Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

Il faut du temps pour que les réputations murissent

... Les bonnes comme les mauvaises ?

A tous ceux qui se soucient de leur e-réputation, vivent dans l'angoisse du vae victis et son pouce abaissé, je dis qu'ils ont encore bien du temps à perdre pour se soucier de l'avis de parfaits inconnus qui jamais ne seront capables faire plus qu'un clic, champions de l'anonymat à l'âme de charognards . Vivez et parlez à ceux qui vous entourent plutôt qu'à vos machines dites connectées, sinon vous finirez comme elles, à la poubelle , pollueurs pollués, inrecyclables .

Ami Georges Brassens, tu nous manques toujours : https://www.youtube.com/watch?v=Cz9NOhwK1yo

 Ô Trompettes de la renommée bien mal embouchées : https://www.youtube.com/watch?v=gWRzopyZBSA

 Résultat de recherche d'images pour "réputation"

Un bisou ou un coup de pied au cul ? quel choix  , tout en nuances ?!

 

 

« A Pierre Guy

1er janvier 1764 aux Délices

à Guy Duchesne, libraire

Le dessein que vous me communiquez, monsieur, de faire une jolie édition de La Henriade 1, sera, je crois approuvé, parce que notre nation devenue de jour en jour plus éclairée, en aime Henri IV davantage . J'ai été toujours étonné qu'aucun littérateur, aucun poète du temps de Louis XIII et de Louis XIV, n'eût rien fait à la gloire de ce grand homme . Il faut du temps pour que les réputations murissent .

Le bel éloge de Maximilien de Sully par M. Thomas 2, a rendu le grand Henri IV plus cher à la nation . Ainsi je pense que vous prenez le temps le plus favorable pour réimprimer La Henriade, et que l'amour pour le héros fera faire pardonner les défauts de l'auteur . Je n'étais pas digne de faire cet ouvrage quand je l'entrepris, j'étais trop jeune ; et à présent je suis trop vieux pour l'embellir .

La dédicace que vous voulez bien m'en faire m'est très honorable . Mais en me dressant ce petit autel, je vous prie d'y brûler en sacrifice votre Zulime et votre Droit du seigneur, que vous avez imprimés sous mon nom, et qui ne sont point du tout mon ouvrage . Vous avez été trompé par ceux qui vous ont donné les manuscrits, et cela n'arrive que trop souvent . C'est le moindre des inconvénients de la littérature .

Quant aux souscriptions pour le Corneille, arrangez vous avec l’éditeur de Genève ; je ne me suis mêlé que de commenter et de souscrire . Tout ce que je sais c'est que l'édition est finie . J'ai fait mes commentaires avec une entière impartialité, sachant bien que les belles pièces de Corneille n'ont pas besoin de louanges, et ses fautes ne font aucun tort à ce qu'il a de sublime .

On m'a envoyé de Paris un conte intitulé , Ce qui plait aux dames . J'y ai trouvé remormora pour remémora ; frange pour fange ; une rime doublée et d'autres fautes . Je ne crois pas que l'imprimeur s'appelle Robert Etienne .

Je suis de tout cœur, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Duchesne a déjà donné en 1761 une réimpression de l'édition Prault de 1746 de La Henriade ; il ne paraît pas avoir publié de réédition avant 1770 .

Lire la suite

07/01/2019 | Lien permanent

Il est entièrement opposé à mes principes

... Zemmour the Z, of course . Une déculottée inévitable l'attend, mais il la revendiquera comme un exploit, et détestable comme un furoncle nous promettra des catastrophes sociales que lui seul , évidemment, aurait su nous éviter .

http://www.presseagence.fr/lettre-economique-politique-paca/files/2021/09/liberteegalitefraternite1-8.jpg

En attendant, vive la France !

 

 

« A Anne-Madeleine-Louise-Charlotte-Auguste de La Tour du Pin de Saint-Julien

15è décembre 1766, à Ferney

Charmant papillon de la philosophie, de la société et de l'amour, j'aurais été enchanté de vous voir honorer encore ma retraite d'une de vos apparitions, vous auriez même été mon premier médecin, car il y a environ deux mois que je ne sors guère de mon lit .

Savez-vous bien, madame, que j'ai des choses très sérieuses à répondre à la lettre très morale que vous n'avez point datée . Vous m'apprenez que dans votre société on m'attribue Le Christianisme dévoilé, par feu M. Boulanger 1, mais je vous assure que les gens au fait ne m'attribuent point du tout cet ouvrage . J'avoue avec vous qu'il y a de la clarté, de la chaleur, et quelquefois de l'éloquence, mais il est plein de répétitions, de négligences, de fautes contre la langue, et je serais très fâché de l'avoir fait, non seulement comme académicien, mais comme philosophe, et encore plus comme citoyen .

Il est entièrement opposé à mes principes . Ce livre conduit à l'athéisme que je déteste . J'ai toujours regardé l'athéisme comme le plus grand égarement de la raison, parce qu'il est aussi ridicule de dire que l'arrangement du monde ne prouve pas un artisan suprême, qu'il serait impertinent de dire qu'un horloge2 ne prouve pas un horloger .

Je ne réprouve pas moins ce livre comme citoyen . L'auteur paraît trop ennemi des puissances . Des hommes qui penseraient comme lui ne formeraient qu’une anarchie, et je vois trop par l'exemple de Genève, combien l'anarchie est à craindre 3.

Ma coutume est d’écrire sur la marge de mes livres ce que je pense d'eux . Vous verrez, quand vous daignerez venir à Ferney les marges du Christianisme dévoilé chargées de remarques qui démontrent que l'auteur s'est trompé sur les faits les plus essentiels 4.

Il est assez douloureux pour moi, madame, que la malignité, et la légèreté des papillons de votre pays, qui n'ont ni votre esprit, ni vos grâces, m’imputent continuellement des ouvrages capables de perdre ceux qu'on en soupçonne .

Quant à M. le maréchal de Richelieu, je me doutais bien qu'il n'aurait pas le temps de parler à M. le comte de Saint-Florentin de la famille infortunée qui a excité votre compassion . Il allait partir pour Bordeaux . Votre jolie âme en a fait assez ; cette famille obtient par vos bontés une pension sur son propre bien dont on lui arrache le fond pour avoir donné il y a vingt-six ans à souper à un sot prêtre hérétique .

Quand j'aurai quelque grâce à implorer pour des malheureux, je demanderai votre protection, madame, auprès de M. le duc de Choiseul . Je l'ai importuné quelquefois de mes indiscrètes requêtes, et il a toujours daigné m'accorder ce que j'ai pris la liberté de lui demander . Je craindrais bien de fatiguer ses bontés si je ne savais par vous-même quel est l'excès de sa générosité .

Venez à Ferney, madame,nous chanterons ses louanges et les vôtres pour le prologue de l'opéra de Pandore, et vous serez ma Pandore, mais vous n'ouvrirez point la boîte .

Agréez, madame, le respect et l'attachement du vieux solitaire .

V. »

1 Le baron d'Holbach a en effet publié Le Christianisme dévoilé sous le nom de l'ingénieur Boulanger, à la date de Londres, 1766 alors que l'ouvrage est en fait imprimé à Nancy en 1761 . Sur la page de titre, V* a noté « livre dangereux ».

2 Le mot horloge est encore souvent masculin au XVIIIè siècle, quoique les dictionnaires de Richelet et Furetière le donnent féminin dès le XVIIè siècle .

3Ces deux paragraphes esquissent les deux thèmes des impossibilités et des dangers de l'athéisme sur lesquels V* revient souvent plus tard, notamment dans l'Histoire de Jenny : pages 552 – 575 https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Histoire_de_Jenni_ou_le_Sage_et_l%E2%80%99Ath%C3%A9e

4Effectivement, les réactions de V* à l'égard de cette « impiété dévoilée » sont extrêmement critiques . Voir La Religion de Voltaire, de R. Pomeau .

Lire la suite

16/03/2022 | Lien permanent

je ne sais si c'est parce que je cultive quelques arpents de terre, que je n'aime point que les terres soient seules cha

... Nos temps modernes ont apporté bien des impôts nouveaux et il est désormais possible qu'on en arrive à taxer l'air que nous respirons (dès qu'on aura trouvé le moyen de nous greffer un compteur ! ).

Casse-toi, classe moyenne à la con ! – L'actu en patates

https://www.lemonde.fr/blog/vidberg/2012/09/11/casse-toi-...

 

 

« A Daniel-Marc-Antoine Chardon

25 décembre 1767

Monsieur,

Je n'ai pu retrouver le petit mémoire 1 fait par un conseiller du parlement de Toulouse, dans lequel on justifie l'assassinat juridique de Jean Calas, et on soutient l'incompétence et l'irrégularité prétendue de l'arrêt de messieurs les maîtres des requêtes . Mais je crois que vous recevrez dans une quinzaine de jours, au plus tard, cette pièce de Toulouse même. Elle vous sera adressée sous l'enveloppe de M. le duc de Choiseul.

Je crois que les circonstances n'ont jamais été plus favorables pour tirer la famille Sirven de l'oppression cruelle dans laquelle elle gémit depuis six années. Elle a contre elle un juge ignorant, un parlement passionné, un peuple fanatique; mais elle aura pour elle son innocence et M. Chardon.

Cette affaire est bien digne de vous, monsieur. Non-seulement vous serez béni par cinq cent mille protestants, mais tous les catholiques ennemis de la superstition et de l'injustice vous applaudiront. Je me flatte enfin que l'absence de M. Gilbert ne vous empêchera point de rapporter l'affaire devant le roi, et je suis bien sûr que le roi sera touché de la manière dont vous la rapporterez. Je m'intéresse autant à votre gloire qu'à la justification des Sirven.

J'ai lu le livre de M. de La Rivière 2 ; je ne sais si c'est parce que je cultive quelques arpents de terre, que je n'aime point que les terres soient seules chargées d'impôts 3. J'ai peur qu'il ne se trompe avec beaucoup d'esprit; mais je m'en rapporte à vos lumières.

J'ai l'honneur d'être avec beaucoup de respect, et un attachement qui se fortifie tous les jours, monsieur,

votre, etc.

Voltaire.

P. S. J'apprends dans le moment, monsieur, que vous allez faire le rapport devant le roi. Vous n'aurez point encore reçu le mémoire du conseiller de Toulouse contre messieurs les maîtres des requêtes . Mais soyez assuré qu'il existe; je l'ai lu, et je suis incapable de vous tromper. »

1 Dans la lettre précédente, il est appelé Lettre. Cet ouvrage semble n'avoir pas existé .

3 La thèse Le Mercier de La Rivière consiste à soutenir que toutes les richesses viennent de la terre ; par conséquent, toutes les denrées devraient être taxées une fois pour toutes au moment de leur production par l'agriculture ou les mines . Tous les autres impôts directs, soit impôts indirects au stade de la transformation seraient abolis . V* avoue naïvement pourquoi ce projet lui convient fort peu .

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fiscalit%C3%A9_d%27Ancien_R%C3%A9gime

Lire la suite

18/07/2023 | Lien permanent

Eh par tous les saints, pourquoi ne pas venir dans notre pays libre ? Vous qui aimez les voyages, vous qui goûtez l'amit

 ... Bon, bon, calmez-vous ! ceci n'est pas un appel à une immigration sauvage à fin souvent dramatique .

Tout au mieux, ce pourrait être un appel des professionnels du tourisme et des organisateurs de spectacles .

Ne vous emballez pas non plus au sujet des "novi amori", contentez vous d'Amora qui mettra du piquant dans votre vie assiette .

 Coup-de-foudre.jpg


Oserai-je ajouter, car nous parlons ici de la France éternelle, vous qui aimez les fonctionnaires et le gaspillage des fonds publics, venez, vous trouverez votre bonheur .

 

 

 

« Au comte Francesco ALGAROTTI. 1

Aux Délices, 2 septembre [1758].

Ritorno dalle sponde del Reno alle mie Delizzie ; qui vedo la signora errante 2 ed amabile, qui leggo, mio caro cigno di Padova, la vostra vezzoza lettera. Siete dunque adesso a Bologna la grasse, ed avete lasciato Venezia la ricca. E 3, per tutti i santi, perchè non venire 4 al nostro paeze libero ? voi che vi dilettate nel viaggiare 5, voi che godete d' amici, d' applausi, di novi amori, dovunque andate? Vi è più facile di venire tra i Pappafighi che non è a me di andare fra i Papimani 6. Ov' è la raccolta delle vostre leggiadre opere? dove la potrô io trovare? dove l' avete mandata? per qual via? non lo so. Aspetto li figlioli per consolarmi dell' offenza 7 del padre. Voi passate i 8 vostri belli anni tra l' amore e la virtù. Orazio vi direbbe

Quod tu, inter scabiem tantam, et contagia lucri,

Nil parvi sapias, et adhuc sublimia cures.9

Ed il Petrarca 10 soggiungerebbe

Non lasciar la magnanima tua impresa.

La signora di Bentinck è, come il re di Prussia, condannata dal Consiglio aulico, e questa povera Marfisa 11 non è seguita da un esercito per difendersi 12 .Cette pauvre milady Blakaker,13 ou comtesse de Pimbesche 14, va encore plaider à Vienne. C'est bien dommage qu'une femme si aimable soit si malheureuse mais je ne vois partout que des gens à plaindre, à commencer par le roi de France, l'impératrice, le roi de Prusse, ceux qui meurent à leur service, ceux qui s'y ruinent, et à finir par d'Argens.

Felix qui potuit rerum cognoscere causas

fortunatus et ille deos qui novit agrestes 15

Le premier vers est pour vous, le second pour moi.16 Pour milady Montaigu 17, je doute que son âme soit à son aise. Si vous la voyez, je vous supplie de lui présenter mes respects.

Farewell, flos Italioe, farewell, wise man whose sagacity has found the secret to part from Argaleon 18 without being molested by him. 19

Si jamais vous repassez les Alpes, souvenez-vous de votre ancien ami, de votre ancien partisan

le Suisse Voltaire »

1 Il y a des différences entre la version de l'édition de Kehl et celle d'Algarotti ; elles sont signalées ci-après .

2 La comtesse Bentinck .

3 Algarotti donne Ma pour E .

4 Algarotti donne venite pour venire .

5 Algarotti donne : voi che vi dilettate di viaggiare .

6 Pour Rabelais, les papimanes sont les catholiques et les papefigues sont les protestants.

7 Algarotti : assenza .

8 Algarotti : li .

9 Citation approximative d'Horace, Épîtres, I, xii, 14-15.

10 C'est la première fois que V* cite Pétrarque dans sa correspondance ; c'est ici le dernier vers du sonnet La Gola, e'il sonno . Le mot tua est omis dans l'édition de Kehl, à la suite de la copie .

11 Vierge guerrière dans le Roland furieux de l'Arioste .

12 Traduction :  « Je reviens des rives du Rhin à mes Délices ; ici je vois l'aimable vagabonde ; ici je lis, mon cher cygne de Padoue, votre charmante lettre . Vous voici donc de nouveau dans Bologne la grasse, et vous avez laissé Venise l'opulente . Eh par tous les saints, pourquoi ne pas venir dans notre pays libre ? Vous qui aimez les voyages, vous qui goûtez l'amitié, les applaudissements et les nouvelles amours, partout où vous allez ; il vous est plus facile de venir chez les Papefigues qu'à moi d'aller chez les Papimanes . Où est le recueil de vos charmantes œuvres ? Où puis-je le trouver ? Où l'avez-vous envoyé ? Par quelle voie ? Je ne le sais . J'attends les enfants pour me consoler de l'offense [selon le texte d'Algarotti ; l'absence semble préférable] du père . Vous passez vos belles années entre l'amour et la vertu . Horace vous dirait : /Parmi une telle lèpre et contagion du lucre, /Ne te soucie de rien de petit, et continue à ne t'occuper que des pensées les plus hautes / Et Pétrarque ajouterait : / N'abandonne pas ta magnanime entreprise. / Mme de Bentinck est, comme le roi de Prusse, condamnée par le Conseil aulique, et cette pauvre Marphise n'est pas suivie d'une armée pour la défendre .

13 Personnage de lady Blackacre dans The Plain dealer, de Wycherley .

14 Dans Les Plaideurs de Racine ; le mot est dur, de la part de V* visant Mme la comtesse Bentinck .

15 Virgile, Georgiques , II,v,490 et 493 : Heureux celui qui a pu connaître la raison des choses . / Fortuné aussi celui qui connait les dieux des champs .

16 Phrase omise par Algarotti .

17 Lady Mary Wortley Montagu qui était éprise d'Algarotti depuis leur rencontre en Angleterre en 1736, était alors établie à Venise .

18 Ici, Frédéric II, en grec, argaleon signifie « terrible »

19 Adieu, fleur de l'Italie, adieu, homme d'esprit dont la sagesse a découvert le secret de quitter Argaleon sans encourir ses foudres .

Lire la suite

14/10/2013 | Lien permanent

voyant que son roman ne réussissait pas, s'est avisé de faire le politique

... Ô combien de politiques, a contrario, sont passés de la politique à l'écriture plus ou moins romanesque, comme si leurs dires pouvaient contrebalancer l'insuffisance de leurs actes . Qui peut encore se laisser prendre à ces publi-cations publi-citaires ? 

Nicolas Sarkozy and C° vous n'aurez pas une roupie de ma part , vous n'excitez que la curiosité des lecteurs de votre bord et vous n'en êtes plus à une promesse vaine supplémentaire . Allez, au foulon !

  Charlie Hebdo 1227

 

« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine

A Ferney , 1er avril 1761 1

Puisque vous aimez la campagne, ma chère nièce, je vous envoie la petite épître , adressée à votre sœur, sur l'agriculture . Le droit de champart 2, et tous les droits seigneuriaux que vous avez ne sont pas si favorables à la poésie que la charrue et les moutons . Virgile a chanté les troupeaux et les abeilles, et n'a jamais parlé du droit de champart . Je vous ferai une épître pour vous confirmer dans le juste mépris que vous semblez avoir pour le tumulte et les inutilités de Paris, et dans votre heureux goût pour les douceurs de la retraite .

Il est vrai que Ferney est devenu un des séjours les plus riants de la terre . Je joins à l'agrément d'avoir un château d'une jolie structure , et celui d'avoir planté des jardins singuliers, le plaisir solide d'être utile au pays que j'ai choisi pour ma retraite . J'ai obtenu du conseil le dessèchement des marais qui infectaient la province, et qui y portaient la stérilité . J'ai fait défricher des bruyères immenses ; en un mot j'ai mis en pratique toute la théorie de mon épître . Si vous ne venez pas voir cette terre qui doit vous appartenir un jour, je vous avertis que je viendrai bouleverser Hornoy, y planter , et y bâtir ; car il faut que je me serve de la truelle ou de la plume .

Je joins à cette épître les lettres sur le roman de J.-J. . Elles sont fortes, mais il méritait pis . Ce valet de Diogène, qui s'est mis dans le tonneau de son maître pour aboyer contre notre nation, n'est digne d'aucun ménagement . On lui a fait même trop d'honneur de le tourner en ridicule . C'est un polisson orgueilleux, de qui d'ailleurs j'aurais à me plaindre personnellement si on pouvait s'abaisser jusqu'à se plaindre de lui . Figurez-vous que du fond de son village d'où il outrage notre nation qui le nourrit, il fit une brigue à Genève pour empêcher les citoyens de jouer la comédie avec votre sœur, et qu'il m'écrivit à moi que je corrompais sa ville, que j’en altérais le mœurs pour prix de l'asile qu'elle m'a donné : comme si je me souciais d’adoucir la pédanterie des usuriers calvinistes de sa petite vile aussi ingrate que lui envers la France ; comme si c'était un asile qu'une maison de campagne que j'ai achetée le triple de ce qu'elle vaut ; comme si j'avais besoin d'un asile chez ses maîtres, moi, qui ai une douzaine de ses maîtres pour vassaux .

Son roman est détestable ; c'est encore là mon plus grand grief . M. de Chimènes a bien voulu que son nom parût à la fin des lettres qui écrasent cette rapsodie inconséquente . J'en suis fort aise . Ce Jean-Jacques voyant que son roman ne réussissait pas, s'est avisé de faire le politique : il est tout aussi bon politique que bon romancier ; sa brochure de la paix perpétuelle n'est qu'une nouvelle impertinence ; et voici la réponse, encore de M. de Chimènes . Nous sommes Bertrand et Raton .

Autres nouvelles . Lekain devait venir jouer la comédie avec nous à Pâques ; mais il m'a fallu communier sans jouer . J'ai édifié mes paroissiens au lieu de les amuser ; et M. de Richelieu s'est avisé de mettre Lekain en pénitence dans ce saint temps .

Je veux vous donner avis de tout . L'impératrice de Russie m’avait envoyé son portrait avec de gros diamants : le paquet a été volé sur la route . J'ai du moins une souveraine de deux mille lieues de pays dans mon parti ; cela console des cris des polissons . Ma chère nièce, je fais encore plus de cas de votre amitié . Adieu : j'embrasse tout ce que vous aimez . »

1 Le manuscrit daté « 1er avril » changé en « février » par l'éditeur porte surement la date correcte ainsi que le prouvent diverses allusions comme Bertrand et Raton ( voir lettre du 1er avril 1761 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/07/c-est-quelque-chose-d-avoir-fait-cinq-actes-sans-amour-quand.html

et lettre du 30 mars 1761 à Schouvalov : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/03/19/ces-eloges-qui-ne-sont-que-la-bordure-du-tableau-ce-sont-les-grandes-action.html

Le passage « Je joins à cette épître … Autres nouvelles. » manque dans les éditions à la suite du manuscrit, qui en revanche ajoutent à la suite de la lettre deux paragraphes pris à la lettre du 15 janvier 1762 à Mme de Fontaine : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1762-partie-3-122795461.html

Lire la suite

20/03/2016 | Lien permanent

mon curé qui s'enivre tous les jours pourra boire plus que moi à votre santé

... Je n'en dirai pas plus . Son zèle à célébrer l'eucharistie vient sans doute de la qualité du vin offert par les paroissiens , enfin, je le suppose .

Tchin tchin !

 Résultat de recherche d'images pour "curé ivrogne"

 

 

 

« A Jean-Philippe Fyot de La Marche

Aux Délices, près de Genève,

le 20 janvier 1764

Monsieur,

Comme M. le duc de Praslin n'avait encore point reçu de réponse de vous le 12 de ce mois, j'ai présumé que vous ne pouviez pas répondre avant que d'avoir trouvé les moyens les plus convenables de tarir enfin la source de tous les procès qui subsistent depuis deux cents ans au sujet des terres possédées autrefois dans le pays de Gex par les ducs de Savoie, le canton de Berne et la république de Genève . Il est triste que nos rois depuis Charles IX n'aient pas fait enregistrer leurs traités au parlement de Dijon : cette précaution aurait prévenu toutes les difficultés qui nous désolent ; mais aujourd’hui il n'est guère praticable que l'on fasse enregistrer des traités dont le dernier est fait il y a cent ans, et dont le premier a plus de deux cents années . J'espère , monsieur, que les bontés dont vous honorez Mme Denis et moi, ne permettront pas que nous perdions tout l'avantage et tout l'agrément que ces mêmes traités nous assurent dans notre terre de Ferney .

Nous vous présentons nos très humbles remerciements de la grâce que vous nous avez faite de nous donner des délais ; et nous vous supplions de vouloir bien agréer que M. le duc de Praslin se serve de la voie du Conseil pour arranger cette affaire, qui est en effet une affaire d’État, attendu les promesses faites en dernier lieu par le roi aux républiques de Berne et de Genève .

Permettez encore, monsieur, que j'aie l'honneur de vous dire que, si nous étions obligés de plaider au parlement pour les droits de Ferney, M. le président De Brosses serait le moment d'après obligé de soutenir le même procès ; il se trouve précisément dans le même cas que moi, au sujet de la terre de Tournay, dont je n'ai que l'usufruit et dont il est le propriétaire . Le curé de Tournay n'attend que la première audience où l'on plaiderait la cause de Ferney, pour redemander la dîme que M. De Brosses partage avec la République de Genève, et par un usage funeste que les parlements n'ont point encore aboli, les décisions d'un concile de Latran sur les dîmes, et ce qu'on appelle le droit commun, l'emporteraient sur les traités faits par les souverains ; le président De Brosses perdrait le plus beau de ses droits . Oserais-je , monsieur, vous supplier de lui communiquer cette lettre ? Il s'agit de ses intérêts comme des miens . J’ai eu le malheur qu'un chicaneur de l'antre de Gex 1 a persuadé à M. De Brosses que je dégradais son bois de Tournay . Monsieur son frère le bailli 2 a été témoin, lorsqu'il est venu dans le pays, que , non seulement je n'ai rien dégradé, mais que j'ai même planté dans ce bois et que je n'y ai pas seulement pris jusqu'à présent une seule branche pour me chauffer ; j'ai embelli et amélioré sa terre , j'y ai dépensé plus d'un tiers au-delà de nos conventions, quoiqu’elle ne me rapporte qu'environ douze cents livres de rente, au lieu des trois mille cinq cents pour lesquelles elle m'a été donnée dans le contrat . Si M. le président De Brosses avait pu être instruit de toutes ces vérités, il aurait eu plus de confiance en moi et j'aurais eu le plaisir de rendre sa terre de Tournay la plus agréable de la province ? C'est à quoi j'avais mis toute mon application, et tous ceux qui ont vu Tournay peuvent lui en rendre témoignage . Quoi qu'il en soit, monsieur,son intérêt est évidemment joint au mien dans l'affaire des dîmes ; je me mets entièrement entre vos mains ; j'attends tout de votre protection : mon curé qui s'enivre tous les jours pourra boire plus que moi à votre santé ; mais il n'aura jamais autant de reconnaissance et d'attachement que j'en ai pour vous .

Je suis avec un profond respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire.

 

Une fluxion que j'ai depuis six mois sur les yeux, et qui me menace de la perte de la vue, me prive de l'honneur de vous écrire de ma main. »

1 Girod .

2 Claude-Charles De Brosses, grand bailli de Gex . Sur l'affaire du bois, voir lettre du 22 janvier 1761 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/01/22/rien-n-est-si-bon-que-la-messe-mais-les-assassins-ne-doivent-5748368.html et correspondance ultérieure .

Lire la suite

27/01/2019 | Lien permanent

Si la nature ne m’avait pas donné deux antidotes excellents, l’amour du travail et la gaieté, il y a longtemps que je se

... Est-ce le cas pour les Enarques de la promotion Voltaire de 1980 à celle de Charlie Hebdo de 2015 :

De la promotion Voltaire (ENA 1980) à Charlie Hebdo (2015) Université de Lorraine https://hal.univ-lorraine.fr › tel-04057869 de W Soumaho · 2022 — De la promotion Voltaire (ENA 1980) à Charlie Hebdo (2015) : présence de Voltaire dans la société et dans les textes (aire française et ...

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

1er avril [1768], et ce n’est pas un poisson d’avril.

Je reçois, mon cher ange, votre lettre du 26 mars. Vous n’avez donc pas reçu mes dernières , vous n’avez donc pas touché les quarante écus que je vous ai envoyés par M. le duc de Praslin 1, ou bien vous n’avez pas été content de cette somme ? Il est pourtant très vrai que nous n’avons pas davantage à dépenser, l’un portant l’autre. Voilà à quoi se réduit tout le fracas de Paris et de Londres. Serait-il possible que ma dernière lettre adressée à Lyon 2 ne vous fût pas parvenue ? Je vous y rendais compte de mes arrangements avec Mme Denis, et ce compte était conforme à ce que j’écris à M. de Thibouville . Ma lettre est pour vous et pour lui. Mandez-moi, je vous en conjure, si vous avez reçu cette lettre, qui doit être timbrée de Lyon 3. Cela est de la plus grande importance, car, si elle ne vous a pas été rendue, c’est une preuve que mon correspondant est au moins très négligent. Je vous disais que j’étais dans les bonnes grâces de M. Jeannel 4, et je vous le prouve, puisque c’est lui qui vous envoie ma lettre et La Princesse de Babylone 5.

Vous me demandez pourquoi j’ai chez moi un jésuite ? Je voudrais en avoir deux ; et, si on me fâche, je me ferai communier par eux deux fois par jour. Je ne veux point être martyr à mon âge. J’ai beau travailler sans relâche au Siècle de Louis XIV, j’ai beau voyager avec une Princesse de Babylone, m’amuser à des tragédies et des comédies, être agriculteur et maçon, on s’obstine à m’imputer toutes les nouveautés dangereuses qui paraissent. Il y a un baron d’Holbach à Paris qui fait venir toutes les brochures imprimées à Amsterdam chez Marc-Michel Rey. Ce libraire, qui est celui de Jean-Jacques, les met probablement sous mon nom. Il est physiquement impossible que j’aie pu suffire à composer toutes ces rapsodies . N’importe, on me les attribue pour les vendre.

J’ai lu la relation 6 dont vous me parlez . Elle n’est point du tout sage et modérée, comme on vous l’a dit . Elle me paraît très outrageante pour les juges. Jugez donc, mon cher ange, quel doit être mon état . Calomnié continuellement, pouvant être condamné sans être entendu, je passe mes derniers jours dans une crainte trop fondée. Cinquante ans de travaux ne m’ont fait que cinquante ennemis de plus, et je suis toujours prêt à aller chercher ailleurs, non pas le repos, mais la sécurité. Si la nature ne m’avait pas donné deux antidotes excellents, l’amour du travail et la gaieté, il y a longtemps que je serais mort de désespoir.

Dieu soit béni, puisque Mme d’Argental se porte mieux : Je me recommande a ses bontés.

Mes compliments je vous prie à Mme Gillet 7 .»

 

1 Un exemplaire de L’Homme aux quarante écus. Voir lettre du 2 novembre 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/06/02/ces-bagatelles-amusent-un-moment-deux-ou-trois-cents-oisifs-6445853.html

2 Cette lettre manque.

3 L'adresse de cette lettre ne nous est pas parvenue .

4 Sur Jeannel, intendant général des postes, voir lettre du 9 août 1756 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/08/05/je-m-unis-a-tout-hasard-aux-sentiments-des-saints-sans-savoi.html

7 Mme Gillet était non pas une bas-bleu comme on l'a dit, mais une femme d'esprit qui collaborait à la feuille de Fréron.

Lire la suite

25/11/2023 | Lien permanent

je ne vois pas pourquoi on exclurait d’un discours de réception des idées vraies et profondes, qui sont elles-mêmes la s

... A cette aune là je pense qu'aucun discours de réception aux différends postes à l'Assemblée Nationale n'est un exemple d'éloquence, car pour y trouver des idées " vraies et profondes" : bernicle ! Sinon ça se saurait .

Idées vraies et profondes, comme tu y vas mon cher Patriarche ; en cette année 2024 ça fait partie des raretés , particulièrement chez les politicien.ne.s qui n'ont de vrai que le désir de s'installer, et de profond que l'ignorance de la gestion d'une nation et leur fauteuil .

 

 

 

« A Charles Bordes

À Ferney 10 janvier 1769

Je trouve, mon cher ami, beaucoup de philosophie dans le discours de M. l’abbé de Condillac1. On dira peut-être que ce mérite n’est pas à sa place, dans une compagnie consacrée uniquement à l’éloquence et à la poésie : mais je ne vois pas pourquoi on exclurait d’un discours de réception des idées vraies et profondes, qui sont elles-mêmes la source cachée de l’éloquence.

Il y a dans le discours de M. Le Bault 2 des anecdotes sur mon ancien préfet l’abbé d’Olivet, dont je connais parfaitement la fausseté . Mais la satire ment sur les gens de lettres pendant leur vie, et l’éloge ment après leur mort.

Il serait à désirer que les lettres 3 concernant Nonotte eussent été imprimées 4 à Lyon, puisque les injures de ce maraud y ont été audacieusement imprimées . C’est d’ailleurs un factum dans une espèce de procès criminel. Il n’y a point de petit ennemi, quand il s’agit de superstition. Les fanatiques lisent Nonotte, et pensent qu’il a raison. Je crois que les Pères de l’Oratoire en seraient très aises, et qu’il y a bien d’honnêtes gens qui seraient charmés de voir l’insolente absurdité d’un ex-jésuite confondue. Voyez ce que vous pouvez faire pour la bonne cause. L’ouvrage d’ailleurs est très respectueux pour la religion, en écrasant le fanatisme.

Bonsoir, mon très cher confrère ; j’attends de Bâle un petit livre sur l’histoire naturelle 5, où il y a, dit-on, des choses curieuses . Je ne manquerai pas de vous l’envoyer. »

1 Pour sa réception à l’Académie française à la place de l’abbé d’Olivet, le 22 décembre 1768.

Voir les Discours prononcés dans l'Académie française le jeudi 22 décembre 1768 à la réception de M. l'abbé de Condillac, 1768 : https://www.academie-francaise.fr/discours-de-reception-de-labbe-de-condillac

2 L'édition Kehl corrige ce texte du manuscrit en M. Batteux . C'est effectivement l'abbé Batteux, directeur de l'Académie qui a reçu Condillac .

3 Nous ne connaissons de lettre concernant Nonotte, et dont Voltaire puisse parler ici, que celle qui est page 569 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome26.djvu/579

La Lettre anonyme, etc., qui est page 401 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/409

est postérieure au 10 janvier.

Mais Voltaire a peut-être aussi voulu parler des Éclaircissements historiques, qui sont tome XXIV, page 183 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome24.djvu/193

[note Moland édition Garnier ]

4 Texte de l'édition de Kehl : Il serait à désirer que les lettres concernant Nonnotte fussent réimprimées […]. Ces « Lettres » sont les Lettres […] sur Rabelais ; voir lettre du 4 octobre 1767 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/10/05/il-ne-faut-point-railler-les-scelerats-il-faut-les-pendre.html

Lire la suite

20/07/2024 | Lien permanent

malgré l'oubli de l'usage où l'on est de charger ces paquets de quelques pistoles qui rendent la consultation plus aisée

 ... On se rend compte que malgré tout il reste encore des électeurs .

Oh ! pardon, je mélange les consultations médicales avec les électorales, j'ai été abusé par la question d'argent donné qui facilite, il faut le reconnaitre, plus les unes que les autres , c'est vous qui voyez . Un ex-futur-ex président aux dents longues et aux grands moyens (qui ne lui coûtaient personnellement pas beaucoup) a démontré que certaines consultations amènent un diagnostic et un pronostic défavorables , l'argent ne fait pas tout, heureusement .

 

pistole.jpg

 

 

« A Charlotte-Sophie von Altenbourg, comtesse Bentinck

Aux Délices 29 juin [1758]

Non, madame, vous n'êtes point ingrate pour moi et vous l'êtes encore moins pour M. le comte Christiani 1. Je partais pour aller à la cour de l’Électeur palatin où il faut nécessairement que je passe quelques jours . Je reçus hier votre paquet à ma campagne par la voie d'un négociant de Genève et je ne vis point l'estafette . J'allai sur le champ chez Tronchin qui malheureusement n'entend pas l'italien . Il a fallu traduire le long mémoire du pauvre docteur de Milan et ce docteur a oublié, tout juste, de dire quel remède Vansuitten 2 a prescrit au malade . Malgré ce double embarras et malgré l'oubli de l'usage où l'on est de charger ces paquets de quelques pistoles qui rendent la consultation plus aisée, M. Tronchin a travaillé presque toute la nuit, et demain , vendredi 30 du mois, la consultation partira par la poste . C'est une bien faible ressource, on ne guérit pas de si loin, et si la nature ne s'en mêle, les médecins de Genève ne feront pas plus de bien que ceux de Milan .

Je rends compte à M. le comte Laurent Christiani de la commission que vous m'avez donnée . Je lui annonce la lettre de M. Tronchin et je pars pour Manheim .

Ce voyage, madame, est un triste contretemps pour moi . Je ne me trouverai point dans mon ermitage des Délices pour vous recevoir . Mes nièces vous en feront les honneurs et seront à vos ordres . Je reviendrai dans peu pour me joindre à elles dans le plaisir qu'elles auront pour vous servir .

Ce dérangement est un peu votre faute car il ne tenait qu'à vous de m'instruire de vos marches . J'aurais remis à un autre temps les engagements que j'ai pris avec la cour palatine, dont je ne peux actuellement me dispenser . Nulle raison politique ne devait vous empêcher de me donner vos ordres . Je ne prétends point et je n'ai jamais prétendu , quoi qu'on en dise, faire la paix entre les puissances . Je ne me mêle point des affaires des rois . Je ne pense qu'à ma chaumière et au bonheur de vous y faire ma cour .

Jugez à quel point je dois être fâché contre vous . Un mot de lettre écrit de Milan quinze jours plus tôt eût empêché mon voyage de Manheim . J'aurais volé en Savoie au devant de vous . Je vous aurais escortée à ma chaumière auprès de Genève et à ma cabane de Lausanne . Vous n'êtes point ingrate, mais vous êtes trop négligente et je ne vous pardonnerai que quand j'aurai l'honneur de vous revoir .

Je pars avec bien du chagrin et avec le respectueux et tendre attachement que j'ai toujours eu pour vous .

V. »

1 Le 23 juin 1758, la comtesse demandait à V* une consultation de Théodore Tronchin pour le comte Cristiani, chancelier du duché de Milan pour la reine Marie-Thérèse, alors gravement malade et qui devait mourir peu après ; voir Beltrame, comte Cristiani : http://books.google.fr/books?id=dOMauMaYA9EC&pg=PA276&lpg=PA276&dq=comte+cristiani+1758&source=bl&ots=LNW-YKMaZz&sig=pl_d7s0n3dKsppxUy_8dAO1FP8g&hl=fr&sa=X&ei=9UEqUvGxE6uw7QbW0oGgDg&ved=0CDkQ6AEwAQ#v=onepage&q=comte%20cristiani%201758&f=false

C'est de cette commission que s'acquitte ici V* . Voir une note de la lettre lettre du 12 mai 1758 à la comtesse . La comtesse écrivait le 23 juin: « Commencez s'il-vous-plait, monsieur, par lire le nom du lieu d'où je vous écris cette lettre [Milan] et puis dites-moi si les noms d'ingrate, de perfide, et toutes les galantes épithète dont vous m'honorez me vont au visage . »

Le comte Laurent Cristiani dont il est question plus loin est le fils du grand chancelier malade ; on parle de lui dans : http://www.cg06.fr/cms/cg06/upload/decouvrir-les-am/fr/fi...*

2 Gérard van Swieten, médecin et éminence grise de Marie-Thérèse , « tyran de l'esprit » .Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Gerard_van_Swieten

 

Lire la suite

06/09/2013 | Lien permanent

on respecterait encore plus votre patrie quand on verrait un homme de votre mérite, orné des plus belles connaissances,

... Qui cela peut-il être à l'heure où les premiers clips de nos politiciens viennent de nous être dévoilés ?

D'entrée de jeu, Marine la poissarde : out , fille à papa, bornée de "belles connaissances" ( tels : son père -étant tout sauf beau-, Philippot, and C°  ) .

Restent dix candidats . Faits pour "réussir dans toutes les cours"? Alors, direction cours de récréation et éjection de Cheminade, Lassalle, Asselineau , Dupont-Aignan , à inviter pour discours de noces et banquets , les occasions de rire n'étant pas à négliger .

"Homme de mérite" ? Fanfoué Fillon mérite un coup de pied au cul, ça pourrait toujours l'aider à monter dans les sondages, car il a dit clairement "je vous demande de me soutenir", dont acte .

Quant au reste de la troupe, je garde une certaine sympathie pour deux CSBI [Candidats Sincères Bien Identifiés] : Nathalie Arthaud et Philippe Poutou .

Les autres non cités ici , à voir plus en détail, si possible .

Par curiosité, voir : http://candidat-2017.fr/candidats.php

Résultat de recherche d'images pour "plus belles connaissances humour"

 

 

 

« A Ivan Ivanovitch Schouvalov

21 mai 1762 , aux Délices 1

Monsieur, j’ai reçu la lettre dont vous m’honorez du 17 mars v.st. Je suppose que toutes celles que je vous ai écrites vous sont parvenues, tant par la voie de la poste ordinaire que par celle de M. de Czernicheff .

Votre Excellence pourra me faire parvenir le paquet qu'elle a la bonté de me faire espérer, par les banquiers qui le feront tenir à des correspondants de Genève .

J’ai été à la mort depuis que je n’ai eu l’honneur de vous écrire, et j’ai perdu une partie de ma fortune par le contre-coup de nos malheurs publics ; mais j’oublie cette dernière disgrâce, et dès que j’aurai un peu réparé l’autre en reprenant un peu de santé, je me remettrai avec courage et avec plaisir à l’Histoire de Pierre-le-Grand.

J’avoue, monsieur, que je serais bien encouragé, si je pouvais en effet me flatter d’avoir l’honneur de vous voir et de vous posséder dans mes petites retraites ; il est digne de vous  d’imiter Pierre-le-Grand, en voyageant comme lui. Vous devez bien sentir que vous seriez accueilli partout comme vous devez l’être, votre voyage serait un triomphe continuel ; et on respecterait encore plus votre patrie quand on verrait un homme de votre mérite, orné des plus belles connaissances, et fait pour réussir dans toutes les cours.

J’aurais souhaité que vous eussiez pris le parti d’être ambassadeur : cela m’aurait du moins rapproché de Votre Excellence ; et, tout malade que je suis, j’aurais volé tôt ou tard pour avoir la consolation de vous voir.

Je suis mortifié de n’avoir aucune nouvelle de M. de Soltikoff 2 depuis son départ : je l’aimais véritablement, et j’avais eu pour lui toutes les attentions qu’il mérite.

Vous ne m’avez point dit, monsieur, si vous aviez reçu la lettre que je vous avais adressée par monsieur le grand-maître de l’artillerie 3. Il est triste d’avoir toujours à craindre que les paquets ne soient perdus. Je crois que le meilleur parti est d’écrire tout simplement par la poste. On doit savoir d’ailleurs que je ne vous parle point d’affaires d’État ; on ne fait point la guerre à la littérature.

Adieu, monsieur ; j’ai l’honneur d’être avec les sentiments les plus respectueux et les plus tendres,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Manuscrit original avec dernière ligne et signature autographe , celles-ci manquent dans les éditions .

La lettre à laquelle répond V* doit être celle du 19/30 mars 1762 où Shouvalov écrit notamment : « L'empereur m'ayant confié la direction du noble corps des cadets, dont il a été chef jusqu'ici, je me suis occupé sans relâche des arrangements qui peuvent avoir rapport à [ce] poste […] ; Il m'a fallu […] remplir les devoirs d'un emploi au-dessus de mon ambition et de mes forces et […] entrer dans les détails qui ne sont guère analogues à la philosophie dont je voudrais faire mon unique étude . Pardonnez [moi] donc […] de ne vous point avoir envoyé encore les remarques sur la condamnation du czarewitz. ». Il termine ainsi : « Une santé altérée, le dégoût pour tout ce qui fait le charme des esprits mondains, le désir de vous voir […] m'engageront à solliciter auprès de Sa Majesté impérial la permission de voyager, et de chercher loin du faste des cours , cette heureuse tranquillité de l'âme […] ; je sais que c'est au château de Ferney qu'elle a établi son séjour, c'est là que je l'irai trouver […] . »

2 Voir les lettres de Soltikof de février-mars 1762, et de Schouvalov du 1er/12 mai 1762 .

3 Celui-ci était mort le 16 janvier 1762 , voir lettre à d'Argental du 8 mars 1762 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/03/08/1.html

 

Lire la suite

10/04/2017 | Lien permanent

Page : 417 418 419 420 421 422 423 424 425 426 427