09/07/2010
Il me paraît absurde de m'attribuer un ouvrage ... mais la calomnie n'y regarde pas de si près.
« A Jean Le Rond d'Alembert
9 de juillet [1769]
Mon cher philosophe, je vous envoie la copie d'une lettre que je suis obligé d'écrire à l'auteur du Mercure [*]. Je vois que cette Histoire du Parlement qu'on m'impute, est la suite de ce petit écrit qui parut, il y a dix-huit mois, sous le nom du marquis de Bélestat [cf. lettre du 20 septembre à Mme du Deffand, où il dit que les deux derniers chapitres de l'Histoire du parlement sont du même style que l'Examen ...], et qui fit tant de peine au président Hénault [**]. C'est le même style ; mais je ne dois accuser personne, je dois me borner à me justifier . Il me paraît absurde de m'attribuer un ouvrage dans lequel il a deux ou trois morceaux qui ne peuvent être tirés que d'un greffe poudreux, où je n'ai assurément pas mis le pied ; mais la calomnie n'y regarde pas de si près.
Je vous demande en grâce d'employer toute votre éloquence et tous vos amis pour détruire un bruit encore plus dangereux que ridicule [***]. Ma pauvre santé n'avait pas besoin de cette secousse. Je me recommande à votre amitié.
J'attends M. de Schomberg [qui fut chambellan du duc d'Orléans et inspecteur général de la cavalerie]. Il voyage comme Ulysse qui va voir les ombres. Mon ombre vous embrasse de tout son cœur. »
*Cette lettre publiée par V* dans le Mercure reparle de l'Examen de la nouvelle histoire de Henri IV … par M. le marquis de B*** (Bélestat), et signale des erreurs historiques ; V* se dit surtout choqué par « l'extrême injustice avec laquelle on y censure l'ouvrage de M. le président Hénault » et 'l'injustice encore plus absurde » qu'on lui avait faite en lui attribuant cet Examen. On renouvelait cette injustice en lui attribuant l'Histoire du parlement : « pour composer un livre utile sur cet objet il faut avoir fouillé pendant une année entière au moins dans les registres ... » or il est « absent de France depuis plus de vingt années... uniquement occupé à d'autres objets. »
**Mme du Deffand, le 29 septembre 1768, dit à V* qui avait signalé à Hénault ce qu'on disait de son ouvrage dans l'Examen … : « heureusement qu'il n'en a pas été fort troublé. » Cf lettres du 18 septembre, 26 octobre, 21 décembre 1768 et 13 janvier et 3 février 1769.
***Le 23 juin, Dupan écrivait : « Le livre où il est mal parlé du roi est intitulé l'Histoire des parlements … C'est une chose inconcevable que Voltaire ose attaquer le roi comme il l'a fait dans un chapitre de ce livre. »
V* dans une lettre à la duchesse de Choiseul, le 18 septembre, reniera particulièrement ces passages : « … comment croira-t-on que j'ai dit que le roi « donna » des pensions à tous les conseillers qui jugèrent Damiens, tandis qu'il est de notoriété publique qu'il n'en donna qu'aux deux rapporteurs ? … comment aurais-je dit qu'on « fit un procès à Damiens » et qu'on « perpétra » son supplice ? Tout cela est absurde, et aussi impertinent que mal écrit ».
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08/07/2010
Il est bon que ceux qui sont nés pour être les soutiens du pouvoir absolu voient les républiques.
« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay
[à Madame de La Live d'Epinay, rue Nicaise, place du Carrousel à Paris]
8è juillet 1774
Quoi ! Ma philosophe a été comme moi sur la frontière du néant et je ne l'ai pas rencontrée ! Je n'ai point su qu'elle fût malade : je ne doute pas que son ancien ami Esculape Tronchin ne lui ait donné dans ce temps funeste des preuves de son amitié pour elle , et de son pouvoir sur la nature. Si cela est, je l'en révérerai davantage, quoiqu'il m'ait traité un peu rigoureusement.[i]
Mes misérables quatre-vingts ans sont les très humbles serviteurs de vos étouffements et de vos enflures, et sans ces quatre-vingts je pourrais bien venir me mettre à côté de votre chaise-longue.
J'ai reçu, il y a longtemps, des nouvelles d'un de vos philosophes datées du pôle arctique, mais rien de l'autre qui est encore en Hollande [Grimm et Diderot]. Je ne sais pas actuellement où est M. Grimm ; on dit qu'il voyage avec MM. De Romanzof [Roumiantsev]. Il devrait bien leur faire prendre la route de Genève. Il est bon que ceux qui sont nés pour être les soutiens du pouvoir absolu voient les républiques.
J'admire le Roi de s'être rendu à la raison, et d'avoir bravé les cris du préjugé et de la sottise.ii Cela me donne grande opinion du siècle de Louis XVI. S'il continue, il ne sera plus question du siècle de Louis XV . Je l'estime trop pour croire qu'il puisse faire tous les changements dont on nous menace [pense-t-il au retour de l'ancien parlement ? cf. lettre à d'Argental du 18 juin]. Il me semble qu'il est né prudent et ferme. Il sera donc un grand et bon roi. Heureux ceux qui ont vingt ans comme lui et qui goûteront longtemps les douceurs de son règne ! Non moins heureux ceux qui sont auprès de votre chaise longue ! Je suis fixé sur le bord du lac, et c'est de ma barque à Charon que je vous souhaite du fond de mon cœur la vie la plus longue et la plus heureuse. Agréez, Madame, mes très tendres respects.
V. »
iAllusions à Théodore Tronchin :
-qui réagit dans l'affaire de « l'âme atroce de Calvin » et de l'article « Genève » de l'Encyclopédie ;
-une indiscrétion possible en 1766, concernant le projet d'établissement à Clèves d'une colonie philosophique cf. lettre de 4 août 1766 à Damilaville:
-au bruit que T. Tronchin répandait en 1767 sue la part prise par V* dans la « guerre civile » de Genève et la manière dont ce dernier le desservit auprès du roi (cf. lettre du 3 avril 1767 à Florian) et auprès de Choiseul;
-à la mésentente de 1768 après qu'il eût circulé dans Paris une copie de La Guerre civile de Genève, dans laquelle Th. Tronchin se trouve raillé (cf. lettre du 1er mars 1768 à Mme Denis et du 6 mars à d'Alembert).
ii Le 26 juin : à Cramer et à Ribote-Charron : « … les protestants de la Gascogne ayant fait une assemblée extraordinaire dans laquelle ils ont prié Dieu pour la guérison de Louis XV et ensuite pour la prospérité de Louis XVI , Montillet,archevêque d'Auch, a écrit au roi une grande lettre dans laquelle il lui a remontré que ces prières étaient contre les lois du royaume, et qu'on ne pouvait punir trop sévèrement une telle prévarication. Le roi a demandé quelles étaient ces lois . On lui a répondu que c'étaient d'anciens édits donnés dans des temps difficiles, qu'ils n'étaient plus d'usage et qu'ils dormaient. Le roi a répondu qu'il ne fallait pas les éveiller, et s'est fait inoculer le moment d'après. » Louis XVI fut inoculé (variole) le 18 juin.
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Il n'y a de bas que les expressions populaires, et les idées du peuple grossier
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
Conseiller d'honneur du parlement, rue Saint -Honoré à Paris
A Cirey ce 11 juillet [1744]
Le convalescent fait partir aujourd'hui sous enveloppe de M. de La Reynière le plus énorme paquet dont jamais vous ayez été excédé. C'est mes anges, toute la pièce avec ses divertissements [La Princesse de Navarre, composée en l'honneur du mariage du dauphin avec l'infante d'Espagne], telle à peu près que je suis capable de la faire. Je ne vous demande pas d'en être aussi contents que Mme du Châtelet et M. le président Hénault, mais je vous demande de l'envoyer à M. le duc de Richelieu,[V* dit que c'est Richelieu qui lui a demandé ce divertissement , et il en suivra de près le travail, ainsi que les d'Argental, d'où de nombreuses discussions et remaniements que l'on suit ua fil des lettres depuis le mois d'avril] et d'en paraître contents.
Je souhaiterais pour le bien de votre âme que vous voulussiez faire grâce à Sancette dont vous m'avez paru d'abord si mécontents. Tenez-moi quelque compte d'avoir mis au théâtre un personnage neuf dans l'année 1744, et d'avoir dans ce personnage comique mis de l'intérêt et de la sensibilité. Comment avez-vous pu jamais imaginer que le bas pût se glisser dans ce rôle ? Comment est-ce que la naïveté d'une jeune personne ignorante, et à qui le nom seul de la cour tourne la tête, peut tomber dans le bas ? Ne voulez-vous pas distinguer le bas du familier et le naïf de l'un et de l'autre ?
Il n'y a de bas que les expressions populaires, et les idées du peuple grossier. Un Jodelet est bas , parce que c'est un valet, ou un vil bouffon à gages.
Morillo est d'une nécessité absolue. Il est le père de sa fille, une fois, et on ne peut se passer de lui. Or s'il faut qu'il paraisse, je ne vois pas qu'il puisse se montrer sous un autre caractère, à moins de faire une pièce nouvelle.
Je pourrai ajouter quelques airs aux divertissements et sutout à la fin ; mais dans le cours de la pièce je me vois perdu si on souffre des divertissements trop longs. Je maintiens que la pièce est intéressante et ces divertissements n'étant point des intermèdes mais incorporés au sujet, et faisant partie des scènes, ne doivent être que d'une longueur qui ne refroidisse pas l'intérêt.
Enfin vous pouvez, je cois, envoyer le tout à M. de Richelieu, et préparer son esprit à être content. S'il l'est ne pourrait-on pas alors lui faire entendre que cette musique continuellement entrelacée avec la déclamation des comédiens est un nouveau genre pour lequel les grands échafaudages de symphonie ne sont point du tout propres ? Ne pourrait-on pas lui faire entendre qu'on peut réserver Rameau pour un ouvrage tout en musique ? Vous me direz ce que vous en pensez et je me conformerai à vos idées .
Que de peines vous avez avec moi ! et que d'importunités de ma part ! En voici bien d'un autre . Vous souvenez-vous avec quels serments réitérés ce fripon de Prault vous promis de ne pas débiter l'infâme édition [Recueil de pièces fugitives en prose et en vers, Prault, 1740 (1739), saisi en novembre 1739; cf. lettre à Feydeau de Marville du 22 octobre] qu'il a fait faire à Trévoux ? M. Pallu [Bertrand-René Pallu, intendant à Lyon] me mande qu'elle est publique à Lyon. Je le supplie de la faire séquestrer, mais je vous demande en grâce d'envoyer chercher ce misérable et lui dire que ma famille est très résolue à lui faire un procès criminel, s'il ne prend pas le parti de faire lui-même ses diligences pour supprimer cette oeuvre d'iniquité. Il a assurément grand tort , et on ne peut se conduire avec plus d'imprudence et de mauvaise foi. Je travaillais à lui procurer une édition complète et purgée de toutes les sottises qu'il a mises sur mon compte dans son indigne recueil ; et c'est pendant que je travaille pour lui qu'il me joue un si vilain tour. Il ne sent pas qu'il y perd, que son édition se vendrait mieux et ne serait point étouffée par d'autres si elle était bonne.
Mais presque tous les libraires sont ignorants et fripons ; ils entendent leurs intérêts aussi mal qu'ils les aiment avec fureur. La mauvaise foi de Prault me fait d'autant plus de peine que je me flattais que cette même édition corrigée selon mes vues serait celle dont je serais le plus content. Vous allez trouver ma douleur trop forte, mais vous n'êtes pas père. Pardonnez aux entrailles paternelles, vous qui êtes le parrain et le protecteur de presque tous mes enfants [= ses oeuvres, bien entendu]; adieu mon cher et respectable ami, Mme du Châtelet vous dit toujours des choses bien tendres, car comment ne pas vous aimer tendrement ? Mille tendres respects à tous les anges.
V.
Permettez que le bavard dise encore un petit mot de la Princesse de Navarre et du Duc de Foix. Il m'est devenu important que cette drogue soit jouée, bonne ou mauvaise. Elle n'est pas faite pour l'impression, elle produira un spectacle très brillant et très varié, elle vaut bien La Princesse d'Elide [de Molière, composée en 1664 pour les fêtes de Versailles] et c'est tout ce qu'il faut pour le courtisan. Mais c'est aussi ce qu'il me faut, cette bagatelle est la seule ressource qui me reste, ne vous déplaise, après la démission de M. Amelot [le 26 avril], pour obtenir quelque marque de bonté qu'on me doit pour des bagatelles d'un autre espèce dans lesquelles je n'ai pas laissé de rendre service [sa mission diplomatique en Prusse; cf. lettre à Amelot le 7 avril]. Entrez donc un peu, mon cher ange, dans ma situation, et songez plutôt ici à votre ami qu'à l'auteur et au solide qu'à la réputation. Je ferai pourtant de mon lmieux pour ne pas perdre celle-ci.
V.
Autre bavarderie. Je suis pourtant toujours pour cet arbre chargé de trophées dont les rameaux se réunissent. Est-ce encore ce coquin de M. LE CHEVALIER ROY [Pierre-Charles Roy, chevalier de Saint-Michel] qui m'a volé cette idée ? Je viens de lire Nérée [Nirée, entrée ajoutée au Ballet de la paix de Roy]. Je ne sais si je ne me trompe, mais cela ne me parait écrit ni naturellement ni correctement, ces deux choses manquant font détestablement [cf. Les femmes savantes de Molière]. J'en demande pardon à M. LE CHEVALIER. »
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07/07/2010
povera e nuda vai filosofia [tu t'en vas pauvre et nue, philosophie]
http://www.youtube.com/watch?v=I96ywoNhh9M&feature=pl...#!
"Appelle ton chien et allons chasser" est si je ne me trompe, le titre de ce que vous venez d'entendre, et correspond à l'ambiance actuelle en France, sauf erreur de ma part . Et ce n'est pas aussi guilleret que cet air de crin-crin !
http://fr.wikipedia.org/wiki/Caton_l%27Ancien
"...les Catons ne sont pas faits pour réussir chez une nation qui n'aime plus que l'opéra-comique.": je remplace ici "opéra-comique" par "Ile de la tentation", "secret story", Castaldi, Vendetta, le foot, McDo, les rumeurs, les séries policières américaines, Navarro (oui, je sais, ça ne passe plus ! ), Derrick (ceux qui l'aiment ne sont pas réputés pour leur hyper-activité, et j'ai des preuves ! ), ...
Caton ...
On rigole un peu moins !
A Marie-Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet
de l'Académie des sciences, etc.
11è juillet 1776
Mon esprit et mon cœur vous remercient, intrépide et vrai philosophe, d'avoir bien voulu me faire l'analyse de cette pièce de théâtre [à savoir, les intrigues qui ont abouti à la démission de Turgot]. Je ne la connaissais que par des récits infidèles ; vous m'en parlez comme un grand connaisseur. Le héros principal est un Caton, mais les Catons ne sont pas faits pour réussir chez une nation qui n'aime plus que l'opéra-comique. Je voudrais pouvoir voir l'auteur avant de mourir. Je fais actuellement un recueil de tous ses ouvrages que j'ai pu rassembler [Édits de Sa Majesté Louis XVI pendant l'administration de M. Turgot, édition posthume dans l'édition de Kehl]. Il me paraît que c'est une collection unique, elle sera un jour bien précieuse. Si vous le voyez, je vous prie instamment de lui dire combien je révère et combien j'aime son génie et son caractère.
Pour vous je vous crois enfoncé dans la géométrie. Je vous pardonne si vous faites dans les mathématiques des découvertes nouvelles, comme ont fait Sir Isaac [Newton] et capitaine Halley. Mais n'oubliez pas, je vous en prie, notre Académie. Il faut que vous nous fassiez l'honneur d'en être à la première occasion. Nous avons besoin d'un homme tel que vous. Alors je dirai : nunc dimittis …[= maintenant tu quittes ...] Pourquoi faut-il que je sois si éloigné de vous ? Que je ne puisse vous parler et surtout vous entendre ? Vous ranimez ma vieillesse un moment par votre lettre, mais je retombe bientôt après dans mon anéantissement . Où est le temps où vous rallumiez mon feu avec M. d'Alembert ? Où est le temps encore plus éloigné où notre Caton daigna passer quelques jours aux Délices dans la chambre des fleurs ?[d'Alembert et Condorcet sont venus chez V* en septembre-octobre 1770, et Turgot en novembre 1760] Je suis de tous les côtés livré aux regrets, et malheureusement je suis sans espérance ; c'est le pire de tous les états. C'est même le signal que nous donne la nature pour sortir de ce monde, car quel motif nous y peut retenir quand l'illusion de cette espérance est perdue ?
Conservez-moi du moins la consolation réelle de votre amitié, j'en ai besoin. J'ai vu dans l'espace de plus de quatre-vingts ans bien des choses affreuses, et je crains d'en voir encore si ma vie se prolonge . Pétrarque disait : povera e nuda vai filosofia [tu t'en vas pauvre et nue, philosophie]. Il faut dire à présent : sferzata e sanguinosa vai filosofia [tu t'en vas fouettée et sanglante, philosophie]. Ai-je pu trouver un asile dans mes déserts sur la fin de mes jours ? Je n'en sais rien .
Je vous aime de tout mon cœur, et je vous suis bien respectueusement dévoué. »
Une tête intéressante qui n'est pas sans me rappeller Bébel ( un nez de boxeur) et un videur de boîte de nuit ( avec des rides de sharpei) !

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06/07/2010
le bien et le mal sont les deux éléments de sa vie
"C'est un fou" : vous avez toute liberté pour remplacer "Frédéric II par qui vous voulez, le choix est large dans le monde des dirigeants actuels (ceux qui sont capables de souffler le chaud et le froid suivent les traces d'illustres anciens qui ont vu bien du monde se prosterner à leurs pieds et encore plus à avoir senti le poids d'iceux pieds !).
Tiens en parlant de pieds, ça me rappele l'histoire de trente (à peu près ! ) gugusses en bleu qui sont allés bien loin, faire admirer leurs mollets (pas si beaux que ça ) et leurs mots-laids ( indignes ! )!
La race des meneurs fous n'est pas éteinte et, je le redoute, ne s'éteindra pas .
Et pour mettre un peu de poésie dans ce monde une image qui est sensée représenter le bien et le mal :

Et comme disait Eve : "Adam a toujours été dur de la feuille"!
Comprenne qui peut !
Ce qui explique, selon moi, qu'il n'ait pas bien compris les directives du barbu céleste .
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
6 juillet 1759
Encore un mot, c'est pour vous dire que personne au monde ne m'est aussi cher que vous et votre amitié.
Que me parlez-vous de Luc [Frédéric II]? Ne savez-vous pas qu'il est capable de tout ? C'est un fou qui se plait dans les deux extrêmes, le bien et le mal sont les deux éléments de sa vie.
Ma vie est à vous pour toujours.
V. »
Un peu de réflexion sur le bien et le mal :
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une conférence entre deux méchants hommes n'intéresse point
Je ne sais si M. Woerth a reçu comme M. Ami Camp un paquet marqué en rouge "Paquet suspect", toujours est-il qu'il est soupçonné d'en avoir reçu un très discretement et fort bien garni, -arme de guerre politique-, d'une fort jolie somme.
En cette période faste pour le sport, en particulier le cyclisme, on va sans doute entendre encore des rumeurs de dopage, et bien des hommes politiques , -et pour être exceptionnellement gentil, je vais dire des partis politiques,- eux se dopent au pognon qui est l'EPO(-gnon) de l'élu en mal de reconnaissance .
J'ai comme l'impression que l'on joue à "je te tiens, tu me tiens par la barbichette, le premier qui parlera aura une ... amnistie ?" Je m'attends à tout dans ce monde qui lie pouvoir et fric .
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De pas content à fâché, de fâché à "tu me gonfles", de "tu me gonfles" à "compte tes abattis" ... je sens que du poil va voler ! Vous pariez sur lequel ?
Et dire qu'après ça, ils vont continuer à manger dans le même gamelle ( là je ne parle plus des chats ci-dessus, bien évidemment ! )
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
Ferney le 6 juillet 1765
Voici, mes divins anges, ce qui est advenu. Votre paquet adressé à M. Camp et contresigné Chauvelin, arriva en son temps à Lyon à l'adresse de M. Camp. Les fermiers généraux des postes l'avaient arrêté et contresigné à Paris d'une autre façon en mettant en gros caractères sur l'enveloppe et avec une encre rouge Paquet suspect. M. Camp est toujours malade, M. Tronchin qui est à Lyon fut étonné du suspect en lettres rouges, il ouvrit le paquet. Les directeurs des postes disputèrent, ils exigèrent, je crois, un louis : enfin le paquet qui portait une sous-enveloppe à l'adresse de Wagnière, chez Souchay à Genève m'a été rendu aujourd'hui. La même chose à peu près m'était arrivée au sujet d'un très petit paquet, aussi contresigné Chauvelin, que vous m'aviez adressé il y a environ trois semaines. Ainsi vous voyez que les fermiers préfèrent le port aux conseillers d'État intendants des finances. Je pense donc que n'ayant à m'envoyer que des paquets honnêtes, le meilleur parti est de les mettre avec les dépêches pour le résident de Genève :vous voudrez bien m'informer du départ par une simple lettre par la poste, à Wagnière chez Souchay à Genève sans autre enveloppe.
J'étais curieux avec juste raison de savoir ce que contenait cette vieille demi-page [où V* parlait de l'Infâme ; cf. lettre du 22 mai]. Le mot l'Infâme a toujours signifié le jansénisme, secte dure et barbare, plus ennemie de l'autorité royale que le presbytérianisme ( et ce n'est pas peu dire ) et plus dangereuse que les jésuites. Si le Roi sait mon grimoire, il sait que je n'écris jamais qu'en loyal sujet à des sujets très loyaux.
Lekain est triste et moi aussi ; je lui conseille de venir chez moi en Suisse pour s'égayer [il y a un conflit à la Comédie française ; cf. lettre du 24 avril à Damilaville ]. Mlle Clairon viendra à Ferney,[elle a été enfermée à Fort-l'Evêque] j'y passerai quelques jours pour elle, et la tragédie que nous jouerons tous ensemble nous remettra de la gaieté dans le cœur [au marquis de Plessis-Villette, ce jour, il dit que Mme Denis après avoir demandé la salle « pour repasser son linge », « a rebâti le théâtre » . Mlle Clairon y jouera en août les rôles d'Aménaïde et d'Electre dans Tancrède et Oreste]. Ferney n'est point à moi, comme vous savez, il est à Mme Denis. J'ai le malheur de n'avoir rien en France et même nulle part, mais je vous remercie pour Mme Denis, vous et M. le duc de Praslin, comme si c'était pour moi-même; et jamais ses bontés et les vôtres ne sortiront de mon cœur . Je crois qu'il est très convenable que j'écrive à M. de Calonne ; je regarde sa commission de rapporteur comme un de vos bienfaits [dans l'affaire des dîmes que le curé de Ferney voulait faire payer à V*].
Je viens de vous dire, mes anges, que si Lekain fait bien, il viendra dans ma Suisse, mais je le prierai de rester au théâtre . On est donc revenu sur les six pendus?[Le Siège de Calais de Belloy, un des motifs du conflit à la Comédie Française, Lekain et Molé décampèrent plutôt que jouer cette pièce qu'on leur imposait] Je suis très aise pour l'auteur que l'illusion l'ait si bien et si longtemps servi. Le ridicule n'est que dans l'enthousiasme qui a pris pour une chose honorable à la nation, l'époque honteuse de trois batailles perdues coup sur coup et d'une province subjuguée : vous apprêtez trop à rire aux Anglais et j'en suis fâché.
Comme je ne reçois le manuscrit du petit prêtre qu'aujourd'hui [Octave et Le Triumvirat qu'il veut faire attribuer à un jeune prêtre] , vous ne pouvez recevoir la nouvelle leçon que dans quinze jours . Il est bon d'ailleurs d'accorder du temps au zèle de ce jeune homme . Il dit que la scène des deux tyrans ne fera jamais un bon effet, parce qu'une conférence entre deux méchants hommes n'intéresse point ; mais elle peut attacher par la grandeur de l'objet et par la vérité des idées, surtout si elle est bien dialoguée et bien écrite ; selon lui, c'est la scène de Julie errante dans les rochers de cette [île] triumvirale qui doit intéresser,[Ac; II sc. 4] mais il faut des actrices.
Je me mets sous les ailes de mes anges.
V. »
Je te tiens, tu me tiens :
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http://www.deezer.com/listen-880476
http://www.deezer.com/listen-587594
Allez, maintenant je vous lâche la grappe ! (ce qui exclut les femmes du jeu , évidemment ).
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05/07/2010
que la justice ne soit pas muette comme elle est aveugle
http://www.deezer.com/listen-4952936
http://www.deezer.com/listen-2156629
Il faut que ça bouge, il n'est plus temps d'être tièdes !
http://www.monsieurdevoltaire.com/pages/En_direct_par_VOL...

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grace Bosc du Bouchet , comtesse d'Argental
Aux Délices 5 juillet [1762]
Mes divins anges, cette malheureuse veuve [Rose Calas] a donc eu la consolation de paraître en votre présence, vous avez bien voulu l'assurer de votre protection. Vous avez lu sans doute les Pièces originales que je vous ai envoyées par M. de Courteilles [« c'est-à-dire les Lettres de la mère et du fils », datées du 15 et 22 juin et publiées par V* dans les Pièces originales concernant la mort des sieurs Calas]. Comment peut-on tenir contre les faits avérés que ces pièces contiennent? Et que demandons nous ? Rien autre chose sinon que la justice ne soit pas muette comme elle est aveugle, qu'elle parle, qu'elle dise pourquoi elle a condamné Calas. Quelle horreur qu'un jugement secret, une condamnation sans motifs ! Y a-t-il une plus exécrable tyrannie que celle de verser le sang à son gré sans en rendre la moindre raison ? Ce n'est pas l'usage, disent les juges ; eh ! monstres, il faut que cela devienne l'usage ! Vous devez compte aux hommes du sang des hommes . Le Chancelier serait il assez ...... [mot biffé et illisible; on sait qu'il s'agit de Guillaume de Lamoignon] pour ne pas faire venir la procédure ?
Pour moi, je persiste à ne vouloir autre chose que la production publique de cette procédure. On imagine qu'il faut préalablement que cette pauvre femme fasse venir des pièces de Toulouse : où les trouvera-t-elle ? Qui lui ouvrira l'antre du greffe ? Où la renvoie-t-on si elle est réduite à faire elle même ce que le chancelier ou le conseil seul peut faire ? Je ne conçois pas l'idée de ceux qui conseillent cette pauvre infortunée . D'ailleurs ce n'est pas elle seulement qui m'intéresse, c'est le public, c'est l'humanité. Il importe à tout le monde qu'on motive de tels arrêts. Le parlement de Toulouse doit sentir qu'on le regardera comme coupable tant qu'il ne daignera pas montrer que les Calas le sont . Il peut s'assurer qu'il sera l'exécration d'une grande partie de l'Europe.
Cette tragédie me fait oublier toutes les autres, jusqu'au miennes. Puisse celle qu'on joue en Allemagne finir bientôt [Frédéric, semblant presque anéanti, conclut une alliance le 19 juin avec son ancienne ennemie la Russie].
Je voudrais que la pauvre Calas eût communication de la lettre que lui a écrite son fils [Lettre de Donat Calas fils à la dame veuve Calas, sa mère, datée du 22 juin et publiée dans les Pièces originales], je voudrais qu'on la fît imprimer à Paris et que le libraire donnât quelques louis à cette infortunée.
Mes charmants anges, je remercie encore une fois votre belle âme de votre belle action.
V. »

Florian, "Florianet" pour Volti, écrivit cette fable qui illustre bien une part de l'activité de V*, l'aide aux malheureux, l'entr'aide, lui l'éternel malade qui aide les victimes de l'injustice :
http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://www.shanaweb.ne...
Pour les curieux, ce document :
http://www.ina.fr/art-et-culture/arts-du-spectacle/video/...
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