16/10/2020
Il dit que vous devez continuer le régime qu'il vous a prescrit . Pour moi, mon principal régime est la patience et la résignation aux ordres immuables de la nature
... Le président l'a dit, le premier ministre confirme . L'arrêt est tombé : couvre-feu !
Entendez-vous, jeunes et moins jeunes qui vous êtes permis de négliger les règles les plus basiques de prévention contre le covirus ? Que ceux qui se moquent de contaminer leurs concitoyens soient freinés dans leurs activités de loisir, ce n'est vraiment pas la mer à boire . N'oublions pas qu'il s'agit d'une maladie incapacitante , et mortelle trop souvent encore . Ceux qui crient qu'on les prive de libertés fondamentales sont comme ceux qui hurlaient contre l'obligation de mettre la ceinture en voiture : la liberté de mourir au volant, la liberté de devenir un invalide à charge, ô les belles libertés !
Mettre un masque et ne pas faire n'importe quoi , est-ce vraiment si difficile ?
Qu'on se le dise !
« A Etienne-Noël Damilaville
A Genève 22è juin 1765
J'ai reçu, mon cher ami, votre lettre pour le docteur Tronchin . Les autres ont été reçues en leur temps . M. Tronchin vous assure de son amitié et de son zèle . Il dit que vous devez continuer le régime qu'il vous a prescrit . Pour moi, mon principal régime est la patience et la résignation aux ordres immuables de la nature . J'ai assez vécu pour savoir qu'il y a bien peu de choses à regretter . S'il est possible que le soin que vous devez à votre santé vous conduise à Genève, et que j'aie le plaisir de vous embrasser et de vous ouvrir mon cœur, je croirai la fin de ma vie très heureuse . Je n'ai rien de nouveau touchant l’ordonnance du parlement de Toulouse . Il est à croire que les Sirven seront réduits à envoyer à M. de Beaumont une protestation contre le refus de délivrer cette ordonnance, et les pièces nécessaires . J'ai toujours même pensé que ce refus serait favorable à la cause des Sirven, et servirait à leur faire obtenir plus aisément une attribution de juges , puisqu'il constaterait la mauvaise volonté et l'injustice des tribunaux dont cette famille a tant besoin de se plaindre .
Je vous supplie d'embrasser tendrement pour moi l'homme supérieur 1 à qui le public rend justice, et à qui ceux qui disposent de ce qui lui est dû, l'ont rendue si peu . Je m'intéresse à lui, non seulement comme un homme qui fait honneur à la nation, mais comme à un homme que j'aime de tout mon cœur . Je suis persuadé qu'il n'attendra que peu de temps, et puisque la place n'est point donnée à d'autres, c'est une preuve qu'il l'aura, ou je suis bien trompé . On connait trop ce qu'il vaut, et les sacrifices généreux qu'il a faits .
Il est sûr que feu l'abbé Bazin a donné des ouvrages de métaphysique ; j'en ai vu des lambeaux cités, et je me flatte que Briasson qui m’a déterré des livres assez rares, me trouvera encore celui-là . Pour son œuvre posthume qui parait depuis quelque temps en Hollande, je ne crois pas qu'il y ait à présent un homme assez dépourvu de sens pour m'attribuer cet ouvrage qui ne peu avoir été fait que par un rabbin ou un bénédictin, et qui ne peut être lu que par le petit nombre d'hommes de cabinet qui aiment ces recherches épineuses .
Au reste, je n'entends rien à la manie qu'on a aujourd'hui de vouloir décrier les philosophes . Il me semble que les sottises et les inconséquences de Rousseau ne doivent point retomber sur les gens de lettres de France . Ceux que je connais sont les meilleurs sujets du roi, les plus pacifiques, les plus amis de l'ordre . En vérité les reproches qu'on leur fait ressemblent à ceux que le loup faisait à l'agneau . Que cette injustice passagère ne vous empêche pas d’aimer les lettres . Adieu, mon cher ami .
V. »
1 D'Alembert ; voir lettre du 24 juin 1765 .
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Vous ne trouverez dans cette maison que des partisans, des admirateurs et des amis
... Ainsi en est-il, ami Voltaire, tant chez moi que chez Mam'zelle Wagnière, je vous l'assure .
« A Claire-Josèphe-Hippolyte Léris de La Tude Clairon
21 juin [1765]
Il y a des gens, mademoiselle, qui sont aussi curieux de voir ce qu'on vous écrit que le public l'est de vous entendre . Je confie ce petit billet à M. Cramer qui vous le fera tenir par une voie sûre . M. le comte de Valbelle que j'ai eu l'honneur de recevoir dans ma petite retraite a pu vous instruire de l'intérêt extrême que je prends à tout ce qui vous regarde .
S'il est vrai qu'une dame de vos amies vienne à Genève pour sa santé, je me flatte que vous l'engagerez à prendre à la campagne le même appartement que M. de Valbelle a bien voulu occuper . Vous ne trouverez dans cette maison que des partisans, des admirateurs et des amis . On y honore les beaux-arts mais surtout le vôtre ; on y déteste ceux qui en sont les ennemis . C'est un temple où l'encens fume pour vous .
Il est vrai que ce temple est un peu bouleversé par des maçons qui s'en sont emparés, mais votre nom est parvenu jusqu'à eux, et ils disent qu'ils ne vous feront point de bruit . »
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15/10/2020
je suis obligé de vous supplier d'ordonner à votre homme d'affaires de me payer en argent ou en avoine, à votre choix
... Non, ce n'est pas pour la consommation personnelle de ce cher Voltaire, ce n'est pas un vieux cheval de retour, il est franc du collier .
Argotiquement parlant, l'argent c'est du blé, de l'artiche, de l'oseille, du fourrage, des patates, des radis, de l'osier, du fourrage, tout un tas de trucs pour Végans !
« A Catherine-Josephe de Loras du Saix, baronne de Monthoux
A Ferney, 19 juin 1765 1
Étant ruiné en bâtiments, je suis obligé de vous supplier d'ordonner à votre homme d'affaires de me payer en argent ou en avoine, à votre choix . Mais s'il me paie en avoine il faudrait qu'il l'envoyât à Ferney, l'état de mes affaires m'ayant obligé de me défaire des Délices .
J'ai l'honneur d'être, avec bien du respect, madame, votre très humble et très obéissant serviteur,
Voltaire. »
1 Le manuscrit était dans la collection de Camille Clermont, 1925.
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14/10/2020
J'attends l'Origène
... En attendant Godot !
Triste mine ? Quand vous saurez qu'il s'est auto-castré , vous comprendrez qu'il fait la tête du "si j'aurais su ! " . Origène père de l'Eglise, mais pas plus .
« A Gabriel Cramer
[juin 1765 ]
Je renvoie à monsieur Cramer le Lactance 1 dont je le remercie . J'attends l'Origène . Il aura incessamment le dernier chapitre de la Tolérance 2. Je crois qu'il ne serait pas mal d'y joindre aussi la lettre à M. Damilaville . »
1 Voir lettre du 10 mai 1765 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/08/25/quid-novi-6259390.html
2 En vue du second volume des Nouveaux mélanges, qui inclut la Letttre à M. Damilaville.Voir : https://voltairefoundation.wordpress.com/2017/09/19/les-nouveaux-melanges-recette-dune-bonne-capilotade-facon-voltaire/
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13/10/2020
C'est je crois une fièvre putride . Cela est toujours bien dangereux
... Voilà, je me mets à faire des diagnostics aussi pertinents que ceux du dangereux guignol US, et du coup vous ne serez pas étonnés si je vous donne mes conseils de traitement : une bonne douche glacée et une solide camisole de force pour maintenir le patient, puis l'écoute de l'intégrale des tweets du dit Donald Trump pour faire crever le virus ; ça rend dingue me direz-vous, oui ; on en meurt , oui , mais tout vaut mieux que supporter la trombine du roi de l'amoralité et de la suffisance .
« A Gabriel Cramer
[juin 1765 ]
On m'a dit monsieur Caro que M. Camp était mieux, nous en serons informés demain au juste . C'est je crois une fièvre putride . Cela est toujours bien dangereux .
Quand mon cher Caro voudra commencer je serai tout prêt .
J'ai le concile des fous de Nicée . J'en remercie monsieur Caro .
Je vais tout quitter pour le dernier chapitre de la Tolérance .
Je n'aurai ce qu'on vous demande de Paris que dans quelques semaines .
Mais je vous demande en grâce de me faire avoir les journaux de Sheurler sans quoi je ne puis compléter l'Histoire générale .
Mille tendres respects à Mme Cara . Jean-Louis est-il toujours sourd ? »
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12/10/2020
vous pouvez compter que les sentiments que vous m'avez connus s'affermiront dans moi jusqu'au dernier moment, et que je vous aimerai toujours avec la même tendresse
...
« A François Achard Joumard Tison , marquis d'Argence
etc.
au château de Dirac
près d'Angoulême
15è juin 1765 1
Heureusement, monsieur, le gouverneur de Pierre-Encise, est un officier rempli d'honneur, et qui a les mœurs les plus aimables . Il n'est occupé que d'adoucir le sort de ceux qu'il est obligé de recevoir dans le château, et la personne dont vous me parlez ne pouvait être en de meilleures mains .
Vous aurez pu recevoir déjà un petit paquet que M. le marquis de Charas doit vous remettre ; c'est un jeune homme qui m'a paru bien digne de l'amitié que vous avez pour lui . Je suis un peu tombé en décadence depuis que j'ai eu l'honneur de vous voir ; les longues maladies ont précipité chez moi la décrépitude . Je ne crois pas que j'aie longtemps à vivre, mais vous pouvez compter que les sentiments que vous m'avez connus s'affermiront dans moi jusqu'au dernier moment, et que je vous aimerai toujours avec la même tendresse . Il me sied plus de vous parler de pâté de perdrix, mais quand vous voudrez donner quelques ordres adressez- les à M. Wagnière chez M. Souchay à Genève .
Mme Denis vous regrette toujours, vous et monsieur votre frère, et vous ne doutez pas que je n'enchérisse sur ses regrets . Mille tendres respects .
V. »
1 L'édition de Kehl suivant la copie Beaumarchais, suivie des autres éditions, mêle des extraits de cette lettre à celle du 3 juillet 1765, en datant du 15 juin 1765.
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Tout ce qui est à Ferney vous dit les choses les plus tendres
... A vous tous et plus particulièrement à Mam'zelle Wagnière .
« A François Tronchin, Conseiller d’État
de Genève
Chez M. Camp Banquier
à Lyon
Nous avons, mon cher ami, ressenti une joie bien vive Mme Denis et moi en apprenant que M. Camp est hors de danger . Mme Dupuits a dit qu'elle était bien fâchée de ne pouvoir embrasser son cher Docteur, car vous savez qu'elle appelle toujours M. Camp son docteur .
Puisque vous avez la bonté de vous mettre à la tête des affaires pendant sa maladie, me permettrez-vous de vous recommander un petit paquet de livres que le libraire Briasson envoie pour moi à M. Camp par la diligence ? On adresse d'ordinaire ces paquets à Meyrin au sieur Guercher, receveur du bureau .
Je ne sais rien de nouveau . J'embrasse de tout mon cœur le malade convalescent . J'en dis autant à M. Tronchin votre frère . Tout ce qui est à Ferney vous dit les choses les plus tendres .
12è juin 1765 à Ferney.
Jean-Jacques va devenir le législateur des Corses 1; j'aime mieux qu'il soit le leur que le mien . »
1 Voir lettre du 20 Mai 1765 à Gian Francesco Marengo : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2020/09/09/si-vous-voulez-avoir-des-informations-je-crois-qu-il-les-faut-juridiques-vo.html
J.-J. Rousseau écrit par ailleurs le 31 mai 1765 à V* : « Si monsieur de Voltaire a dit qu'au lieu d'avoir été secrétaire de l'ambassadeur de France à Venise j’ai été son valet, monsieur de Voltaire en a menti comme un impudent . Si dans les années 1743 et 1744, je n'ai pas été premier secrétaire de l’ambassadeur de France, si je n'ai pas fait les fonctions de secrétaire d'ambassade, si je n'en ai pas eu les honneurs au sénat de Venise j'en aurai menti moi-même. » Voir : https://luxeavenise.altervista.org/sur-les-pas-de-jean-jacques-rousseau-de-bruno-planty/
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