28/06/2010
Cela ne corrigera pas nos dames qui aiment un peu trop le brelan.
Brelan d'as, avec un A !
A comme Agathe !
Ce n'est pas une pierre froide et polie, mais une chaude voix dans une enveloppe jolie d'une interprête jazzy : http://www.youtube.com/watch?v=ATUSFPyK1x4

Bonne lecture , esbaudissez-vous !
"Bruxelles est si peu bruyant" qu'il a fallu raconter des histoires belges pour qu'on se souvienne de cette modeste contrée, qui ne se jugeant pas assez petite (ou au contraire , peut-être se voyant trop grande ? ) est prête à se couper en deux !
Remontons dans le temps, alors que la Belgie n'existait pas encore .
« A Berger
A Bruxelles le [28 juin 1739]
Je reçois votre lettre du 25. Vous ne pouvez ajouter, monsieur, au plaisir que me font vos lettres, qu'en détruisant le bruit qui se répand, que j'ai envoyé mon Siècle de Louis XIV à Prault. Je sais qu'on n'en a que des copies très infidèles, et je serai fâché que les copies ou l'original fussent imprimées.
Je n'aurai jamais d'aussi brillantes nouvelles à vous apprendre que celles que vous nous envoyez. C'est ici le pays de l'uniformité. Bruxelles est si peu bruyant que la plus grande nouvelle d'aujourd'hui est une très petite fête que je donne à Mme du Châtelet, à Mme la princesse de Chimay [Gabrielle-Françoise de Beauvau, femme d'Alexandre d'Hénin-Liétard, prince de Chimay], et à M. le duc d'Arenberg [le 30, à Thiriot : après avoir vu « choir deux pauvres artificiers », il voit bien que « ce n'est pas à lui de donner des fêtes » ]. Rousseau, je crois, n'en sera pas [Jean-Baptiste Rousseau dont V* répète qu'il a été « chassé » par le comte d'Arenberg]. C'est surement la première fête qu'un poète ait donnée à ses dépens et où il n'y ait point de poésie. J'avais promis une devise fort galante pour le feu d'artifice ; mais j'ai fait faire de grandes lettres bien lumineuses, qui disent : Je suis du jeu ; va tout . Cela ne corrigera pas nos dames qui aiment un peu trop le brelan. Je n'ai pourtant fait cela que pour les corriger.
Si vous voyez M. Bouchardon qui élève des monuments un peu plus durables pour sa gloire et pour celle de sa nation, je vous prie de lui faire mes sincères compliments. Vous savez que les Phidias me sont aussi chers que les Homère.
Continuez, mon cher ami, à m'écrire de très longues lettres qui me dédommagent de tout ce que je ne vois pas à Paris. Ayez la bonté, je vous prie, d'envoyer à Prault ce petit billet que vous cachetterez avec un petit pain. Mille compliments à M. de Crébillon, à M. de La Bruère [? Leclerc de La Bruère sans doute, auteur de livrets d'opéra]. N'oubliez pas de dire à l'abbé Dubos [secrétaire perpétuel de l'Académie française à qui V* écrivit entre autre le 30 octobre 1738 pour lui présenter le plan du Siècle de Louis XIV en formation] combien je l'estime et je l'aime. Adieu. »
http://www.mediadico.com/dictionnaire/lecture.asp/definit...
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27/06/2010
Tout ce qui est contre la vraisemblance doit au moins inspirer des doutes, mais l'impossible ne doit jamais être écrit
Hier, 26 juin 2010, s'est déroulée la Fête à Voltaire à Ferney-Voltaire .
Immense plaisir de partager cette journée avec Monsieurdevoltaire sous la forme de son auteur LoveV et d'une de ses amies.
Promenades animées par les spectacles donnés tant au château que dans les rues de Ferney.
Très agréable programme concocté par Mme Audemars et le service culturel mené par Olivier Guichard.
Oserai-je vous exprimer ma (notre ) frustration ? Oui, bien sûr !
Pourquoi, encore une fois au nom du principe du moindre effort d'un agent de l'état que je ne nomme plus (ça lui ferait trop d'honneur ), n'a-t-il pas été possible de faire la visite du château l'après-midi ?
Autre temps, autres moeurs ! L'an passé, avec les mêmes contraintes de lieu et de personnel, les visites se sont déroulées normalement, avec un succès accru par l'ambiance festive .
L' administrateur, entreprenant pour faire parler du site, n'est pas capable de passer outre la mauvaise volonté d'un subalterne mielleux (lèche-cul et faux jeton ) et fainéant (ce n'est pas de la diffamation, mais un constat -non amiable, je le reconnais- !!).
C'EST LAMENTABLE !!
Manque de réflexion, manque d'initaitive ! Petit bras ! comme on dit au tennis .
Je déteste ce manque de respect du visiteur qui fait 300 km dans la journée pour se retrouver à la porte du monument. Encore plus quand ce visiteur est un proche !
Allons ! oublions ces trublions et publions ces brouillons !
http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://www.cosmovisions.com/M15240.jpg&imgrefurl=http://www.cosmovisions.com/Strabon.htm&usg=__OlRPQo8Nu1qah0n-MmLNKqXkka4=&h=430&w=671&sz=90&hl=fr&start=7&um=1&itbs=1&tbnid=_RagL2ZIlKKu0M:&tbnh=88&tbnw=138&prev=/images%3Fq%3Dstrabon%26um%3D1%26hl%3Dfr%26lr%3Dlang_fr%26sa%3DN%26rlz%3D1G1TSEH_FRFR383%26tbs%3Disch:1,lr:lang_1fr
Strabon , était-il l'inventeur du strabisme ? Je vous le demande . En voyant ses cartes on pourrait l'imaginer ! Là, je suis volontairement de mauvaise foi, c'est vrai .

« A Monsieur le ministre [Paul-Claude] Moultou
à Genève.
[vers juin 1764]
Je pourrais bien , mon cher philosophe, dans les moments où ma mauvaise santé me donne quelque relâche, m'amuser un peu de l'histoire ancienne, c'est à dire des fables 1. Je n'ai ni Strabon, ni Hyde De veter persarum religione. Si vous pouviez me prêter ces deux livres, ou les demander à la bibliothèque, je vous serais obligé. Songez combien Dieu vous bénira d'avoir le courage de lever le voile qui cache les trois premiers siècles de notre ère vulgaire 2. Vous serez assurément le seul qui aurez dit la vérité. »
1V* travaille à La Philosophie de l'histoire. Il dit que ceux qui ont écrit l'histoire ancienne n'ont fait que « compiler » des « fables » sans esprit critique. Dans la Gazette littéraire du 6 juin : « Tout ce qui est contre la vraisemblance doit au moins inspirer des doutes, mais l'impossible ne doit jamais être écrit … Tous nos compilateurs recueillent (d)es contes sans le moindre examen ; tous sont copistes, aucun n'est philosophe ... »
2Le 8 juin à Damilaville : « Je suis enfoncé à présent dans des recherches pédantesques de l'Antiquité. Tout ce que je découvre dépose furieusement contre l'Infâme. »
10:56 | Lien permanent | Commentaires (0)
26/06/2010
je sais l'histoire d'un problème de géométrie et des bouteilles de savon .
Je ne sais ce qu'est cette histoire de "problème de géométrie" et de "bouteilles de savon".
Pour moi, cela évoque des soucis de vaisselle à faire , laver un énorme plat à gratin dans un évier trop petit par exemple !
Je vais tenter d'élucider cette affaire, et en attendant je vous invite à faire des bulles de savon, le temps est calme et le ciel radieux (Ah ! audace dans les termes ! ) et les humains de Ferney ont le coeur en fête pour célébrer Voltaire.
Je vais de ce pas au château où doit me rejoindre une princesse au grand coeur, accompagnée d'une princesse de bonne conduite .
Que la fête commence ! et ne finisse pas !
http://www.youtube.com/watch?v=e62cU3dU5aw
« A Anne-Louise-Bénédicte de Bourbon-Condé, duchesse du Maine
Ma protectrice,
Votre protégé Cicéron [V* qui signe ainsi les lettres où il est question de Rome sauvée] a changé la scène de Cicéron et Catilina au second acte (car il faut rendre compte de tout à sa souveraine) . Nous avons répété aujourd'hui la pièce [sur la scène du théâtre aménagé par V* rue Traversière] avec ces arrangements, et devant qui ? Madame ? Devant des cordeliers, des jésuites, des pères de l'Oratoire, des académiciens, des magistrats qui savent leurs Catilinaires par cœur. Vous ne sauriez croire quel succès votre tragédie a eu dans cette grave assemblée . Ah ! Madame, qu'il y a loin de Rome au cavagnole Cependant il faut plaire même à celles qui sont occupées d'un vieux plain [terme de jeu de cavagnole quand on mise sur le zero]. Âme de Corneille, nous amènerons le sénat romain aux pieds de Votre Altesse lundi [représentation chez la duchesse le lundi 22 juin]. Après quoi il y aura grand cavagnole. Car vous unissez tout, et je sais l'histoire d'un problème de géométrie et des bouteilles de savon .
Le sénat et le peuple romain vous présentent leurs respects.
Dimanche matin [juin 1750] »

10:16 | Lien permanent | Commentaires (2)
25/06/2010
Le spectacle d'un jeune pédant de soixante et dix ans conduisant un cabriolet ne se donne pas tous les jours
Au château de Voltaire : http://www.lepaysgessien.fr/Actualite/Sortir/article_1236739.shtml
Au hasard de mes furetages , un petit mot sur Voltaire et les abeilles : http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://www.ruche-ecolo.com/abeille/etud-voltaire.jpg&imgrefurl=http://www.ruche-ecolo.com/abeille/etude.php&usg=__wXYDKTOgJI1TyMo_32IF2ZcNSOM=&h=600&w=353&sz=50&hl=fr&start=70&um=1&itbs=1&tbnid=FnUtwHiIAaNDnM:&tbnh=135&tbnw=79&prev=/images%3Fq%3Dvoltaire%2Bjean%2Bhuber%26start%3D54%26um%3D1%26hl%3Dfr%26sa%3DN%26rls%3Dcom.microsoft:fr-FR:IE-SearchBox%26rlz%3D1I7TSEH_fr%26ndsp%3D18%26tbs%3Disch:1
(petit mot, mais adresse qui vaut le détour ).
Voltaire, (Volti, pour moi ) l'éternel malade en pleine forme intellectuelle , irrésistible, impétueux, modèle de vigueur, dans ses oeuvres ... du corps et de l'esprit !

Hier soir, conférence avec illustration musicale dans ce qu'il est convenu d'appeler le grand salon du château de Voltaire (à Ferney) sur le chevalier de Saint-Georges, nègre des Lumières, par Alain Guédé. Celui-ci ne se contente pas d'être un excellent journaliste d'investigation, -ce qui me direz vous est un pléonasme quand on sait qu'il travaille au Canard Enchainé-, mais un bon et attachant conférencier, ce qui reflète la richesse de ses pôles d'intéret . Après le lui avoir dit de vive voix, je renouvelle mon merci.
Merci aussi à l'Association Voltaire à Ferney qui a permis une excellente soirée .
Dieu, ou ce qu'il en reste, le(s) préserve de me lire un jour !
http://fr.wikipedia.org/wiki/Alain_Gu%C3%A9d%C3%A9
http://www.chronicart.com/livres/chronique.php?id=3446
http://www.africultures.com/php/index.php?nav=personne&no=6934
« A Monsieur le professeur [Théodore] Tronchin
à Genève
[22 juin 1764]
Le spectacle d'un jeune pédant de soixante et dix ans conduisant un cabriolet ne se donne pas tous les jours. Mon cher Esculape, j'allais chez vous . J'avais quelque chose à vous dire. Je n'avais point de chevaux de carrosse et j'ai pris le parti de vous aller voir en petit-maître. N'allez point en tirer vos cruelles conséquences, que je me porte bien, que je suis un corps de fer, etc. Ne me calomniez plus et aimez-moi.
V. »
Un autre modèle à mes yeux : Georges Brassens et une chanson qui va avec les exploits de Volti, à la couleur près :
http://www.youtube.com/watch?v=Bvd1PBwGI4M
Et pour en revenir au Chevalier de Saint-Georges, amant émérite dit-on, cette oeuvre L'amant anonyme ( et il sait de quoi il s'agit, vertubleu ! ) :
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24/06/2010
Il est bien doux et bien utile de connaître à fond les gens qui ont séduit la canaille
A la lecture de cette lettre, en voyant "Pigeon" j'ai tout de suite pensé que cepersonnage était à l'origine de "se faire pigeonner" .
Erreur !
Errare humanum est ! perseverare diabolicum !
Donc voir : http://www.mon-expression.info/se-faire-pigeonner
Et pourquoi pas :
Cui(t)-cui(t) : http://lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr/media/01/0...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
24 juin [1776]
Mon cher ange, ce n'est pas de mon joli théâtre, ce n'est pas de Lekain que je veux parler 1, c'est d'un cocher. Hélas ! Ce n'est pas d'un cocher pour me mener à Paris à l'ombre de vos ailes. C'est d'un cocher nommé Gilbert dont vous ne vous doutez pas. Ce Gilbert est le même qui déposa contre M. de Morangé [Morangiès qui avait semble-t-il signé un reçu avant d'avoir touché l'argent du prêt et a été sommé de rendre la somme par ses prétendus créanciers] et qui le fit condamner par le nommé Pigeon et consorts à payer cent mille écus, à garder prison et à être admonesté, etc. etc. La cabale avocassière, convulsionnaire, usurière prônait dans tout Paris ce Gilbert comme un Caton. C'était le cocher qui conduisait le monde dans le chemin de la vertu. Ce Caton , Dieu merci, vient d'être pris volant dans la poche, et faisant de faux billets. Il est dans les prisons du Châtelet. Je vous demande en grâce de vous en informer. Il est bien doux et bien utile de connaître à fond les gens qui ont séduit la canaille, comme les faux messies et monsieur Gilbert. Cela est important. Envoyez un valet de chambre demander des nouvelles de ce brave Gilbert.
Ne serez-vous point charmé de voir tous ces impudents braillards du barreau humiliés ? N'est-ce pas une grande consolation de confondre ceux qui avaient vu Du Jonquay porter à pied cent mille écus [à Morangiès] et faire vingt-six voyages , l'espace de six lieues , en trois heure ? N'est-il pas plaisant de confondre un peu ces témoins de miracles ! Et de pouvoir faire rougir tout Paris si on ne peut le corriger ! Ayez pitié de ma curiosité. C'est une grande passion .
On disait hier que Mlle de Raucourt était à Genève . Mais je n'en crois rien. On prétend qu'elle va en Russie [accusée d'immoralité, cette actrice de la Comédie française, Rocou (comme l'écrit V*) part pour la Russie en mai 1776 ; elle ne reviendra qu'en 1779], et que depuis longtemps elle avait fait son marché.
Je vous conjure d'être aussi curieux que moi sur le cocher Gilbert …
V. »
1Le 12 juin à d'Argental : « Un directeur de troupes nommé Saint-Géran, fort protégé par Mme de Saint-Julien, et par M. le marquis de Gouvernet son frère, achève actuellement dans ma colonie le plus joli théâtre de province. Il demande Lekain pour consacrer cette église immédiatement après le jubilé. Il se flatte que Lekain viendra passer chez nous tout le mois de juillet si M. le maréchal de Duras lui … donne la permission [de prendre congé de la Comédie française]. C'est une grâce qui ne peut être obtenue que par vous. »
Un air qui me trotte dans la tête avec une voix acidulée qui réveille immanquablement : http://www.youtube.com/watch?v=ot3cVY1JESQ&NR=1
07:45 | Lien permanent | Commentaires (0)
23/06/2010
Quand on vexe un pauvre auteur, les dix-neuf vingtièmes du monde l'ignorent ; le reste en rit et moi aussi
Arsenic ??
http://www.youtube.com/watch?v=shi9C368X0s
Non ! A' n'ser' à rien !
Arsenaria ! Na !!

« A Nicolas-Claude Thiriot
[lettre destinée à la publication et qui parut dans le Mercure de juillet 1761]
[23 juin 1761]
Sic vos non vobis [début de vers attribué à Virgile : « sic vos non vobis mellificatis apes » = « de même, vous , abeilles, vous faites du miel pour d'autres que vous »]. Dans le nombre immense de tragédies, comédies, opéra-comiques, discours moraux et facéties, au nombre d'environ cinq cent mille [exagéré !], qui font l'honneur éternel de la France, on vient d'imprimer une tragédie sous mon nom, intitulée Zulime. La scène est en Afrique. Il est bien vrai qu'autrefois ayant été avec Alzire en Amérique, je fis un petit tour en Afrique avec Zulime [jouée en juin 1740], avant d'aller voir Idamé [L'Orphelin de la Chine, joué en 1755] à la Chine ; mais mon voyage d'Afrique ne me réussit point. Presque personne dans le parterre ne connaissait la ville d'Arsénie qui était le lieu de la scène. C'est pourtant une colonie romaine nommée Arsénaria ; et c'est encore par cette raison-là qu'on ne la connaissait pas.
Trémizène est un nom bien sonore ; c'est un joli petit royaume, mais on n'en avait aucune idée. La pièce ne donna nulle envie de s'informer du gisement de ces côtes. Je retirai prudemment ma flotte. Et quae desperat tractata nitescere posse relinquit [= et ce qu'il désespère de traiter brillamment, il le laisse]. Des corsaires se sont enfin saisis de la pièce, et l'ont fait imprimer ; mais par droit de conquête ils ont supprimé deux ou trois cents vers de ma façon, et en ont mis autant de la leur [cette édition reproduit le texte d'un manuscrit corrigé de la main de V*, et c'est certainement d'une copie de ce manuscrit qu'il est question ensuite]. Je crois qu'ils ont très bien fait ; je ne veux point leur voler la gloire comme ils m'ont volé mon ouvrage. J'avoue que le dénouement leur appartient, et qu'il est aussi mauvais que l'était le mien [dans cette version de la pièce, l'épouse secrète du héros se tue]. Les rieurs auront beau jeu ; car au lieu d'avoir une pièce à siffler, ils en auront deux.
Il est vrai que les rieurs seront en petit nombre, car peu de gens pourraient lire les deux pièces. Je suis de ce nombre ; et de tous ceux qui prisent ces bagatelles ce qu'elles valent, je suis peut-être celui qui y met le plus bas prix. Enchanté des chefs-d'œuvre du siècle passé, autant que dégoûté du fatras prodigieux de nos médiocrités, je vais expier les miennes en me faisant le commentateur de Pierre Corneille. L'Académie agrée ce travail, je me flatte que le public le secondera en faveur des héritiers de ce grand nom.
Il vaut mieux commenter Heraclius que de faire Tancrède. On risque bien moins. Le premier jour qu'on joua ce Tancrède [3 septembre 1760] beaucoup de spectateurs étaient venus armés d'un manuscrit qui courait le monde, et qu'on assurait être mon ouvrage. Il ressemblait à cette Zulime imprimée.
C'est ainsi qu'un honnête libraire nommé Gosse s'avisa d'imprimer une Histoire générale qu'il assurait être de moi [associé à Néaulme quand celui-ci édita cette oeuvre en deux tomes en 1753] , et il me le soutenait à moi-même. Il n'y a pas grand mal à tout cela. Quand on vexe un pauvre auteur, les dix-neuf vingtièmes du monde l'ignorent ; le reste en rit et moi aussi. Il y a trente à quarante ans que je prenais sérieusement la chose, j'étais bien sot ! Adieu, je vous embrasse.
V. »
Wanted !
Une bonne adresse pour bricoleur-maçon-charpentier-peintre de bonne volonté :
http://www.castellum-tingitanum.org/index.php?id=8&id2=3
Et pour garder des relations internationales au beau fixe, pour les germanophones (et -philes ! ) :
http://www.youtube.com/watch?v=q6IUQo8ch9s&feature=related
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22/06/2010
ce sont les termes et non les choses qui révoltent l'esprit humain
http://www.youtube.com/watch?v=eUKz2fvb6jY&feature=related
« A Charles-Marie de La Condamine
22 juin 1734
Si la grand-chambre était composée, monsieur, d'excellents philosophes, je serais très fâché d'y avoir été condamné [le 10 juin les Lettres philosophiques condamnées sont brûlées au pied du grand escalier du Palais], mais je crois que ces vénérables magistrats n'entendent que médiocrement Neuton et Locke .Ils n'en sont pas moins respectables pour moi quoiqu'ils aient donné autrefois un arrêt en faveur de la physique d'Aristote, qu'ils aient défendu de donner de l'émétique [la Sorbonne lance un arrêt contre l'antimoine en 1566. Le parlement fit un arrêt en faveur de la doctrine d'Aristote sous Louis XIII en 1624, puis un arrêt contre l'émétique] etc., leur intention est toujours très bonne. Ils croyaient que l'émétique était un poison, mais depuis que plusieurs conseillers de grand-chambre furent guéris par l'émétique, ils changèrent d'avis sans pour autant réformer leur jugement, de sorte qu'encore aujourd'hui l'émétique demeure proscrit par un arrêt, et que M. Silva ne laisse point d'en ordonner à messieurs, quand messieurs sont tombés en apoplexie. Il pourrait peut-être arriver à peu près la même chose à mon livre. Peut-être quelque conseiller pensant lira les Lettres philosophiques avec plaisir quoiqu'elles soient proscrites par arrêt. Je les ai relues hier avec attention pour voir ce qui a pu choquer si vivement les idées reçues. Je crois que la manière plaisante dont certaines choses y sont tournées aura fait généralement penser qu'un homme qui traite si gaiement les quakers et les anglicans, ne peut faire son salut cum timore et tremore [= avec crainte et tremblement], et est un très mauvais chrétien ; ce sont les termes et non les choses qui révoltent l'esprit humain. Si M. Neuton ne s'était pas servi du mot d'attraction dans son admirable philosophie, toute notre Académie aurait ouvert les yeux à la lumière, mais il a eu le malheur de se servir à Londres d'un mot auquel on aurait attaché une idée ridicule à Paris, et sur cela seul on lui a fait ici son procès avec une témérité qui fera un jour peu d'honneur à ses ennemis.
S'il est permis de comparer les petites choses aux grandes, j'ose dire qu'on a jugé mes idées sur des mots. Si je n'avais pas égayé la matière, personne n'eût été scandalisé, mais aussi personne ne l'aurait lu.
On a cru qu'un Français qui plaisantait les quakers, qui prenait le parti de Locke et qui trouvait de mauvais raisonnements dans Pascal était un athée. Remarquez, je vous prie, si l'existence d'un Dieu dont je suis réellement très convaincu n'est pas clairement admise dans tout mon livre ? Cependant les hommes qui abusent toujours des mots appelleront également athée celui qui niera un Dieu et celui qui disputera sur la nécessité du péché originel. Les esprits ainsi prévenus ont crié contre les Lettres sur Locke et sur Pascal.
Ma lettre sur Locke se réduit uniquement à ceci :
la raison humaine ne saurai démontrer qu'il soit impossible à Dieu d'ajouter la pensée à la matière.
Cette proposition est, je crois, aussi vraie que celle-ci : deux triangles qui ont la même base et la même hauteur sont égaux.
A l'égard de M. Pascal le grand point de la question roule visiblement sur ceci,savoir si la raison humaine suffit pour prouver deux natures dans l'homme. Je sais que Platon a eu cette idée et qu'elle est très ingénieuse, mais il s'en faut bien qu'elle soit philosophique. Je crois le péché originel quand la religion me l'a révélé, mais je ne crois pas les androgynes quand Platon a parlé ; les misères de la vie, philosophiquement parlant, ne prouvent pas plus la chute de l'homme que les misères d'un cheval de fiacre ne prouvent que les chevaux étaient tous autrefois gros et gras et ne recevaient jamais de coups de fouet, et que , depuis qu'un d'eux s'avisa de manger trop d'avoine, tous ses descendants furent condamnés à trainer des fiacres. Si la sainte Écriture me disait ce dernier fait, je le croirais, mais il faudrait du moins m'avouer que j'aurais eu besoin de la sainte Écriture pour le croire et que ma raison ne suffisait pas.
Qu'ai-je donc fait autre chose que de mettre la sainte Écriture au dessus de la raison ? Je défie encore une fois qu'on me montre une proposition répréhensible dans mes réponses à Pascal .Je vous prie de conférer sur cela avec vos amis et de vouloir bien me mander si je m'aveugle.
Vous verrez bientôt Mme du Châtelet. L'amitié dont elle m'honore ne s'est point démentie dans cette occasion [elle est sa maitresse depuis le printemps 1733, et lui a offert refuge dans son château de Cirey suite à la lettre de cachet de mai lancée contre lui]. Son esprit est digne de vous et de M. de Maupertuis [Maupertuis a initié la marquise aux hautes mathématiques, devenu son amant, il fera tout pour se dérober à l passion exigeante de Mme du Châtelet], et son cœur est digne de son esprit. Elle rend de bons offices à ses amis, avec la même vivacité qu'elle a appris les langues et la géométrie ; et quand elle a rendu tous les services imaginables, elle croit n'avoir rien fait ; comme, avec son esprit et ses lumières, elle croit ne savoir rien, et ignore si elle a de l'esprit. Soyez-lui bien attachés, vous et M. de Maupertuis, et soyons toute notre vie ses admirateurs et ses amis. La cour n'est pas trop digne d'elle ; il lui faut des courtisans qui pensent comme vous. Je vous prie de lui dire à quel point je suis touché de ses bontés. Il y a quelque temps que je ne lui ai écrit et que je n'ai reçu de se nouvelles, mais je n'en suis pas moins pénétré d'attachement et de reconnaissance.
Embrassez pour moi, je vous prie, l'électrique M. du Fay [Charles-François Cisternay du Fay, directeur du jardin et du cabinet d'histoire naturelle du roi, ayant découvert en 1733 l'existence de deux types d'électricité], et si vous embrassiez ma petite sœur, feriez-vous si mal ? Mandez-moi, je vous prie, comment elle se porte. Mille respects à Mme du Fay et à ses dames. Vous m'aviez parlé d'une lettre de Stamboul,[allusion au fait que V* n'avait pas reconnu La Condamine déguisé en turc lors d'un diner chez du Fay en décembre 1732 , ou à une lettre du comte de Bonneval envoyée de Turquie fin 1726] etc. »
Emétique ?
Hey ! Meetic ?
Et mes tics ?
Aye ! mes tiques ?

http://www.cnrtl.fr/lexicographie/%C3%A9m%C3%A9tique
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