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19/08/2022

vous ne me mandez point si les acteurs viendront diner ou souper, je ne puis envoyer de carrosse

... De Volodymyr Zelensky aux chefs du protocole turc et de l'ONU :

https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/19/a...

 

 

 

« A Henri Rieu

Vendredi au soir [6 mars 1767]

Mon cher ami, comme vous ne me mandez point si les acteurs viendront diner ou souper, je ne puis envoyer de carrosse . Car si je me trompais, le carrosse reviendrait à vide . Je vous supplie de louer une carrosse à Genève que je paierai . Nous jouons Les Scythes jeudi à Ferney, nous vous attendons avec M. Hennin, à qui je vous supplie de faire mes très tendres compliments .

Vous sentez bien, mon cher corsaire, qu'on a mis de mes sens éperdus, au lieu de et mes sens éperdus 1. Je crois que cette faute n'est pas sur le rôle . »

1 Les Scythes, Ac. IV, sc. 4 .

On ne fait rien à dîner . On est obligé de s'en retourner après avoir pris son café

... On ne fait rien non plus, quand , ministre, on se déplace sur les lieux de catastrophes, c'est du flan , c'est du cirque . Café ou pas, discours formaté "Les services de l'Etat vont dès à présent tout faire pour secourir les victimes et indemniser , blablabla, et je m'y engage, blablabla ..." , et puis , ciao, je rentre au chaud et remets mes pantoufles .

 

 

« A Henri Rieu

Vendredi au soir [6 mars 1767]

A mardi mon cher ami . Voici encore une petite correction que je vous prie de ne pas manquer de faire sur le rôle d'Obéide . C'est au cinquième acte, à l'endroit des imprécations :

Puisqu'ils sont tous égaux, qu'ils soient également

De leur chute éternelle un aveugle instrument .

J'ai peur que quelque malintentionné ne fasse de ces deux vers une application maligne ; c'est un danger qu'il faut prévenir .

Voulez-vous bien avoir la bonté de mettre à la place :

Que tout chargé de fers au bord de son cercueil

Pour son châtiment même il garde son orgueil,

Et qu'en mordant le frein , etc.1

Je vous prie d'amener les acteurs pour coucher et non pas pour dîner . On ne fait rien à dîner . On est obligé de s'en retourner après avoir pris son café . D'ailleurs quand on ne vient que pour dîner, les chevaux sont obligés de faire quatre voyages en une journée, et nous n'avons pas assez de chevaux pour tant d'allées et de venues . En venant coucher on est le maître absolu de son temps .

Mille compliments, je vous prie, à M. le résident, dites-lui qu'il est tendrement aimé à Ferney. Bonsoir, mon très cher corsaire . »

1 Les Scythes, Ac. V, sc. 4, avec plusieurs modifications .

18/08/2022

J’ai fait réflexion à votre proposition de préparer la chose

... Ceci étant dit, M. Darmanin, vous avez une mauvaise figure avec votre tentative d'arborer une barbe avec moustache qui évoquent les zones incendiées : noires et clairsemées .

Gérald Darmanin, l'épreuve du feu | Les Echos

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

6è mars 1767 1

Voici, mon cher ami, un petit mot pour M. de Lamberta 2. J’ai fait réflexion à votre proposition de préparer la chose. J’ai trouvé le secret de glisser, au second acte, que les femmes dans ce pays-là vengent leurs maris quand on les a tués. Heureusement cela est dit tout naturellement et sans art. Je ne sais si on aura le temps de jouer cette rapsodie. Je voudrais vous envoyer du Lamberta, mais comment faire ?

Bonsoir, mon cher ami. É L. »

1 Copie par Wagnière ; l'édition de Kehl est limitée à la phrase citée en note de http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/08/18/le-premier-de-l-etat-quand-il-a-pu-deplaire-s-il-est-persecu-6396753.html

17/08/2022

ils aiment la liberté comme des fous, et moi aussi

... Pas mieux !

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

6 mars 1767

Mon cher philosophe, il y a une dizaine de fautes ridicules dans cet ouvrage de mathématiques, mais les gens au fait rectifierons aisément les méprises d'algèbre . Je ne sais pas trop comment je pourrais faire pour vous envoyer ces planches . Voudriez-vous que je m'adresse à M. Marin ?1 C'est bien le plus sûr .

Vous devez être étonné qu'on ait mis trois mois au lieu de trois jours à ces gravures de courbes ; mais je vous ai déjà dit qu'on ne savait plus ce qu'on faisait à Genève ; mais dans quel pays sait-on ce qu'on fait ?

Si Mme la dauphine se trouve mieux, on jouera Les Scythes . Je vous recommande ces polissons-là ; ils aiment la liberté comme des fous, et moi aussi .

Que dites-vous de votre impératrice, qui a fait un beau mémoire sur la tolérance et qui est toute prête à se battre pour elle ?

Nous venons de lire une Lettre à un conseiller 2 ; c'est un chef-d’œuvre . »

1 Le texte porte Morin, ce qui est certainement une erreur de lecture .

2 La Lettre à M.***, conseiller au parlement de ***, pour servir de supplément à l'ouvrage qui […] a pour titre Sur la destruction des Jésuites en France, 1767, dont d'Alembert parle déjà couvert à V* dans une lettre du 27 février 1765 . La Seconde lettre de M*** […] sur l'édit du roi d'Espagne pour l'expulsion des jésuites est datée du 15 juillet 1767 . toutes deux sont de d'Alembert .

Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Sur_la_destruction_des_J%C3%A9suites_en_France

16/08/2022

Le premier de l’État, quand il a pu déplaire, S’il est persécuté, doit souffrir et se taire 

... Est-ce bien entendu M. Emmanuel Macron ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

4è mars 1767 1

Mon cher ami, le mémoire des Sirven réussira. Les traits du premier mémoire, conservés dans le second, feront un très grand effet. L’éloquence perce à travers le style du barreau.

Je vous adresserai les Sirven aussitôt que vous voudrez. Vous serez leur protecteur à Paris. Je me réserve à vous écrire plus amplement sur leur compte, quand je les ferai partir. Il faudra un passeport de M. le duc de Choiseul : nous sommes bien sûrs de n’être pas refusés.

La querelle que l’on fait à mon cher Marmontel n’est qu’une farce, en comparaison de la tragédie des Sirven et des Calas. Cette farce sera sifflée. Voici un petit madrigal d’un jeune homme de Mâcon 2, sur la bêtise de la sacrée faculté :

Vénérables sorboniqueurs,
De l’enfer savants chroniqueurs,
Vous prétendez que Marc-Aurèle
Doit cuire à jamais dans ce lieu :
Pour récompenser votre zèle,
Puisse incessamment le bon Dieu
Vous donner la vie éternelle !

Vous voyez que les provinces se forment. Je n’ai pas le temps de vous parler beaucoup des Scythes. Je vous dirai seulement qu’un serment de punir de mort les gens convient fort dans les premiers actes de Tancrède et de Brutus, mais qu’il serait un peu déplacé dans un mariage, et qu’il serait assez ridicule qu’une femme prévît qu’on tuera son mari, lorsqu’il n’est menacé par personne. Vous sentez qu’une telle finesse serait trop grossière.

Tout dépendra du rôle d’Obéide. Il faudra que Lekain se donne la peine d’adoucir et d’attendrir la voix de Mlle Durancy, qu’on dit un peu dure et un peu sèche. Si vous avez lu la préface que je voulais aussi faire lire à M. Diderot, vous aurez vu que mon intention n’était point de faire jouer cette pièce ; mais puisque mes amis veulent qu’on la représente, j’y consens. Cela pourra donner quatre ou cinq représentations avant Pâques. Les comédiens en ont besoin ; après quoi je ne m’en mêlerai plus. Je suis bien aise que la police ait passé ces deux vers :

Le premier de l’État, quand il a pu déplaire,
S’il est persécuté, doit souffrir et se taire ,3


et encore celui-ci :

Pourrais-tu rechercher cette basse grandeur ?4

La police a jugé sagement que ces choses-là n’arrivaient qu’en Perse.

Je vous remercie, mon cher ami, de l’intérêt que vous prenez à mes petites affaires. Je ne me suis point encore ressenti des arrangements économiques de M. le duc de Virtemberg.

J’écris à Cadix au sujet de la banqueroute des Gilly, mais j’espère très peu de chose. Les Gilly n’ont fait que de mauvaises affaires.

Vous m’avez mandé, par votre dernière lettre, que Mlle de L’Espinasse 5 désirait des sottises complètes . Il n’y a qu’à en prendre un recueil chez Merlin, le faire relier, et le lui envoyer. Ce sera autant de payé sur les mille livres qu’il doit à Wagnière.

Je reçois dans ce moment une lettre de M. de Courteilles, qui est enchanté de votre mémoire.

Je vous embrasse plus fort que jamais. E[crasez] L['infâme] .

M. Damilaville est prié de donner cours aux incluses 6

1 Copie contemporaine Darmstadt B. ; édition de Kehl. Le poste scriptum,manquant dans la copie Darmstadt est remplacé par Kehl et toutes éditions, sauf celle de 1813, par une phrase empruntée à la lettre du 6 mars : Je voudrais vous envoyer du Lamberta, mais comment faire ? 

2V* lui-même , bien entendu .

3 Les Scythes, Ac. I, sc. 3 .

4 Ibid, mais le vers a été légèrement modifié .

5 Voir lettre du 3 mars 1766 à d'Alembert : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvre... .

6 Ce peut être la lettre à M***, conseiller au parlement, etc. :.D’Alembert ne publia qu’en 1767 la Lettre à M***, conseiller au parlement de ***, pour servir de supplément à l’ouvrage qui est dédié à ce même magistrat, et qui a pour titre : Sur la Destruction des jésuites en France, par un auteur désintéressé ; mais cette lettre était faite dès 1765. Ou alors il s'agit sans doute d'un certain nombre de lettres de ce 4 mars 1767 , sinon toutes .

15/08/2022

Tu me glaces d’horreur !

...Vu sur Google actualités le 13/8/2022 ! Fabuleuse conception de nos US fournisseurs de data de ce qu'est un divertissement ; ils seront bien capables de mettre les fusillades meurtrières communes chez eux dans cette rubrique

Le Parisien
 
 

 

« A Henri-Louis Lekain

Mercredi au matin, après les autres lettres écrites,

4 mars [1767]

Il m’a paru convenable de jeter, dans les premiers actes des Scythes, quelques fondements de la loi qui fait le sujet du cinquième acte ; mais il n’est pas naturel qu’on parle dans un mariage de venger la mort d’un époux dont la vie semble en sûreté, et qui n’est encore menacé de rien par personne.

On peut, dans Tancrède et dans Brutus, commencer le premier acte par dévouer à la mort quiconque trahira sa patrie ; on peut commencer dans Œdipe par la proscription du meurtrier de Laïus : cet artifice serait grossier et impraticable dans les Scythes. Cependant il serait heureux que le spectateur pût au moins deviner quelque chose de cette loi, qui a, en effet, existé en Scythie. Voici comme je m’y prends à la deuxième scène du second acte ; voici le couplet qu’Indatire doit substituer à son premier couplet, qui commence par ces mots : en ce temple si simple.

Cet autel me rappelle à ces forêts si chères ;
Tu conduis tous mes pas, je devance nos pères :
Je viens lire en tes yeux, entendre de ta voix,
Que ton heureux époux est nommé par ton choix.
L’hymen est parmi nous le nœud que la nature
Forme entre deux amants, de sa main libre et pure.
Chez les Persans, dit-on, l’intérêt odieux,
Les folles vanités, l’orgueil ambitieux,
De cent bizarres lois la contrainte importune,
Soumettent tristement l’amour à la fortune :
Ici le cœur fait tout, ici l’on vit pour soi ;

D’un mercenaire hymen on ignore la loi ;
On fait sa destinée. Une fille guerrière
De son guerrier chéri court la noble carrière,
Se plaît à partager ses travaux et son sort,
L’accompagne aux combats, et sait venger sa mort.
Préfères-tu nos mœurs aux mœurs de ton empire ?
La sincère Obéide aime-t-elle Indatire ?

Obéide

Je connais les vertus, j’estime ta valeur, etc.

Non-seulement ces vers préparent un peu le cinquième acte, mais ils sont plus forts et meilleurs.

M. Lekain est prié de les donner à M. Molé, et de lui faire de ma part les plus sincères compliments. Je persiste toujours à croire qu’il ne faut donner que cinq ou six représentations avant Pâques. La pièce demande à être beaucoup répétée, et, en ce cas, l’approbation du public pourra produire quelque avantage aux acteurs après Pâques.

N. B. Au cinquième acte :

Obéide

[· · · · ]· C’est assez, seigneur ; j’ai tout prévu :
J’ai pesé mon destin, et tout est résolu.
Une invincible loi me tient sous son empire ;
La victime est promise au père d’Indatire ;
Je tiendrai ma parole. Allez, il vous attend
Qu’il me garde la sienne ; il sera trop content.

Sozame

Tu me glaces d’horreur !

Obéide

Hélas ! je la partage.
Seigneur, le temps est cher, achevez votre ouvrage,
Laissez-moi m’affermir ; mais surtout obtenez
Un traité nécessaire à ces infortunés
, etc.

N. B. Comment des gens du monde peuvent-ils condamner sénat agreste ? Ils n’ont pas vu les conseils généraux des petits cantons suisses. Le mot agreste est noble et poétique. Il est vrai qu’étant neuf au théâtre, quelques Frérons peuvent s’en effaroucher au parterre ; mais c’est à la bonne compagnie à le défendre. »

 

14/08/2022

En vérité, il s’agit dans cette affaire de l’honneur de la France

... "Zaporijia : la France "préoccupée par la menace "": https://www.youtube.com/watch?v=FOz8V4vckls

Préoccupation, à quand l'occupation ? Il est vrai que les nuages radio-actifs, depuis Tchernobyl, savent s'arrêter à nos frontières orientales !

 

 

 

« A Philippe-Antoine de Claris , marquis de Florian

4è mars 1767

Grand Turc, grand écuyer persan, cadi, et vous, grande écuyère 1, tombe sur vous la rosée du ciel, et soit votre rosier toujours fleuri 2! Qui a donc fait la chanson de Molé 3? Elle est naïve et plaisante. N’en fera-t-on point sur la Sorbonne, qui persécute si sottement Marmontel ?

Les Gilly 4 m’ont fait pis ; leur banqueroute est forte. Je serai fort obligé à monsieur le cadi s’il fait agir vigoureusement le procureur boiteux dans mon affaire contre des Normands.

Mme Denis et moi remercions le Grand Turc de la mainlevée. Mahomet favorise ses bons serviteurs. J’aurai bientôt, je crois, une plus grande obligation aux maîtres des requêtes. Vous avez vu sans doute le mémoire de M. de Beaumont : il faudrait avoir une âme de bronze pour ne pas accorder une évocation aux Sirven. En vérité, il s’agit dans cette affaire de l’honneur de la France ; il est trop honteux de se faire continuellement un jeu d’une accusation de parricide. Mon cher grand écuyer y est surtout intéressé pour l’honneur de son Languedoc. Pour moi, je m’intéresse plus aux Sirven qu’aux Scythes : je n’avais fait cette pièce que pour mon petit théâtre et pour mes chers Genevois, qui y sont un peu houspillés. M. et Mme de La Harpe la jouent très bien ; elle nous fait un très grand effet. Les changements que les anges nous proposent nous paraissent absolument impraticables : ce serait nous couper la gorge. Il faut donner la pièce telle qu’elle est, avec ses défauts ; mais il ne la faut donner que quand Mlle Durancy sera sûre de son rôle, et qu’elle aura appris à répandre et à retenir des larmes, et quand les deux vieillards sauront imiter la nature, ce qui est aussi rare dans ce tripot que dans celui de Nicolet.

Si le grand écuyer et le Grand Turc veulent se donner le plaisir des répétitions, ils feront un grand plaisir au Scythe, qui les embrasse de tout son cœur.

Il leur enverra incessamment la Guerre de Genève, dès qu’il en aura fait faire une copie. Cela peut amuser quelques moments ceux qui connaissent les masques.

Mille et mille tendres amitiés.

V. »

1 L’abbé Mignot, le marquis de Florian, d’Hornoy, son beau-fils, et la marquise de Florian, mère de ce dernier.

2 Réminiscence du Bourgeois gentilhomme, de Molière, Ac ; IV, sc. 6 :

3 Cette chanson, qui commence par ce vers :

Quel est ce gentil animal,

Tourne à Paris toutes les têtes,

Et pour qui l'on donne des fêtes ?

Ce ne peut être que Molet

Ou le singe de Nicolet.

Elle est du spirituel chevalier de Boufflers, et figure dans les Œuvres complètes de Boufflers, 1827 . Elle comporte une strophe regardant Voltaire :

Si la mort étendait son deuil

Ou sur Voltaire ou sur Choiseul,

Paris serait moins en alarmes,

Et répandrait bien moins de larmes

Que n'en ferait verser Molet

Ou le singe de Nicolet .

Note : Molet désigne le comédien Molé ; Nicolet est un entrepreneur en spectacles, célèbre à l'époque par son singe savant .

4 Les Gilly de Montaud, célèbres financiers . c'est l'un d'entre eux que Lescure a prétendu, à la fin du XIXè siècle, reconnaît dans le « vieux G.M. » de Manon Lescaut. .