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13/01/2025

Vous devez être excédé de lettres et de demandes

... M. Bayrou, dont celles de l'UNEDIC , qui ne sont pas des moindres : https://www.europe1.fr/economie/les-gestionnaires-de-lune...

 

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

À Ferney, 10 juillet [1769]

Le plus vieux et le plus attaché de vos serviteurs ne vous importune, monseigneur, que dans les occasions qui fournissent quelque excuse. Vous devez être excédé de lettres et de demandes. C’est toujours au doyen de notre Académie que j’écris, et non au gouverneur, au premier gentilhomme de la chambre . Vous souviendrez-vous des Mémoires de Maintenon faits par La Beaumelle, et de quelques autres brochures dans ce goût qui calomnient les plus grandes maisons du royaume, à commencer par la famille royale ? Vous daignâtes me marquer ce que vous en pensiez. Il paraît dans les pays étrangers un livre assez curieux écrit dans ce style . C’est l’Histoire du Parlement. Je n’ai rien à dire contre le premier volume . Il fait voir que le parlement tire toute sa dignité des pairs. J’ai toujours été de cet avis. Il y a d’ailleurs, dans ce premier tome, des anecdotes dont je ne puis juger : il faudrait avoir consulté le greffe. Je doute que La Beaumelle ait été à portée de fouiller dans ces archives, et c’est ce qui me fait suspendre toute idée sur le nom de l’auteur.

Pour le second tome, j’en trouve la fin non seulement fausse, mais excessivement indécente, et je l’ai dit hautement. L’auteur, quel qu’il soit, s’efforce de faire passer son ouvrage sous mon nom : je suis accoutumé à ces impostures ; mais celle-ci m’afflige. Je suis d’un corps dont vous êtes le principal membre, et dont le roi est protecteur. À la bonne heure qu’on impute à ma vieillesse de plats vers et de la prose languissante . Mais certainement il y a, dans ce second tome, des expressions impertinentes qui devraient déplaire au roi, s’il n’était pas trop grand pour être seulement instruit de ces sottises. Dans l’indignation où je suis qu’on m’impute un pareil ouvrage, je ne puis que déclarer que l’auteur est très mal avisé, qu’il est un impudent, et que je réprouve son livre, qui est plein d’erreurs.

Qu’il me soit encore permis de dire à mon doyen (dont je suis le doyen par l’âge 1) qu’on achève actuellement deux nouvelles éditions du Siècle de Louis XIV et de Louis VI . Ce sont des monuments de votre gloire. Ils vaudraient mieux si j’avais pu recevoir vos instructions ; mais tels qu’ils sont, puis-je les présenter au roi ? Daignerez-vous me dire si je dois prendre cette liberté ? M. de Saint-Florentin le croit ; mais je ne veux rien faire sans vous consulter. Donnez-moi cette marque de vos anciennes bontés. Je suis honteux de vous ennuyer d’une si longue lettre ; mais mon héros a toujours été indulgent pour moi. Je me flatte qu’il le sera encore, en daignant m’apprendre par un mot ce que je dois faire. J’attends cette grâce de lui, et je lui renouvelle mon très vieux et très tendre respect. »

1 Ce même 10 juillet 1769 V* écrit de sa main le testament suivant . Voir aussi la lettre du 17 juillet 1769 à Mme Denis .

« Mon testament

J'institue Mme Denis ma nièce mon héritière universelle.

Je prie M. l'avocat Christin d'être mon exécuteur testamentaire .

Je lègue à Mme de Florian ma nièce cinquante mille francs .

à M. l'abbé Mignot cinquante mille francs

à M. d'Hornoy cinquante mille francs

à M. Christin un diamant de mille francs outre les quinze cents francs dont je lui ai fait don

au sieur Wagnière dix mille francs, outre les 400 livres de rente viagère qu'il a sur la Compagnie des Indes entre les mains de M. de Laleu

au sieur Bigex douze cents francs

à M. et Mme Dupuits un diamant de 2400 livres

à Mlle Maton 400 livres

à la Barbéra 300 livres

à mes domestiques mille francs que Mme Denis partagera entre eux convenablement

aux pauvres de Ferney, s'il y en a , 300 livres

à la famille Sirven 2400 livres.

Mes papiers sont en ordre, on les trouvera dans mon grand secrétaire avec de l'argent comptant.

Plus je lègue à M. l'abbé Adam trois mille francs

à Mlle Nollet cinq cents livres.

Je prie ma nièce Mme Denis de rendre à M. Durey les billets que j'ai de lui si je meurs avant l’échéance . Je le prie d'accepter un diamant de 2400 livres.

On nourrira toute la maison jusqu'à l'arrivée de Mme Denis ou jusqu'aux ordres de ses ayant cause .

Comme il est difficile d'assembler sept personnes pour signer ce testament selon l'usage et que je peux mourir avant que le notaire soit venu, j'avertis que les testaments olographes sont valables au pays de Gex.

F. M. Arouet de Voltaire

10 juillet 1769

Plus je lègue à M. Thieriot un diamant de deux mille quatre cents livres .

10 juillet . F. M. Arouet de Voltaire

Si je meurs de ma maladie j'avertis Mme Denis que M. Jeanmaire trésorier de M. le duc de Virtemberg est redevable de vingt-six mille livres qu'il a pris [sic] sur mes quartiers .

Je ne dois que le courant . Toutes mes affaires sont en règle . »

je ne garderai pas le silence

...

 

« A Marie-Louise Denis

9è juillet 1769

Voici, ma chère nièce, une seconde lettre que j'écris au Mercure 1. L'accusation me paraît si absurde que je ne crois pas devoir la traiter trop sérieusement . J'ai lu dans l'ouvrage qu'on m'impute deux ou trois chapitres qui ne peuvent être tirés que d'un greffe poudreux où je n'ai certainement jamais mis les pieds . Plusieurs personnes attribuent cet ouvrage à La Beaumelle . Il est vrai que c'est son style, mais Dieu me garde d'accuser jamais personne, ni même de laisser la moindre soupçon sur mon ennemi quand je n'ai pas de preuve 2. Tout ce que je sais c'est que l'ouvrage a été imprimé en Hollande, et je vous ai mandé que M. Marin m'en avait instruit . Je ne doute pas que les personnes qui aiment la vérité et qui s'intéressent à moi, ne fassent taire la calomnie ; leur voix sera plus écoutée que la mienne , mais je ne garderai pas le silence . Je vais écrire même à M. le maréchal de Richelieu .

Cette ridicule aventure vient mal à propos pour Les Guèbres 3 . Ma plus grande consolation est dans la vivacité avec laquelle vous prenez cette affaire . Je suis persuadé que vous, vos parents et vos amis vous détromperez ceux qui se plaisent à être les échos de l'imposture . J'en ai essuyé beaucoup dont je me suis moqué, mais celle-ci m'afflige . Il faut attendre un mois pour que les journaux parlent, et pendant ce temps-là les bruits redoublent .

Je n'aurai M. le marquis de Jaucourt que vers le 15 .

Vous pouvez m'écrire, ma chère nièce, sous l'enveloppe de M. Lavergne 4 .

Je vous embrasse tendrement . Je suis pénétré de votre amitié . »

2 Ces deux phrases depuis Plusieurs personnes […] ont été biffées par Mme Denis sur l'original .

3 Ces deux mots sont biffés par Mme Denis qui y substitue l'ouvrage que vous aimez .

4 Phrase biffée par Mme Denis .

12/01/2025

le commencement m’en paraît un peu superficiel, et la fin indécente

... Je suis prêt à parier que ce sera, en gros, le jugement des opposants à François Bayrou après son discours de politique générale . A combien la mise ? Petits joueurs , perdants d'avance ...

 

 

 

« A Jacques Lacombe

À Ferney 9è juillet 1769 1

Toutes les réflexions, monsieur, toutes les critiques que j’ai lues sur les ouvrages nouveaux, dans votre Mercure, m’ont paru des leçons de sagesse et de goût. Ce mérite assez rare m’a fait regarder votre ouvrage périodique comme très utile à la littérature.

Vous ne répondez pas des pièces qu’on vous envoie. Il y en a une sous mon nom, page 53 du Mercure de juillet 2 ; c’est une lettre qu’on prétend que j’ai écrite à mon cher B***3. On me fait dire en vers un peu singuliers, à mon cher B****  que le feu est l’âme du monde, que sa clarté l’inonde, que le feu maintient les ressorts de la machine ronde, et que sa plus belle production est la lumière éthérée, dont Newton le premier, par sa main inspirée, sépara les couleurs par la réfraction ».

Je vous avoue que je ne me souviens pas d’avoir jamais écrit ces vers à mon cher B., que je n’ai pas l’honneur de connaître. Je vous ai déjà mandé qu’on m’attribuait trois ou quatre cents pièces de vers et de prose que je n’ai jamais lues.

On a imprimé sous mon nom les amours de Moustapha et d’Elmireles aventures du chevalier Ker 4, et j’espère que bientôt on m’attribuera le parfait teinturier, et l’histoire des conciles en général.

Je vous ai déjà parlé de l’Histoire du Parlement. Cet ouvrage m’est enfin tombé entre les mains. Il est, à la vérité, mieux écrit que les amours de Moustapha ; mais le commencement m’en paraît un peu superficiel, et la fin indécente. Quelque peu instruit que je sois dans ces matières, je conseille à l’auteur de s’en instruire plus à fond, et de ne point laisser courir sous mon nom un ouvrage aussi informe, dont le sujet méritait d’être approfondi par une très longue étude et avec une grande sagesse. On est accoutumé d’ailleurs à cet acharnement avec lequel on m’impute tant d’ouvrages nouveaux. Je suis le contraire du geai de la fable, qui se paraît des plumes du paon 5. Beaucoup d’oiseaux, qui n’ont peut-être du paon que la voix, prennent plaisir à me couvrir de leurs propres plumes ; je ne puis que les secouer, et faire mes protestations, que je consigne dans votre greffe de littérature.

J’ai l’honneur d’être, monsieur, avec toute l’estime que je vous dois, votre, etc. »

1 Copie Beaumarchais-Kehl ; éd. « Lettre de M. de Voltaire à l'auteur du Mercure » , Mercure de France, août 1769 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k38132576/f44.item.r=voltaire

2 Mercure de France , juillet 1769, I, 53-55 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3813256s/f53.item

3 Cette lettre, intitulée « Réponse à M. D. B... 1750 »qui est terminée par quelques vers, avait été imprimée, comme étant de Voltaire, dans la cinquième partie des Nouveaux Mélanges, publié en 1768. En désavouant de nouveau cette lettre dans une note de son Dialogue de Pégase et du vieillard (voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Dialogue_de_P%C3%A9gase_et_du_vieillard/%C3%89dition_Garnier ), Voltaire transcrit quelques-uns des vers dont il cite ici quelques impressions.

4 Ces titres paraissent inventés . Pourtant le premier fait penser aux relations –tendues-- de Catherine II et du sultan Moustapha .

5 La Fontaine, livre IV, « Le geai paré des plumes du paon » : https://www.texteslibres.fr/livre-4-des-fables-de-la-fontaine/le-geai-pare-des-plumes-du-paon-1172.html

je ne dois accuser personne, je dois me borner à me justifier

... Dur dur n'est-ce pas M. Sarkozy quand on a choisi des alliés répréhensibles pour des affaires véreuses . Est-il donc si difficile d'être honnête quand on est ambitieux ? Le pouvoir à tout prix n'est bon que pour des pourris .

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

9 de Juillet [1769]

Mon cher philosophe, je vous envoie la copie d’une lettre que je suis obligé d’écrire à l’auteur du Mercure 1. Je vois que cette Histoire du Parlement, qu’on m’impute, est la suite de ce petit écrit qui parut, il y a dix-huit mois, sous le nom du marquis de Bélestat, et qui fit tant de peine au président Hénault 2. C’est le même style ; mais je ne dois accuser personne, je dois me borner à me justifier. Il me paraît absurde de m’attribuer un ouvrage dans lequel il y a deux ou trois morceaux qui ne peuvent être tirés que d’un greffe poudreux, où je n’ai assurément pas mis le pied ; mais la calomnie n’y regarde pas de si près.

Je vous demande en grâce d’employer toute votre éloquence et tous vos amis pour détruire un bruit encore plus dangereux que ridicule. Ma pauvre santé n’avait pas besoin de cette secousse. Je me recommande à votre amitié.

J’attends M. de Schomberg 3. Il voyage comme Ulysse, qui va voir des ombres. Mon ombre vous embrasse de tout son cœur. »

2 Voltaire avait glissé, dans la première page de son Histoire, un petit mot contre le président Hénault, afin de dérouter plus complètement les lecteurs. (Georges Avenel.)

Sur l'Examen de l'Histoire de Henri IV par M. de Bury, voir la lettre du 13 septembre 1768 à Henault : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/03/26/m-6491423.html

Il faut se résigner et agir

... Consigne pour tous ! Go !

 

 

« A Marie-Louise Denis

[8 juillet 1769]

Je vous écrivis hier, ma chère nièce, au départ du courrier un petit mot fort à la hâte . J’ai passé une partie de la nuit à lire ces lettres à Mme de La Neuville 1, etc., que cette pauvre Duchesne veut imprimer . La première dit, que je déteste cordialement le pape et la cour de Rome . Il n'y a pas d'apparence que je sois jamais canonisé sur ces lettres-là ; il faut être bien damné pour me jouer de pareils tours .

Vous savez que mes papiers sont un peu à l’abandon dans ma bibliothèque . Vous savez qu'on m'en vola beaucoup, vous n'ignorez pas qui les vola 2. J'ai perdu un très gros manuscrit de recherches sur l'histoire de France dont je vois bien qu'on a extrait tout ce qui regarde le parlement . Le voleur a compilé tout à sa mode . Je lui ai encore bien de l'obligation de n'avoir pas mis mon nom à la tête quand il l'a fait imprimer . Tout ce que je vous dis est dans la vérité la plus exacte, et ce qui est bien étrange c'est que je ne puis publier cette vérité parce que je n'en ai point de preuve convaincante, parce que je me ferais un ennemi très dangereux qui serait appuyé par des ennemis plus dangereux encore ; parce qu'ayant été volé, falsifié, et calomnié, je passerai moi-même pour un calomniateur .

Je suis donc très fermement résolu à me justifier sans accuser personne, et non moins résolu à braver toutes les suites de ce mystère d'iniquité malgré mon âge et mes maladies . Je crois qu'il suffit à présent de faire courir tant qu'on pourra, ma lettre à M. Marin 3. Il est surtout nécessaire que notre ami d'Hornoy en distribue plusieurs copies à ses chers confrères, et surtout que les avocats généraux en aient leur provision . Je vous envoie encore deux copies ; il vous sera aisé, ma chère amie, d'en inonder le public ; un écrivain des charniers Saint-Innocent en peut faire cent par jour . Je voudrais bien que Les Guèbres fussent déjà imprimés pour faire diversion dans Paris que milord Bolingbroke appelait la ville causeuse . Il faut se résigner et agir . Je m'en rapporte à votre amitié, et je prends pour ma part la patience . Tout ce que vous me mandez dans votre grande lettre 4 est très vrai . Vous me paraissez bien informée, et ce qui n'est pas moins vrai c'est que vous faites la consolation de ma vie, et que je vous aime bien tendrement . Confiez, je vous prie, aux anges ce que je vous écris. »

1 Le volume qui est pus précisément décrit dans la lettre du 22 juillet 1769 à d'Argental ( http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/09/correspondance-annee-1769-partie-24.html ) ne fut pas publié . Sur le manuscrit de 189 pages passé chez Charavay à la vente Guys le 7 novembre 1860, V* a traité d'"imposteur celui qui a vendu ces lettres à la veuve Duchesne ».

2 La harpe que Mme Denis nomme expressément dans une lettre du 10 août à son oncle : « Je n'ai montré les trois lettres que vous m'avez écrites sur La harpe qu'à M. d'Argental et à mon neveu, comme vous me l'aviez recommandé . Quand vous viendrez à Paris vous verrez que cela est suffisant . Je n'ai pas vu La Harpe quatre fois depuis que je suis ici . Comme vous m'avez dit sans cesse que c’était lui qui était cause de notre séparation, que je n'y ai rien compris et que je n'y comprends rien encore, tout cela m'a fait une telle impression que je l'ai prié de ne me pas voir . »

4Lettre du 25 juin qui n'est pas connue .

11/01/2025

C’est un des [plus] méchants hommes qui respirent... J’ai d’ailleurs agi en tout conformément aux lois

... Constat regrettable de Jean-Noël Barrot, suite à l'expulsion ratée de l'influenceur algérien "Doualemn" renvoyé chez nous illico presto : https://www.msn.com/fr-fr/actualite/monde/si-l-alg%C3%A9r...

Au fait, qui a payé l'avion pour le retour de cet indésirable ?

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

7è juillet 1769 1

Eh bien ! mon cher ange, il faut vous dire le fait. Vous savez 2 déjà que j’ai affaire à un fanatique qui a été vicaire de paroisse à Paris, et qui a donné à plein collier dans les billets de confession. C’est un des [plus] méchants hommes qui respirent. Il a ôté les pouvoirs a mon aumônier, et il me ménageait une excommunication formelle qui aurait fait un bruit diabolique. Il faisait plus, il prenait des mesures pour me faire accuser au parlement de Dijon d’avoir fait des ouvrages très impies. Je sais bien que j’aurais confondu l’accusateur devant Dieu et devant les hommes ; mais il en est de ces procès comme de ceux des dames qui plaident en séparation ; elles sont toujours soupçonnées. Je n’ai fait aucune démarche dans toute cette affaire que par le conseil de deux avocats. J’ai toujours mis mon curé et ma paroisse dans mes intérêts. J’ai d’ailleurs agi en tout conformément aux lois du royaume.

À l’égard du Massillon, j’ai pris juste le temps qu’un président du parlement de Dijon est venu dîner chez moi 3, et c’était une bonne réponse aux discours licencieux et punissables que le scélérat m’accusait d’avoir tenus à table. En un mot, il m’a fallu combattre cet homme avec ses propres armes. Quand il a vu que j’entendais parfaitement cette sorte de guerre, et que j’étais inattaquable dans mon poste, le croquant s’y est pris d’une autre façon ; il a eu la bêtise de faire imprimer les lettres qu’il m’avait écrites, et mes réponses.

Il a poussé même l’indiscrétion jusqu’à mettre dans ce recueil une lettre de M. de Saint-Florentin, sans lui en demander la permission. Il a eu encore la sottise d’intituler cette lettre de façon à choquer le ministre. Je me suis contenté d’envoyer le tout à M. le comte de Saint-Florentin, sans faire la moindre réponse. Le ministre m’en a su très bon gré, et a fort approuvé ma conduite.

Vous n’êtes pas au bout. L’énergumène, voyant que je ne répondais pas, et que j’étais bien loin de tomber dans le piège qu’il m’avait tendu si grossièrement, a pris un autre tour beaucoup plus hardi et presque incroyable. Il a fait imprimer une prétendue profession de foi qu’il suppose que j’ai faite par-devant notaire, en présence de témoins 4 ; et voici comme il raisonnait :

« Je sais bien que cet acte peut être aisément convaincu de faux, et que, si on voulait procéder juridiquement, ceux qui l’ont forgé seraient condamnés ; mais mon diocésain n’osera jamais faire une telle démarche, et dire qu’il n’a pas fait une profession de foi catholique. »

Il se trompe en cela comme en tout le reste, car je pourrais bien dire aux témoins qu’on a fait signer : « Je souscris à la profession de foi, je suis bon catholique comme vous ; mais je ne souscris pas aux sottises que vous me faites dire dans cette profession de foi, faite en style de Savoyard. Votre acte est un crime de faux, et j’en ai la preuve ; l’objet en est respectable, mais le faux est toujours punissable. Qui est coupable d’une fraude pieuse pourrait l’être également d’une fraude à faire pendre son homme. »

Mais je me garderai bien de relever cette turpitude ; le temps n’est pas propre ; il suffit, pour le présent, que mes amis en soient instruits ; un temps viendra où cette imposture sacerdotale sera mise dans tout son jour.

Je vous épargne, mon cher ange, des détails qui demanderaient un petit volume, et qui vous feraient connaître l’esprit de la prêtraille, si vous ne le connaissiez pas déjà parfaitement. Je suis dans une position aussi embarrassante que celle de Rezzonico et de Ganganelli. Tout ce que je puis vous dire, c’est que j’ai de bonnes protections à Rome. Tout cela m’amuse beaucoup, et je suis de ce côté dans la sécurité la plus grande.

Je me tirerai de même de l’Histoire du Parlement, à laquelle je n’ai ni ne puis avoir la moindre part. C’est un ouvrage écrit, il est vrai, d’un style rapide et vigoureux en quelques endroits ; mais il y a vingt personnes qui affectent ce style ; et les prétendus connaisseurs en écrits, en écriture, en peinture, se trompent, comme vous savez, tous les jours dans leurs jugements. Je crois vous avoir mandé que j’ai écrit sur cet objet une lettre a M. Marin 5, pour être mise dans le Mercure.

Un point plus important à mon gré que tout cela, c’est que M. Marin ne perde pas un moment à faire imprimer Les Guèbres ; c’est une manière sûre de prouver l’alibi. Il est physiquement impossible que j’aie fait à la fois l’Histoire du Siècle de Louis XV, les Guèbres, l’Histoire du Parlement, et une autre œuvre dramatique que vous verrez incessamment. Je n’ai qu’un corps et une âme ; l’un et l’autre sont très chétifs : il faudrait que j’en eusse trois pour avoir pu faire tout ce qu’on m’attribue.

Encore une fois, il ne faut pas que M. Marin perde un seul moment. Je passerai pour être l’auteur des Guèbres, je m’y attends bien, et voilà surtout pourquoi il faut se presser. On a déjà envoyé à Paris des exemplaires de l’édition de Genève. La pièce a beau m’être dédiée 6, on soupçonnera toujours que le jeune homme qui l’a composée est un vieillard. Je n’ai pu m’empêcher d’en envoyer un exemplaire à Mme la duchesse de Choiseul, parce que je savais qu’un autre prenait les devants, et que je suis en possession de lui faire tenir tout ce qu’il y a de nouveau dans le pays étranger. On se prépare à faire une nouvelle édition des Guèbres à Lyon ; il faut donc se hâter prodigieusement à Paris.

Voilà, mon cher ange, un détail bien exact de toutes mes bagatelles littéraires et dévotes. Je vous prie de faire part de cette lettre à Mme Denis. Je ne puis lui écrire par cet ordinaire ; je suis malade, la tête me tourne, la poste part.

À l’ombre de vos ailes.

V.

Mais surtout comment se porte Mme d’Argental ? »

1 Copie Beaumarchais-Kehl ; éd. Kehl .

2 Ed. : saviez .

10/01/2025

Il conseille au vainqueur de donner la préférence aux dames françaises sur les dames turques

... Serait-ce du Retailleau dans le texte et dans l'esprit  ? Bien qu'on soit à des années lumière d'un éventuel "grand remplacement" [sic], statistiquement les dames françaises sont quand même plus faciles à rencontrer, mais n'excluons pas d'autres éventualités , les goûts et les couleurs ... Ne nous voilons pas la face, la police va avoir un surcroit de travail, comme si elle n'en avait pas assez à ce jour ; et vous , femmes ne vous voilez pas non plus aux yeux de tous , un diktat va sortir, le laïcisme risque de monter d'un cran superflu.

 

 

« A François-Gabriel Le Fournier, chevalier de Wargemont

L’ermite de Ferney réitère ses remerciements et ses compliments au digne Romain, tribun de la légion de Soubise. Il conseille au vainqueur de donner la préférence aux dames françaises sur les dames turques. Il sera mieux reçu, après avoir soumis la Corse, qu’après avoir suivi un bacha dans les déserts d’Okzacou. Plus tôt il reviendra, plus tôt 1 il jouira.

Le vieil ermite offre ses prières à Dieu pour les succès en amour et en guerre du très digne tribun d’une légion romaine.

V.

7è juillet 1769 . 2»

1 Plutôt […] plutôt sur l'original .

2 Original ; éd. Cayrol , induit en erreur par le texte qu'il suit d'une copie ancienne, date la lettre du 1er juillet au lieu du 7, bien que le chiffre soit corrigé sur la copie .