 1760 à Capacelli : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1760/Lettre_4387

et : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/12/23/je-pardonne-de-tout-mon-coeur-a-tous-ceux-dont-je-me-suis-mo-5737506.html

Je n'ai jamais tant regretté d'être inutile

...

 

Le sentiment d'inutilité | PrototypeKblog

Il n'y a pas que le Covid dans la vie ! Wait and see !

https://prototypekblog.wordpress.com/2020/04/21/le-sentim...

 

 

« A Charles Manoël de Végobre, Avocat

à Genève

10è février 1766 à Ferney

Il est bien cruel et bien honteux, monsieur, que nous soyons encore au XVIè siècle à certains égards . Si la chose dont vous me parlez dépendait de M. le duc de Choiseul, ou de M. le duc de Praslin, les bontés dont ils m'honorent me mettraient en droit d'implorer leur protection avec la plus grande chaleur ; mais je ne puis rien auprès de M. le comte de Saint-Florentin . M. de Moultou est très bien avec l'intendant de Montpellier et peut rendre service dans cette affaire . Je vous conseille de lui en écrire . Je n'ai jamais tant regretté d'être inutile . J’ai perdu successivement beaucoup d'amis par la mort et encore plus par l'absence . Je ne sais pas comment je pourrai me tirer de l'affaire des Sirven ; elle est bien épineuse . Nous ne trouvons point d'exemple de la grâce que nous demandons au roi . Il est vrai que la famille des Sirven est dans un cas singulier qui doit servir d'exemple mais que ferons-nous sans protection ? Peut-être ne réussirons-nous qu'à montrer à l’Europe quel excès de fanatisme règne encore en France, et quelle a été la fureur de nos prêtres de persuader au peuple et aux juges que la première loi de votre religion est d'égorger vos enfants quand on craint qu'ils ne la quittent .

Tantum religio potuit suadere malorum 1 . Les Turcs sont plus honnêtes que nous, sans aucune comparaison . J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec des sentiments inaltérables, votre très humble et très obéissant serviteur

V. »

1 Tant la religion a pu suggérer de crimes ; citation de Lucrèce déjà employée, De natura rerum , I, 101

28/05/2021

Ce roi de Maroc est un terrible homme ; il demande environ huit cent mille francs pour deux cents esclaves : cela est cher

... Mohammed VI, successeur de Mohammed ben Abdallah (contemporain de Voltaire ) est tout à fait digne de son ancêtre rançonneur . Tel père, tel fils, ce ne sont pas les Marocains qui fuient leur pays qui me contrediront . Voltaire parle d'esclaves , il en dirait autant aujourd'hui, tant l'exploitation du peuple est sinistre . Lui qui a lutté pour abolir le servage des serfs de Chézery aurait matière à dénoncer ce régime alaouite corrompu .

Au pays du backchich, les nantis sont rois .

Bado, le blog: Le dessinateur Khalid Gueddar arrêté au Maroc

http://badoleblog.blogspot.com/2012/05/le-dessinateur-khalid-gueddar-aurait.html

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

10è février 1766

J’ai reçu hier, de la main d’un de mes anges, une lettre qui commençait par Monsieur mon cher cousin. Comme à moi tant d’honneur n’appartient, je regardai au bas, et je vis qu’elle était adressée à M. le président de Barral 1, à qui je l’envoie.

J’ai soupçonné que, par la même méprise, il aura reçu pour moi une lettre à laquelle il n’aura rien compris, et j’espère qu’il me la renverra.

Je m’imagine que mes anges verront bientôt le mémoire d’Élie pour les Sirven, et qu’ils le protégeront de toute leur puissance. Cette affaire agite toute mon âme ; les tragédies, les comédies, le tripot, ne me sont plus de rien ; j’oublie qu’il y a des tracasseries à Genève ; le temps va trop lentement ; je voudrais que le mémoire d’Élie fût déjà débité, et que toute l’Europe en retentît. Je l’enverrais au mufti et au Grand Turc, s’ils savaient le français. Les coups que l’on porte au fanatisme devraient pénétrer d’un bout du monde à l’autre.

Il faut pourtant que je m’apaise un peu, et que je revienne au mémoire de M. de La Voute, en faveur du tripot 2. Je crois qu’il réussira ; mais voudra-t-il bien faire usage de mes remarques ? Je les croirai bien fondées, jusqu’à ce que vous m’ayez fait apercevoir du contraire. Il me paraît bien peu convenable que le roi dise, dans une déclaration : Voulons et nous plaît que tout gentilhomme puisse être comédien. Je tiens qu’il faut faire parler le roi plus décemment.

J’ai été bien ébaubi quand j’ai reçu une lettre pastorale du révérendissime et illustrissime évêque et prince de Genève, munie d’une lettre de M. de Saint-Florentin, qui demande une collecte pour nos soldats qui sont à Maroc ; j’aurais souhaité une autre tournure ; mais la chose est faite. On trouvera peu d’argent dans notre petite province. Ce roi de Maroc est un terrible homme ; il demande environ huit cent mille francs pour deux cents esclaves : cela est cher 3.

Nous sommes toujours en Sibérie . Cela n’accommode pas les gens de mon âge. Je crois que je serais fort aise d’être à Maroc pendant l’hiver. Nous avons toujours ici Pierre Corneille ; mais il ne donnera point de tragédie cette année. Nos montagnes de neige n’ont pas encore permis à M. de Chabanon de venir chercher sa Virginie.

Je me mets au bout des ailes de mes anges.

V. »

1Joseph-marie de Barral, président du parlement de Grenoble . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Marie_de_Barral

Pour le cousinage, voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_de_Barral

3 Allusion à une expédition malheureuse au Maroc : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Larache_(1765)