27/12/2014
il ne faut jamais songer à ce qu'on a perdu, il faut penser à bien employer ce qui reste.
... Se disait un chauve sachant faire des économies sérieuses en shampoing et coiffeur, sans compter le temps gagné à ne plus avoir à discipliner un épi rebelle .
Temps perdu, heures présentes et à venir bien employées, c'est la balance de la vie . Je n'irai pas, comme ce Proust dont je n'ai pu lire plus d'une page, à la recherche du temps perdu, ce serait redoubler la peine .

« A Élie BERTRAND, premier
pasteur de l’Église française
à Berne
18è décembre 1759
Je m'intéresse bien vivement, mon cher monsieur, à tout ce qui peut toucher Mme de Freudenreich ; je crains de ne pas assez ménager sa douleur 1, en lui écrivant une de ces lettres de condoléance qui ne sont, comme dit La Fontaine, que des surcroîts d'affliction 2. J'ai pris le parti d'adresser ma lettre à M. de Freudenreich. Je reconnais bien votre amitié à la part que vous m'avez faite de ce qui regarde une famille qui me sera toujours respectable et bien chère.
Je vous plains si vous avez mis quelque chose sur les fonds publics de France ; il n'y a pas d'apparence que nos pertes immenses soient sitôt réparées. J'ai embarqué comme vous une grande partie de ma fortune sur ce frêle vaisseau de la foi publique ; mais il ne faut jamais songer à ce qu'on a perdu, il faut penser à bien employer ce qui reste.
S'il est vrai qu'un corps prussien de huit mille hommes ait été battu 3 par les Autrichiens, et que le maréchal de Daun se soit ouvert les chemins de Berlin , je tiens le roi de Prusse plus à plaindre que vous et moi.
Je vous embrasse de tout mon cœur.
Vre.
S'il est vrai que le général Beck ait battu un corps prussien et se soit ouvert le chemin de Berlin 4. »
1 L'oncle de Mme de Freudenreich , Benjamin Anton Tillier, venait de mourir sur le champ de bataille .Voir page 2 : http://www.schlossmuseumnidau.ch/images/Vision_f_20081.pdf
2 De certains compliments de consolation
Qui sont surcroît d'affliction.
LA FONTAINE, livre VIII, fable XIV : Les obsèques de la lionne ; http://www.lafontaine.net/lesFables/afficheFable.php?id=160
3 Le 3 décembre 1759, le général Levin Philip von Beck , l'un des généraux qui servaient sous Daun, avait enlevé un corps de quinze cents Prussiens, près de Meissen, sur la rive droite de l'Elbe. faisant de nombreux prisonniers .
4 Ce dernier paragraphe omis par les éditions modernes était manifestement destiné à compléter ou remplacer le début du troisième paragraphe .
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je crois qu'il faudra bien du temps pour rétablir la circulation et la confiance
... Et vous sentez bien qu'il ne s'agit pas là des conditions de circulation routière alors qu'on parle d'alerte météo dans 19 départements : attention nous sommes en hiver et il va neiger , quel scoop !
Il peut être question des chauffeurs de taxis qui savent à l'occasion, tout comme les routiers et les cheminots semer le soukh et geler eux aussi les déplacements de leurs concitoyens qui n'en peuvent mais .
Malheureusement, on fait un constat tristounet à propos de notre politique

« A Jean-Robert TRONCHIN
à Lyon
Je commence à espérer la paix, et je pense que cet événement si désirable est ou sera la suite de ce que je vous mandai il y a quelque temps. Mais je crois qu'il faudra bien du temps pour rétablir la circulation et la confiance.
Ne soupçonnez-vous pas que M. Silhouette voulait faire rendre gorge à certains financiers, et que ceux-ci l'ont culbuté?1 Il allait trop vite, il effarouchait; peut-être de bonnes intentions trop
précipitées l'ont perdu. S'il y a quelques nouvelles je vous prie de m'en faire part . Je n'en sais point encore d'Allemagne .
Si vous pensez, mon cher monsieur que le vin que vous avez eu la bonté 2 soit de garde je vous prie de m'en envoyer encore deux pièces .
J'ai écrit à Paris pour les livres qu'on ne peut trouver à Lyon .
Nulle nouvelle sinon qu’on attend la réponse de Vienne pour avoir la paix . Le roi de Prusse inattaquable dans son camp de Meissen et le duc de Virtemberg battu la font espérer .
Votre très humble serviteur
V.
17 décembre [1759] 3»
1 Voir lettre du 30 novembre 1759 à JR Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/07/rien-n-est-si-cher-que-de-rendre-justice-5505388.html
2 V* a oublié quelques mots, sans doute de m'envoyer . Voir lettre du 6 octobre 1759 à JR Tronchin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/26/n-auriez-vous-point-du-nectar-cette-annee-en-beaujolais-rien-5476966.html
3 Année ajoutée sur le manuscrit .
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Calfeutrez-vous, chauffez-vous bien, madame ; digérez ; jouissez de la société d'une amie charmante, et de la considération personnelle qui doit rendre votre vie agréable
...

« À Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de LUTZELBOURG.
Aux Délices, 16 décembre [1759]
Calfeutrez-vous, chauffez-vous bien, madame ; digérez ; jouissez de la société d'une amie charmante, et de la considération personnelle qui doit rendre votre vie agréable. On abrège ses jours dans le tracas des cours ; on les prolonge et on les rend sereins dans la retraite. Si je suis en vie, j'en ai l'obligation à ma campagne. J'ai acheté deux terres belles et bonnes auprès de mes Délices, par reconnaissance du bien que m'a fait la vie champêtre.
J'ai trois ports contre tous les naufrages : c'est là que je plains les folies barbares de ceux qui s'égorgent pour des rois. J'y ris de la folie ridicule des courtisans, et du changement continuel de scènes dans une très-mauvaise pièce. Les vers que vous m'envoyez ne donnent point envie de rire ; ils disent des vérités bien tristes. Il faut s'attendre à peu de gloire et peu d'argent. Passe pour le premier point. Le duc 1 de Lauraguais renonce à la gloire, et garde son argent; mais la France perd le sien.
Bonsoir, et mille respects.
V. »
1 Louis de Brancas, né en 1714, duc de Lauraguais, était le père du comte de Lauraguais. http://histoire-bibliophilie.blogspot.fr/2013/07/linfatigable-comte-de-lauraguais.html
02:35 | Lien permanent | Commentaires (0)
26/12/2014
In tanto sappia che l'amo e l'amero
...

« A Cosimo Alessandro Collini
[Aux Délices 16 décembre 1759]1
Gli auguro un felice viaggio, e piu tosto una certa e felice dimora che un viaggio ; ecco due lettere, l'una per l'altezzza 2, l'altra pel'cameriero, scritte ambedue colla medesima prémura . In tanto sappia che l'amo e l'amero .
V. »3
1 La date a été portée sur le manuscrit par Collini avec la mention « reçu le paquet le 22 décembre »
2 Cette lettre pour l'Electeur palatin ne nous est pas parvenue .La lettre pour le cameriero est la suivante, à Pierron : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/26/mon-cher-ami-je-vous-envoie-mon-precurseur-5520636.html
3 « Je vous souhaite un bon voyage, et plutôt encore qu'un voyage, un séjour agréable ; voici deux lettres, l'une pour l'altesse, l'autre pour le secrétaire, écrites l'une et l'autre avec la même hâte . Je sais seulement que je vous aime et que je vous aimerai . »
Les recommandations de V* avaient abouti à faire engager Collini par l'Electeur palatin, en qualité de secrétaire .
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Mon cher ami, je vous envoie mon précurseur
...

« A Nicolas Pierron 1
Aux Délices 16 décembre 1759 2
Mon cher ami, je vous envoie mon précurseur 3. Mon régime, malgré toutes mes incommodités, me mettra l'été qui vient en état de venir vous remercier de toutes les marques d'amitié qu'il a reçues de vous . Je prends sur moi le bien que vous lui faites et je partage sa reconnaissance . Vous aurez en lui un homme très attaché . Plus vous le connaitrez, plus vous verrez combien il mérite votre bienveillance . Je lui ai donné une lettre pour Son Altesse électorale ; je me flatte que vous lui procurerez l'honneur de la présenter ; il ne veut avoir d'obligation qu'à vous . Je vous prie, mon cher monsieur, de présenter mes respects à M. le baron de Beckers et à tous ceux qui voudront bien se souvenir de moi dans votre aimable cour . Je serai toute ma vie avec l'amitié la plus véritable, votre très humble et très obéissant serviteur .
V. »
1 Voir : http://books.google.fr/books?id=aF3V-PGcu78C&pg=PA214&lpg=PA214&dq=pierron+collini+voltaire&source=bl&ots=mDlLvR5LU2&sig=ZFlR3LsqCD3a6Mcw0yiHqYxajvY&hl=fr&sa=X&ei=RRVOVPrlIYT0PJHEgNAP&ved=0CCMQ6AEwAA#v=onepage&q=pierron%20collini%20voltaire&f=false
2 Copie par Collini ; sur le manuscrit, Collini a porté la mention : « copie d'une lettre de M. de Voltaire à M. Pierron, à Mannheim ; au sujet de M. Collini qui allait partir de Strasbourg pour se rendre à Mannheim . »
3 Collini .
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25/12/2014
Bannissons pour jamais, monsieur, les vaines cérémonies
... C'est un des voeux que je fais en pensant à François Hollande qui se trouve embringué dans une foule de cérémonies qui ne font pas avancer d'un iota le bien être de ses concitoyens ; seuls quelques organisateurs et happy few se souviennent de ces micro-événements, on est bien souvent en dessous du niveau du mouron (les pâquerettes me lassent) et on s'en fait, -du mouron-, pour notre avenir .

A quoi peuvent bien servir ces voeux aux corps constitués ?
Bla Blaaahh Blaaahhh !
Et combien ça coûte ?
Un peu de beauté que nous offre un génie, Bach : https://www.youtube.com/watch?v=bFnW_CrPUlA , pour être raccord avec Noël, et aussi : http://pluzz.francetv.fr/videos/bach_concertos_pour_clavi... , je ne m'en lasse pas
« A François Guillet, baron de Monthoux
Bannissons pour jamais, monsieur, les vaines cérémonies . J'ai reçu l'avoine . Mes chevaux et moi nous vous remercions . Plus vous nous gratifierez de semblables envois, plus vous nous ferez plaisir . Je vous supplierai d'envoyer le plus tôt que vous pourrez les papiers absolument nécessaires pour la consommation de notre affaire , je suis d'ailleurs à vos ordres, et je ne souhaite du loisir, de la santé et de beaux jours que pour venir vous assurer de mon sincère respect, vous, monsieur, et madame votre femme .
V.
Jeudi [décembre 1759] »
23:28 | Lien permanent | Commentaires (0)
24/12/2014
quid agis dulcissime rerum ? = Que fais-tu toi qui m'est cher entre toutes choses ?
... A l'heure où le très saint pape François dit sa troisième messe de nativité, je lui demande de bien vouloir faire quelque prière pour vous chère Mam'zelle Wagnière et que Voltaire, mon/notre François préféré vous aide en cas de besoin, je me ferai son intercesseur bien volontiers .
Joyeux Noël à tous !
Chat va ? Bisou !

https://www.youtube.com/watch?v=8YtJ1_8ZZu4
dédicace pour LoveVoltaire
« A Nicolas-Claude THIERIOT.
15è décembre 1759. 1
Vous ne vous plaindrez pas cette fois-ci, mon cher et ancien ami, que j'épargne les ports de lettres 2. J'ai peur qu'il ne soit ridicule de parler de comédie dans le temps qu'il n'est question que de culs noirs, de bourses vides, de flottes dispersées, et de malheurs en tout genre sur terre et sur mer. L'espérance de la paix est dans le fond de la boîte de Pandore ; mais, pendant que tout l'État souffre, il se trouve toujours des gredins qui impriment, des oisifs qui lisent, et des Frérons qui mordent. Je vous prie de m'envoyer, par M. Bouret ou par quelque autre contresigneur,3 la Femme qui a raison, et la malsemaine 4 dans laquelle Fréron répand son venin de crapaud.
On m'a envoyé la magnifique édition de l'Ecclésiaste 5 : elle est imprimée au Louvre, avec mon portrait à la tête ; mais il y a beaucoup de fautes, et le texte manque au bas des pages. Il en paraîtra une belle édition approuvée par le pape. Il faut apprendre à de petits esprits insolents, qui abusent de leurs places, à quel point on doit les mépriser 6, et à quel point on peut les confondre. On reviendrait à Paris leur marquer tout le dédain qu'on leur doit, si on n'aimait pas mieux être chez soi libre et tranquille.
Sed nil dulcius est bene quam munita tenere
Edita doctrina sapientum templa serena,
unde queas alios passim videre palantes .7
On doit regretter la perte de Madame,8 mais Paris ne regrette que ses annuités et ses billets de loterie . Connaissez-vous Mlle de Bazincour qui est chez moi ? J'ai aussi un géomètre qui traduit l'Arioste en vers . Il a fait un livre de trigonométrie sphérique qu'il a dédié à d’Alembert . Il s'appelle La Valette . En aviez-vous entendu parler ? son nom est-il sur vos tablettes ? Que faites-vous à votre Arsenal ? quid agis dulcissime rerum ? 9»
1 L'édition de Kehl supprime tout ce qui est après la citation de Lucrèce .
2 Thieriot commençait sa lettre du 28 novembre 1759 ; à laquelle V* a déjà répondu le 5 décembre 1759 ( http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/12/05/je-n-ai-point-de-culs-noirs-xii-et-j-ai-renonce-aux-blancs-q.html ) par : « Est-ce l'augmentation des ports de lettres qui rend les vôtres si rares, mon très illustre ami ? N'ayez aucun égard je vous conjure, à médiocre fortune pour cette dépense qui de toutes celles que j'ai à faire en est la plus agréable . Depuis neuf mois n=bientôt que je me suis retiré ici [à l'Arsenal] vous ne m'avez écrit que deux fois . »
3 Voir lettre du 30 mars 1758 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/07/26/temp-9fc40c98b67ed5cd4ca208a0a4d2043a-5129937.html
4 Ce mot désignant l'Année littéraire de Fréron, est déjà rencontré dans une lettre à d'Olivet le 4 octobre 1735 à propos des Observations de Chauffour : « Que fait mon abbé des Chauffours (3) ? Il broche, dans ses Malsemaines (4), une satire honnêtement impertinente ,... » : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1735-partie-7-111792805.html
5 C'était sans doute la Pompadour qui avait fait imprimer cette édition. (Clogenson.)
On ne connait pas cette édition, voir lettre du 15 juin 1759 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/06/07/il-n-a-jamais-commence-aucune-de-ses-pieces-par-dire-a-une-f.html
Quand V* parle ensuite d'une « plus belle édition approuvée par le pape » on sent qu'il est ironique .
6 Ceci s'adressait à Omer Joly de Fleury et à l'abbé Terrai, sur le rapport duquel le parlement ordonna que l'on brûlât le Précis du Cantique des cantiques.
7 D'après Lucrèce , De natura rerum , II, 7-10 : Sed nil dulcius est bene quam munita tenere Respicere unde queas alios, passimque videre Errare, atque viam palantes quærere vitre. Mais rien n'est plus doux que d'occuper solidement les hauts lieux fortifiés par la sagesse des philosophes, régions sereines d'où l'on peut voir les autres hommes errer à l'aventure .
8 Voir lettre du 15 décembre 1759 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/22/je-demande-seulement-comme-citoyen-si-vous-pensez-que-nous-a-5518295.html
9 Que fais-tu toi qui m'est cher entre toutes choses ?
23:55 | Lien permanent | Commentaires (0)

