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18/04/2017

Tant de malheurs publics influent sur la fortune des particuliers, excepté de ceux qui pillent les autres

... Faites votre liste des pillards en prévoyant un papier grand format, ne vous limitez pas au territoire national, cette race détestable ne connait pas les frontières, et quand elle les reconnait, c'est pour en profiter, en abuser . Ecrasons ces infâmes !

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Ces gens là ...

 

 

«A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

31è mai 1762 aux Délices 1

Mes divins anges, je suis pénétré de vos bontés, et je vous dois celles de M. le comte de Choiseul. Je vais tâcher de lui écrire deux lignes de ma faible main ; elles seront bien reçues en passant par les vôtres.

Je trouve que M. de Chavigny 2 fait fort bien de se retirer dans ses terres ; j’approuve tous ceux qui prennent ce parti : il faut savoir mettre un temps entre les affaires et la mort, et n’imiter ni le cardinal de Fleury ni le maréchal de Belle-Isle.

Madame la duchesse d’Anville a fait un triste voyage, à mon gré. Elle désirait passionnément une maison de campagne ; madame la duchesse de Grafton en a une pour cent louis, jusqu’à l’hiver ; et madame d’Anville paie deux cents louis un simple appartement pour trois mois. Pour comble de désagrément, elle est logée tout auprès d’un temple où elle entend détonner des chansons hébraïques, mises en vers français détestables 3. De plus, toute la bonne compagnie est à la campagne, et il ne reste à la ville que des pédants.

Je voudrais pouvoir lui céder les Délices ; mais j’ai trop besoin de Tronchin, et malheureusement on vernit actuellement tous les dedans de Ferney. Tout ce que je peux faire est de lui donner une représentation de Cassandre. Je n’y jouerai pas mon rôle de grand-prêtre ; je suis obligé de renoncer au théâtre, comme Grandval . Mais la pièce ne sera pas mal représentée, et je vous assure que c’est l’appareil le plus imposant qui soit au théâtre.

Pour le Droit du Seigneur, vous êtes maître absolu de le faire jouer par qui il vous plaira et quand vous voudrez ; c’est un service que vous rendrez à Thieriot. Il prétend qu’il vient me voir après les fêtes de la Pentecôte ; mais c’est de quoi je doute très fort.

Il est juste de vous envoyer un exemplaire de la seconde édition de Meslier ; on avait oublié, dans la première, son Avant-propos 4, qui est très curieux. Vous avez des amis sages qui ne seront pas fâchés d’avoir ce livre dans leur arrière-cabinet ; il est tout propre d’ailleurs à former la jeunesse. L’in-folio, qu’on vendait en manuscrit huit louis d’or, est inlisible 5; ce petit extrait est très édifiant. Remercions les bonnes âmes qui le donnent pour rien, et prions Dieu qu’il répande ses bénédictions sur cette lecture utile.

Je crois que M. l’abbé le coadjuteur sera bien étonné d’avoir été comparé à la fois à Ésope et à Goliath 6. J’espère, Dieu aidant, que le libelle du jésuite rendra les parlements irréconciliables, et qu’avec le temps on tombera sur tous les autres moines. Je n’en serai pas témoin, mais je mourrai dans cette douce espérance.

Je ne compte pas non plus voir la fin de la guerre. On disait hier Dresde pris par le prince Henri,7 immédiatement après la déconfiture de l’armée des Cercles . Cette nouvelle, qui n’est pas encore vraie, pourra l’être dans quelque temps . Vous verrez, avant la fin de la campagne, seize mille Russes rendre visite à M. le maréchal d’Estrées. La flotte anglaise est actuellement dans Lisbonne ; il n’y a qu’un nouveau tremblement de terre qui puisse faire dénicher cette flotte. Tant de malheurs publics influent sur la fortune des particuliers, excepté de ceux qui pillent les autres ; je m’en ressens autant que personne . Mademoiselle Corneille en sentira aussi le contre-coup ; la guerre fait tort aux souscriptions. La chambre syndicale des libraires de Paris nous fait plus de tort encore ; elle arrête, depuis quatre mois, le ballot des annonces de Cramer, où se trouvent les noms des souscripteurs. M. de Malesherbes souffre cette injustice, laquelle est une insulte au public. Il me semble que les affaires particulières vont à peu près comme les générales.

Le parlement de Dijon continue dans son obstination.

J’admire toujours qu’on ne veuille point rendre la justice au peuple, pour faire de la peine au roi. Les classes du parlement feront un peu de mal ; et j’ai bien peur que les classes 8 des matelots ne rendent pas de grands services. Je conclus que tout ceci est un naufrage universel, et je dis toujours  sauve qui peut !

Je vous supplie de donner Rodogune à Duclos .

Mille tendres respects. »

1 L'édition de Kehl suivie par les autres supprime la dernière phrase avant la formule de politesse .

3 Les Psaumes chantés mis en vers par Clément Marot et Théodore de Bèze. V* les tourne en dérision pans le Pot pourri, chap. VI : https://fr.wikisource.org/wiki/Pot-pourri

et : http://www.litteratureaudio.com/livre-audio-gratuit-mp3/voltaire-pot-pourri.html

5Sur cette forme, inlisible, voir lettre du 5 décembre 1760 à JR Tronchin , V* utilise cette forme à plusieurs reprises, conformément à l'usage de l'époque . Voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/04/06/je-vois-qu-on-ne-fait-rien-sur-terre-en-enfer-et-au-ciel-que-5784988.html

6 L’abbé Chauvelin était petit et contrefait. (Georges Avenel) ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Philippe_de_Chauvelin

7 La nouvelle était fausse .

8 En termes de marine, les classes sont les levées de matelots pour le service du roi ; appliqué au parlement de Bourgogne, le mot désigne la grève auquel celui-ci se livrait .

 

Ce n'est peut-être pas même une tragédie . C'est un ouvrage d'un goût un peu nouveau

... C'est tout bêtement une campagne électorale énervante, débilitante,  ou plus exactement des campagnes, menées par des hommes et femmes qui prétendent chacun en savoir assez pour mener le troupeau de ceux qui les ont élus (ce qui d'après les prévisions fait assez peu) et la majorité de ceux d'opinion adverse et les abstentionnistes . Chacun tire à hue et à dia, étonnez vous après cela que l'on avance comme un pochtron qui vient de boire sa paye . Gare à la gueule de bois !

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Marine Le Pen, et son directeur de campagne ( qui pour une fois est sincère ) 

 

 

« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine , marquise de Florian

28 mai [1762] 1

Si vous n'êtes pas à Hornoy, ma chère nièce, allez donc chez M. d'Argental, vous y trouverez cette tragédie que je n'ai pas faite, car comment voulez-vous que je l'aie faite depuis le 20 avril ? Elle n'est donc pas de moi . Ce n'est peut-être pas même une tragédie . C'est un ouvrage d'un goût un peu nouveau . Votre sœur dit que cela fait pleurer . Je le veux croire, mais il faut qu'elle ne soit pas de moi pour qu'elle ne fasse pas rire et siffler , et pour que le petit Fleury 2 ne la défère pas à la cohue des enquêtes . Je l'ai adressée à M. d'Argental et à vous solidairement, sous l'enveloppe de M. de Courteilles . Si vous aviez un receleur 3 qui affranchit vos paquets je vous l'aurais adressée . Je n'ai pas un moment . Voyez si votre vieil oncle peut encore vous amuser . Il n'est sûr que de vous aimer .

V. »

1 Le manuscrit olographe est passé en vente chez Liepmanssohn à Berlin le 21 mai 1909 .

2 Omer Joly de Fleury, avocat général .

3 Cet emploi particulier de receleur ne parait pas attesté .

 

17/04/2017

je m'intéresserai toujours au succès de la scène française ; mais je m'intéresse bien davantage aux frères et à la destruction de l'infâme qu'il ne faut jamais perdre de vue

... Et un dictateur de plus ! UN !! Erdogan .

Il semblerait bien que nos têtes de turcs aient perdu le sens de la démocratie, si tant est qu'ils l'aient eu un jour , ils semblent adorer être menés comme des moutons à l'abattoir . Enfin , je suis mauvaise langue : seulement un peu plus de la moitié des électeurs en territoire turc ( mais près des deux tiers de ceux qui vivent majoritairement en France et en Allemagne , pourquoi ? ) .

Ecrasons l'infâme ! est plus que jamais d'actualité, l'infection contre la liberté gagne du terrain , y compris par des élections, faisons en sorte qu'il n'en soit pas de même en France . 

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« A Etienne-Noël Damilaville

28 mai [1762] 1

Mon cher frère, je suis bien languissant ; je serai bien charmé de revoir frère Thieriot avant de mourir, et très fâché de ne vous avoir jamais vu ; mais en vérité je ne vous en aime pas moins .

Nous vous avons adressé en dernier lieu une lettre ouverte pour M. de La Chalotais 2, procureur général du parlement de Bretagne : quand je dis nous, j'entends celui qui tient la plume et moi . Je vous envoie un livre exécrable, mais votre ami veut l'avoir, et j'obéis à ses ordres .

Je voudrais savoir comment réussit la nouvelle édition du Dictionnaire de notre académie . Les étrangers se plaignent qu'il est sec et décharné, et qu’aucun des doutes qui embarrassent tous ceux qui veulent écrire, n'y est éclairci . Il est triste que nous ne puissions parvenir à donner un dictionnaire tel que ceux de la Crusca et de Madrid .

Je suis enchanté que Zelmire 3 réussisse . Je m'intéresse à l'auteur, et je m'intéresserai toujours au succès de la scène française ; mais je m'intéresse bien davantage aux frères et à la destruction de l'infâme qu'il ne faut jamais perdre de vue .

Valete, fratres . »

1 L'édition de Kehl ajoute en post scriptum de la présente lettre le premier paragraphe de la lettre du 4 juin 1762 au même , suivant la copie Beaumarchais, et suivie par toutes les éditions jusqu'à Cayrol .

2 Voir lettre du 15 mai 1762 à La Chalotais : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/04/02/1-5928308.html

3 Zelmire, tragédie de Pierre-Laurent Buirette de Belloy, avait été représentée le 6 mai 1762 au Théâtre-Français . Cideville en avait parlé à V* dans une lettre du 11 mai . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Laurent_Buirette_de_Belloy

et : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k74052m

 

16/04/2017

Je ne peux arrêter le torrent de nos dépenses, mais on se ruinera si on veut

...  Na !

On ne manque pas de  candidats président ni de  méthodes pour ruiner ( relever, selon eux ) le pays, plus ou moins vite, plus ou moins gravement, et malgré ma sympathie pour l'homme Mélenchon et son talent d'orateur , je suis effaré par son projet d'emprunts, plus effaré encore -et ça ne doit pas être tombé dans l'oreille d'un banquier sourd- quand il laisse entendre qu'il ne compte pas tout rembourser . Dommage d'être aussi irréaliste ! Me trompè-je ?

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 N'oublions pas qu'avec Marine, on coule absolument sans recours .

 

 

« A Ami Camp

Aux Délices 28 mai [1762]

J'ai prêté aujourd’hui neuf mille francs, mon cher correspondant, à M. Dupuits mon voisin , pour acheter une compagnie de dragons, et je lui ai donné une lettre de change sur vous pour le paiement d'août, 1er octobre 1.

Je compte faire une autre affaire pour la valeur de douze mille livres . Je vous prierai de me dire quand vous pourrez les payer sans vous déranger . Pourriez-vous me les faire toucher en deux paiements , le premier de huit mille livres, et le second de quatre mille ?

Je ne peux arrêter le torrent de nos dépenses, mais on se ruinera si on veut ; je prends le parti de vous laisser cent cinquante mille livres dans votre caisse , dont je compte respecter le fonds . Je n'y toucherai pas .

M. de Laleu fournira à Mme Denis ses douze cents louis d'or par an . Elle a outre cette somme le revenu de Ferney, que je lui abandonne, celui des Délices qui est peu de chose, mais une quantité immense de provisions de toute espèce . Ainsi elle peut tenir une assez grande maison si elle sait se régler .

Voici monsieur une lettre de change de 2230 livres mais l'échéance n'est pas à courts jours . Pourriez-vous à votre loisir avoir la bonté de me faire un petit compte par lequel je verrais ce que je pourrais prendre sur vous en comptant les 12 000 livres ci-dessus, et les 9 000 livres Dupuits, et en vous laissant une somme ronde de 150 000 livres à laquelle je ne toucherai certainement pas .

Je vous embrasse de tout mon cœur .

Votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

Vous avez donné une Jeanne à l'abbé Pernetti . Regardez cela je vous prie comme un présent .

Thieriot vient après les fêtes qu’on appelle la Pentecôte . Je vous supplie d'avoir de la bonté pour lui, et de nous l’envoyer aux Délices . Faites-lui je vous prie la galanterie de payer son voyage au cocher qui le conduira . Je vous aurai une véritable obligation de cette attention . Excusez toutes mes libertés .

Vraiment je vous supplie de vouloir bien compéter mon petit galon en l’allongeant de deux pieds, ou d'en ordonner un de trois 2. Cent fois pardon . »

1 Dupuits en fit à V* des obligations qui sont encore conservées .

 

15/04/2017

Je crois pourtant notre noise apaisée . Je voudrais en pouvoir dire autant des états et du parlement

... à savoir, d'abord Nicolas Sarkozy qui rumine dans son coin et me soutient du bout des lèvres (visiblement ça le gonfle d'avoir été mis au coin ). Merci à vous M. Juppé de faire un petit bout de chemin avec moi, tel Simon de Cyrène , me soulageant un peu du fardeau de cette croix de campagne électorale . 

Signé : Fanfoué Fillon, le bon larron [NDLR - Ecrasons une larme de crocodile, Pâques c'est le retour des cloches, pas des casseroles . ]

http://www.lepoint.fr/presidentielle/presidentielle-alain-juppe-va-s-afficher-aux-cotes-de-francois-fillon-14-04-2017-2119826_3121.php?M_BT=443989616563&m_i=ehGfDLed_sPLPbSAf0xUeFOLcCpYR7u5q5e99T4clTiESZfBVeAvfZ6X1%2ByJ_rOah03Ki_nz_GXPMs0RVjDW4rqemVV0ex#xtor=EPR-6-[Newsletter-Mi-journee]-20170415

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Manque de bol Fanfoué, on est en république !

 

 

« A monsieur le président Germain-Gilles-Richard de

Ruffey

à Paris

Comme on se flatte toujours, monsieur, j'espère manger de vos navets . Je les fais planter dans une terre aussi sèche que le devient mon imagination . La maladie détruit toutes les facultés à mon âge ; et je vous réponds bien que je ne ferai plus de tragédie en six jours .

Je vous remercie bien sincèrement de vos graines, et de vos règlements académiques . Que n'ai-je la force de faire le voyage ! que ne puis-je assister à vos séances avec le président fétiche !1 Il est vrai qu'il ne serait pas mon fétiche, mais il pourrait bien être mon serpent, et surtout serpent gardien des trésors . Je crois pourtant notre noise apaisée 2. Je voudrais en pouvoir dire autant des états et du parlement .

Pourriez-vous avoir la bonté, mon cher monsieur, 3 le mémoire du parlement, et celui pour lequel votre pauvre parent 4 est en pénitence ? Je le trouve bien bon de n'avoir pas voyagé, et de s'être laissé embastiller ; il me semble qu'il a pris là un bien mauvais parti . Tout ce qui se passe dans ce monde me fait bénir ma retraite ; elle serait plus heureuse si je pouvais vous y posséder . L'état où je suis ne me permettra pas vraisemblablement la consolation de vous voir à La Marche .

Tenez, voilà une gazette de Londres, vous pouvez la montrer, et même à l'abbé de Citeaux, pourvu que vous ne disiez point de qui vous la tenez, de peur que je ne sois excommunié, et que je meure déconfès 5.

Je vous embrasse tendrement, et vous regrette toujours .

V.

26è mai 1762 aux Délices. »

3 Wagnière a oublié d'écrire quelque chose comme « de m'envoyer » .

4 M. Philibert Joly de Bévy, conseiller puis président du parlement de Dijon . Sa brochure Le parlement outragé est un ouvrage rare . Voir : http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc828613/cd0e73

et page 202 : https://books.google.fr/books?id=FHM9AAAAYAAJ&pg=PA20...

5 Sans confession .

 

Heureusement il ne s'agit pas de religion, ainsi cette guerre finira

... Oui, mais comment et quand ? Trump flirte avec le hors-jeu, il faut avouer que son passé d'homme d'affaires l'a habitué à le pratiquer, hors-la-loi friqué, tricheur patenté, danger public .

http://www.la-croix.com/Monde/Ameriques/Quest-donc-cette-mere-toutes-bombes-larguee-Etats-Unis-2017-04-14-1200839687

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« A Claude-Philippe Fyot de La Marche

Aux Délices 26 mai [1762] 1

Mon respectable et digne magistrat, non pas magistrat de ce siècle, mais du siècle des de Thou, je fais un effort pour écrire . L'attachement donne des forces . Permettez qu'en vous renouvelant mes remerciements sur vos estampes je vous envoie une planche de Paris à laquelle je prie vos aimables artistes de se conformer en faisant les corps des figures un peu moins gros .

Je voudrais bien avoir le mémoire du parlement . J'ai lu celui des élus 2. Il faut entendre les deux parties . J'apprends que les contrebandiers délivrent avec leurs marchandises force coups de fusil dans la province . Tot bella per orbem !3

Il y a une réponse d'un jésuite à l'abbé Chauvelin écrite du ton insolent dont les jésuites écrivaient du temps de frère Le Tellier . Il y a quelques bonnes raisons mais il les gâte par son audace monacale et par l'air victorieux qu'il prend . Ce n'est pas le ton dont parle la modeste innocence qui veut toucher . Les jésuites ont passé pour politiques . Ils méritent peu aujourd’hui cette réputation d'ailleurs très peu séante à des religieux .

Je vois avec une extrême douleur que les états et le parlement enveniment leur querelle . Vous prenez le bon parti d'attendre à La Marche que le temps apaise ce que l'animosité produit . Heureusement il ne s'agit pas de religion, ainsi cette guerre finira .

Conservez vos bontés pour l'homme de France qui vous aime et qui vous respecte le plus .

V. »

1 La date est développée par Fyot de La Marche sur le manuscrit . Les passages non pas magistat […] de Thou et Il y a une réponse […] religieux manquent dans les éditions .

3 Tant de guerres à travers le monde .

 

14/04/2017

les lettres font la plus grande consolation de la vieillesse, après celle qu’on reçoit de l’amitié. Je vous avouerai qu’elles sont chez moi une passion

... Et considérant que les belles lettres comprennent la correspondance de Voltaire, je me permets de vous en faire profiter avec un plaisir toujours renouvelé .

 

 

«Au cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis

Aux Délices 26 mai 1762 1

Je ne savais pas, Monseigneur, qu’ayant perdu madame votre nièce, vous aviez été encore sur le point de perdre sa sœur. Il y a deux mois que je n’éprouve, que je n’entends, et que je ne vois que des choses tristes, permettez-moi de compter vos douleurs parmi les miennes. Je vous avais marqué qu’un de mes chagrins était de ne pouvoir jouir de la consolation de m’entretenir avec Votre Éminence 2. Ce chagrin est d’autant plus fort que je n’ai aucune espérance de vous revoir . Il m’est impossible de me transplanter. Tout ce que me permet mon état de langueur est d’aller de Ferney aux Délices, et des Délices à Ferney, c’est-à-dire de faire deux lieues. Certainement vous ne viendrez pas à Genève ; aussi je n’ai que trop senti que je ne vous reverrais jamais. Je ne vous en serai pas moins tendrement attaché ; vos lettres charmantes, où se peint une très belle âme, et une âme vraiment philosophe, m’ont sensiblement touché. Je prendrai l’intérêt le plus vif à tout ce qui vous regarde jusqu’au dernier moment de ma vie. Je vous exhorte toujours à joindre à votre philosophie l’amour des lettres. Vous me paraissez faire trop peu de cas du génie aimable avec lequel vous êtes né. N’ayez jamais cette ingratitude. Vous joignez à ce génie un goût fin et cultivé qui est presque aussi rare que le génie même ; c’est une grande ressource pour tous les temps de la vie ; et je sens que les lettres font la plus grande consolation de la vieillesse, après celle qu’on reçoit de l’amitié. Je vous avouerai qu’elles sont chez moi une passion. Vous allez vous moquer de moi : mais je vous demande la permission de vous envoyer mon ouvrage de six jours, auquel vous m’aviez bien dit qu’il fallait travailler six mois.

J’ai grande envie que cette pièce soit ce que j’ai fait de moins mal, et je ne vois d’autre façon d’en venir à bout que de vous consulter. Vous n’avez vu que les matériaux ; vous verrez l’édifice : ce sera pour vous un amusement, et pour moi une instruction. Ayez la bonté de me faire savoir s’il faudra que j’envoie le paquet à Soissons. Je sais bien que les paquets passent par Paris ; mais une tragédie n’effarouchera pas votre ami Jannel 3.

Auriez-vous lu une réponse d’un jésuite de Lyon ou de Toulouse à l’abbé Chauvelin, intitulée Acceptation du défi  4? Il y a de la déclamation de collège, mais elle ne manque pas de raisons très fortes ; cette affaire est une des plus singulières de ce siècle singulier.

On n’est pas content de notre Dictionnaire  ; on le trouve sec, décharné, incomplet, en comparaison de ceux de Madrid et de Florence. Oserai-je vous prier de me dire si vous approuvez cette expression : donner de la croyance à quelque chose ? Le papier me manque pour vous dire à quel point j’aime et je respecte Votre Éminence.

V.

Puis-je vous dire que le roi m’a conservé la charge de gentilhomme ordinaire, et m’a fait payer d’une pension ? Je ne me croyais pas si bien en cour. »

1 Le dernier paragraphe a été écrit dans la marge du bas .

3 Intendant des postes .