16/04/2025
Les prêtres ne doivent que prier Dieu pour nous, et non pas nous juger.
... J'admire cette prise de position voltairienne qui tombe bien à propos alors que la fin du Carême arrive pour nous ; comment ne pas entièrement l'approuver ?
Des humains ont eu l'astuce de créer des dieux tyranniques, à leur image, pour imposer leurs diktats et vivre impunément aux dépends de leurs concitoyens . Il est temps que cela cesse .
« A Joseph-Michel-Antoine Servan
27è septembre 1769
C’est votre vie, monsieur, et non pas la mienne, qui est utile au monde. Je ne suis que vox clamantis in deserto 1; et j’ajoute que, vien rauco e perde il canto e la favella 2. De plus, cette vieille voix ne part que du gosier d’un homme sans crédit, et qui n’a d’autre mission que celle de son amour pour une honnête liberté, de son respect pour les bonnes lois, et de son horreur pour des ordonnances et des usages absurdes, dictés par l’avarice, par la tyrannie, par la grossièreté, par des besoins particuliers et passagers, et qui enfin, pour comble de démence, subsistent encore quand les besoins ne subsistent plus. Il n’appartient, monsieur, qu’à un magistrat tel que vous d’élever une voix qui sera respectée, non-seulement par son éloquence singulière, mais par le droit de parler que vous avez dans la place où vous êtes 3.
C’est à vous de montrer combien il est absurde qu’un évêque se mêle de décider des jours où je puis labourer mon champ et faucher mes prés sans offenser Dieu ; combien il est impertinent que des paysans, qui font carême toute l’année, et qui n’ont pas de quoi acheter des soles comme les évêques, ne puissent manger, pendant quarante jours, les œufs de leur basse-cour sans la permission de ces mêmes évêques 4. Qu’ils bénissent nos mariages, à la bonne heure 5; mais leur appartient-il de décider des empêchements ? Tout cela ne doit-il pas être du ressort des magistrats ? Et ne portons-nous pas encore aujourd’hui les restes de ces chaînes de fer dont ces tyrans sacrés nous ont chargés autrefois ? Les prêtres ne doivent que prier Dieu pour nous, et non pas nous juger.
J’attends avec impatience que vous mettiez ces vérités dans tout leur jour, avec la force de votre style, qui ne perdra rien par la sagesse de votre esprit : vous rendrez un service éternel à la France.
Vous nous ferez sortir du chaos où nous sommes, chaos que Louis XIV a voulu en vain débrouiller. Nos petits-enfants s’étonneront peut-être un jour que la France ait été composée de provinces devenues, par la législation même, ennemies les unes des autres. On ne pourra comprendre à Lyon que les marchandises du Dauphiné aient payé des droits d’entrée comme si elles venaient de Russie. On change de lois en changeant de chevaux de poste ; on perd au delà du Rhône un procès qu’on gagne en deçà.
S’il y a quelque uniformité dans les lois criminelles, elle est barbare. On accorde le secours d’un avocat à un banqueroutier évidemment frauduleux, et on le refuse à un homme accusé d’un crime équivoque.
Si un homme qui a reçu un assigné pour être ouï est absent du royaume, et s’il ignore le tour qu’on lui joue, on commence par confisquer son bien. Que dis-je ! la confiscation, dans tous les cas, est-elle autre chose qu’une rapine ? et si bien rapine, que ce fut Sylla qui l’inventa. Dieu punissait, dit-on, jusqu’à la quatrième génération 6 chez le misérable peuple juif, et on punit toutes les générations chez le misérable peuple welche. Cette volerie n’est pas connue dans votre province ; mais pourquoi réduire ailleurs des enfants à l’aumône, parce que leur père a été malheureux ? Un Welche dégoûté de la vie, et souvent avec très grande raison, s’avise de séparer son âme de son corps ; et, pour consoler le fils, on donne son bien au roi, qui en accorde presque toujours la moitié à la première fille d’opéra qui le fait demander par un de ses amants ; l’autre moitié appartient de droit à messieurs les fermiers généraux.
Je ne parle pas de la torture 7, à laquelle de vieux grands chambriers appliquent si légèrement les innocents comme les coupables. Pourquoi, par exemple, faire souffrir la torture au chevalier de La Barre ? était-ce pour savoir s’il avait chanté trois chansons contre Marie-Madeleine, au lieu de deux ? est-ce chez les Iroquois, ou dans le pays des tigres, qu’on a rendu cette sentence ? L’impératrice de Russie, de ce pays qui était si barbare il y a cinquante ans, m’a mandé 8 qu’aujourd’hui, dans son empire de deux mille lieues, il n’y a pas un seul juge qui n’eût fait mettre aux Petites-Maisons de Russie les auteurs d’un pareil jugement ; ce sont ses propres paroles.
Puisse votre faible santé, monsieur, vous laisser achever promptement le grand ouvrage que vous avez entrepris, et que l’humanité attend de vous ! Nous avons croupi, depuis Clovis, dans la fange ; lavez-nous donc avec votre hysope, ou du moins cognez-nous le nez dans notre ordure, si nous ne voulons pas être lavés.
M. l’abbé de Ravel a dû vous dire à quel point je vous estime, je vous aime, et je vous respecte. Souffrez que je vous le dise encore dans l’effusion de mon cœur.
V. »
1 La voix de celui qui crie dans le désert
Isaïe, XL, 3 : https://saintebible.com/isaiah/40-3.htm
et Jean, I. 23 : https://www.biblegateway.com/passage/?search=Jean%201%3A23-25&version=LSG
2 S'enroue et perd son chant et sa parole . Voltaire a déjà cité ce vers italien dans une lettre à Querini du 4 juillet 1752 : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome37.djvu/453
3 Servan est avocat général à Grenoble .
4 On a là un des thèmes de la Requête à tous les magistrats : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome28.djvu/351; voir lettre du 7 juin 1769 à Dupont de Nemours : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/12/09/le-gouvernement-nous-doit-toute-sa-protection-c-est-un-crime-de-lese-humani.html
5 V* critique la confusion entre le contrat (civil) et le sacrement (religieux) dans L'A.B.C. et dans « Mariage II » 1771 des Questions sur l'Encyclopédie .
Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/372
6 Deutéronome, V. 9 : https://www.aelf.org/bible/Dt/5
7 Une commission gouvernementale est précisément en train d’étudier le problème de la torture juridique, ou question .
8 Dans la lettre citée à propos de celle du 2 septembre 1769 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/03/13/on-ne-peut-guere-forcer-les-hommes-a-l-admiration-sans-excit-6539566.html
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15/04/2025
je vous prie d'ajouter aux sommes précédentes, celle de
... quelques millions, une bagatelle [sic], parce que, tout bonnement, le solde du budget de l’État (budget général, budgets annexes et comptes spéciaux) est de -138 996 millions d’euros : https://www.budget.gouv.fr/reperes/budget/articles/chiffr...
Ne pas augmenter les impôts, dit vous avez, Maître Bayrou ; que la force soit avec nous pour supporter les conséquences d'un tel mensonge sans devenir fous .
« A Gaspard-Henri Schérer
Je vous remercie, monsieur, et je vous prie d'ajouter aux sommes précédentes, celle de 1504 livres dont je vous envoie la lettre de change .
Ayez la bonté de vouloir payer pour moi au sieur Rosset, libraire de Lyon, un petit billet qu'il vous présentera incessamment.
J'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire .
27è septembre 1769 à Ferney. »
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14/04/2025
Quiconque ose penser n’est pas né pour me croire
... Une mention spéciale à Laurent Wauquier et quelques autres penseurs de haut niveau : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-du-lundi-14-avril-2025-3532181
Et dire qu'ils sont payés pour ça !
« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu
27è septembre 1769 à Ferney
Mon héros voit bien que, lorsque j’ai sujet d’écrire, je barbouille du papier sans peine, et que je l’ennuie souvent : mais quand je n’ai rien à dire, je respecte ses occupations, ses plaisirs, sa jeunesse, et je me tais. Il y a quarante-neuf ans que mon héros prit l’habitude de se moquer de son très humble serviteur ; il la conserve et la conservera. Je n’y sais autre chose que de faire le plongeon, et d’admirer la constance de monseigneur à m’accabler de ses lardons.
Je n’étais pas informé de la circonstance du brayer 1 ; il y a mille traits de l’histoire moderne qui échappent à un pauvre solitaire retiré au milieu des neiges.
S’il était permis de vous parler sérieusement, je vous dirais que je n’ai jamais chargé M. de Chimène de vous parler des Guèbres, ni de vous les présenter. Il a pris tout cela sous son bonnet, qui n’est pas celui du cardinal de Ximénès, dont il prétend pourtant descendre en ligne droite. Je lui suis très obligé d’aimer les Guèbres, mais je ne l’ai assurément prié de rien. J’ai eu l’honneur de vous envoyer un autre exemplaire, et on en fait encore actuellement une édition bien plus correcte. Tous les honnêtes gens de Paris souhaitent qu’on représente cette pièce. On la joue en province. Une société de particuliers vient de la représenter à la campagne 2 avec beaucoup de succès ; on la jouera probablement chez M. le duc d’Orléans. Il n’y a pas un seul mot qui puisse avoir le moindre rapport ni à nos mœurs d’aujourd’hui, ni au temps présent. S’il y a quelque chose qui fasse allusion à l’Inquisition, nous n’avons point d’Inquisition en France : elle y a toujours été en horreur. Le Tartuffe, qui était une satire des dévots et surtout de la morale des jésuites, alors tout-puissants, a été joué par la protection d’un premier gentilhomme de la chambre, et est resté au théâtre pour toujours.
Mahomet, où il est dit :
Quiconque ose penser n’est pas né pour me croire ;3
Mahomet, dans lequel il y a un séide, qui est précisément Jacques Clément, est joué souvent sans que personne en murmure. M. de Sartines ne demande pas mieux qu’on fasse aux Guèbres le même honneur ; mais il n’ose pas se compromettre. Il n’y a qu’un premier gentilhomme de la chambre, ayant le droit d’être un peu hardi, qui puisse prendre sur lui une telle entreprise. Quelques sots pourraient crier, mais trois à quatre cent mille hommes le béniraient.
J’ai bien senti que mon héros, qui a d’ailleurs tant de gloire, ne se soucierait pas beaucoup de celle-ci : aussi je me suis bien donné de garde de lui en parler, et encore plus de lui en faire parler par M. de Chimène ; je lui ai seulement présenté les Guèbres pour l’amuser. Il viendra un temps où cette pièce paraîtra fort édifiante ; ce temps approche, et j’espère que mon héros vivra assez pour le voir.
Au reste, il sait que j’ai juré, depuis longtemps, d’obéir à ses ordres, et de ne jamais les prévenir ; de lui envoyer tout ce qu’il me demanderait, et de ne jamais rien lui dépêcher qu’il ne le demande, parce que je ne puis deviner ses goûts ; je ne dois rien lui présenter sans être sûr qu’il le recevra, et je ne veux rien faire qui ne lui plaise. Voilà mon dernier mot pour quatre jours que j’ai à vivre. Je vivrai et je mourrai son attaché, son obligé, et son berné.
V. »
1 Allusion obscure en l'absence de la lettre de Richelieu qui permettrait de l'éclairer . Un brayer est un bandage destiné à con,tenir une hernie ; mais le mot s'employait, plus largement, pour désigner une ceinture supportant les braies ; voir Robert Challe, Journal d'un voyage aux Indes ; Ed. De F. Deloffre et M. Menemencioglu, Mercure de France, 1979 , n°779.
2 À Orangis .
3 Mahomet, Ac. III, sc. 6 : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/cultures-d-islam/mahomet-de-voltaire-9893568
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13/04/2025
Il y a eu, dit-on, des tables pour mille personnes. Les dépenses qu’on a faites pour cette fête enrichiraient tout le Parnasse français
... Pourvu qu'on ne le voie jamais en France : https://www.lesinrocks.com/actu/pourquoi-les-fetes-du-spr...
Au pays de la disproportion, on voit évidemment qu'au fond, dès que la bride est lâchée, le plus dégueulasse arrive, drogue, sexe, alcool et ... taxes douanières à la Trump .
« A Nicolas-Sébastien Roch, dit De Chamfort , Libraire 1
au Palais
pour faire tenir s. l. p. 2à Monsieur
de Champfort
à Paris
27è septembre 1769 à Ferney
Tout ce que vous dites, monsieur, de l’admirable Molière 3, et la manière dont vous le dites, sont dignes de lui et du beau siècle où il a vécu. Vous avez fait sentir bien adroitement l’absurde injustice dont usèrent envers ce philosophe du théâtre des personnes qui jouaient sur un théâtre plus respecté. Vous avez passé habilement sur l’obstination avec laquelle un débauché refusa la sépulture à un sage. L’archevêque Champvallon 4 mourut depuis, comme vous savez, à Conflans, de la mort des bienheureux, sur Mme de Lesdiguières 5, et il fut enterré pompeusement au son de toutes les cloches, avec toutes les belles cérémonies qui conduisent infailliblement l’âme d’un archevêque dans l’Empyrée. Mais Louis XIV avait eu bien de la peine à empêcher que celui qui était supérieur à Plaute et à Térence ne fût jeté à la voirie . C’était le dessein de l’archevêque et des dames de la halle, qui n’étaient pas philosophes.
Les Anglais nous avaient donné, cent ans auparavant, un autre exemple ; ils avaient érigé, dans la cathédrale de Strafford, un monument magnifique à Shakespear 6, qui pourtant n’est guère comparable à Molière ni pour l’art ni pour les mœurs. Vous n’ignorez pas qu’on vient d’établir une espèce de jeux séculaires en l’honneur de Shakespear en Angleterre 7. Ils viennent d’être célébrés avec une extrême magnificence . Il y a eu, dit-on, des tables pour mille personnes. Les dépenses qu’on a faites pour cette fête enrichiraient tout le Parnasse français.
Il me semble que le génie n’est pas encouragé en France avec une telle profusion. J’ai vu même quelquefois de petites persécutions être chez les Français la seule récompense de ceux qui les ont éclairés. Une chose qui m’a toujours réjoui, c’est qu’on m’a assuré que Martin Fréron avait beaucoup plus gagné avec son âne littéraire 8 que Corneille avec le Cid et Cinna ; mais aussi ce n’est pas chez les Français que la chose est arrivée, c’est chez les Welches.
Il s’en faut bien, monsieur, que vous soyez welche ; vous êtes un des Français les plus aimables, et j’espère que vous ferez de plus en plus honneur à votre patrie.
Je vous suis très obligé de la bonté que vous avez eue de m’envoyer votre ouvrage, qui a remporté le prix et qui le mérite.
J’ai l’honneur d’être, avec toute l’estime que je vous dois, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
V. »
1 Voir : https://www.academie-francaise.fr/les-immortels/sebastien-roch-nicolas-dit-chamfort
et : https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9bastien-Roch_Nicolas_de_Chamfort
2 S'il lui plaît .
Original, initiale autographe, cachet « de Lyon ». On dispose aussi de la minute corrigée par V*. Ed. Kehl .
3 Dans l’Éloge de Molière, ouvrage couronné par l’Académie française. Voir lettre du 7 août 1769 à Chabanon : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2025/02/13/il-ne-faut-jamais-tuer-sur-le-theatre-que-des-gens-que-l-on-aime-passionnem.html
4 Archevêque de Paris lorsque la sépulture religieuse fut refusée à Molière .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Harlay_de_Champvallon
5 Le 6 auguste 1695 ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome21.djvu/307
Sur les aventures galantes de Harlay de Champvallon, voir L'Ingénu, chap. XIII
: https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome21.djvu/307
6 En réalité le monument à Shakespeare dans l'église de la Trinité à Strafford-on-Avon est, comme l'église elle-même , très modeste .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_de_la_Sainte-Trinit%C3%A9_de_Stratford-upon-Avon
7 Allusion au jubilé qui venait d'être organisé par Garrick, et qui devait avoir lieu régulièrement ensuite . Voir, de Garrick, la lettre Best. 15934 , de septembre-octobre 1769 qui est un mot d'accompagnement à l'Ode upon Dedicating à Building and Erecting a Statue to Shakespeare at Stratford-upon- Avon, 1769, laquelle fut déclamée par lui le 7 septembre . Voir : https://archive.org/details/odeupondedicatin00garr/page/n5/mode/2up
8 On sait que V* appelait ainsi par plaisanterie, l'intéressante Année littéraire de Fréron .
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12/04/2025
Je ne croirai les Welches dignes d’être Français que quand on représentera, publiquement et sans contradiction, une pièce où les droits des hommes sont établis contre les usurpations des prêtres
... Peut-on compter sur une ministre de l'acabit de Rachida Dati pour que cela se réalise régulièrement ? Le doute m'habite . Elle est bien trop vénale et femme d'affaires, la culture n'est pas intéressante (au sens pécunier ) . Heureusement, bon coup de frein de l'Assemblée : https://www.liberation.fr/economie/medias/reforme-de-laud...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
27 septembre 1769
Voici encore une autre requête que Chabanon me prie de présenter à mes anges. Mais qu’a-t-il besoin de moi ? pourquoi prendre un si grand tour ? Je suppose qu’il a parlé lui-même. Il s’agit d’une place de garde-marine 1 que le chevalier de Vezieux sollicite auprès de M. le duc de Praslin. Le chevalier de Vezieux est neveu de M. de Chabanon, et recommandé par M. le duc de Nivernais. Un mot de mes anges, placé à propos, fera grand bien.
On attend à Lyon que M. de Sartines ait déclaré à un de ses amis qu’il ne se mêle point des spectacles de cette ville, et qu’il ne leur veut aucun mal. Tout se fait bien ridiculement dans votre pays welche. Si M. le duc de Richelieu avait voulu, Les Guèbres auraient été joués à Fontainebleau sans le moindre murmure. Vous n’avons actuellement de ressource que dans Orangis. Il se pourrait bien que M. le duc d’Orléans priât bientôt cette troupe de venir jouer à Saint-Cloud 2 ou à Villers-Cotterets . Ce serait un bel encouragement. Je ne croirai les Welches dignes d’être Français que quand on représentera, publiquement et sans contradiction, une pièce où les droits des hommes sont établis contre les usurpations des prêtres 3.
Le vieux solitaire malade lève de loin ses mains aux anges. »
1 Les gardes marines correspondaient aux cadets dans l'armée, ou aux midships de la marine anglaise .
2 Le château de Saint-Cloud appartenait alors à la famille d’Orléans.
3 Plusieurs mots de cette phrase se retrouvent dans le titre d’un opuscule publié par Voltaire l’année précédente ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/201
et lettre du 24 juin 1768 à Mme Denis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/02/07/il-s-imagine-que-c-est-moi-qui-ai-souleve-tous-les-esprits.html
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11/04/2025
Les jeunes gens font très bien d’être amoureux ; mais il ne faut pas pour cela négliger ses talents ; au contraire, il faut les cultiver pour plaire encore plus à sa maîtresse
... Croyez-en le Patriarche, il sait ce que c'est qu'aimer . Cela est valable pour les jeunes gens, et aussi , réciproquement, pour les jeunes femmes , bien sûr .
« A Michel-Paul-Guy de Chabanon
27è septembre 1769
J'ai l’honneur, mon cher confrère, d’être en aucune relation avec M. le duc de Nivernais, malgré la belle réputation que j’ai sur son compte. Il m’a un jour refusé tout net d’interposer son autorité pour une affaire de bibus au collège des Quatre-Nations 1, quoiqu’il soit aux droits du fondateur. Depuis ce temps-là, je me suis contenté de le respecter et de l’aimer, sans lui rien demander. M. et Mme d’Argental sont très en état d’appuyer votre demande, quoique vous n’ayez nul besoin d’appui. Je vais leur écrire, non pas pour me donner les airs d’animer leur zèle en votre faveur, mais pour les remercier, et pour prendre sur moi tous les bons offices qu’ils vous rendront 2. Je ne sais ce que fait La Borde ; je n’entends plus parler de lui : je crois qu’il oublie totalement la musique en faveur de la danse 3. Les jeunes gens font très bien d’être amoureux ; mais il ne faut pas pour cela négliger ses talents ; au contraire, il faut les cultiver pour plaire encore plus à sa maîtresse ; c’est l’avis de votre vieux confrère, qui vous sera toujours tendrement attaché.
V. »
1 On ignore ce que c'est que cette affaire de bibus, c'est à dire sans importance . V* s'était adressé au duc comme à son confrère de l'Académie .
Voir : https://www.francegenweb.org/wiki/index.php?title=Coll%C3%A8ge_des_Quatre_Nations
2 Voir lettre du même jour à d'Argental : https://www.monsieurdevoltaire.com/2015/09/correspondance-annee-1769-partie-33.html
3 La maîtresse de La Borde est une danseuse .
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10/04/2025
J'avais toujours désiré que la gestion de mon bien ne dépendit de personne
... Et c'est uniquement pour ça que je n'ai pas révélé le montant exact de mon patrimoine " dit Rachida Dati, qui n'en est plus à une malversation près . Et dire que cette engeance est ministre ; le truandage paie encore en France , nous aussi nous connaissons la corruption à tous étages : https://fr.statista.com/infographie/8162/corruption-dans-...
http://justice.cloppy.net/index.php/notes/2008/11/20/le-f...
Dati-Sarkozy, même but : fric et pouvoir
« A Marie-Louise Denis
On vous envoie, ma chère amie, ces rogatons 1 pour vous amuser si vous avez du temps de reste , ou pour amuser quelqu'un de vos amis .
Que dites-vous de Lekain qui s'est avisé de jouer Gustave à Toulouse, au lieu de paraître dans le rôle de Vandôme comme il l'avais promis ? M. de Chimène prétendait qu'il ferait jouer Les Guèbres à Fontainebleau, et qu'il en avait parole de M. le maréchal de Richelieu . M. de Richelieu m'a mandé tout le contraire, et je m'y attendais bien . On donnera à Fontainebleau Les Scythes, Mérope et Tancrède .
Je commence à craindre que l'affaire de Sirven ne soit point finie avant la Saint-Martin, et que ma santé ne me permette pas de faire le voyage de Toulouse, malgré les empressements qu'on me témoigne . Quelque chose qui arrive, je crois que vous devez conclure votre marché avec Mme d'Erlach, et que le plus tôt sera le mieux . C'est mon cœur qui vous parle, il n'y a point de meilleur conseiller que l'amitié . Si vous ne vous ennuyez pas à Ferney, ma vie y sera heureuse . Si nous allons dans un pays chaud, il faudra y essuyer l'embarras insupportable des nouvelles connaissances . Choisissez , encore une fois, je suis à vos ordres .
Puisque votre neveu d'Hornoy n'est point à Paris, ne pouvez-vous pas vous transporter chez M. de Laleu et lui demander le contrat passé avec le prince et la princesse de Guise ? Je ferais signifier en Lorraine au régisseur de Régicour . On ne peut, autant qu'il m'en souvient, demander que cinq années d'arrérages, et on nous en doit plus de dix ; cela est bien cruel . L'homme d’affaires nommé Le Sueur que M. de Laleu emploie ; et que je paie, n'a point fait apparemment les diligences nécessaires, quoique j'aie toujours recommandé qu'on les fit . Si toutes nos affaires vont de même nous n'aurons pas de quoi donner des spectacles .
J'espère un succès plus prompt dans les affaires de Montbéliard, malgré le guignon attaché aux vieux malades . Je crois que ce guignon se répand sur l'affaire proposée par Mme Lelong . M. de La Sourdière m'a fait entendre à demi-mot qu'elle ne réussirait pas . Si j'en avais cru ma façon de penser,je ne me serais pas remis entre les mains de votre notaire que je crois un homme très dur, et pour qui j'ai toujours eu le plus sincère mépris . J'avais toujours désiré que la gestion de mon bien ne dépendit de personne . Vous savez quel enchaînement m'a fait esclave des autres . Il faut se soumettre à la destinée et achever malgré moi ma pauvre vie dans la dépendance . Si vous m'aimez je me croirai libre, et je serai consolé ; l’amitié vaut mieux que tous les notaires . J'attends votre dernière résolution, elle réglera toutes les miennes .
V.
25è septembre 1769.»
1Que sont ces rogatons ? Dieu et les hommes, 1769, en faisait peut-être partie .Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Dieu_et_les_hommes/%C3%89dition_Garnier
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