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01/08/2024

Je sais bien que l’Europe n’approuve pas cette guerre , mais les ministres peuvent voir ce que le reste du monde ne voit pas. D’ailleurs cette entreprise étant une fois commencée, on ne pourrait guère y renoncer sans honte

... Voila ce qui résume fort bien les prises de position vis-à-vis de l'Ukraine contre la Russie . Jusqu'où peut-on aller sans faire tuer nos concitoyens ? Nos ministres sont-ils/elles si clairvoyant.e.s ? Je crains bien que non .

 

 

 

« A François-Gabriel Le Fournier, chevalier de Wargemont

16è janvier 1769

Le solitaire, monsieur, à qui vous daignez vous expliquer avec confiance, le mérite du moins par son extrême attachement pour vous. Il pense comme vous qu’on casse des cruches de terre avec des louis d’or, et qu’après s’être emparé d’un pays très misérable, il en coûtera plus peut-être pour le conserver que pour l’avoir conquis. Je ne sais s’il n’eût pas mieux valu s’en déclarer simplement protecteur avec un tribut ; mais ceux qui gouvernent ont des lumières que les particuliers ne peuvent avoir. Il se peut que la Corse devienne nécessaire dans les dissensions qui surviendront en Italie. Cette guerre exerce le soldat et l’accoutume à manœuvrer dans un pays de montagnes.

Je sais bien que l’Europe n’approuve pas cette guerre , mais les ministres peuvent voir ce que le reste du monde ne voit pas. D’ailleurs cette entreprise étant une fois commencée, on ne pourrait guère y renoncer sans honte.

Si vous voyez M. de Chauvelin, je vous supplie, monsieur, d’ajouter à toutes vos bontés celle de lui dire combien je m’intéresse à lui. Je lui suis attaché depuis longtemps. La nation corse ne méritait guère qu’on lui envoyât l’homme le plus aimable de France et le plus conciliant.

Je vous tiens très heureux, monsieur, de pouvoir passer votre hiver auprès d’un homme aussi généralement aimé et estimé que M. le prince de S*** 1. Il me semble que le public rend justice à la noblesse de son âme, à sa générosité, à sa bonté, à sa valeur et à la douceur de ses mœurs. Il m’a fait l’honneur de m’écrire une lettre 2 à laquelle j’ai été extrêmement sensible ; cela console ma vieillesse, qui devient bien infirme. Je mourrai en le respectant. Je vous en dis autant, monsieur, et du fond de mon cœur. 

V.»

1 Soubise .

2 Dans cette lettre qui est connue, le prince de Soubise remercie V* de l'envoi de « quatre volumes du Siècle de Louis XIV et de Louis XV » et de la délicatesse avec laquelle il a traité de la bataille de Rossbach .

31/07/2024

nous avons fait l'un et l'autre une perte irréparable

.... C'est ce que des millions d'humains peuvent dire, eux que l' on nomme "réfugiés climatiques" comme ceux-ci : https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&sca_esv=ce82090d53e0c143&sca_upv=1&q=journ%C3%A9e+des+refugi%C3%A9s+climatiques&tbm=vid&source=lnms&fbs=AEQNm0CbCVgAZ5mWEJDg6aoPVcBgI7gqy1MWN_foW-2bXqL-6ukzTZrOgTJezOvupujciHo_wQNaLKARSPBkIckK5Y73kxQAoxgSrXU0bSEuVWHijxo8E3Z21ux48lXg_Ge8u0G6oRUsZ6vRKiKw1VkbLOHjdJ6FcrNvp5pxOqmFaSJcLTZVQam4vhZL7BhKd0b7yYrn7wPzr2ba8zIC5PqbisVdXVAh4w&sa=X&ved=2ahUKEwjThMbJ1NCHAxUF8LsIHabGDh0Q0pQJegQIDhAB&biw=1280&bih=539&dpr=3#fpstate=ive&vld=cid:2be1adf1,vid:MOObDTR2PzU,st:0

Une journée mondiale le 20 juin leur est consacrée et n'empêche rien, des milliards d'humains n'ont pas encore compris que la lutte pour contrer la dégradation du climat n'est pas à remettre à demain ; il est vrai que pour eux les profits immédiats sont prioritaires .

 

 

« A Mme Le Glaive Duclos

16 janvier 1769 1

[Sur la mort de Damilaville] . Je joins mes regrets aux vôtres, madame, nous avons fait l'un et l'autre une perte irréparable [...].

1 Le manuscrit était inséré dans un exemplaire de l'édition des Œuvres de l'édition Didot (Paris, mai 1827 ) qui fut mis en vente par Besombes ( Paris,mai 1925 ) . La destinataire, de Châlons-sur-Marne était une amie de Damilaville et de d'Alembert . On possède sa réponse à V* du 26 janvier 1769 ; elle l'y remercie des livres qu'il se propose de lui envoyer.

Voir : https://obtic.huma-num.fr/elicom/voltaire/doc.jsp?id=1769-01-26_49227

et : https://archives.bge-geneve.ch/archive/fonds/MS_IMV_CD/inventaire/n:103?RECH_S=le+glaive&RECH_eadid=MS_IMV_CD&Archives.RECH_Valid=&type=inventaire

30/07/2024

les faits qui confondent très impertinemment

... Ce sont les performances des athlètes vus par les yeux des pantouflards critiques du sport .

Bravo à tous, champions ou non, qui avez travaillé si dur . Suivre vos exploits est un régal d'émotions . Quels moments de vie intenses .

 

 

« A Gabriel Cramer

[Janvier 769]

Le résumé de l'Histoire des mœurs commencera à la page 332 que l'on renvoie avec une petite correction.

Après ce résumé viendra le supplément qui sera refondu avec les faits qui confondent très impertinemment critiques des Patouillet et des Nonotte . Mais pour en venir à bout et pour éviter les redites il faut avoir continuellement devant les yeux les deux premiers volumes de l'in quarto .1

L'Histoire de l'encyclopédie pourra trouver place dans les additions au Siècle de Louis XV.

Mons. 2

1 La lettre se réfère à l'édition quarto . Les matières mentionnées cmmencent respectivement aux pages 425 , 437 et 485 du volume X.

2 Le manuscrit se termine ainsi .

29/07/2024

Il faudra bien qu’il vienne enfin un temps où la religion ne puisse faire que du bien...Le sang coulera tant que les hommes auront la folie atroce de penser que nous devons détester ceux qui ne croient pas ce que nous croyons

... "Il faudra ...", mais pourquoi donc ne peut-on enfin dire "le temps est venu" que la religion , au moins elle, ne fait que du bien, les meurtriers ayant déjà suffisamment de prétextes à invoquer pour continuer leurs massacres .

Ami Voltaire qui t'entend, qui t'écoute ?

 

 

 

« A Jean Gal-Pomaret 1

15 janvier 1769

Je vois, monsieur, que vous pensez en homme de bien et en sage . Vous servez Dieu sans superstition, et les hommes sans les tromper. Il n’en est pas ainsi de l’adversaire que vous daignez combattre. S’il y avait dans vos cantons plusieurs têtes aussi chaudes que la sienne, et des cœurs aussi injustes, ils seraient bien capables de détruire tout le bien que l’on cherche à faire depuis plus de quinze ans. On a obtenu enfin qu’on bâtirait sur les frontières une ville dans laquelle seule tous les protestants pourront se marier légitimement 2.

Il y aura certainement en France autant de tolérance que la politique et la circonspection pourront le permettre. Je ne jouirai pas de ces beaux jours, mais vous aurez la consolation de les voir naître. Il faudra bien qu’il vienne enfin un temps où la religion ne puisse faire que du bien. La raison, qui doit toujours paraître sans éclat, fait sourdement des progrès immenses. Je vous prie de lire avec attention ce que m’écrit de Toulouse un homme constitué en dignité, et très-instruit :

« Vous ne sauriez croire combien augmente dans cette ville le zèle des gens de bien, et leur amour et leur respect pour 3… Quant au parlement et à l’ordre des avocats, presque tous ceux qui sont au-dessous de trente-cinq ans sont pleins de zèle et de lumières, et il ne manque pas de gens instruits parmi les personnes de condition. Il est vrai qu’il s’y trouve plus qu’ailleurs des hommes durs et opiniâtres, incapables de se prêter un seul moment à la raison ; mais leur nombre diminue chaque jour, et non-seulement toute la jeunesse du parlement, mais une grande partie du centre, et plusieurs hommes de la tête, vous sont entièrement dévoués. Vous ne sauriez croire combien tout a changé depuis la malheureuse aventure de l’innocent Calas. On va jusqu’à se reprocher l’arrêt contre M. Rochette et les trois gentilshommes : on regarde le premier comme injuste, et le second comme trop sévère », etc. 

Vous voyez, monsieur, qu’il n’était pas possible d’introduire la raison autrement que sur les ruines du fanatisme. Le sang coulera tant que les hommes auront la folie atroce de penser que nous devons détester ceux qui ne croient pas ce que nous croyons. Plût à Dieu que l’évêque de Soissons, Fitz-James, vécût encore, lui qui a dit dans son mandement 4 que nous devons regarder les Turcs mêmes comme nos frères ! Quiconque dit : « Tu n’as pas ma foi, donc je dois te haïr », dira bientôt : « Donc je dois t’égorger. » Proscrivons, monsieur, ces maximes infernales ; si le diable faisait une religion, voilà celle qu’il ferait.

Je vous dois de tendres remerciements des sentiments que vous avez bien voulu me témoigner ; comptez qu’ils sont dans le fond de mon cœur.J'ai l'honneur, etc. »

2 Versoix : ce projet ne fut point exécuté. (Beuchot.)

3 M. de Voltaire supprime ici le mot vous, qui se trouve dans la lettre de M. l’abbé Audra, baron de Saint-Just, chanoine de la métropole, et professeur royal d’histoire, à Toulouse. Il a été depuis si violemment persécuté par les dévots qu’il en est mort de chagrin. (Kehl.) — L’abbé Audra, né à Lyon en 1714, mourut à Toulouse le 17 septembre 1770 ; voir page 497 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome11.djvu/517

Voir lettre du 5 janvier 1769 à Faubert Lavaysse : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/07/17/il-est-vrai-qu-il-s-y-trouve-plus-qu-ailleurs-des-hommes-dur-6507350.html

28/07/2024

Jouissez, couple aimable

... Et comme Marie-José Pérec et Teddy Riner, allumez le feu de la concorde transmis par le centenaire Charles Costes

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https://www.lepoint.fr/sport/qui-est-charles-coste-l-athl...

 

 

 

« A Jean-Baptiste-Jacques-Elie de Beaumont et à

Anne-Louise Blanc-Mesnil Élie de Beaumont

14è janvier 1769

Jouissez, couple aimable ; je suis fâché seulement que votre terre soit près de Rouen, et non pas près de Lyon.

Mon ami Damilaville n'était pas né, à ce qu'on m'a dit, loin de votre terre ; je voudrais être votre vassal avec lui . Les gens qui pensent ont fait en lui une grande perte, il était le plus intrépide ennemi des persécuteurs .

Vous apprendrez sans doute avec satisfaction que tout commence à changer dans le parlement de Toulouse . Un homme assez considérable de ce pays-là 1 me mande que la moitié du parlement est déjà éclairée ; que toute la jeunesse pense comme vous et moi , qu'elle dit hautement qu'il faut faire amende honorable de l'arrêt contre les Calas . Je sonde ces bonne dispositions pour savoir si les Sirven peuvent en sûreté aller purger leur décret à Toulouse . Vous avez tellement éclairci cette abominable affaire 2 , qu'il me paraît impossible qu'ils n'obtiennent pas une entière justice, pourvu que le fanatisme ne s'en mêle pas .

Ce que vous m'écrivez sur la chute originale a été traité fort au long dans plusieurs livres nouveaux, et entre autres dans L'A.B.C. traduit de l’anglais de Huy . Vous savez qu'un Africain nommé Augustin est le premier qui ait levé cet étrange livre . Il n'en est pas dit un seul mot dans les Évangiles . Saint Paul n'en a parlé que fort obscurément . Il se passa près de quatre cents ans avant qu'on agitât cette question . Vous savez que Paris n'a pas été bâti en en un jour ; l'édifice dont vous parlez a été bâti en quinze siècles, aussi passe-t-il pour être fort irrégulier . Je crois que ni vous ni Mme de Canon n'habitez guère cette maison ridicule . J'irai bientôt trouver Damilaville dans la sienne, mais malheureusement, on ne peut ni s'écrire ni se parler dans le pays qu'il habite . En attendant , soyez sûrs que je vous serai attaché jusqu'au dernier moment de ma vie avec autant d'amitié que d'estime .

V. »

27/07/2024

J'aime assez les choses qui ne ressemblent à rien ... la sagesse est l'ennemie mortelle de la passion et des traits hardis

... C'est ainsi qu'il faut voir et aimer cette fabuleuse cérémonie d'ouverture des XXXIIIè Jeux Olympiques modernes à Paris , que j'ai trouvée parfois un peu trop savante et intellectuelle ( par ses références historiques ) mais majoritairement extraordinaire et qui grave la mémoire d'images inoubliables, ça fait du bien .

Il a plu ( sans François Hollande ), ça a plu . On a vu  les athlètes  entre deux eaux rester enthousiastes et les spectateurs aussi : pari réussi .

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Beau spectacle, belle union

 

 

« A Marie-Louise Denis

13 janvier [1769] à Ferney

Ma chère nièce, toute votre maison a donc été malade et vous aussi . Pour moi, je n'ai que mes misères ordinaires auxquelles la nature m'a livré depuis 75 ans . Le mieux qu'on puisse faire dans une vieillesse aussi infirme, c'est de se cacher . Il n'y a point de marmotte dans les Alpes qui entende cela mieux que moi .

Quand vous vous porterez bien, mandez-moi des nouvelles du pauvre feu La Touche 1. J'aime assez les choses qui ne ressemblent à rien . Je suis possesseur d'un cinquième acte un peu changé . Je vois qu'il a fallu le rendre sage ; et la sagesse est l'ennemie mortelle de la passion et des traits hardis . C'est un grand malheur de marcher entre les épines, les pas sont mal assurés et on se pique les jambes . Vous pourriez fort bien me mander des nouvelles sans vous piquer , elles m’intéressent beaucoup. Vous savez combien je suis attaché au patron. On me fit craindre pour lui .

On dit que le maréchal de Richelieu a la mémoire affaiblie comme les oreilles . Je me flatte cependant qu'il n’oubliera pas tout à fait qu'il vous doit de l'argent ; et vous êtes sûre d'en toucher de M. de Lézeau.

Je suis bien faible pour entreprendre le voyage de la rue Bergère, mais j'en ai grande envie . Cela dépendra un peu de feu La Touche, mais Mme la comtesse de Vergy a retenu toutes les places au coche 2.

Je vous embrasse de toute mon âme et de toutes mes forces .

N. B. – Voici un cinquième acte.

Il y a une grosse faute au troisième . Ce ne sont que deux vers à changer mais ils sont essentiels.

Acte I, scène 1

Cézène

Et pourquoi vous charger de l'affreux ministère

Que partage avec vous un sénat sanguinaire ?

Iradan

On prétend qu'à ce peuple il faut un joug de fer,

Une loi de terreur et des juges d'enfer,

Je sais 3 qu'au Capitole on a plus d'indulgence ;

Mais le cœur en ces lieux se ferme à la clémence.

Dans ce sénat sanglant les tribuns ont leur voix.

J'ai souvent amolli la dureté des lois ;

Mais ces juges altiers contestent à ma place

Le droit de pardonner, le droit de faire grâce.

Cézène

Ah ! Laissons cette place et ces hommes pervers 4

etc.

A la scène des prêtres et de la petite fille, le pontife doit dire :

Et la loi la condamne, au lieu de dire

Et moi je la condamne.

Nous ne souffrirons pas qu'un soldat , un profane

En corrompe à nos yeux la sévère équité 5

etc. »

1 C'est-à-dire Les Guèbres, attribués par V* à La Touche.

2V* craint que Gabrielle de Vergy ne soit jouée avant Les Guèbres ; voir lettre du 1er janvier 1769 à Mme Denis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/07/09/vous-ferez-l-usage-que-vous-croirez-le-plus-convenable-tout-6506351.html

3 Et non fais comme le donne l'édition Besterman .

4Les Guèbres, Ac. I, sc. 1 ; c'est ce texte qui fut retenu .

5Ibid Ac.. I, sc. 4 ; ce texte fut ultérieurement modifié .

26/07/2024

pour la canaille, le plus sot ciel et la plus sotte terre est ce qu’il lui faut ...Ce sont les assassins que je ne ménage pas

... Une fois de plus l'actualité du détestable est personnifiée par Poutine et Bachar al-Assad, réunion de deux assassins notoires en vue de normaliser des relations avec un faux jeton de leur acabit Erdogan sur le dos  d'un quatrième

https://www.sudouest.fr/international/russie/russie-vladi...

On est bien loin de l'esprit de trêve olympique .

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

13è janvier 1769

Je vous renvoie, mon cher philosophe, votre chien danois 1 ; il est beau, bien fait, hardi, vigoureux, et vaut mieux que tous les petits chiens de manchon qui lèchent et qui jappent à Paris.

Votre discours est excellent ; vous êtes presque le seul qui n’alliez jamais ni en deçà ni en delà de votre pensée. Je vous avertis que j’en ai tiré copie.

Le Mercure devient bon. Il y a des extraits de livres fort bien faits. Pourquoi n’y pas insérer ce discours, dont le public a besoin 2? La Bletterie a juré à son protecteur et à sa protectrice qu’il ne m’avait point eu en vue, et qu’il me permettait de ne pas me faire enterrer. Il dit aussi qu’il n’a point songé à Marmontel quand il a parlé de Bélisaire, ni au président Hénault quand il a dit que  la précision des dates est le sublime des historiens sans talents . J’ai tourné le tout en plaisanterie.

À propos du président Hénault, le marquis de Bélestat m’a écrit 3 enfin qu’il était très fâché que j’eusse douté un moment que le portrait de Sha-Abas et du président fussent de lui ; qu’ils sont très ressemblants ; que tout le monde est de son avis, et qu’il n’en démordra pas. J’ai envoyé sa lettre à notre ami Marin. On a fait trois éditions de ce petit ouvrage en province, car la province pense depuis quelques années. Il s’est fait un prodigieux changement, par exemple, dans le parlement de Toulouse ; la moitié est devenue philosophe, et les vieilles têtes rongées de la teigne de la barbarie mourront bientôt.

Oui, sans doute, je regrette Damilaville . Il avait l’enthousiasme de saint Paul, et n’en avait ni l’extravagance ni la fourberie : c’était un homme nécessaire . Oui, oui, l’A, B, C est d’un membre du parlement d’Angleterre, nommé Huet 4, parent de l’évêque d’Avranches, et connu par de pareils ouvrages. Le traducteur est un avocat nommé La Bastide ; ils sont trois de ce nom-là : il est difficile qu’ils soient égorgés tous les trois par les assassins du chevalier de La Barre.

Vous n’avez point les bons livres à Paris : le Militaire philosophe 5les Doutes 6l’Imposture sacerdotale 7le Polissonisme dévoilé 8. Il paraît tous les huit jours un livre dans ce goût en Hollande. La Riforma d’Italia 9 qui n’est pourtant qu’une déclamation, a fait un prodigieux effet en Italie. Nous aurons bientôt de nouveaux cieux et une nouvelle terre, j’entends pour les honnêtes gens ; car, pour la canaille, le plus sot ciel et la plus sotte terre est ce qu’il lui faut.

Je prends le ciel et la terre à témoin que je vous aime de tout mon cœur.

Pardieu, vous êtes bien injuste de me reprocher des ménagements pour gens puissants, que je n’ai connus jadis que pour gens aimables à qui j’ai les dernières obligations, et qui même m’ont défendu contre les monstres. En quoi puis-je me plaindre d’eux ? est-ce parce qu’ils m’écrivent pour me jurer que La Bletterie jure qu’il n’a pas pensé à moi ? Faudrait-il que je me brûlasse toujours les pattes pour tirer les marrons du feu ? Ce sont les assassins que je ne ménage pas. Voyez comme ils sont fêtés tome Ier et tome IV du Siècle. »

1 Un discours tenu par d'Alembert à l'Académie, au roi de Danemark, reproduit intégralement dans la Correspondance littéraire , VIII, 212 et suiv.

Voir lettre du 12 décembre 1768 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/06/18/empechez-que-ce-siecle-ne-soit-la-chiasse-du-genre-humain-6503374.html

« Le roi de Danemark ne m’a presque parlé que de vous dans la conversation de deux minutes que j’ai eu l’honneur d’avoir avec lui : je vous assure qu’il aurait mieux aimé vous voir à Paris que toutes les fêtes dont on l’a accablé . » Lettre de d'Alembert du 17 décembre 1768 .

2 Le Mercure de France de janvier 1769 ne publia qu'un bref résumé de ce discours , voir I, 147-148.

4 Voltaire pourrait avoir eu l'idée de ce personnage à partir de celui d'un anglais nommé William Hewet, dont on conserve une lettre à V*, écrite de Genève le 3 décembre 1758 annonçant sa venue au philosophe .

6 Les Doutes sur la religion, suivis de l’analyse du Traité théologi-polilique de Spinosa, 1767. in-12. L’Analyse est du comte de Boulainvilliers ; les Doutes, de Guéroult de Pival, mort en 1772.

Voir : https://data.bnf.fr/fr/12171113/gueroult_de_pival/fr.pdf

et : https://data.bnf.fr/de/14474771/examen_de_la_religion/de.pdf

8 C’est-à-dire Le Christianisme dévoilé. (Beuchot.). — Voir lettre du 20 décembre 1768 à Villevieille : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/06/26/je-mourrai-console-en-voyant-la-veritable-religion-c-est-a-d-6504508.html

Voir lettre du 15 décembre 1766 à Mme de saint-Julien : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/03/16/il-est-entierement-oppose-a-mes-principes.html