13/09/2012
Parmi les nouvelles affligeantes pour les bons citoyens, dans plusieurs parties de l'Europe, il y en a de bien désagréables dans la littérature
... Mais heureusement elles ne prêtent pas à conséquence . La période des prix littéraires qui chevauche celle des foires aux vins sera fertile en maux de tête dont il sera difficile de trouver la cause , indigestions de romans imbuvables ou gueules de bois de pinards dont les étiquettes sont la seule qualité , l'un n'excluant pas l'autre .
Je propose que l'on mette cet avertissement sur les certains livres "L'abus de mauvaise littérature rend idiot" , et sur les plus mauvais "A consommer avec modération" .
http://deledition.tumblr.com/post/31330169437/a-la-soiree-douverture-du-salon-du-livre-merci
« A M. Pierre ROUSSEAU 1
[décembre 1756]
Parmi les nouvelles affligeantes pour les bons citoyens, dans plusieurs parties de l'Europe, il y en a de bien désagréables dans la littérature. On se contentait autrefois de critiquer les auteurs, on a fait succéder à cette critique permise un brigandage inouï; on fait imprimer leurs ouvrages falsifiés et infectés de tout ce qu'on croit pouvoir nourrir la malignité, pour favoriser le débit. Voici comme s'explique, sur ce criminel abus, M. l'abbé Trublet, dans sa préface des Lettres 2 de feu M. de Lamotte « On donne de nouvelles éditions des ouvrages des gens célèbres, pour avoir occasion d'y répandre les notes les plus scandaleuses et les traits les plus satiriques contre leurs auteurs. Il était réservé à notre siècle de voir pratiquer dans les lettres ce brigandage. »
Le sage auteur de cette remarque parlait ainsi en 1754, à l'occasion du Siècle de Louis XIV, dont M. La Beaumelle s'avisa de faire et de vendre une édition chargée de tout ce que l'ignorance a de plus hardi, et de ce que l'imposture a de plus odieux. La même aventure se renouvelle depuis cinq ou six mois. Le même éditeur a falsifié plusieurs lettres de Mme de Maintenon, et en a supposé quelques-unes de M. le maréchal de Villars, de M. le duc de Richelieu, qu'ils n'ont jamais écrites et c'est encore là le moindre abus dont on doit se plaindre dans la publication scandaleuse des prétendus Mémoires de Mme de Maintenon. Le comble de ces manœuvres infâmes est une édition d'un poème intitulé la Pucelle d'Orléans 3. L'éditeur a le front d'attribuer cet ouvrage à l'auteur de la Henriade, de Zaïre, de Mérope, d'Alzire, du Siècle de Louis XIV; et, tandis que nous attendons de lui une Histoire générale, et qu'il travaille encore au Dictionnaire encyclopédique, on ose mettre sur son compte le poème le plus plat, le plus bas, et le plus grossier qui puisse sortir de la presse. En voici quelques vers pris au hasard
Louis s'en vint du fond des Pays-Bas
Pour cogner Charles et heurter le trépas.
(La Pucelle, Variantes du ch. II.)
Là, les lépreux, les femmes bien apprises,
Devaient changer de robe et de chemises.
L'heureux Villars, bon Français, plein de cœur,
Gagna le quitte ou double avec Eugène.
Pour les idiots ce fut une trompette
Le drôle avait étudié sa bête.
Il dit que Dieu, roulé dans un buisson,
A lui chétif avait donné leçon.
(Var. du ch. III.)
Il les pria, de la part de madame,
A manger caille, oie, et bœuf au gros lard.
(Var. du ch. IV.)
Sous le foyer d'un grand feu de charbon,
La tête hors d'un énorme chaudron.
Pendez, pendez, le vilain semblait dire
Baiser soubrette est péché dont la loi, etc.
(Var. du ch. V.)
Agnès baisait, Agnès était saillie.
A ses baisers il veut que l'on riposte,
Et qu'on l'invite à courir chaque poste.
(Var. du ch. X.)
Chandos, suant et soufflant comme un bœuf,
Tâte du doigt si l'autre est une fille;
Au diable soit, dit-il, ma sotte aiguille.
(Var. du ch. XIII.)
Lecteur, ma Jeanne aura son pucelage
Jusqu'à ce que les vierges du Seigneur,
Malgré leurs vœux, sachent garder le leur.
(Var. du ch. XXI.)
La plume se refuse à transcrire le tissu des sottes et abominables obscénités de cet ouvrage de ténèbres. Tout ce qu'on respecte le plus y est outragé autant que la rime, la raison, la poésie, et la langue. On n'a jamais vu d'écrit ni si plat, ni si criminel et c'est ce langage des halles qu'on a le front d'attribuer à l'auteur de la Henriade, contre lequel même on trouve dans le poème deux ou trois traits parmi tant d'autres qui attaquent grossièrement les plus honnêtes gens du monde. Ceux qui, trompés par le titre, ont acheté cette misérable rapsodie, ont conçu l'indignation qu'elle mérite. Si une telle horreur parvient jusqu'à vous, monsieur, elle excitera en vous les mêmes sentiments, et vous n'aurez pas de peine à les inspirer au public. »
2 L'abbé Trublet lui-même dit que l'éditeur des Lettres de M. de Lamotte, 1754, in-12, est l'abbé Leblanc, à qui est adressée la lettre 563.
18:07 | Lien permanent | Commentaires (0)
12/09/2012
Continuez à instruire ce monde, que tant de gens désolent
... Et soyez-en remerciés .
http://www.furet.com/ecoles-du-monde-se-deplacer-s-instruire-etre-ensemble-1536045.html
« A M. D'ALEMBERT.
Aux Délices, où l'on vous regrette, 22 décembre [1756] 1.
Mon cher maître, mon aimable philosophe, vous me rassurez sur l'article Femme; vous m'encouragez à vous représenter en général qu'on se plaint de la longueur des dissertations vagues et sans méthode que plusieurs personnes vous fournissent pour se faire valoir; il faut songer à l'ouvrage, et non à soi. Pourquoi n'avez-vous pas recommandé une espèce de protocole à ceux qui vous servent, étymologies, définitions, exemples, raison, clarté, et brièveté? Je n'ai vu qu'une douzaine d'articles, mais je n'y ai rien trouvé de tout cela. On vous seconde mal il y a de mauvais soldats dans l'armée d'un grand général. Je suis du nombre; mais j'aime le général de tout mon cœur. Si j'étais à Paris, je passerais ma vie dans la Bibliothèque du roi, pour mettre quelques pierres à votre grand et immortel édifice. Je m'y intéresse pour l'honneur de ma patrie, pour le vôtre, pour l'utilité du genre humain. Si j'avais eu l'honneur de voir M. Duclos 2 quand il vous donna l'article Étiquette, je l'aurais détrompé de l'idée vague où l'on est que Charles-Quint établit dans ses autres États l'étiquette de la maison de Bourgogne. Celles de Vienne et de Madrid n'y ont aucun rapport. Mais surtout, si je travaillais à Paris, je ferais bien mieux que je ne fais; je n'ai ici aucun livre nécessaire.
Les tracasseries civiles de France sont tristes, mais les guerres civiles d'Allemagne sont affreuses. La campagne prochaine sera probablement bien sanglante. Continuez à instruire ce monde, que tant de gens désolent.
L'édition infâme de la Pucelle m'afflige; mais la justice que vous me rendez, ainsi que tous les gens d'honneur et de goût, me console.
Mme Denis et moi, nous vous embrassons de tout notre cœur. »
1 Réponse à la lettre du 13 décembre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/10/le-cri-public-nous-autorise-a-nous-rendre-severes-et-a-passe.html
2 Charles Pinot Duclos : http://fr.wikisource.org/wiki/Auteur:Charles_Pinot_Duclos
17:45 | Lien permanent | Commentaires (0)
11/09/2012
Je n'ai jamais vu d'ailleurs d'ouvrage plus digne à la fois de mépris et de châtiment; mais je crois à présent le parlement et le public occupés de soins plus pressants que celui de juger un petit libelle
... Comme celui de Richard Millet (chez Gallimard), intitulé "Eloge littéraire d'Anders Breivik" .
et bien sûr ne pas manquer Patrick Besson : http://www.lepoint.fr/editos-du-point/patrick-besson/saint-germain-des-pres-zone-urbaine-sensible-06-09-2012-1503310_71.php
Ci-dessous mon "Eloge de l'oeuvre de Richard Millet"
Sous titre : "Vision du futur de la dite oeuvre : Garbage !"
« A M. le comte d'ARGENTAL.
Aux Délices, 20 décembre [1756].
Mon cher ange, j'ai vu cette infamie que l'on impute à La Beaumelle, et que je n'impute qu'à un diable, et à un sot diable. Il y a deux endroits assez piquants contre moi dans cette rapsodie digne des halles 1, qu'on a osé imprimer sous mon nom. Je n'ai jamais vu d'ailleurs d'ouvrage plus digne à la fois de mépris et de châtiment; mais je crois à présent le parlement et le public occupés de soins plus pressants que celui de juger un petit libelle 2. Je me console par la juste espérance que les honnêtes gens et les gens de goût me rendront justice. Vous y contribuez plus que personne, vos amis vous secondent il serait bien étrange que la vérité ne triomphât pas, quand c'est vous qui l'annoncez.
Si cette affreuse calomnie a des suites, je suis très-sûr que vous serez le premier à m'en instruire. Je crois qu'à présent je n'ai rien à faire qu'à déplorer tranquillement la méchanceté des hommes. M. le duc de La Vallière m'a mandé les mêmes choses que vous il veut bien se charger d'assurer Mme de Pompadour de mon attachement et de ma reconnaissance pour ses bontés, et il répond qu'elle ne prêtera point l'oreille à la calomnie 3.
Ce n'est pas assurément le temps que M. le maréchal de Richelieu entame ce que votre amitié généreuse lui a suggéré, et je suis bien loin de lui laisser seulement envisager que je veuille mettre ses bontés à l'épreuve 4. Pour Rome sauvée et les autres pièces, ce sont là des choses qu'on peut demander hardiment. Je n'y ai pas manqué, et j'espère que vous vous joindrez à moi.
Zulime ne sera plus Zulime, elle changera de nom sans changer de caractère 5. Le lieu de la scène ne sera plus le même. Il y aura quelques scènes nouvelles; et, comme les deux derniers actes sont absolument différents de ceux qui furent joués, la pièce sera en effet toute neuve. Le reste viendra quand il pourra, quand j'aurai de la santé, de la force, de la tranquillité; quand la calomnie ne viendra plus assiéger mon ermitage, désoler mon coeur, et éteindre mon pauvre génie. Je vous embrasse avec larmes, mon respectable ami.
Il n'est pas douteux que La Beaumelle n'ait été l'auteur et l'éditeur, avec ses associés, de cet abominable ouvrage; je le reconnais à cent traits. Voilà pour la seconde fois qu'il fait imprimer mes propres ouvrages 6 farcis de tout ce que sa rage pouvait lui dicter. Il y a des horreurs contre le roi même. Leur platitude ne les rend pas moins criminelles. Ce libelle est un crime de lèse-majesté, et il se vend impunément dans Paris. »
1 Une version de La Pucelle .
2 Voir dans le Précis du Siècle de Louis XV : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-precis-du-siecle-de-louis-xv-chapitre-xxxvi-partie-2-109987154.html
3 Allusion aux vers qui commencent ainsi, dans les variantes du chant II de la Pucelle:
Telle plutôt cette heureuse grisette
Que la nature ainsi que l’art forma
Pour le b….. ou bien pour l’Opéra,
Qu’une maman avisée et discrète
Au noble lit d’un fermier éleva,
Et que l’amour, d’une main plus adrète,
Sous un monarque entre deux draps plaça.
4 Voir lettre du 20 décembre 1756 à Richelieu : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/07/26/si-je-voulais-transcrire-les-paroles-favorables-que-vous-m-a.html
5 Zulime devient Médime puis Fanime .Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-zulime---avertissement-81729398.html
20:47 | Lien permanent | Commentaires (5)
Heureusement il y a toujours d'honnêtes gens parmi les monstres, et des gens de goût parmi les sots
... Et pour vivre bien, agréablement, il est bon que les monstres et les sots restent minoritaires, ce dont on peut douter parfois quand on voit les "une" des journaux .
Les honnêtes gens et gens de goût n'ont pas la vedette , ne sont pas vendeurs .
Il est vrai qu'ils ont peu d'intérêt pour ces lecteurs assidus , quotidiens, qui se jettent d'abord sur la page des annonces nécrologiques , puis sur les faits divers/chiens écrasés de leur canton, l'horoscope, le programme télé, les nouvelles (mauvaises) du monde , et enfin pour les plus érudits les pages du foot.
« A M. THIERIOT.
Le 19 décembre [1756]
On m'a enfin envoyé de Paris une de ces abominables éditions de la Pucelle. Ceux qui m'avaient mandé, mon ancien ami, que La Beaumelle et d'Arnaud avaient fabriqué cette œuvre d'iniquité, se sont trompés, du moins à l'égard de d'Arnaud. Il n'est pas possible qu'un homme qui sait faire des vers ait pu en griffonner de si plats et de si ridicules. Je ne parle point des horreurs dont cette rapsodie est farcie elles font frémir l'honnêteté comme le bon sens, je ne sais rien de si scandaleux ni de si punissable. On dit qu'on a découvert que La Beaumelle en était l'auteur, et qu'on l'a transféré de la Bastille pour le mettre à Vincennes dans un cachot mais c'est un bruit populaire qui me paraît sans fondement. Tout ce que je sais, c'est qu'un tel éditeur mérite mieux. Voilà assurément une manœuvre bien criminelle. Les hommes sont trop méchants. Heureusement il y a toujours d'honnêtes gens parmi les monstres, et des gens de goût parmi les sots. Quiconque aura de l'honneur et de l'esprit me plaindra qu'on se soit servi de mon nom pour débiter ces détestables misères. Si vous savez quelque chose sur ce sujet aussi triste qu'impertinent, faites-moi l'amitié de m'en instruire.
Mandez-moi surtout si vous avez votre diamant 1. Je m'intéresse beaucoup plus à vos avantages qu'à ces ordures, dont je vous parle avec autant de dégoût que d'indignation.
Je vous embrasse du meilleur de mon cœur. »
-
Légué à Thieriot par Mme de La Popelinière. Voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/04/la-france-joue-a-present-un-beau-role-dans-l-europe-on-sent.html
17:59 | Lien permanent | Commentaires (0)
la paix, la concorde, l'union, la douceur d'une vie égale, espèce de félicité qu'on trouve rarement dans les cours
... De récréation .
http://www.dailymotion.com/video/x865t1_alain-souchon-laurent-voulzy-j-ai-d_music
... Royales !
Quoique !
... Luxe, calme et volupté coexistent dans une même famille :
« A madame la duchesse de SAXE-GOTHA.
Aux Délices, 14 décembre [1756].
Madame, le jeune gentilhomme anglais nommé M. Keat 1, qui aura l'honneur de rendre cette lettre à Votre Altesse sérénissime, me fait crever de jalousie. Ce n'est pas que son mérite, qui n'inspire que des sentiments agréables, fasse naître en moi la triste passion de l'envie; mais il a le bonheur de voir et d'entendre Votre Altesse sérénissime. Ce bonheur m'est refusé; il y a là de quoi mourir de douleur. Il peut du moins rendre bon témoignage de mon chagrin il peut dire si je regrette autre chose dans le monde que le séjour de Gotha.
Il arrivera peut-être dans le temps qu'on donnera quelque bataille, qu'on prendra quelque ville dans le voisinage de vos États. Mais il verra dans la cour de Votre Altesse sérénissime ce qu'il aime, la paix, la concorde, l'union, la douceur d'une vie égale, espèce de félicité qu'on trouve rarement dans les cours, félicité que vous donnez, madame, et que vous goûtez.
Puisse l'année 1757 être aussi heureuse pour elle et pour toute son auguste famille qu'elle commence malheureusement pour ses voisins ! Je me mets à ses pieds pour cette année et pour toutes celles de ma vie. »
1George Keate, poète anglaisdont V* parle dans sa lettre du 14 novembre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/03/d...
14:51 | Lien permanent | Commentaires (0)
10/09/2012
le cri public nous autorise à nous rendre sévères, et à passer dorénavant par-dessus toute autre considération
... Auraient pu dire François Hollande, Ayrault et Vals réunis .
Et d'ajouter "Ah! ça ira ! ça ira !..."
(NDLR - La cédille prend ici toute sa valeur pour éviter, autant que possible, de retomber dans les excès de langage sarkoziens "Ah ! caïra! caïra !" que la faune délinquante de Marseille pourrait encore prendre comme une insulte et tabasser les forces de l'ordre, encore une fois)
« DE M. D'ALEMBERT.
A Paris, ce 13 décembre [1756].
Vous avez, mon cher et illustre maître, très-grande raison sur l'article Femme 1 et autres; mais ces articles ne sont pas de mon bail: ils n'entrent point dans la partie mathématique, dont je suis chargé, et je dois d'ailleurs à mon collègue 2 la justice de dire qu'il n'est pas toujours le maître ni de rejeter ni d'élaguer les articles qu'on lui présente. Cependant le cri public nous autorise à nous rendre sévères, et à passer dorénavant par-dessus toute autre considération; et je crois pouvoir vous promettre que le septième volume n'aura pas de pareils reproches à essuyer.
J'ai reçu les articles que vous m'avez envoyés, dont je vous remercie de tout mon cœur. Je vous ferai parvenir incessamment l'article Histoire contresigné. Nos libraires vous prient de vouloir bien leur adresser dorénavant vos paquets sous l'enveloppe de M. de Malesherbes, afin de leur en épargner le port, qui est assez considérable. Quelqu'un s'est chargé du mot Idée. Nous vous demandons l'article Imagination; qui peut mieux s'en acquitter que vous? Vous pouvez dire comme M. Guillaume 3 : Je le prouve par mon drap.
Le roi tient actuellement son lit de justice pour cette belle affaire du parlement et du clergé;
Et l'Église triomphe ou fuit en ce moment 4.
Tout Paris est dans l'attente de ce grand événement, qui me parait à moi bien petit en comparaison des grandes affaires de l'Europe. Les prêtres et les robins aux prises pour les sacrements vis-à-vis 5 les grands intérêts qui vont se traiter au parlement d'Angleterre, vis-à-vis la guerre de Bohême et de Saxe, tout cela me parait des coqs qui se battent vis-à-vis des armées en présence.
Personne ne croit ici que les vers contre le roi de Prusse 6 soient votre ouvrage, excepté les gens qui ont absolument résolu de croire que ces vers sont de vous, quand même ils seraient d'eux. J'ai vu aussi cette petite édition de la Pucelle; on prétend qu'elle est de l'auteur du Testament politique d'Albéroni 7; mais, comme on sait que cet auteur est votre ennemi, il me parait que cela ne fait pas grand effet. D'ailleurs les exemplaires en sont fort rares ici, et cela mourra, selon toutes les apparences, en naissant. Je vous exhorte cependant là-dessus au désaveu 8 le plus authentique, et je crois que le meilleur est de donner enfin vous-même une édition de la Pucelle que vous puissiez avouer. Adieu, mon cher et illustre maître; nous vous demandons toujours pour notre ouvrage vos secours et votre indulgence.
Mon collègue vous fait un million de compliments. Permettez que Mme Denis trouve ici les assurances de mon respect. Vous recevrez, au commencement de l'année prochaine, l'Encyclopédie. Quelques circonstances, qui ont obligé à réimprimer une partie du troisième volume, sont cause que vous ne l'avez pas dès à présent. Iterum vale, et nos ama. »
1Voir lettre du 13 novembre 1756 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/11/13/8b7616856c4cc63e00eca0a0f081b4f5.html
et du 29 novembre 1756 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/06/il-est-difficile-d-etre-court-et-plein-de-discerner-les-nuan.html
3 Dans l'Avocat Patelin, comédie de Brueys, acte III, scène Il.Page 69 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5675024b/f72.image
4 Bajazet, acte I, scène 2 page 21 : http://readerv4.numilog.com/?BookId=07AC0D69-71D3-4ECA-9A47-A22650F965DF&ExpCode=bnf&cr
« Et le sultan triomphe ou fuit en ce moment . »
5 C'est par ironie que ce mot est employé ici; voir : page 413 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113219/f415.image
6 Voir lettre du 29 novembre : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2012/09/06/il-est-difficile-d-etre-court-et-plein-de-discerner-les-nuan.html
7 Maubert de Gouvest : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Henri_Maubert_de_Gouvest
20:29 | Lien permanent | Commentaires (0)
09/09/2012
En fait d'amour, il faut parler et faire
... L'un et l'autre sont parfaitement nécessaires, variables, inconstants, faciles ou non, au fil du temps .
« A M. DE CHENEVIÈRES 1.
[décembre 1756]
Grand merci, mon cher confrère, de votre petite pastorale 2.
Vous possédez la langue de Cythère;
Si vos beaux faits égalent votre voix,
Vous êtes maître en l'art divin de plaire.
En fait d'amour, il faut parler et faire;
Ce dieu fripon ressemble assez aux rois
Les bien servir n'est pas petite affaire.
Hélas il est plus aisé mille fois
De les chanter que de les satisfaire.
Il se peut pourtant que vous ayez autant de talents pour le service de Mysis 3 que vous en avez pour faire de jolis vers en ce cas, je vous fais réparation d'honneur.
Si vous avez quelque nouvelle intéressante, je vous prie de m'en faire part, quoique en prose. Je vais faire lire Mysis à Mme Denis la paresseuse, qui n'écrit point, mais qui vous aime véritablement. »
1 François de Chenevières, premier commis au bureau de la guerre, né le 22 novembre 1699, à la Rochefoucauld, mort le 13 novembre 1779, a publié Détails militaires, 1750-68, six volumes in-12°, et les Loisirs de M. de C* 1764, deux volumes petit in-12°. (Beuchot.) Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_de_Chennevi%C3%A8res
20:11 | Lien permanent | Commentaires (0)