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21/08/2010

Tout mourant qu'il est, il s'intéresse fort aux plaisirs des vivants

http://www.musicme.com/#/Jean-Baptiste-Lully/videos/?res=...

Je suis raccord avec mon titre ...

 

 

 

« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu

 

21è auguste 1769, à Ferney

 

Mon héros souffrira-t-il qu'on donne de vieille musique [i] à une jeune princesse ?[ii] Je lui répète et je l'assure que l'opéra de M. de La Borde [iii] est rempli de morceaux charmants qui tiennent de l'italien autant que du français.

 

Qui favorisera un premier valet de la chambre du Roi [iv] si ce n'est un premier gentilhomme de la Chambre ? L'amie de mon héros [v] ne doit-elle pas s'intéresser à faire donner une belle fête ? Cela ne lui fera-t-il pas honneur ? Je crois qu'elle n'a qu'à témoigner sa volonté. Je ne doute pas que M. le duc d'Aumont ne se fasse un plaisir de lui donner l'opéra qu'elle demandera. Si j'osais répondre quelque chose, ce serait du succès de cette musique. En vérité , il est honteux de donner du réchauffé à une dauphine. Vous avez soutenu la gloire de la nation dans des occasions un peu plus sérieuses, et vous ne l'abandonnerez pas quand il s'agit de plaisirs. Il ne vous en coûtera que trois ou quatre paroles, et à votre amie autant.

 

Ne rejetez pas la prière du plus ancien, du plus tendre, et du plus respectueux de vos courtisans. Tout mourant qu'il est, il s'intéresse fort aux plaisirs des vivants ; mais il vous est encore plus attaché qu'à tous les plaisirs de la cour. Il vous supplie, Monseigneur, d'agréer son profond respect.

 

V. »

 

i La musique de Lully.

ii Marie-Antoinette pour son mariage avec le dauphin, futur Louis XVI.

iii Texte du livret de V* : Pandore.

iv La Borde.

v Mme du Barry.

 

Je ne pense pas que le texte de ce Pandore soit de Volti, mais ce n'est pas loin de son esprit frondeur :

http://www.deezer.com/listen-5703870
pandore.jpg

je sens bien que le reste de mes jours sera empoisonné malgré la liberté, malgré la douceur d'une vie tranquille, malgré les excessives bontés d'un roi

 

http://www.deezer.com/listen-4692637

 

Volti est encore marqué par le deuil, et presque à reculons, (ce qui est très imprudent quand on connait Frédéric ;-( !), a pris le parti de rejoindre le roi de Prusse . « Pour se changer les idées » avais-je l'habitude de dire au temps de ma fréquentation du château à Ferney . Il a de la peine et se rassure comme il peut . Le meilleur et le pire vont se cotoyer, et intelligemment et sentimentalement, il le pressent, mais c'est une autre histoire ...

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

A Charlottenbourg 21 août [1750]

 

Mes chers anges, si je vous disais que nous avons eu ici un feu d'artifice dans le goût de celui du Pont-Neuf, que nous allons aujourd'hui à Berlin voir Phaéton [i] dont les décorations seront de glaces, que tous les jours sont des fêtes, que d'Arnaud a fait jouer son Mauvais riche [ii] et qu'il a été jugé ici pour le fond et pour les détails tout comme à Paris [iii], vous ne vous en soucierez peut-être que très médiocrement . J'ai d'ailleurs le cœur plus rempli et plus déchiré de ma résolution [iv] que je ne suis ébloui de nos fêtes, et je sens bien que le reste de mes jours sera empoisonné malgré la liberté, malgré la douceur d'une vie tranquille, malgré les excessives bontés d'un roi qui me parait ressembler en tout à Marc-Aurèle, à cela près que Marc-Aurèle ne faisait point de vers, et que celui-ci en fait d'excellents quand il se donne la peine de les corriger. Il a plus d'imagination que moi, mais j'ai plus de routine que lui. Je profite de la confiance qu'il a en moi pour lui dire la vérité plus hardiment que je ne la dirais à Marmontel ou à d'Arnaud, ou à ma nièce. Il ne m'envoie point aux carrières [v] pour avoir critiqué ses vers, il me remercie, il les corrige , et toujours en mieux. Il en a fait d'admirables. Sa prose vaut ses vers pour le moins, mais dans tout cela il allait trop vite. Il y avait de bons courtisans qui lui disaient que tout était parfait, mais ce qui est parfait, c'est qu'il me croit plus que que ses flatteurs, c'est qu'il aime, c'est qu'il sent la vérité. Il faut qu'il soit parfait en tout. Il ne faut pas dire : Caesar est supra grammaticam. César écrivait comme il combattait. Il joue de la flûte comme Blavet [vi], pourquoi n'écrirait-il pas comme nos meilleurs auteurs ? Cette occupation vaut bien le jeu et la chasse. Son Histoire de Brandebourg sera un chef-d'œuvre quand il l'aura revue avec soin , mais un roi a-t-il le temps de prendre ce soin ? un roi qui gouverne seul une vaste monarchie ? Oui, voilà ce qui me confond, je ne sors point de surprise. Sachez encore que c'est le meilleur de tous les hommes ou bien je suis le plus sot. La philosophie a encore perfectionné son caractère. Il s'est corrigé, comme il corrige ses ouvrages.

 

Voilà précisément, mes anges, pourquoi j'ai le cœur déchiré, voilà pourquoi je ne vous reverrai qu'au mois de mars. Comptez qu'ensuite quand je reviendrai en France je n'y reviendrai que pour vous seuls, pour vous mes anges qui faites toute ma patrie. Je vous demande en grâce d'encourager Mme Denis à venir avec moi s'établir au mois de mars à Berlin dans une bonne maison où elle vivra dans la plus grande opulence . Le roi de Prusse lui assure à Paris une pension après ma mort. Il m'a promis que les reines (qui ne savent encore rien de nos petits desseins) l'honoreront des distinctions et des bontés les plus flatteuses. Elle fera ma consolation dans ma vieillesse. Disposez-la à cette bonne œuvre . Il n'y a plus à reculer. Le roi de Prusse m'a fait demander au roi [vii] et je ne suis pas un objet assez important pour qu'on veuille me garder en France. Je servirai le roi dans la personne du roi de Prusse son allié et son ami [viii]. Ce sera une chose honorable pour notre patrie qu'on soit obligé de nous appeler quand on veut faire fleurir les arts . Enfin je ne crois pas qu'on refuse le roi de Prusse [ix], et si par un hasard que je ne prévois pas, on le refusait, vous sentez bien que la première démarche étant faite, il la faudrait soutenir, et obtenir par des sollicitations pressantes ce qu'on n'aurait pas accordé d'abord à ses prières, et que je ne peux plus vivre en France après avoir voulu la quitter [x]. Il y a un mois que je suis à la torture, j'en ai été malade. Un tel parti coûte sans doute. Vous êtes bien sûrs que c'est vous qui déchirez mon âme, mais encore une fois quand je vous parlerai, vous m'approuverez. Ne me condamnez point avant de m'entendre, conservez-moi des bontés qui me sont aussi précieuses pour le moins que celles du roi de Prusse. J'ai les yeux mouillés de larme en vous écrivant. Adieu.

 

V.

 

Mille respects à tous les neuillistes [xi]. »

 

 

Autre saluts/respects de/à Neuilly au XXIème siècle : http://www.dailymotion.com/video/x4lkio_les-inconnus-aute...

 

iNouvelle version de Villati, après celle de Quinault.

 

iii Pièce représentée en privé à Paris en février 1750.

 

iv Résolution de s'installer en Prusse, dont il a déjà parlé à mots couverts.

 

v Comme Denys le tyran y envoyait Philoxène.

 

viiLe 8 août Frédéric a écrit à son représentant à Paris le baron Le Chambrier pour lui demander de faire le nécessaire.

 

viii Le 7 août, V* présente ainsi la chose au marquis (de Puisieulx ou d'Argental ?) et le 25 au comte de Saint-Florentin en lui demandant de garder son titre de gentilhomme ordinaire de la chambre. Il gardera le titre mais perdra sa charge d'historiographe.

 

ix De Puisieulx écrira le 22 à Richard Talbot : « Le roi de Prusse a fait demander Voltaire au roi. Sa Majesté le lui a accordé. Elle a pensé que cette complaisance serait agréable à ce prince, et que, si d'un côté elle laissait aller un académicien que quelques-uns de ses ouvrages rendent célèbre, elle n'avait d'ailleurs rien à regretter dans ce sacrifice . Je doute fort qu'à la longue le roi de Prusse s'accommode du caractère de M. de Voltaire. »

 

x Après avoir rapporté l'information donnée par Richelieu (celle de Puisieulx), il lui demande le 31 : « Comment serai-je donc traité si je reviens ? »

 

xi D'Argental réside à Neuilly ; cf. lettre du 28 août.

20/08/2010

on s'imagine en vain que les sages qui sont dans le ministère seront assez hardis et assez puissants pour s'exposer au fanatisme




 

« A Marie-Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet


A Ferney ce 20 août 1775


Papillon philosophe [i], et beaucoup plus philosophe que papillon, honore depuis quelques semaines ma solitude de sa présence, et console ma vieillesse. Elle est votre parente et je la crois votre disciple. Mais ni vous , ni elle, ni les autres illustres appuis de la raison sans cesse persécutée, ni vos amis, ni vos espérances, rien enfin , ne me rassure contre les menées sourdes des scélérats dont vous me parlez [ii].


Je remercie Dieu de nous avoir envoyé monsieur le marquis de Condorcet, mais je crains le diable, qui circuit quaerens quem devoret [iii].


Des gens très instruits me font craindre qu'un maître qui est très attaché aux anciens usages, et qui vient d'en donner les marques publiques [iv], ne regarde comme un de ses devoirs, de protéger ceux qui sont par état ses ennemis depuis plus de mille ans, contre ceux qui seraient par amour et par raison ses serviteurs les plus fidèles. Je sais même qu'on a donné depuis peu des ordres très sévères contre l'introduction des remèdes apportés des pays étrangers, qui pourraient guérir les anciennes maladies . Je sais à n'en pouvoir douter que les ordres sont donnés à Lyon pour saisir un convoi immense d'Encyclopédie, et de beaucoup d'autres ouvrages.


Cette extrême sévérité ne s'accorde pas avec l'esprit de tolérance dont quelques personnes se flattent. On s'imagine en vain que les sages qui sont dans le ministère [v] seront assez hardis et assez puissants pour s'exposer au fanatisme. Ils ne pourront, ni n'oseront combattre ; ils se borneront à plaindre les philosophes qui leur sont attachés, mais ils ne voudront jamais se perdre avec eux. La raison sera toujours le partage du petit nombre et ce petit nombre sera toujours écrasé par le grand qui est payé pour tenir dans leurs fers, pour s'engraisser de notre substance, et pour boire notre sang. Le Cri de ce sang innocent [vi] qui fume encore n'a pu se faire entendre à Paris.


Le jeune homme [vii] n'a d'autre ressource que d'aller jouir dans une terre étrangère de la fortune et de la faveur que lui offre un maître éclairé [viii], et devenu enfin véritablement philosophe, puisqu'il songe à faire du bien, et à venger la raison si indignement outragée. Je devrais fuir avec lui et l'accompagner, mais je suis enchainé par des entreprises immenses.


Ma colonie exige mes soins continuels. Je bâtis un ville assez jolie [ix], et ce qui vous étonnera, c'est que Papillon philosophe daigne y avoir une maison [x]. Mon âge, et des entreprises que j'ose dire très utiles, ma retraite, l'amitié des personnes les plus respectables du royaume sembleraient me mettre à l'abri. Cependant, il est très vrai que je suis exposé plus que personne à la plus infâme persécution. Les jésuites poursuivent Arnaud jusqu'à son dernier moment, et il fallait leur cacher son tombeau. Il y a aujourd'hui des monstres plus dangereux que n'étaient autrefois les jésuites.


Je ne vous écris que la centième partie des choses que je voudrais vous dire. J'aurais bien voulu que Papillon philosophe eût pu vous amener avec elle.


Je vous embrasse, je vous aime, je vous respecte, et je gémis avec vous.


V. »


i Mme de Saint-Julien.

ii Cf. lettre du 12 août de Condorcet qui dit que Jean-Georges Lefranc de Pompignan avait fait dans l'Assemblée « un beau discours contre la philosophie » disant : « ... le sanctuaire des lettres [l'Académie] est devenu le repaire de l'incrédulité et de l'irréligion ... Que serait-ce si ... la protection accordée à l'impiété venait à entrer dans les vues du gouvernement ? »  ; qu'il avait tiré de sa poche un projet de lettre au roi, où il réclamait « contre les écrivains qui ... donnaient des leçons de blasphèmes » des peines plus sévères encore que contre les blasphémateurs [qui avaient la langue coupée] , que les évêques ayant refusé de signer, il avait dit : « L'incrédulité a pénétré jusque dans l'Assemblée. Je ne vois plus pour la religion d'appuis fidèles que m. l'archevêque, mon frère, et Fréron. »

Condorcet ajoutait : « Car Fréron a l'intendance des petits dogues qu'on élève contre la philosophie, il les dresse à aboyer et il les enivre... »

iii ... qui tourne en rond, cherchant quelqu'un à dévorer.

iv Allusion aux cérémonies du sacre de Louis XVI; cf. lettre du 7 juillet 1775 à Frédéric. La veille sa Diatribe à l'auteur des Éphémérides a été condamnée par la Conseil à la demande de l'Assemblée du clergé, et de plus le roi a rappelé l'ancien parlement, etc.

v V* pense à Turgot, Malesherbes, Miromesnil, Trudaine et peut-être à Maurepas .

vi Allusion à la brochure concernant l'affaire de La Barre – Etallonde, ainsi titrée.

vii D'Etallonde.

viii Frédéric II

ix A Marin, le 11 août : « ... il y a des philosophes ... Nous étions il y a quelques jours douze habitants de Ferney à table , chacun a sa maison et son jardin... Nous avons plusieurs bibliothèques ... Nous avons une colonie d'horlogers qui font un commerce d'environ cinq cents mille francs par an ... On bâtit actuellement une douzaine de maisons nouvelles ... »

xLa maison de Mme de Saint-Julien s'écroulera avant son achèvement.

Voilà de bons citoyens dans ce siècle philosophe et calculateur!

Ce titre en pensant (ce jour où j'écris cette note, 17/8/2010) à ces foutus "gens du voyage" qui à Bordeaux font leur loi, eux aussi . Mais que fait la police ?

Que tous ceux qui se font fait verbaliser pour défaut de disque bleu, stationnement mordant sur un passage clouté, dépassement de temps au parc-mètre, enfin toutes ces infractions qui mettent la nation et la sécurité des citoyens en péril, que tous ceux-là , -dont je fait partie-, se mettent à entraver la circulation . je vous fiche mon billet que ça se finira avec un mot d'amour tarifé de l'administration.

Y'a pas de justice, le quidam isolé reçoit des baffes (symboliques ) et paye , les emmerdeurs unis sont reçus par les autorités . Je mets au défi les gendarmes d'honorer cette foule de parebrises de "papillons" mérités. Non seulement ils ne paient rien pour leur nuisances, mais en plus il faut les subventionner .

Vu à la télé ! Oui, je vous ai vus, profiteurs de bas étage .

Si j'ai bien compris, un motif de refus de terrain d'accueil est la proximité d'une aire de déchetterie , c'est vrai, j'ai connu mieux comme environnement . Cependant, je dois vous signaler qu'à chaque passage de SDF de luxe de votre sorte, les déchetteries locales se voient garnies discrètement d'un monceau de déchets à l'extérieur de leur clotures . Flemme, je m'en-foutisme, imbécilité, je vous laisse le choix de vos motifs .

Messieurs et mesdames je ne vous salue point !

 

 

 

 

 

« A Marc-Pierre de Voyer,comte d'Argenson


Aux Délices, 20 août [1755]

 

Il m'est impossible, Monseigneur, de vous envoyer votre contreseing. Celui qui en a si indignement abusé est à Marseille. C'est un intrigant fort dangereux. Ce Grasset [i] m'a montré des contreseings chancelier et Berryer avec les vôtres. Il écrit souvent à M. Berryer, qui est fort poli, car il signe un grand votre très humble à ce valet de libraire. On dit qu'il fait imprimer des horreurs à Marseille. J'oubliais de vous dire qu'il est réfugié, et qu'il est de moitié avec un capucin défroqué, auteur du Testament politique du cardinal Albéroni [ii]. Ce capucin , appelé ici Maubert, est à Genève avec des Anglais, et outrage impunément, dans ses livres, le roi , le ministère et la nation. Voilà de bons citoyens dans ce siècle philosophe et calculateur!


Le prince de Wurtemberg avait auprès de lui un philosophe de cette espèce, qu'il me vantait fort, et qu'il mettrait au-dessus de Platon : ce sage a fini par lui voler sa vaisselle d'argent [iii].


Je ne vis plus qu'avec des Chinois. Mme Denis, du fond de La Tartarie, vous présente ses respects, et moi les miens. Je vous serai bien tendrement attaché tant que je vivrai.


V. »


i Grasset, arrêté à Genève, avec qui V* a eu des démélés à propos de La Pucelle : cf. lettre du 28 jullet à d'Argental.

ii V* écrit que Grasset a dit tenir de Maubert de Gouvest la feuille de La Pucelle litigieuse.

iii Ce qu'écrit à peu près le prince à V* le 2 mai.Il parle d'Hancarville, protégé de la comtesse de Bentinck ; cf. lettre du 11 octobre 1752.

Nous sommes traités en médecins de village qu'on envoie chercher en carrosse et qu'on laisse retourner à pied

 

 

 

 

 

« A Madame de Champbonin


De Cambrai [vers le 20 août 1739]


Mon cher gros chat est dans sa gouttière et nous courons les champs. Nous voici à Cambrai, marchant à petites journées. Nous n'avons pas trouvé la moindre petite fête sur la route. Nous sommes traités en médecins de village qu'on envoie chercher en carrosse et qu'on laisse retourner à pied. Si vous me demandez pourquoi nous allons à Paris, je ne peux vous répondre que de moi. J'y vais parce que je suis Émilie. Mais pourquoi Émilie y va-t-elle ? Je ne sais pas trop. Elle prétend que cela est nécessaire, et je suis destiné à la croire comme à la suivre. Vous jugez bien que la première chose que je ferai sera de voir monsieur votre fils . Mais pourquoi la mère n'y serait-elle pas ? Pourquoi n'aurions nous pas le plaisir de nous voir rassemblés ? Voici une belle occasion pour quitter sa gouttière. On ne vous soupçonnera point d'être venue à Paris pour le feu d'artifice [i]. On sait assez que vous ne faites de ces voyages là que pour vos amis. Où êtes-vous à présent, cher gros chat? Êtes-vous à La Neuville ? Y renouez-vous les nœuds d'une ancienne amitié ? Et Mme de La Neuville jouit-elle un peu de l'interrègne ? Elle sera trop heureuse de vous avoir retrouvée ; mais nous aurons notre tour, et nous espérons toujours revoir Cirey, avant d'habiter le palais de la pointe de l'Île [ii]. Nous les verrons bien tard, ce Cirey et ce Champbonin, hélas ! Nous avons acheté des meubles à Bruxelles, c'est la transmigration de Babylone. Je ne suis pas trop content de mon séjour dans ce pays-là. Je m'y suis ruiné ; et pour dernier trait, les commis de la douane ont saisi des tableaux qui m'appartiennent. Il y a , comme vous savez, beaucoup de princes à Bruxelles, et peu d'hommes. On entend à tout moment Votre Altesse, Votre Excellence . Mme du Châtelet ne sera princessse que quand sa généalogie sera imprimée [iii]: mais fût-elle bergère, elle vaut mieux que tout Bruxelles. Elle est plus savante que jamais, et si sa supériorité lui permet encore de baisser les yeux sur moi, ce sera une belle action à elle, car elle est bien haute. Il faut qu'elle cligne les yeux en regardant en bas pour me voir. On va souper. Adieu , cher gros chat. J'embrasse vos pattes de velours. »

iA Cideville, le 25, de Paris, V* parle de tous ces grands imbéciles » qui « ne parlent que de feux d'artifice et de fusées volantes » offerts en l'honneur « d'une Madame et d'un Infant qu'ils ne verront jamais », à savoir les fiançailles de Louise-Elisabeth de France avec le fils de Philippe V d'Espagne et futur duc de Parme.

ii L'hôtel Lambert que les du Châtelet auraient acheté ; cf. lettre à Helvétius du 21 mars 1739.

iii Quand elle aura gagné son procès, quand les du Châtelet seront reconnus héritiers du marquis de Trichâteau, une petite principauté près de Clèves faisant partie de la succession ; cf. lettre à Champbonin de juin 1739, et à Frédéric le 25 avril.

19/08/2010

les deux seuls exemplaires qui me restent de la Lettre à la noblesse du Gévaudan




 

 

« A Joseph Vasselier


19è auguste 1773, à Ferney


Je vous envoie, mon cher ami, les deux seuls exemplaires qui me restent de la Lettre à la noblesse du Gévaudan [1]. Je vous en enverrai d'autres dès que j'en aurai.


Je vous supplie de donner cours à ceux qui sont adressés aux gentilshommes qui ont écrit en faveur de M. de Morangiès. »

 

1 Lettre de Voltaire à Messieurs de la noblesse du Gévaudan, qui ont écrit en faveur de M. le comte de Morangiès , 10 août 1773.

http://books.google.be/books?id=bqMGAAAAQAAJ&pg=PA263...

 

Si l'on peut fermer les écoles de théologie, et établir à leur place des écoles de morale, tout ira bien.

Si l'on pouvait cesser de gonfler la tête du vulgum pecus de croyances religieuses aberrantes et surtout de pratiques dogmatiques invraisemblables et ridicules, pour simplement éduquer à la morale, ce serait un progrès supérieur à celui d'être capable d'aller sur Mars .

Toujours est-il que l'on profite encore de cette période du ramadan pour trucider l'ennemi sunnite ou chiite pour la plus grande gloire d'Allah et son mal inspiré prophète (je dis mal inspiré, mais je ne parle pas de son sens des affaires et de son intérêt personnel ). Si tant est que l'on puisse croire aux dires de cet auto-proclamé porte-parole de Dieu ...

De nos jours, si vous flanquez un coup de pied dans un gros tas de billets de banque, pour un trader il en sort dix prophètes-évangélistes de tout crin-gourous (coucou!).

L'amoralité faisant très bon ménage avec la religiosité de façade .

 


 

 

 

 

« A Jacob Vernes


19è auguste 1768


Je vous renvoie, Monsieur le philosophe prêtre, les Remontrances du Gévaudan [i] que vous avez eu la bonté de me prêter ; votre ami Rustan est un peu brutal, c'est dommage, car il ne manque pas d'esprit. Il est vrai qu'il ne sait ni ce qu'il dit ni ce qu'il veut. L'âge le murira peut-être ; mais surtout il faut qu'il prenne des leçons de politesse soit de Jean-Jacques, soit de sa paroisse de Londres [ii].


Je n'ai point la Profession de foi dont vous parlez [iii] ; je me souviens de l'avoir vue. Je crois que vous la trouverez chez Chirol où je l'ai fait acheter.


Je crois avec vous que le temps des usurpations papales est passé, c'est-à-dire qu'on n'en fera pas de nouvelles ; mais une partie des anciennes durera encore longtemps. Le christianisme, dites-vous, est aboli chez tous les honnêtes gens ; oui, le christianisme de Constantin, le christianisme des Pères ; mais le christianisme de Jésus subsistera. Vous avez grande raison d'appeler Jésus le premier des théistes, car il ne connaissait qu'un seul Dieu, et comme vous avez fort bien dit, si on lui impute des sottises, ce n'est ni sa faute ni la vôtre.


Je vous remercie des sermons de Samuel Bourn sur la religion naturelle [iv]. Il n'y a pas un mot dans ces quatre volumes du christianisme d'aujourd'hui. La religion se décrasse tous les jours, le dogme est sifflé, et la vérité reste. Il s'est fait depuis quinze ans une étrange révolution dans l'esprit humain. Si l'on peut fermer les écoles de théologie, et établir à leur place des écoles de morale, tout ira bien.


Soyez toujours libre et heureux. »




 


iLes Remontrances du corps des pasteurs du Gévaudan à Antoine-Jean Rustan, 1768, sont une réponse de V* aux Lettres sur l'état présent du christianisme et la conduite des incrédules, de Roustan, 1768.

http://books.google.be/books?id=oFcVAAAAQAAJ&pg=PA112...

ii Roustan est ministre de l'Eglise suisse à Londres.

iii La Profession de foi des théistes, de V*.

iv A series of discourses , 1760, 1768.