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Rechercher : Tâchez de vous procurer cet écrit; il n'est pas orthodoxe, mais il est très bien raisonné

J'emploie mon bon œil mon divin ange

... pour regarder ceci, entre autres :

https://www.lefigaro.fr/bd/le-confinement-vu-par-les-dess...

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

10è janvier [1765] 1

J'emploie mon bon œil mon divin ange

Pour vous dire un penser indigne, bas et lâche 2.

Je me surprends presque dans l'affliction que ma nouvelle ne soit pas vraie . Cependant un neveu doit être informé de la santé de son oncle, et c'était un neveu qui parlait 3.

Je suis encore affligé que le tyran 4 du tripot se brouille avec vous. Voilà un beau sujet de guerre 5 ; cela est bien ridicule, bien petit. Ah ! que de faiblesses chez nous autres humains ! Mais existe-t-il un tripot ? On dit qu’il n’y a plus que celui  de l’Opéra-Comique 6, et que c’est là que tout l’honneur de la France s’est réfugié.

Autre sujet d’affliction, mais légère : la discorde est toujours à Genève. Rousseau a trouvé le secret d’allumer le flambeau du haut de sa montagne, sans qu’en vérité il y ait le moindre fondement à la querelle. Le peuple est insolent, et le Conseil faible . Voilà tout le sujet de la guerre. Le plaisant de l’affaire c’est, comme je l’ai déjà dit, que le peuple de Calvin prétend qu’un citoyen de Genève a le droit d’écrire tant qu’il veut contre le christianisme, sans que le Conseil soit en droit de le trouver mauvais ; et, pour rendre la farce complète, les ministres du saint Évangile sont du parti de Jean-Jacques, après qu’il s’est bien moqué d’eux. Cela paraît incompréhensible, mais cela est très vrai. Il faudrait cette fois recourir à la médiation de Spinoza 7.

Ce petit  magot de Rousseau a écrit un gros livre contre le gouvernement, et son livre enchante la moitié de la ville. Il dit, en termes formels, qu’il faut avoir perdu le bon sens pour croire les miracles de Jésus-Christ 8.

Malheureusement il m’a fourré là très mal à propos. Il dit au Conseil que j’ai fait le Sermon des Cinquante. Ah ! Jean-Jacques, cela n’est pas d'un philosophe . Il est infâme d’être délateur, il est abominable de dénoncer son confrère, et de le calomnier aussi injustement. En un mot, mon cher ange, vous pouvez compter qu’on est aussi ridicule dans mon voisinage qu’on l’était à Paris du temps des billets de confession ; mais le ridicule est d’une espèce toute contraire.

Comment se porte Mme d'Argental ? Je me mets à ses pieds . Serez-vous assez bon pour présenter mes respects à M. le duc de Praslin ? 9»

1 L'édition de Kehl a lu 1764, année portée par d'Argental, corrigée par Beuchot . Le chiffre ressemble à un 6, mais la date du 10 est plus vraisemblable, par rapprochement avec la lettre du 9 janvier à d'Alembert .

3 Ce début, ainsi que le mot encore dans la phrase suivante a été biffé sur la copie Beaumarchais et manque dans les éditions ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/09/correspondance-annee-1765-partie-1.html

4Le duc de Richelieu .

5 Peut-être une réminiscence de La Fontaine : vers 18 de « Le chat, la belette et le petit lapin » : https://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/Poemes/jean_de_la_fontaine/le_chat_la_belette_et_le_petit_lapin

6 Formé en 1763 par la réunion du Théâtre-Italien et de l'ancien Théâtre de la Foire ou des Boulevards,l'Opéra-Comique a alors ne excellente réputation, grâce à des auteurs tels que Favart, ou à des comédiens tels que Mme Favart .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9%C3%A2tre_national_de_l%27Op%C3%A9ra-Comique

7 Sur un autre plan, il y a déjà eu en 1738 une médiation par Berne, Zurich et la France qui a abouti à un important document constitutionnel, le Règlement de l'illustre médiation : https://books.google.fr/books?id=zuxq45JNVG0C&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

8 Lettres écrites de la montagne, II, 3 : https://www.rousseauonline.ch/pdf/rousseauonline-0028.pdf

9 Paragraphe biffé sur la copie Beaumarchais et manquant dans les éditions .

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18/03/2020 | Lien permanent

l’auteur de l’Année littéraire a fait usage de ces lettres ; mais vous ne me dites pas quel usage, et si c’est celui qu’

... Je ne vous ferai pas un dessin, mais l'entrée en confinement récente et la ruée sur le papier toilette conséquente m'ont rappelé l'usage et le recyclage qu'on faisait du papier journal il n'y a pas si longtemps , dans la "cabane au fond du jardin" . Ainsi méritent de finir les paperasses des "attestations etc." à condition toutefois, pour les modernes fesses délicates, qu'elles ne soient pas imprimées sur du papier supérieur à 90g .

Pour rester raccord, rendons à Rabelais etc. : https://www.point-fort.com/index.php/post/2012/12/07/908-le-torchecul-de-rabelais

 

 

 

« A Berger 1

25è février 1765 au château de Ferney 2

J’ai été touché, monsieur, de votre lettre du 12è février. On m’a dit que vous êtes dévot ; cependant je vous vois de la sensibilité et de l’honnêteté.

Vous m’apprenez que vous avez été taillé de la pierre, il y a douze ans ; je vous félicite de vivre si vous trouvez la vie plaisante. J’ai toujours été affligé que, dans le meilleur des mondes possibles, il y eût des cailloux dans les vessies, attendu que les vessies ne sont pas plus faites pour être des carrières que des lanternes ; mais je me suis toujours soumis à la Providence. Je n’ai point été taillé ; mais j’ai eu et j’ai ma bonne dose de mal en autre monnaie ; chacun la sienne : il faut savoir mourir et souffrir de toutes façons.

Vous me mandez qu’on a imprimé je ne sais quelles lettres 3 que je vous écrivis il y a plus de trente années . Vous m’apprenez qu’elles étaient tombées entre les mains d’un nommé Vauger 4, qui n’en peut répondre, attendu qu’il est mort 5. Si ces lettres ont été son seul héritage, je conseille aux hoirs de renoncer à la succession. J’ai lu ce recueil, je m’y suis ennuyé ; mais j’ai assez de mémoire, dans ma soixante et douzième année, pour assurer qu’il n’y a pas une seule de ces lettres qui ne soit falsifiée. Je défie tous les Vauger, morts ou vivants, et tous les éditeurs de rapsodies, de montrer une seule page de ma main qui soit conforme à ce que l’on a eu la sottise d’imprimer.

Il y a environ cinquante ans qu’on est en possession de se servir de mon nom. Je suis bien aise qu’il ait fait gagner quelque chose à de pauvres diables . Il faut que le pauvre diable vive ; mais il faudrait au moins qu’il me consultât pour gagner son argent plus honnêtement.

Vous m’apprenez, monsieur, que l’auteur de l’Année littéraire a fait usage de ces lettres 6; mais vous ne me dites pas quel usage, et si c’est celui qu’on fait ordinairement de ses feuilles. Tout ce que je peux vous répondre, c’est que je n’ai jamais lu l’Année littéraire, et que je suis trop propre pour en faire usage.

Vous craignez que l’impression de ces chiffons ne me fasse mourir de chagrin. Rassurez-vous : j’ai de bons parents qui ne m’abandonnent pas dans ma vieillesse décrépite. Mlle Corneille, bien mariée, et devenue ma fille, a grand soin de moi. J’ai dans ma maison un jésuite qui me donne des leçons de patience ; car si j’ai haï les jésuites lorsqu’ils étaient puissants et un peu insolents, je les aime quand ils sont humiliés. Je ne vois d’ailleurs que des gens heureux : cela ragaillardit. Mes paysans sont tous à leur aise : ils ne voient jamais d’huissiers avec des contraintes. J’ai bâti, comme M. de Pompignan, une jolie église où je prie Dieu pour sa conversion et celle de Catherin Fréron. Je le prie aussi qu’il vous inspire la discrétion de ne plus laisser prendre de copies infidèles des lettres qu’on vous écrit. Portez-vous bien. Si je suis vieux, vous n’êtes pas jeune. Je vous pardonne de tout mon cœur votre faiblesse, j’ai pardonné dans d’autres jusqu’à l’ingratitude ; il n’y a que la méchanceté orgueilleuse et hypocrite qui m’a quelquefois ému la bile ; mais à présent rien ne me fait de la peine que les mauvais vers qu’on m’envoie quelquefois de Paris.

J’ai l’honneur d’être, comme il y a trente ans, monsieur, votre, etc. »

1 Copie par Wagnière ; édition Nouveaux mélanges philosophiques, historiques , critiques, etc., etc., 1768 . La copie de Wagnière a été faite en vue de l'édition susdite, et comporte sans doute pour cette raison, deux corrections de V* . La lettre de Berger n'est pas connue . Berger est un ancien correspondant de V* depuis 1736 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1736/Lettre_667

et : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1736/Lettre_683

et : http://jp.rameau.free.fr/voltaire-lettrepan.htm

2 V* a remplacé cette mention, par aux Délices, on se demande pourquoi .

3 V* a ajouté ici, au-dessus de la ligne, en Hollande .

4 Ce Vauger disposait en effet de nombre de pièces de V* ou attribuées à V*, en manuscrit . Il en fait état dans une lettre du 22 août 1755 à un nommé Jean-Nicolas Douville, conservée dans les archives Suard sous forme d'une copie par Suard . La liste même de ces pièces diverses est également conservée mais elle ne comporte pas les lettres à Berger . Voir aussi : https://books.google.fr/books?id=rTYHAAAAQAAJ&pg=PA229&lpg=PA229&dq=berger+voltaire&source=bl&ots=Bks1450Ez4&sig=ACfU3U2mLBKtgjJvADGpRmFYXKF3p66Azw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjHm5WIzqPpAhXEzoUKHaarBVEQ6AEwEnoECBcQAQ#v=onepage&q=berger%20voltaire&f=false

5 D'après Suard, Vauger serait mort « quelques années après » 1755.

6 Dans l'Année littéraire, du 4 janvier 1765, Fréron donne un compte-rendu des Lettres secrètes, dont il profite pour évoquer les querelles de V* avec J.-J. Rousseau, Desfontaines et Saint-Hyacinthe .

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08/05/2020 | Lien permanent

Vous savez que ma maxime est de remplir tous mes devoirs aujourd’hui, parce que je ne suis pas sûr de vivre demain. On m

... Ce qui tombe fort à propos, moi qui suis un modèle de procrastination , pour ce qui me regarde seulement , il est vrai.

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https://www.flym.fr/bd/2018/04/definition-humour-procrast...

 

« A Etienne-Noël Damilaville

8 septembre 1766 1

J’ai bien des choses à vous dire, mon cher ami ; premièrement, dès que M. de Beaumont m’eut écrit qu’il fallait demander M. Chardon pour rapporteur, je n’eus rien de plus pressé que de faire ce qu’il me prescrivait 2. Tout malade et tout languissant que je suis. Vous savez quelle est mon activité dans de pareilles affaires 3. Vous savez que ma maxime est de remplir tous mes devoirs aujourd’hui, parce que je ne suis pas sûr de vivre demain. On m’a mandé depuis qu’il fallait attendre ; je ne pouvais pas deviner ce contrordre. Tout ce que je peux faire est de ne pas réitérer ma demande. Je vous supplie de le dire à M. de Beaumont.

Je suis déjà tout consolé, et Sirven l’est comme moi, si l’on ne peut pas obtenir une évocation. Ce sera beaucoup pour lui si l’on imprime seulement le mémoire de M. de Beaumont 4. Il est si convaincant et si plein d’une vraie éloquence qu’il fera également la gloire de l’auteur et la justification de l’accusé. Le public éclairé, mon cher ami, est le souverain juge en tout genre ; et nous nous en tenons à ses arrêts, si nous ne pouvons en obtenir un en forme juridique.

La seconde prière que je vous fais, c’est de m’envoyer le factum pour feu M. de La Bourdonnais 5.

J’ai une troisième requête à vous présenter au sujet de ce Robinet qu’on dit être l’auteur de la Nature 6, et qui certainement ne l’est pas : car l’auteur de la Nature sait le grec, et ce Robinet, l’éditeur de mes prétendues Lettres 7, cite dans ces Lettres deux vers grecs 8, qu’il estropie comme un franc ignorant . On voit d’ailleurs dans le livre une connaissance de la géométrie et de la physique que n’a point le sieur Robinet. Enfin ce Robinet est un faussaire. Il est triste que de vrais philosophes aient été en relation avec lui.

Vous savez qu’il a fait imprimer dans son infâme recueil la Lettre que je vous écrivis sur les Sirven l’année passée 9. Ne sachant pas votre nom, il vous appelle M. Damoureux . Il dit 10, dans une note, « qu’il a restitué un long passage que le censeur n’avait pas laissé passer 11 dans l’édition de Paris 12 ».

Ce passage, qui se trouve à la page 181 de son édition, concerne Genève et Jean-Jacques Rousseau 13. Il me fait dire « qu’il y a une grande dame de Paris qui aime Jean-Jacques comme son toutou 14. » Vous m’avouerez que ce n’est pas là mon style ; mais cette grande dame pourrait être très fâchée, et il ne faut pas susciter de nouveaux ennemis aux philosophes.

Je vous prie donc, au nom de l’amitié et de la probité, de m’envoyer un certificat 15 qui confonde hautement l’imposture de ce malheureux. S’il y a eu en effet un censeur par les mains de qui ait passé cette lettre que vous imprimâtes, réclamez son témoignage . S’il n’y a point eu de censeur, le mensonge de Robinet est encore par là même pleinement découvert, puisqu’il prétend restituer un passage que le censeur a supprimé. Vous voyez qu’il faut combattre toute sa vie. Tout homme public est condamné aux bêtes ; mais il est quelquefois indispensable d’écraser les bêtes qui mordent. Je me chargerai de faire mettre dans les journaux ce désaveu. J’y ajouterai quelques réflexions honnêtes sur les indécences et les calomnies dont les notes de ce M. Robinet sont chargées.

Je crois qu’on a bien oublié actuellement dans Paris des choses que les âmes vertueuses et sensibles n’oublieront jamais. Je voudrais qu’on aimât assez la vérité pour exécuter le projet proposé à M. Tonpla. Est-il possible qu’on ne trouvera jamais quatre ou cinq avocats pour plaider ensemble une si belle cause ?

Adieu, mon très cher ami. Écr. l’inf. »

1Edition de Kehl avec variantes signalées en notes .

2 La lettre où Voltaire fait cette demande manque.

3 Toutes les éditions donnent dans ces sortes d'affaires, d’après la copie Beaumarchais .

4 Pour les Sirven ; Voltaire en parle ici de confiance, à moins qu’il n’en ait vue le plan ou une partie, car, un mois après, le Mémoire n’était pas encore fait .

7 Les Lettres de Voltaire à ses amis du Parnasse ; voir lettre du 5 septembre 1766 à Damilaville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/11/30/vous-voyez-que-tout-ce-qui-se-passe-est-bien-desagreable-pou-6352334.html

8 Dans la lettre à Deodati de Tovazzi, du 24 janvier 1761 ; voir: https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1761/Lettre_4432

9 Le manuscrit donne simplement : l'année passée et dit […].

11 Mot remplacé dans les éditions par substituer .

12 Lettres […] page 170 .

13 Lettres […] page 182 ;

15 Voir ce certificat, : https://fr.wikisource.org/wiki/Appel_au_public/%C3%89dition_Garnier

Damilaville fournit effectivement ce certificat, daté du 17 septembre 1766, et Voltaire le fit figurer dans son « Appel au public contre un recueil de prétendues lettres de M. de Voltaire . », Journal encyclopédique, 15 novembre 1766 .

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09/12/2021 | Lien permanent

il n’y aurait guère que deux mille sages en France ; mais ces deux mille, en dix ans, en produisent quarante mille, et c

... Constat actuel ? Base des programmes de nos politiciens ? qu'en dit maître Blanquer ? La multiplication des sages selon Voltaire nous amènerait, en supposant deux mille sages au début du quinquennat de Fanfoué, à quarante mille à la fin du quinquennat d'Emmanuel, soit presque un par commune : génial ! non ? Les faits sont têtus , le sage se fait rare et se reproduit au compte gouttes, les malfaisants eux sont prolifiques comme les cloportes .

Humour : Facebook guidant le peuple… | Finobuzz

Tout faire pour que jamais nous ne soyons sous la coupe des censeurs

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

19 mars 1766 1

M. de Laleu, mon cher ami, vous donnera tout ce que vous prescrirez. J’attends avec mon impatience ordinaire cette estampe et le mémoire de notre prophète Élie . Il est sans doute signé de plusieurs avocats, dont il faut payer la consultation. Vous êtes le seul qui vouliez bien rendre ces services essentiels à la philosophie. Daignez donc donner à M. de Beaumont ce qu’il faudra , et rendez ces services essentiels à la philosophie 2.

Ô que j’aime cette philosophie agissante et bienfaisante ! Il y a dans le discours de M. de Castillon 3 un bel éloge de cette vraie philosophie qu’il rend compatible avec la religion, ainsi qu’il le devait faire dans un discours public.

Le roi de Prusse mande 4 que, sur mille hommes, on ne trouve qu’un philosophe ; mais il excepte l’Angleterre. À ce compte, il n’y aurait guère que deux mille sages en France ; mais ces deux mille, en dix ans, en produisent quarante mille, et c’est à peu près tout ce qu’il faut : car il est à propos que le peuple soit guidé, et non pas qu’il soit instruit ; il n’est pas digne de l’être 5.

J’ai lu Henri IV 6 : je pense comme vous ; mais je crois que, si on permettait la représentation de ce petit ouvrage, il serait joué trois mois de suite, tant on aime mon cher Henri IV , et je ne vois pas pourquoi on prive le public d’un ouvrage fait pour des Français.

Pourriez-vous, mon cher ami, m’envoyer le Philosophe sans le savoir 7 ? J’ai bien de la peine à écrire de ma main. Wagnière est malade, et un autre copiste est occupé 8.

Voici une petite lettre pour Laleu, et une autre pour Briasson 9, qui me néglige. Mais 10 parlez-moi donc du Dictionnaire . Les souscripteurs l’ont-ils ? Maître Beaudet s’oppose-t-il à la publication ? Les baudets ne passeront pas les trois volumes de Mélanges 11. Il faudra du temps, il faudra attendre qu’il y ait quarante mille sages 12. »



1Il y a trois versions , la copie contemporaine Darmstadt, la copie Beaumarchais-Kehl et l'édition de Kehl ; voie notes suivantes .

2 Ce paragraphe biffé sur la copie Beaumarchais manque dans les éditions anciennes ; l'éd. 1 le remplace par ce texte , joint à la lettre du 28 avril 1766 : «Vous êtes le seul qui vouliez bien rendre ces services essentiels à la philosophie ; daignez donc donner à M. de Beaumont ce qu'il faudra : vous ferez prendre ce qui sera nécessaire chez M. de Laleu . » Le ms 1 supprime la dernière phrase et donne de la troisième une version abrégée . 

4 Dans une lettre du 25 février 1766, Frédéric écrit : « S'il se trouve donc un homme sur mille qui pense, c'est beaucoup. » Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6275

5 Depuis car il est à propos […], passage manquant sur ms1.

6 La Partie de chasse de Henri IV, comédie de Collé ; voir lettre du 17 avril 1762 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/03/18/2-5922869.html

8 Ce paragraphe manque sur la copie Beaumarchais .

9 Lettres perdues .

10 Ce début manque sur le ms 1 .

12 Curieusement l'ed 2 donne pages pour sages .

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27/06/2021 | Lien permanent

J’ai vu depuis peu des fatras d’instructions pastorales, d’arrêts contre les instructions, d’arrêts contre les arrêts, e

... En un mot comme en cent, j'ai tout simplement écouté les déclarations de tous bords à propos de la conduite à tenir face au Covid-19 . Heureusement que le net permet d'éviter le gaspillage de papier et qu'un clic suffit pour se dépolluer la vue et l'ouïe  d'avis stupides .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

2 octobre 1765

A peine le petit prêtre a-t-il reçu ses Roués de la part de ses divins anges, qu’il s’est mis sur-le-champ à faire ce que lesdits anges ont prescrit, excepté à la scène d’Octave et de Julie. Le pauvre diable confesse qu’il ne peut réchauffer cette scène, et il dit qu’il lui est impossible de faire d’Octave un amoureux violent. L’impuissance dont il convient lui fait beaucoup de peine ; mais il dit que c’est le seul vice dont on ne peut pas se corriger.

Ce malheureux prêtre renverra, le plus tôt qu’il pourra, ses Roués, avec l’honnête préface convenable en pareil cas . Le temps ne fait rien à l'affaire . Il compte sur les gens qui aiment l’histoire romaine ; mais comme il y en a beaucoup plus qui aiment l’opéra-comique, il n’espère pas un succès prodigieux.

Pour moi, j’attends Adélaïde, et je la renverrai aussi avec sa préface, car il me semble qu’elle en mérite une.

Je ne savais point que Clairon eût manqué à mes anges, quand je lui fis, je ne sais comment, des vers hexamètres 1 comme pour une héroïne romaine , mais elle avait si bien joué Electre, elle avait été si fêtée par tout le pays, elle avait été si honnête et si polie, que j’en fus enquinaudé 2

On dit qu’il n’est pas bien sûr que l’on donne à Fontainebleau toutes les fêtes qu’on préparait.

J’ai écrit un petit mot de félicitation à M. Hennin 3 ; M. le duc de Praslin ne pouvait faire un meilleur choix ; ce sera un homme de bonne compagnie de plus dans notre petit canton allobroge. J’adressai ma lettre à M. de Sainte-Foix , ne sachant pas si M. Hennin est à Paris.

Le plaisant secrétaire d’ambassade que Jean-Jacques ! Voilà un étrange original ; c’est bien dommage qu’il ait fait le Vicaire savoyard. La conversation de ce vicaire méritait d’être écrite par un honnête homme.

J’ai vu depuis peu des fatras d’instructions pastorales, d’arrêts contre les instructions, d’arrêts contre les arrêts, et de lettres contre les arrêts 4, et de lettres sur les miracles de Jean-Jacques, et j’ai conclu qu’une tragédie est plus touchante, et que ce qui plaît aux dames 5 est plus agréable ; et je dis dans mon cœur , il n’y a de bon que de souper avec ses amis, et de se réjouir dans ses œuvres 6, et j’ai surtout ajouté que la consolation de la vie consiste à être un peu aimé de ses divins anges, ces divins anges à qui je n’ai pas l’honneur d’écrire de ma main, attendu que je suis retombé dans mes malingreries 7, et je ne m’en mets pas moins à l’ombre de leurs ailes. »

1 L’Épître à Mlle Clairon est en alexandrins .

4 Fin août 1765 , l'assemblée générale du clergé a publié ses Actes qui comportent la condamnation de diverses œuvres, dont certaines de V* . La même assemblée a en même temps republié des décrets antérieurs controversés et alors les Actes furent supprimés le 4 septembre 1765 par le parlement de Paris qui fit brûler la Lettre circulaire qui accompagnait les Actes ( voir lettre du 8 octobre 1765 à d'Argental : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/10/correspondance-annee-1765-partie-30.html ). L'assemblée porta plainte et le Conseil du roi donna tort au Parlement . V* lut toutes ces pièces et ce furent ces « arrêts contre les arrêts » qui purent l'inciter à écrire les Questions sur les miracles ( https://fr.wikisource.org/wiki/Questions_sur_les_miracles/%C3%89dition_Garnier ), et le Mandement ( https://fr.wikisource.org/wiki/Mandement_de_l%E2%80%99archev%C3%AAque_Alexis/%C3%89dition_Garnier.)

Voir : https://data.bnf.fr/fr/12110348/france_assemblee_generale_du_clerge/

et : https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb337700849

5 Possible allusion au conte de ce nom , sans plus .

7 Encore un plaisant néologisme voltairien .

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01/02/2021 | Lien permanent

Rendez-vous les maîtres absolus, ou abandonnez tout

 ... Votre ouvrage, votre pays, vos amis, vos chats et vos cafards , vos femmes et vos maitresses, votre percepteur et le loto, Money drop et Cauet, ... ! J'arrête ici, je ne veux pas y passer la nuit .

 Je tiens à rester parfaitement maître de moi-même, au moins .

 DSCF2011 maitre de moi .png


 

 

« A M. Jean Le Rond d'ALEMBERT.
A Lausanne, de mon lit, d'où je vois

dix lieues de lac,
29 de janvier [1758]
N'appelez point vos lettres du bavardage 1, mon digne et courageux philosophe; il faut, s'il vous plaît, s'entendre et parler de ses affaires.
On fait une grande profession de foi à Genève ; vous aurez le plaisir d'avoir réduit les hérétiques à publier un catéchisme. On se plaint de l'article des Comédiens, inséré dans celui de Genève; mais vous avez joint ce petit mot de la comédie à la requête des citoyens qui vous en ont prié. Ainsi d'un côté vous n'avez fait que céder à l'empressement des bourgeois, et de l'autre vous n'avez fait que répéter le sentiment des prêtres, sentiment publié dans le catéchisme d'un de leurs théologiens 2, et débité publiquement devant vous dans toutes les conversations.
Quand je vous ai supplié de reprendre l'Encyclopédie,`j'ignorais à quel excès de brutalité on avait poussé les libelles, et j'étais bien loin de soupçonner qu'ils fussent autorisés. Je vous ai écrit une grande lettre par Mme de Fontaine 3, elle est votre voisine ne pourriez-vous pas passer chez elle ?
Il serait triste qu'on crût que vous quittez l'Encyclopédie à cause de l'article Genève, comme on affecte d'en faire courir le bruit; mais il serait encore plus triste de continuer en étant exposé à des dégoûts qui doivent vous révolter autant qu'ils déshonorent la nation. Êtes-vous bien uni avec M. Diderot et les autres associés ? Funiculus triplex difficillime rumpitur 4. Quand vous signifierez tous ensemble que vous ne travaillerez qu'avec l'assurance de la liberté honnête qu'il vous faut, et de la protection qu'on vous doit, il faudra bien qu'on en vienne à vous prier de ne pas priver la France d'un monument devenu nécessaire. Les criailleries passeront, et l'ouvrage restera.
Il est beau de quitter tous ensemble et de donner des lois ; il serait désagréable pour vous de quitter seul, il ne faut point que la tête se sépare du corps.
Quand vous donnerez le premier volume, faites rougir dans une préface les lâches qui ont permis qu'on insultât à ceux qui seuls aujourd'hui travaillent pour la gloire de la nation et, pour Dieu, ne souffrez plus les insipides déclamations qu'on insère dans votre Encyclopédie. Ne donnez pas à nos ennemis le droit de se plaindre que ceux qui n'ont eu aucun succès dans les arts, où ils ont même été sifflés, osent donner les règles de ces arts, et prendre pour règles leurs ridicules imaginations. Bannissez la morale triviale dont on enfle certains articles. Le lecteur veut savoir les différentes acceptions d'un mot, et déteste un fade lieu commun sur ce mot. Qui vous force à déshonorer l'Encyclopédie par cet entassement de fadeurs et de fadaises qui donne un si beau champ aux critiques? et pourquoi joindre du velours de gueux à vos étoffes d'or? Rendez-vous les maîtres absolus, ou abandonnez tout. Malheureux enfants de Paris, il fallait faire cet ouvrage dans un pays libre. Vous avez travaillé pour des libraires 5; ils ont recueilli le profit, et vous recueillez les persécutions.
Tout cela me fait trouver ma retraite charmante. Je vous y regrette de tout mon cœur. Plût à Dieu que vous n'eussiez point vu de prêtres quand vous vîntes chez nous Mettez-moi au fait de tout, je vous en prie. » 

1 Voir lettre du 20 janvier 1758 de d'Alembert à V* : … vous avez dû recevoir il y a plusieurs jours une longue lettre de moi dont le bavardage vous aura sans doute ennuyé. »

4 Ecclésiaste ; IV, 12 : Un triple câble rompt difficilement .

5 Voltaire, quoique l'un des collaborateurs de l'Encyclopédie, à laquelle il n'avait pu souscrire qu'à la fin de 1756, ne manquait pas d'en payer chaque volume à Briasson, comme le confirme la fin de la lettre du 13 novembre 1756 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/11/13/8b7616856c4cc63e00eca0a0f081b4f5.html

 

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02/04/2013 | Lien permanent

dès qu’il y aura le moindre danger, je vous demande en grâce de m’avertir, afin que je désavoue l’ouvrage dans tous les

...

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

On dit, mon cher philosophe, que vous perfectionnez les lunettes 1. Ceux qui ont de mauvais yeux vous béniront ; mais moi, qui perds la vue dès qu’il fait froid et qu’il y a un peu de neige sur la terre, je ne profiterai pas de votre belle invention. Après avoir rendu hommage à votre physique, il faut que je vous parle morale. Il y en a tant dans ce diabolique dictionnaire, que je tremble que l’ouvrage et l’auteur ne soient brûlés par les ennemis de la morale et de la littérature 2. Ce recueil est de plusieurs mains, comme vous vous en serez aisément aperçu. Je ne sais par quelle fureur on s’obstine à m’en croire l’auteur. Le plus grand service que vous puissiez me rendre est de bien assurer, sur votre part du paradis, que je n’ai nulle part à cette œuvre d’enfer, qui d’ailleurs est très mal imprimée, et pleine de fautes ridicules. Il y a trois ou quatre personnes qui crient que j’ai soutenu la bonne cause, que je combats dans l’arène, jusqu’à la mort contre les bêtes féroces. Ces bonnes âmes me bénissent et me perdent. C’est trahir ses frères que de les louer en pareille occasion ; il faut agir en conjurés et non pas en zélés. On ne sert assurément ni la vérité ni moi, en m’attribuant cet ouvrage. Si jamais vous rencontrez quelque pédants à grand rabat ou à petit rabat, dites-leur bien, je vous en prie, que jamais ils n’auront ce plaisir de me condamner en mon propre et privé nom, et que je renie tout dictionnaire, jusqu’à celui de la Bible par dom Calmet 3. Je crois qu’il y a, dans Paris, très peu d’exemplaires de cette abomination alphabétique, et qu’ils ne sont pas dans des mains dangereuses ; mais, dès qu’il y aura le moindre danger, je vous demande en grâce de m’avertir, afin que je désavoue l’ouvrage dans tous les papiers publics avec ma candeur et mon innocence ordinaires.

Il se répand des bruits fâcheux sur l’impératrice de toutes les Russies. On prétend qu’à son retour elle a trouvé un violent parti contre elle, et que le sang du prince Ivan  ou Jean a crié vengeance. Je ne garantis rien, pas même la mort de ce prince qui est trop avérée. Portez-vous bien, digérez, et aimez un peu qui vous aime beaucoup.

V.

Ce 19 [septembre 1764] »

1 Tout le troisième volume des Opuscules mathématiques, de d'Alembert, est consacré à des Essais sur les moyens de perfectionner les verres optiques . Voir : http://sites.mathdoc.fr/cgi-bin/oetoc?id=OE_DALEMBERT__3

2 Cet ouvrage « diabolique » sera effectivement brûlé . Quant à l'auteur il ne risque rien comme on le verra .

Deux jours avant, Bonnet écrit à Haller : « J'ai parcouru de l’œil ce Dictionnaire philosophique, le plus détestable de tous les livres du pestilentiel auteur . Il n'a lu l’Écriture que pour la mêler à son arsenic . Il s'efforce de la déguiser ou de la détruire ; il redouble ses efforts, à mesure qu'il vieillit ; c'est quelle est pour sa conscience ce que l'arsenic est pour les intestins . » Voir : https://books.google.fr/books?id=m9gnDwAAQBAJ&pg=PT329&lpg=PT329&dq=Bonnet%C2%A0:+%C2%AB%C2%A0J%27ai+parcouru+de+l%E2%80%99%C5%93il+ce+Dictionnaire+philosophique,+le+plus+d%C3%A9testable+de+tous+les+livres+du+pestilentiel+auteur&source=bl&ots=hXtiVYeudx&sig=ACfU3U1uj9o8OBB2EW6hdWNSB4jkOSCjbg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjeq-P_4M7lAhWF5-AKHY1VAxEQ6AEwAXoECAkQAQ#v=onepage&q=Bonnet%C2%A0%3A%20%C2%AB%C2%A0J'ai%20parcouru%20de%20l%E2%80%99%C5%93il%20ce%20Dictionnaire%20philosophique%2C%20le%20plus%20d%C3%A9testable%20de%20tous%20les%20livres%20du%20pestilentiel%20auteur&f=false

3C'est chez Don Calmet que V* a trouvé l'essentiel de sa documentation biblique, qu'il retourne contre le pieux auteur du Dictionnaire, et de la Géographie de la Bible . Sur les œuvres de Don Calmet, qui avait accueilli V* à Senones, voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8626560z/f498.image

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04/11/2019 | Lien permanent

Je compte retrouver tout très-propre

 ... Mon ami Volti, tu serais effaré si tu voyais l'état de ton parc et tes jardins à Ferney .

Il y a des coups de pied au cul qui se perdent !

Celui qui est censé faire l'entretien est d'une inculture crasse et a hérité des qualités du cheval d'Attila, à ceci près que là où il passe l'herbe envahit les allées pendant qu'il fait crever les buis et les topiaires . Cet individu ne sait pas que des outils de taille (sécateurs et taille-haies ) se désinfectent, sinon vive la contagion des maladies fongiques et bactériennes tueuses d'arbres, ce qui est le cas en ce moment . Il est trop niais pour savoir que le désherbage au chalumeau ne doit pas être fait à proximité immédiate d'arbustes qui cuisent littéralement et irrémédiablement . En un mot comme en cent , c'est ce que mon père appelait un cossard, il n'est bon qu'à se caler le cul sur son mini-tracteur et faire des ronds de jambe à l'administrateur . Voilà, c'est dit, ça me gonflait trop de garder ça sur la patate . Persiste et signe !

 

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 Calme sur fond de colère

 

« A M. COLINI

A Berne 1, 18 mai [1756]

Si vous nous envoyez quelques lettres adressées aux Délices, ne nous en envoyez à Berne qu'une fois, et gardez les suivantes jusqu'à nouvel ordre, mon cher Colini car nous sommes un peu en l'air. Nous irons à Soleure 2, de là nous retournons à Monrion, et nous regagnons ensuite notre lac de Genève.
Je vous prie d'ordonner qu'on refasse le talus que les eaux avaient emporté vers la Brandie, qu'on le sème de fenasse, et qu'on laisse deux petites rigoles pour l'écoulement des eaux à travers les haies; c'est Loup qui doit prendre ce soin. Il faut que les charpentiers fassent en diligence le berceau qui doit être posé vis-à-vis la Brandie, et que l'on prépare des couleurs pour le peindre. Je vous prie d'ordonner aux jardiniers d'arroser les fleurs et les gazons de la terrasse. Je compte retrouver tout très-propre. Il faut que Boësse 3 presse les travailleurs. Voilà de bien menus détails.
Je vous embrasse de tout mon cœur. »

1 Voltaire alla voir à Berne le pasteur Bertrand, les avoyers Steiger et Tiller, ainsi que le banneret Freudenreich. Il descendit à l'auberge du Faucon, rue du Marché. (CL.)

2 Chavigny, ambassadeur de France en Suisse, résidait à Soleure, et ce fut lui que Voltaire alla y voir. Colini, qui parle de ce voyage dans ses Mémoires, n'en connut jamais le motif précis; il dit seulement que Voltaire, en allant à Soleure, devait avoir des vues bien importantes. Je crois que Chavigny proposa à l'ancien ami de Frédéric de retourner à Potsdam pour y négocier secrètement: ce que Voltaire eut la prudence de refuser (voyez lettres du 4 juin à Thieriot et 14 juin à Louis-Eugène prince de Wurtemberg ). (Cr..)
L'ermite des Délices fit un autre voyage à Soleure, comme le prouve la date de sa lettre du 19 août 1758, à l'abbé de Bernis.

3 Valet de chambre de Voltaire. V* sait exactement ce qu'il faut faire . Pour d'autres ordres à propos de divers travaux aux Délices, voir la lettre du 23 mai 1756 à Colini : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/05/23/d-avoir-soin-de-fermer-la-grille-d-entree-de-ma-maison-les-d.html

 

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07/07/2012 | Lien permanent

Il faut que je sois désespéré si je crois enfin à la médecine

Personnellement, sans douter de la médecine, je ne fréquente guère les cabinets médicaux, qui sont , comme chacun le sait, les meilleurs lieux pour lire des nouvelles vieilles d'au moins un lustre et se faire contaminer par les virus des patients "tousseux" qui viennent en quête de guérison rapide .

 

medecine-travail.jpg

http://www.journal-la-mee.fr/2425-medecine-du-travail-la-...

Je préfère laisser faire la nature et guérir un rhume en huit jours sans médicaments, plutôt qu'une semaine avec la panoplie chimique homologuée et empoisonnante .

 Oserai-je vous recommander de suivre les "conseils hygiéniques" suivants ?

conseils-hygieniques-f.jpg

http://www.histoire-image.org/pleincadre/index.php?i=1136

 

 Conseils d'hier, médecine de demain/aujourd'hui ?

photoshop-medicine.jpg

http://www.ufunk.net/photoblog/lol-du-jour-les-bienfaits-...

 

 

 

 

« A M. Jean-Louis-Vincent Capperonnier de Gauffecourt i

 

 

 

A Prangins, 30 janvier 1755

 

 

 

Mme Denis et moi, monsieur, nous apprenons par M. Marc Chappuis ii les nouvelles obligations que nous vous avons . Je voudrais pouvoir vous écrire de ma main, mais je suis tout perclus sur les bords de votre lac . Le soleil de Montpellier me serait plus favorable que les glaces du mont Jura . Je n'ai point eu la force d'aller aux bains d'Aix en Savoie, dans une saison si rigoureuse . Il faut attendre le retour du printemps, et le vôtre, pour adoucir tant de souffrances . On me fait craindre que les mêmes personnes qui ont donné sous mon nom une prétendue Histoire universelle, remplie de fautes absurdes, n'impriment aussi un poème iii composé il y a plus de vingt ans, qu'elles défigureront de même . Les belles-lettres ne sont pas faites pour rendre heureux ceux qui les cultivent, et notre royaume n'est pas de ce monde iv. Je me console avec ma garde-malade des maux que me font la nature, la fortune, et les imprimeurs : son courage m’en donne beaucoup ; elle brave les neiges et mes malheurs, et me rend tout cela très supportable . Vous m’avouerez que, sans elle, il serait assez dur de n'être entouré que des Alpes, et d'être privé même de la consolation d’avoir ses livres . Nous manquons de tout assez patiemment , mais nous espérons vous revoir cet été, et alors nous ne manquerons de rien . On prétend que je ne saurais vivre, et que je suis un homme mort si je m'éloigne du docteur Tronchin v. Il faut que je sois désespéré si je crois enfin à la médecine : je crois bien davantage à votre amitié ; c'est elle qui m'autorise à présenter mes respects à M. le comte de Bellegarde . Je suis persuadé que vous ne m'oublierez point auprès de M. de La Popelinière, et que la philosophe vi se souviendra de moi . A propos de philosophie,voyez-vous toujours messieurs de l'Encyclopédie ? Ce sont des seigneurs de la plus grande terre qui soit au monde . Je souhaite qu'ils la cultivent toujours avec une entière liberté ; ils sont faits pour éclairer le monde hardiment, et pour écraser leurs ennemis . Adieu, monsieur, souvenez-vous de deux solitaires qui vous seront toujours bien tendrement attachés .

 

Je vous embrasse.

 

 

 

V. »


 

i Bibliophile et relieur réputé ; voir page 183, note 35 : http://books.google.fr/books?id=j2eOfCIF2_EC&pg=PA183...

 

ii Il est question de lui dans les Confessions de Jean-Jacques Rousseau . Il logeait alors chez le comte de Bellegarde, envoyé de Pologne . Voir lettre du 23 janvier à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/11/11/l...

 

iii La Pucelle .

 

iv Évangile de Jean .

 

 

vi Mme d'Epinay .

 

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14/11/2011 | Lien permanent

Je bois du vin modérément, et je trouve fort étranges les gens qui mangent sans boire

A boire encore : http://www.deezer.com/listen-700369

A écouter sans modération :

http://www.deezer.com/listen-700369

http://www.deezer.com/listen-1566448

Et dédicace à ce vigneron, Volti lui-même, qui ne mentait pas sur sa production  : http://www.deezer.com/listen-1566455

 

 

 

« A Henri-Jean-Baptiste Fabry de Moncault, comte d'Autrey

[i]

6è septembre 1765

 

Ce n'est donc plus le temps, Monsieur, où les Pythagore voyageaient pour aller enseigner les pauvres Indiens [ii]; vous préférez votre campagne à mes masures. Soyez bien persuadé que je mourrai très affligé de ne vous avoir point vu. J'ai eu l'honneur de passer quelque temps de ma vie avec madame votre mère dont vous avez tout l'esprit avec beaucoup plus de philosophie.

 

Si j'avais pu vous posséder cet automne, vous auriez trouvé chez moi un philosophe [iii]qui vous aurait tenu tête, et qui mérite de se battre avec vous. Pour moi, je vous aurais écoutés l'un et l'autre, et je ne me serais point battu. J'aurais tâché seulement de vous faire une bonne chère, plus simple que délicate. Il y a des nourritures fort anciennes et fort bonnes, dont tous les sages de l'Antiquité se sont toujours bien trouvés. Vous les aimez, et j'en mangerais volontiers avec vous. Mais j'avoue que mon estomac ne s'accommode point de la nouvelle cuisine. Je ne peux souffrir un ris de veau qui nage dans une sauce salée, laquelle s'élève quinze lignes au dessus de ce petit ris de veau. Je ne puis manger d'un hachis composé de coq d'Inde, de lièvre, et de lapin qu'on veut me faire prendre pour une seule viande. Je n'aime ni le pigeon à la crapaudine, ni le pain qui n'a pas de croûte. Je bois du vin modérément, et je trouve fort étranges les gens qui mangent sans boire, et qui ne savent pas même ce qu'ils mangent.

 

Je ne vous dissimulerai pas même que je n'aime point du tout qu'on se parle à l'oreille quand on est à table, et qu'on se dise ce qu'on a fait hier, à son voisin qui ne s'en soucie guère ou qui en abuse. Je ne désapprouve pas qu'on dise bénédicité ; mais je souhaite qu'on s'en tienne là, parce que si on va plus loin on ne s'entend plus ; l'assemblée devient cohue, et on dispute à chaque service.

 

Quant aux cuisiniers, je ne saurais supporter l'essence de jambon, ni l'excès des morilles, des champignons, de poivre et de muscade, avec lesquels ils déguisent des mets très sains en eux-même, et que je ne voudrais pas seulement qu'on lardât.

 

Il y a des gens qui vous mettent sur la table un grand surtout où il est défendu de toucher. Cela m'a paru très incivil, on ne doit servir un plat à son hôte que pour qu'il en mange ; et il est fort injuste de se brouiller avec lui parce qu'il aura entamé un cédrat qu'on lui aura présenté. Et puis quand on s'est brouillé pour un cédrat il faut se raccommoder et faire une paix plâtrée, souvent pire que l'inimitié déclarée.

 

Je veux que le pain soit cuit au four, et jamais dans un privé. Vous auriez des figues au fruit, mais dans la saison.

 

Un souper sans apprêts, tel que je le propose, fait espérer un sommeil fort doux et fort plein, qui ne sera troublé par aucun songe désagréable.

 

Voilà, Monsieur, comme je désirerais d'avoir l'honneur de manger avec vous. Je suis un peu malade à présent, je n'ai pas grand appétit mais vous m'en donneriez, et vous me feriez trouver plus de goût à mes simples aliments.

 

Mme Denis est très sensible à l'honneur de votre souvenir. Elle est entièrement à mon régime. C'est d'ailleurs une fort bonne actrice ; vous en auriez été content dans une assez mauvaise pièce à la grecque, intitulée Oreste, et vous l'auriez écoutée avec plaisir, même à côté de Mlle Clairon.

 

Conservez-moi au moins vos bontés si vous me refusez votre présence réelle.

 

V. »

i Auteur du Pyrrhonien raisonnable ; cf.lettres des 15 et 23 mars 1765 à Damilaville : « Je doute que le Pyrrhonien raisonnable fasse une grande fortune, quoique l'auteur ait beaucoup d'esprit. »

ii Cf. l'Aventure indienne de V* ,1764.

iii Damilaville.

 

Une curiosité : http://www.deezer.com/listen-721717

 

 

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07/09/2010 | Lien permanent

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