10/01/2010
Nous aurons bientôt la médiation et la comédie , ce qui raccommodera tout.
"C'est comme ça qu'on aime ! Exactement ! ... "
http://video.google.fr/videoplay?docid=914129657018377759...#

Volti dans un exercice qui lui plait, endosser une fausse identité pour informer un ami . Juste pour le fun comme on dirait de nos jours, car à première vue ses propos de doivent pas encourir les foudres de la censure . Enfin, je crois ...
« A Etienne-Noël Damilaville
10 janvier 1766
Vous m’avez recommandé, monsieur, de vous envoyer les petites brochures innocentes qui paraissent à Neuchâtel et à Genève. En voici une que je vous dépêche [1]. Il serait à souhaiter que nous ne nous occupassions que de ces gaietés amusantes ; mais nos tracasseries toutes frivoles qu’elles sont nous attristent . M. de Voltaire, votre ami a fait longtemps tout ce qu’il a pu pour les apaiser ; mais il nous a dit qu’il ne lui convenait plus de s’en mêler quand nous avions un résident qui est aussi sage qu’aimable. Nous aurons bientôt la médiation et la comédie [2], ce qui raccommodera tout.
Le petit chapitre intitulé Du czar Pierre et de J.-J. Rousseau [3] est fait à l’occasion d’une impertinence de Jean-Jacques, qui a dit dans son Contrat insocial [4] que Pierre Ier n’avait point de génie, et que l’empire russe sera bientôt conquis infailliblement.
Le dialogue sur les Anciens et les Modernes [5] est une visite de Tullia, fille de Cicéron, à une marquise française. Tullia sort de la tragédie de Catilina [6] et est tout étonnée du rôle qu’on y fait jouer à son père. Elle est d’ailleurs fort contente de notre musique, de nos danses et de tous les arts de nouvelle invention et elle trouve que les Français ont beaucoup d’esprit, quoiqu’ils n’aient point de Cicéron.
J’ai écrit à M. Fauche [7]. Voilà, Monsieur, les seules choses dont je puisse vous rendre compte pour le présent. J’ai l’honneur d’être, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Boursier. »
1- Le Sentiment des citoyens, attribué à Voltaire, publié le 27 décembre 1764
2- Hennin ; sur les « tracasseries de Genève », voir lettres des 3 et 10 janvier à Damilaville et aux d’Argental.
3- Il sera inclus dans l’Opinion en alphabet sous le titre de « Pierre le Grand et J.-J. Rousseau ».
4- Contrat social.
5- Les Anciens et les Modernes ou la Toilette de Mme de Pompadour, paru dans les Nouveaux mélanges, 1765.
6- Tragédie de Crébillon.
7- Samuel Fauche, de Neuchâtel, qui semble avoir imprimé certaines des Questions sur les miracles de Voltaire.
Fi de la morosité !...
http://video.google.fr/videoplay?docid=914129657018377759...
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08/01/2010
la renommée ne sait souvent ce qu’elle dit
http://www.youtube.com/watch?v=gQLtCoh5EaI&NR=1&f...
Petit clin d'oeil à Nicolas qui porte en lui un esprit voltairien ! Bon sang ne saurait mentir !

« A Claude-Etienne Darget [ 1]
A Lausanne 8 janvier 1758
Vous me demandez, mon cher et ancien compagnon de Potsdam, comment Cinéas [ 2] s’est raccommodé avec Pyrrhus. C’est premièrement que Pyrrhus fit un opéra de ma tragédie Mérope, et me l’envoya. C’est qu’ensuite il eut la bonté de m’offrir sa clé qui n’est pas celle du paradis, et toutes ses faveurs qui ne conviennent plus à mon âge. C’est une de ses sœurs qui m’a toujours conservé ses bontés qui a été le lien de ce petit commerce qui se renouvelle quelquefois entre le héros –poète –philosophe –guerrier –malin –singulier –brillant –fier -modeste etc. et le Suisse Cinéas retiré du monde [ 3]. Vous devriez bien venir faire quelque tour dans nos retraites soit de Lausanne soit des Délices. Nos conversations pourraient être amusantes. Il n’y a point de plus bel aspect dans le monde que celui de ma maison de Lausanne. Figurez-vous quinze croisées de face en cintre, un canal de douze grandes lieues de long que l’œil enfile d’un côté, et un autre de quatre à cinq lieues, une terrasse qui domine sur cent jardins, ce même lac qui présente un vaste miroir au bout de ces jardins, les campagnes de la Savoie au-delà du lac, couronnées par les Alpes qui s’élèvent jusqu’au ciel en amphithéâtre, enfin une maison où je ne suis incommodé que des mouches au milieu des plus rigoureux hivers. Madame Denis l’a ornée dans le goût d’une Parisienne. Nous y faisons beaucoup meilleure chère que Pyrrhus. Mais il faudrait un estomac, c’est un point sans lequel il est difficile aux Pyrrhus et aux Cinéas d’être heureux. Nous répétâmes hier une tragédie. Si vous voulez un rôle, vous n’avez qu’à venir. C’est ainsi que nous oublions les querelles des rois, et celles des gens de lettres : les unes affreuses, les autres ridicules.
On nous a donné la nouvelle prématurée d’une bataille entre M. le maréchal de Richelieu et M. le prince de Brunswik ; il est vrai que j’ai gagné aux échecs une cinquantaine de pistoles à ce prince mais on peut perdre aux échecs une cinquantaine de pistoles, et gagner à un jeu où l’on a pour second trente mille baïonnettes. Je conviens avec vous que le roi de Prusse a la vue basse, et la tête vive, mais il a le premier des talents au jeu qu’il joue, la célérité. Le fonds de son armée a été discipliné pendant plus de quarante ans. Songez comment doivent combattre des machines régulières, vigoureuses, aguerries qui voient leur Roi tous les jours, qui sont connues de lui, et qu’il exhorte chapeau bas à faire leur devoir ; souvenez-vous comme ces drôles-la font le pas de côté et le pas redoublé, comme ils escamotent les cartouches en chargeant, comme ils tirent six à sept coups par minute. Enfin leur maître croyait tout perdu, il y a trois mois il voulait mourir, il me faisait ses adieux en vers et en prose, et le voilà qui par sa célérité et par la discipline de ses soldats gagne deux grandes batailles en un mois, court aux Français, vole aux Autrichiens, reprend Breslau [ 4 ], a plus de quarante mille prisonniers et fait des épigrammes. Nous verrons comment finira cette sanglante tragédie si vive et si compliquée. Heureux qui regarde d’un œil tranquille tous ces grands évènements du meilleur des mondes possibles.
Je n’ai point encore tiré au clair l’aventure de l’abbé de Prades [ 5 ]; on l’a dit pendu. Mais la renommée ne sait souvent ce qu’elle dit. Je serais fâché que le roi de Prusse fît pendre ses lecteurs. Vous ne me dites rien de M. du Verney. Vous ne me dites rien de vous. Je vous embrasse bien tendrement et j’ai une terrible envie de vous voir.
Le Suisse V. »
1- Cette lettre fut publiée dans le Journal encyclopédique du 1er juillet 1758, et V* s’en plaindra à Darget le 17 juillet et le 16 septembre et à Pierre Rousseau, directeur du Journal, le 24 août . Il se plaindra qu’elle a été « falsifiée » : il y manque effectivement le dernier paragraphe.
2- Cinéas était un habile négociateur qui conseilla à Pyrrhus de cesser de faire la guerre et profiter de la vie.
3- Wilhelmine, la margravine de Bayreuth. V* ne fait pas de référence aux négociations secrètes de paix qui se faisaient par son intermédiaire.
4- Frédéric a remporté la bataille de Rossbach le 5 novembre 1757, Leuthen le 5 novembre, Breslau en décembre.
5- On disait qu’il était accusé d’avoir conspiré contre le roi de Prusse ; Frédéric le soupçonnait seulement d’indiscrétion et l’a fait mettre à Magdebourg.
07/01/2010
Je ne demande que le repos. Procurez-le à votre ami
http://www.dailymotion.com/video/xa5lr1_4-chants-othodoxe...
Il n'est jamais trop tard pour présenter des voeux , sincères, surtout alors que nos amis orthodoxes fêtent seulement Noël, et ne verront la nouvelle année qu'avec quelque retard sur une certaine partie du monde.
http://www.ina.fr/art-et-culture/musique/video/PAC9701017...
Il se peut que je fasse une piqure de rappel "meilleurs voeux" pour le nouvel an chinois, juif, arabe et tutti quanti ... Faites m'en souvenir à l'occasion !...
http://www.touslespodcasts.com/annuaire/radio-tv/radio-na...
Pour rejoindre l'actualité, moi fidèle auditeur de la RSR (Radio suisse romande ) qui échappe donc à un certain nombre de couillonnades matraquées sur nos belles antennes françaises, je suis quand même au courant du décès du célèbrissime M. Seguin, qui sur le tard a voulu physiquement se rapprocher de la chevrette provençale de Daudet.
Non, je ne veux pas dire qu'il s'est transformé en bouc, il en a simplemement adopté le système pileux facial . Pour le reste, je ne regarde pas en dessous de la ceinture.
Toujours est-il, que jusqu'à ce matin, dans le fond de ma conscience politique, je le pensais homme de gauche ! Vu ses fonctions, si j'avais été un peu plus impliqué dans un engagement de citoyen responsable et votant, j'aurais bien dû réaliser qu'il ne pouvait être que de droite . Mais baste, où il est maintenent, ça lui fait une belle jambe .
Je souhaite qu'il soit mort en pensant qu'il a fait de son mieux.
Pour revenir à des choses terre à terre, je plains les porteurs de son cercueil ! Le poids des mo(r)ts , comme dit la revue à deux balles sensée nous informer en nous distrayant (grâce à la pub qui en constitue la plus grande surface imprimée ) !
"Et à la fin de la nuit, le loup la mangea ..."
http://www.laposte.net/thematique/actualites/france/artic...
En voilà un que Volti pour qui Volti n'aurait sans doute pas levé le petit doigt : un riche père de gauche (?) est-il une circonstance atténuante pour les actes délictueux (?) d'un jeune Fabius aux comportements litigieux ? Laurent a participé en cavalier à l'émission (que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaitre ) "La Tête et les Jambes", le fiston semble se limiter à "Prends l'Oseille et tire-toi".
Et du même auteur , dans le même esprit
Voltaire a toujours aimé la conciliation, ce qui ne l'empèche pas d'être un attaquant redoutable s'il le faut .
« A Berger
A Cirey 8 janvier 1739
Mons cher ami, voulez-vous me rendre un signalé service ? Il faut voir Saint-Hyacinthe. Je ne le connais pas, direz-vous. Il faut le connaitre ; on connait tout le monde quand il s’agit d’un ami .Mais saint Hyacinthe est un homme décrié ; eh qu’importe ! Voici de quoi il s’agit. Il est cité dans le livre infâme de Desfontaines [ [1]], pour avoir écrit contre moi un libelle, intitulé : Déification d’Aristarchus [ [2]] . Or je ne l’ai jamais offensé, ce Saint-Hyacinthe. Pourquoi donc imprimer contre moi des impostures si affreuses ? Veut-il les soutenir ? Je ne le crois pas. Que lui coutera-t-il de signer qu’il n’en est pas l’auteur ? ou qu’il les déteste, ou qu’il ne m’a point eu en vue ? Exigez de lui un mot qui lave cet outrage et qui prévienne les suites d’une querelle cruelle. Faites-lui écrire un petit mot dont il résulte la paix et l’honneur, je vous en conjure. Courez, rendez-moi ce service. Je ne demande que le repos. Procurez-le à votre ami.
Voltaire. »
[1] La Voltairomanie ou lettre d’un jeune avocat en forme de mémoire, et réponse au libelle du sieur Voltaire intitulé « Le Préservatif », 12 décembre 1738.
[2] L’Apothéose ou la déification d’Aristarchus, où il est question d’une rixe entre V* et un officier, Beauregard, en présence d’un acteur, au pont de Sèvres. V* demandera à Quinault de faire signer un certificat disant « que l’affaire prétendue entre lui et un officier est une calomnie, qui n’a pas le moindre fondement etc . »
15:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, berger, cirey, saint hyacinthe, desfontaines, paix, libelle
06/01/2010
Pardonnez-leur de danser toujours parce qu’ils ne peuvent marcher droit
Ne voyez aucune allusion à l'histoire récente de certains concitoyens qui ont un peu forcé sur ces choses dont l'abus est dangereux .
http://www.youtube.com/watch?v=ZtTJ03wuwZk

Un certain président rassurant, comme une hyène qui vient de jeuner 6 mois, que je me suis bien gardé de voir faire son show du 1er janvier, a dit, (si mes renseignements sont exacts),
"Nous avons évité le pire" !
Lui peut-être, nous surement pas ! La preuve , il est toujours là !
Je ne fais qu'un voeu, en réponse à cet élu :"Carla, s'il vous plait, cassez-lui les ... pour qu'il ne joue pas les prolongations en 2012 ! " . Enfin, je dis les ..., c'est vous qui voyez, vous attaquez ce qui sert le moins d'abord !
http://www.dailymotion.com/video/x7cyte_pour-eviter-ca_news
Je n'appartiens à aucun syndicat, ni parti, si ce n'est celui du rire, et ma foi, quand on fait une recherche avec "éviter" -sous entendu "le pire"-, j'ai trouvé cette bande annonce (FO) que je dédie à tous ceux qui espèrent un mieux, que ce soit grâce à FO ou autre syndicat .
« A Pierre-Joseph Thoulier d’Olivet
A Cirey ce 6 janvier 1736
par Vassy, en Champagne
Je vous gronde de ne m’avoir point écrit mais je vous aime de tout mon cœur de m’avoir envoyé ce petit antidote [Discours prononcé le 25 août 1735 avant la distribution des prix ] contre le poison de Marivaux et consorts. Votre discours est un des bons préservatifs contre la fausse éloquence qui nous inonde. Franchement nous autres Français nous ne sommes guère éloquents, nos avocats sont des bavards secs, nos sermonneurs des bavards diffus, et nos faiseurs d’oraisons funèbres, des bavards ampoulés. Il nous resterait l’histoire, mais un génie naturellement éloquent veut dire la vérité, et en France on ne peut pas la dire. Bossuet a menti avec une élégance et une force admirable tant qu’il a eu à parler des anciens Egyptiens, des Grecs et des Romains, mais dès qu’il est venu aux temps plus connus, il s’est arrêté tout court. Je ne connais après lui aucune histoire où je trouve du sublime, que la Conjuration de Saint-Réal [La Conjuration des Espagnols contre la république de Venise en MDCXVII, Paris 1674 ]. Le France fourmille d’historiens, et manque d’écrivains.
De quoi diable vous avisez-vous de louer les phrases hyperboliques, et les vers enflés de Balzac ? Voiture tombe tous les jours et ne se relèvera point, il n’a que trois ou quatre petites pièces de vers par où il subsiste. Sa prose est digne du chevalier d’Her [Fontenelle publia les Lettres diverses de m. le chevalier d’Her***, 1683 ], et vous allez louer la naïveté du style le plus pincé, guindé, et le plus ridiculement recherché. Laissez là ces fadaises, c’est du plâtre et du rouge sur le visage d’une poupée. Parlez-moi des Lettres provinciales ; quoi ! vous louez Fénelon d’avoir de la variété ! Si jamais homme n’a eu qu’un style, c’est lui. C’est partout Télémaque. La douceur, l’harmonie, la peinture naïve et riante de choses communes, voilà son caractère. Il prodigue des fleurs de l’Antiquité qui ne se fanent point entre ses mains, mais ce sont toujours les mêmes fleurs. Je connais peu de génies variés tels que Pope, Adisson, Machiavel, Leibnits, Fontenelle. Pour M. de Fénelon je ne vois pas par où il mérite ce titre. Permettez-moi, mon cher abbé, de vous dire librement ma pensée. Cette liberté est la preuve de mon estime.
J’ajouterai que la palme de l’érudition est un mot plus fait pour le latin du père Jouvancy [Joseph de Jouvancy, auteur de De ratione discendi et docendi, 1706] que pour le français de l’abbé d’Olivet.
Je vous demande en grâce à vous et aux vôtres de ne vous jamais servir de cette phrase : nul style, nul goût dans la plupart sans y daigner mettre un verbe. Cette licence n’est pardonnable que dans la rapidité de la passion, qui ne prend pas garde à la marche naturelle d’une langue, mais dans un discours médité, cet étranglement me révolte. Ce sont nos avocats qui ont mis ces phrases à la mode. Il faut les leur laisser aussi bien que le Journal de Trévoux. Mais je m’aperçois que je remontre à mon curé. Je vous en demande très sérieusement pardon. Si je voulais vous dire tout ce que j’ai trouvé d’admirable dans votre discours, je serais bien autrement importun.
J’ai reçu hier la Vie de Vanini [La Vie et les sentiments de Lucilio Vanini, 1717, de David Durand que V* a demandé à d’Olivet le 30 novembre 1735 ; Vanini a été exécuté en 1619], je l’ai lue. Ce n’était pas la peine de faire un livre. Je suis fâché qu’on ait cuit ce pauvre Napolitain mais je brûlerais volontiers ses ennuyeux ouvrages, et encore plus l’histoire de sa vie .Si je l’avais reçue un jour plus tôt, vous l’auriez avec ma lettre.
Un petit mot encore, je vous prie, sur le style moderne. Soyez bien persuadé que ces messieurs ne cherchent des phrases nouvelles que parce qu’ils manquent d’idées. Hors M. de Fontenelle, patriarche respectable d’une secte ridicule, tous ces gens là sont ignorants et n’ont point de génie .Pardonnez-leur de danser toujours parce qu’ils ne peuvent marcher droit. Adieu, s’il y a quelque chose de nouveau dans la littérature, secouez votre infâme paresse et écrivez à votre ami V.
12:56 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, olivet, cirey, vassy, fontenelle
04/01/2010
il n’avait été qu’un enfonceur de portes ouvertes
« A Etienne-Noël Damilaville
Ferney 3 janvier 1766
M. le duc de Choiseul m’a écrit, mon cher frère, qu’il avait parlé pour la pension de M. d’Alembert [L’Académie des Sciences avait demandé le report de la pension de Clairaut, mort en mai 1765, sur d’Alembert, ce qui n’est pas encore fait .] , qu’il n’y avait nul mérite et qu’il n’avait été qu’un enfonceur de portes ouvertes.
Voilà ses propres paroles [Exact, dans le billet de Choiseul du 26 décembre 1765. Il dira ensuite qu’il ne se soucie pas de l’opinion de d’Alembert et « hait à mort la vanité et la présomption philosophique »], je vous prie instamment de les rapporter à notre cher philosophe. Avouons donc que M. le duc de Choiseul a une belle âme. Ce qu’il a fait pour les Calas le prouve assez. Rendons-lui justice. Il y a eu malentendu dans la protection qu’il a donnée à l’infâme pièce de Palissot [Les Philosophes, qui suscitent polémiques ]. Il lui avait fait entendre que les philosophes décrieraient le ministère. Nous ne devons pas avoir de meilleur protecteur que ce ministre généreux qui a de l’esprit comme s’il n’était pas grand seigneur, qui a fait de très beaux vers [Ode contre le roi de Prusse au printemps 1759 qui répondait à une ode de Frédéric contre Louis XV ; en réalité l’ode n’est pas de Choiseul, mais sans doute de Palissot], même étant ministre, qui a sauvé bien des chagrins à de pauvres philosophes, qui l’est lui-même autant que nous, qui le paraîtrait davantage si sa place le lui permettait.
Mon cher frère, tout est tracasserie, et personne ne s’entend. On m’a rendu compte de la prétendue lettre à Mme du Deffand [Est-ce celle du 16 octobre 1765 où il lui reproche son aversion pour les pauvres philosophes, ou celle du 6 novembre 1765 où il présente sa Philosophie de l’Histoire , lettre qu’il lui demande de brûler ? ], dont quelques fragments ont couru sous mon nom. Elle n’en a point donné de copies ; quelques indiscrets en ont retenu des bribes. Il s’agissait d’une mauvaise plaisanterie que je reprochais à Mme du Deffand. Vous savez en pareil cas combien on augmente ou combien on altère le texte.
Lisez ces vers [L’Epitre à Henri IV sur ce qu’on avait écrit à l’auteur que plusieurs citoyens de Paris s’étaient mis à genoux devant la statue équestre de ce prince, pendant la maladie du dauphin.] avec vos amis ; mais n’en laissez point prendre de copies. Je ne veux pas me brouiller avec les moines de Sainte-Geneviève ; Soufflot trouverait mes vers mauvais [l’Epître disait : « La fille qui naquit aux chaumes de Nanterre / Pieusement célèbre en ce temps ténébreux (Ste Geneviève) / De l’empire français n’est point la protectrice. » . Soufflot est l’architecte de l’église Ste Geneviève.].
Je vous embrasse tendrement.
Voltaire. »
05:20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, damilaville, choiseul, d alembert, palissot, du deffand, soufflot, geneviève, louis xv, prusse