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04/10/2010

dans chaque page, depuis la Genèse jusqu'au concile de Trente, vous trouvez le sceau du mensonge

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Le mensonge, sans sceau , sans sots ?

 

 

 

« A Claude-Adrien Helvétius

 

4è octobre 1763

 

Mon frère, le hasard m'a remis sous les yeux le décret de la Sorbonne, et le réquisitoire de maitre Omer [i]. Je vous exhorte à les relire pour vous exciter à la vengeance, en regardant votre ennemi. Je ne crois pas qu'on ait entassé jamais plus d'absurdités et plus d'insolences, et je vous avoue que je ne conçois pas comment vous laissez triompher l'hydre qui vous a déchiré. Le comble de la douleur, à mon gré, est d'être terrassé par des ennemis absurdes. Comment n'employez-vous pas tous les moments de votre vie à venger le genre humain en vous vengeant ? Vous vous trahissez vous-même en n'employant pas votre loisir à faire connaitre la vérité. Il y a une belle histoire à faire, c'est celle des contradictions. Cette idée m'est venue en lisant l'impertinent décret de la Sorbonne. Il commence par condamner cette vérité que toutes les idées nous viennent par les sens, qu'elle avait adoptée autrefois, non pas parce qu'elle était vérité, mais parce qu'elle était ancienne [ii]. Ces marauds ont traité la philosophie comme ils traitèrent Henri IV, et comme ils ont traité la bulle [iii], que tantôt ils ont reçue, et qu'ils ont tantôt condamnée.

 

Ces contradictions règnent depuis Luc et Matthieu, ou plutôt depuis Moïse. Ce serait une chose curieuse que de mettre sous les yeux ce scandale de l'esprit humain. Il n'y a qu'à lire et transcrire. C'est un ouvrage très agréable à faire, on doit rire à chaque ligne. Moïse dit qu'il a vu Dieu face à face [iv], et qu'il ne l'a vu que par derrière [v]. Il défend qu'on épouse sa belle-sœur [vi], et il ordonne qu'on épouse sa belle-sœur [vii]; il ne veut pas qu'on croie aux songes [viii], et toute son histoire est fondée sur des songes.

 

Enfin, dans chaque page, depuis la Genèse jusqu'au concile de Trente, vous trouvez le sceau du mensonge.

 

Cette manière d'envisager les choses est palpable, piquante, et capable de faire le plus grand effet. Ne seriez-vous pas charmé qu'on fit un tel ouvrage ? Faites-le donc, vous y êtes intéressé ; vous devez décréditer ceux qui vous ont traité si indignement.

 

Si l'idée que je vous propose n'est pas de votre goût, il y a cent autres manières d'éclairer le genre humain. Travaillez , vous êtes dans la force de votre génie ; je me charge de l'impression, vous ne serez jamais compromis [ix].

 

Adieu, soyez sûr que votre Fontenelle [x] n'eût jamais été aussi empressé que moi à vous servir. »

 

[Adresse] : [xi]

 

 

i Écrit contre le livre d'Helvétius De l'esprit, contre l'Encyclopédie et le Poème sur la loi naturelle en janvier et février 1759.

ii Un des objets de la polémique avec « le pédant Larcher » en 1767, c'est un critère que récuse V* dans la Philosophie de l'Histoire.

ix Ce jour, à Damilaville, V* demande de prier Diderot de persuader Helvétius qui « a du loisir, de la science et des richesses » : « qu'il écrive quelque chose de net, de convaincant, qu'il le fasse imprimer à ses dépens, on le distribuera sans le compromettre. Je m'en chargerai ; il n'aura qu'à m'envoyer le manuscrit ... »

x « votre héros Fontenelle » écrivait-il me 15 septembre.

xi Adresse inachevée car V* « ne sait où est Helvétius » et il confie « ce petit mot » à Damilaville.

03/10/2010

Si j'osais, je vous conjurerais à genoux de débarrasser pour jamais du Canada le ministère de France

Note rédigée le 12 août 2011 pour parution le 3 octobre 2010 .

 

pigalle mercure berlin.jpg

Mercure rajuste ses talonnières ailées , est-ce pour porter plus vite de bonnes nouvelles ?

Moins élégant, le Mercure de notre siècle se nomme Twitter, fils d'Internet, grand pourvoyeur de niaiseries (NDLR : auxquelles mes commentaires vont se joindre ), hélas !

 

 

 

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin 1

 

Aux Délices 3 octobre [novembre] 1760

 

Le baron germanique qui se charge de rendre ce paquet à Votre Excellence est un heureux petit baron . Je connais des Français qui voudraient bien être à sa place, et faire leur cour à monsieur et madame de Chauvelin . Je n'ai point eu l'honneur de vous écrire pendant que vous bouleversiez nos limites, et que vous rendiez des Savoyards français et des Français savoyards 2. Je conçois très bien qu'il y a eu du plaisir à être savoyard quand vous êtes en Savoie . Souvenez-vous, Monsieur, que quand vous prendrez le chemin de Versailles pour donner la chemise au roi 3 vous devez au moins venir changer de chemise dans nos ermitages .

 

J'ai l'honneur de vous envoyer une partie de la vie du Solon et du Lycurgue du Nord . Si la cour de toutes les Russies était aussi diligente à m'envoyer ses archives que je le suis à les compiler, vous auriez deux ou trois tomes au lieu d'un . Je me souviens d'avoir entendu dire à vos ministres, au cardinal Dubois, à M . de Morville 4 que le czar n'était qu'un extravagant né pour être contremaître d'un navire hollandais, que Petersbourg ne pouvait subsister, qu'il était impossible qu'il gardât la Livonie, et voilà aujourd'hui les Russes dans Berlin 5, et un Tottleben donnant ses ordres datés de Sans-Souci . Si j'avais été là j'aurais demandé le beau Mercure de Pigalle pour le rendre au roi 6.

 

En qualité de tragédien j'aime toutes ces révolutions-là passionnément . J'ai et j'aurai contentement . Peut-être si j'étais sir Politic 7, je ne les aimerais pas tant . Je ne suis pas trop mécontent de vous autres sur terre, mais vous êtes sur mer de bien pauvres diables .

 

Si j'osais, je vous conjurerais à genoux de débarrasser pour jamais du Canada 8 le ministère de France . Si vous le perdez, vous ne perdez presque rien, si vous voulez qu'on vous le rende on ne vous rend qu'une cause éternelle de guerre et d'humiliation . Songez que les Anglais sont au moins cinquante contre un dans l'Amérique septentrionale . Par quelle démence horrible a-t-on pu négliger la Louisiane pour acheter tous les ans 3 millions cinq cent mille livres de tabac de vos vainqueurs ?9 N'est-il pas absurde que la France ait dépensé tant d'argent en Amérique pour y être la dernière des nations d'Europe ? Le zèle me suffoque, je tremble depuis un an pour les Indes orientales . Un maudit gouverneur de la colonie anglaise à Suratte, et un certain commodore qui nous a frottés dans l'Inde sont venus me voir 10. Ils m'ont assuré que Pontichéri serait à eux dans quatre mois 11. Dieu veuille que M. Berryer 12 confonde mon commodore ! »


1 François-Claude-Bernard-Louis de Chauvelin : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Claude_Chauvelin

2 Allusion aux discussions qui ont suivi le traité du 24 mars 1760 entre la France et Charles-Emmanuel . Chauvelin était ambassadeur à Turin .

3 Chauvelin était depuis peu maître de la garde-robe .

4 Charles-Jean-Baptiste Fleuriau de Morville fut entre 1718 et 1727 diplomate et secrétaire d’État aux Affaires étrangères .

5 Ils occupèrent Berlin du 9 au 12 octobre .

6 Les châteaux royaux (de Frédéric II) et leurs œuvres d'art furent saccagés . La statue avait été donnée à Frédéric par Louis XV en 1750 .http://www.insecula.com/oeuvre/O0032287.html

7 Allusion à la comédie de Saint-Evremond : Sir Politick Would Be :

http://books.google.com/books?id=sz46AAAAcAAJ&printse...

8 Les Anglais étaient entrés à Montréal le 8 septembre .

9 Le 1er novembre il donnait des précisions à d'Argental : «  … vous devriez bien inspirer à M. le duc de Choiseul mon goût pour la Louisiane, je n'ai jamais conçu comment on a pu choisir le plus détestable pays du Nord … et qu’on ait abandonné le plus beau climat de la terre dont on peut tirer du tabac, de la soie, de l'indigo... » ,

voir page 98 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k800358/f103.image.r=.langFR

10 Sans doute Richard Bourchier et Charles Steevens . V* a des intérêts financiers en Inde au sujet desquels il exprime ses inquiétudes à son banquier Jean-Robert Tronchin .

http://en.wikipedia.org/wiki/Richard_Bourchier

http://newsarch.rootsweb.com/th/read/INDIA/2007-07/1183363031

11 Pondichéry capitulera le 15 janvier 1761.

Alcibiade faisait couper la queue à son chien pour empêcher les Athéniens de remarquer certaine frasque dont on commençait à parler

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http://www.eleves.ens.fr/home/cuvelier/wwwpolitique/alcib...

Faute de couper la queue du chien, on peut en nos temps modernes : recevoir des parents d'otages, voyager aux quatres points cardinaux, s'agiter, mentir, encenser les uns, vilipender les autres, faire le beau, se réjouir des lapsus (révélateurs) des alliés et des adversaires,...

 

Et comme il fait encore beau :

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

 

3 octobre [1764]

 

Divins anges, vous avez à étendre vos ailes sur deux hommes assez singuliers ; c'est le petit ex-jésuite en vers, et le petit huguenot Des Buttes en prose [i]. Ce Des Buttes auteur du Dictionnaire trouve vos idées et vos conseils tout aussi bons que le jésuite, et il y défère tout aussi vite. Il m'apporta hier un gros cahier d'articles nouveaux et d'anciens articles corrigés. Je les ai lus, je les ai trouvé à la fois plus circonspects et plus intéressants que les anciens. C'est un travailleur qui ne laisse pas d'avoir quelque érudition orientale et qui cependant a quelquefois dans l'esprit une plaisanterie qui ressemble à celle de votre pays. S'il n'était pas si vieux et si malade, vous pourriez en faire quelque chose.

 

Ce serait un grand coup d'engager frère Marin [ii] à faire imprimer les nouveaux cahiers de frère Des Buttes. Il y aurait assurément du bénéfice, et si on n'ose pas proposer à frère Marin cette rétribution, il peut en gratifier quelque ami. Il peut surtout adoucir quelques teintes un peu trop fortes, s'il y en a, ce que je ne crois pas, car Des Buttes s'est tenu par les cordons.

 

Dans quelques jours on enverrait le reste de l'ouvrage. Il pourrait aisément être répandu dans Paris avant que son diabolique prédécesseur fût connu. Tout ce que je puis dire sur ce livre c'est qu'il n'est point de moi, et que ceux qui me l'attribuent sont des malavisés, des gens sans pitié, des Welches.

 

Je voudrais que mon ami le défroqué servit son ami Des Buttes, qu'il pût faire jouer le drame des Roués pour faire diversion, comme Alcibiade faisait couper la queue à son chien pour empêcher les Athéniens de remarquer certaine frasque dont on commençait à parler.

 

Voici Des Buttes qui entre chez moi. Il ne me donne aucun repos. Il faut donc que je vous en donne et que je finisse.

 

Le paquet du huguenot est adressé à M. le duc de Praslin.

 

Respect et tendresse.

 

N.B.- J'ai reçu deux lettres de frère Marin cachetées de vos armes ou au moins d'un cachet fort approchant. J'ai cru qu'il les avait écrites chez vous et j'en ai été bien aise !

 

J'apprends dans ce moment que votre ami M. Tiepolo vient de mourir [iii]. J'en suis sensiblement affligé. »


i Auteurs fictifs, respectivement d'Octave ou Le Triumvirat, et du Dictionnaire philosophique. Le 10 octobre, d'Alembert , à propos du nom de « Dubut » que V* lui a indiqué : « au lieu du petit ministre Dubut, j'avais imaginé le grand diable Belzébuth ; je me doutais bien qu'il y avait du Buth à ce nom-là, et je vois que je ne me trompais guère. »

ii François-Louis-Claude Marin qui occupe un poste dans les services de la censure et du commerce des livres.

iii L'ambassadeur de Venise, qui était venu se faire soigner par Théodore Tronchin.

vous croyez donc qu'on s'égorge tous les jours, comme les petites filles s'imaginent que les hommes bandent toujours !

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« A Nicolas-Claude Thiriot

 

Chez Madame la comtesse de Montmorency, rue Vivienne à Paris.

 

3 octobre [1758] aux Délices

 

Urbis amator, credule galle [i], vous êtes donc tous fous avec votre bataille du 26 ii; et vous croyez donc qu'on s'égorge tous les jours, comme les petites filles s'imaginent que les hommes bandent toujours ! Le fait est que les Russes ont perdu environ quinze mille hommes le 25è [iii], et n'avaient nulle envie de se battre le 26, que Frédéric après les avoir vaincus, et les avoir mis hors d'état de pénétrer plus avant , a couru dégager son frère, qu'il a fait repasser les montagnes au duc de Daun, et qu'on est à peu près au même état où l'on était avant cette funeste guerre.

 

 Maupertuis crèverait s'il savait que le roi son maître m'a écrit deux lettres depuis sa bataille de Custrin, mais je n'en suis ni enorgueilli ni séduit.

 

Les deux couplets sur le livre d'Helvétius [iv] sont assez jolis, mais il me parait qu'en général il y a beaucoup d'injustice et bien peu de philosophie , à taxer de matérialisme l'opinion que les sens sont les seules portes des idées. L'apôtre de la raison, le sage Loke n'a pas dit autre chose, et Aristote l'avait dit avant lui. Le gros de votre nation ne sera jamais philosophe, quelque peine qu'on prenne à l'instruire.[v]

 

J'ai reçu les manuscrits concernant la Russie [vi]. Ce sont des anecdotes de médisance, et par conséquent cela n'entre pas dans mon plan [vii].

 

 Pour Jean-Jacques, il a beau écrire contre la comédie,[viii] tout Genève y court en foule. La ville de Calvin devient la ville des plaisirs et de la tolérance. Il est vrai que je ne vais presque jamais à Genève. Mais on vient chez moi, ou plutôt chez mes nièces. Mon ermitage est charmant dans la belle saison. Si vous n'étiez pas un casanier, je vous dirais toujours omitte mirari beatae fumum et opes strepitumque Romae.[ix]

 

Je vous suis très obligé, mon cher et ancien ami, du livre que vous me destinez [x]. Mme de Fontaine vous fera rembourser du prix. Le bruit qu'a fait ce livre m'a engagé à relire Loke. J'avoue qu'il est un peu diffus. Mais il parlait à des esprits prévenus et ignorants auxquels il fallait présenter la raison sous tous les aspects et sous toutes les formes.

 

Je trouve que ce grand homme n'a pas encore la réputation qu'il mérite. C'est le seul métaphysicien raisonnable que je connaisse et après lui je mets Hume.

 

Bonsoir, il est vrai que je me suis amusé avec La Femme qui a raison, mais c'est pour notre troupe et non pour la vôtre. Scurror mihi non populo [xi].Je vous embrasse de tout mon cœur. Vale.

 

V.

 

Madras ! quel conte ! il n'y a que des La Bourdonnais qui le prennent . Ils en ont été bien payés ![xii]

 

 Pourquoi a-t-on pendu un huissier ?[xiii] »

 

 

i Amoureux de la ville, crédule Gaulois .

ii En fait il n'y eu qu'une canonnade et une escarmouche.

iii A Zorndorf, les Russes reconnurent 13 000 blessés et près de 11 000 disparus.

iv De Thiriot, le 26 septembre, en parlant des couplets qui commencent ainsi : « Admirez cet écrivain-là / Qui de l'esprit intitula / Un livre qui n'est que matière. » 

v A Thiriot le 17 septembre, V* dit qu'il avait lu dans un journal qu'Helvétius avait fait un livre sur l'esprit « un livre très bon plein de littérature et de philosophie, approuvé par un premier commis... » et apprenait le même jour « qu'on a condamné ce livre, et qu'il (Helvétius) le désavoue comme un ouvrage dicté par le diable ». Le 23, V* fait des réserves sur le livre : « Le fatras de l'Esprit d'Helvétius ne méritait pas le bruit qu'il a fait. Si l'auteur devait se rétracter, c'était pour avoir fait un livre philosophique sans méthode, farci de contes bleus. » ; cf. lettre du 18 octobre.

vi Le manuscrit que l'abbé Ménet devait remettre à Thiriot.

vii Cf. lettre du 7 août 1757 ; le 10 juillet, V* précise à Shouvalov qu'il ne retient des mémoires que ce qui « caractérise particulièrement Pierre le Grand », en particulier son action en tant que « réformateur des mœurs... créateur des arts, de la marine et du commerce », éliminant « ces anecdotes désagréables dont tant de livres sont remplis ».

viii Lettre à d'Alembert sur les spectacles, pour répliquer à l'article Genève de l'Encyclopédie de 1757.

ix Cesse d'admirer la fumée, les richesses et le bruit de l'opulente Rome.

x Celui d'Helvétius.

xi Je fais l'amuseur pour moi, non pour le peuple.

xii La Bourdonnais a pris Madras en 1746, qui fut perdue, puis assiégée par Lally fin 1758, délivrée par les Anglais en février 1759. La Bourdonnais a été emprisonné à son retour en France en 1748.

xiii Moriceau de La Motte avait critiqué le comportement du gouvernement dans l'affaire du régicide Damiens et avait eu en main des brochures séditieuses, il a été exécuté le 11 septembre .

02/10/2010

Je compte sur votre amitié, sur votre discrétion et sur les imparfaits en oi

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« A Gabriel Cramer

 

[septembre-octobre 1759]

 

Vous m'avez promis, mon cher Gabriel, une Bertiade [1]. Je compte sur votre amitié, sur votre discrétion et sur les imparfaits en oi, et non pas en ai [2], et si quid novi, scribe.[3] »

 

 

1Qui est la réponse de V* à la suspension de l'Encyclopédie : Relation de la maladie, de la confession, de la mort et de l'apparition du jésuite Bertier.

Petite invitation au rire avec V* :

http://www.baillement.com/lettres/voltaire.html

 

2V* impose habituellement à ses imprimeurs la graphie ai conforme à la prononciation et encore inhabituelle en France ; cette fois il indique la graphie oi pour faire croire que la brochure n'est pas de lui ou que ce n'est pas lui qui a demandé l'impression.

3Et s'il y a quelque chose de nouveau, écris.

01/10/2010

Ils prétendirent que les honnêtes gens n'avaient pas besoin de l'enfer pour être vertueux, que l'idée de l'enfer faisait plus de mal que de bien

 Un peu gnan-gnan, mais chanté juste : http://www.deezer.com/listen-869901

Beaucoup plus plaisant pour moi : http://www.deezer.com/listen-1117108

Jazzy et poétique : http://www.deezer.com/listen-1101604 , à écouter en boucle, à deux, c'est très dansant .

Simplement pour rendre hommage à Volti qui fit cohabiter paisiblement catho et parpaillots, un chant enregistré à Taizé qui sait réunir des voix de tous horizons :  http://www.deezer.com/listen-1134741

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A moins que vous ayez des états d'âme comme ici : http://www.deezer.com/listen-2554431

 

 

 

 

 

« A François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

 

A Tournay par Genève

1er octobre 1759

 

Monsieur,

 

La confiance que vous voulez bien me témoigner et le goût que vous avez pour la vérité me touchent sensiblement. Vous avez perdu , dites-vous, des protecteurs, mais vous êtes sans doute votre protecteur vous-même. On n'a besoin de personne quand on a un nom et des terres. M. le chevalier d'Aydie a pris il y a longtemps le parti de se retirer chez lui. Il s'est procuré par là une vie heureuse et longue. Il n'y a personne qui ne regarde le repos et l'indépendance comme le but de tous ses travaux, pourquoi donc ne pas aller au but de bonne heure ? On est égal aux rois quand on sait vivre heureux chez soi.

 

 Quand aux objets de métaphysique dont vous me faites l'honneur de me parler, ils méritent votre attention. Il est bien vrai que dans les lois de Moïse il n'est jamais parlé de l'immortalité de l'âme, ni de récompenses et de peines dans une autre vie. Tout est temporel ; et l'Anglais Warburton que M. Silhouette a traduit en partie [i] prétend que Moïse n'avait pas besoin de ce ressort pour conduire les Hébreux parce qu'ils avaient Dieu pour roi, et que ce roi les punissait sur-le-champ quand ils avaient fait quelque faute. Cependant il est clair que du temps de Moïse les Égyptiens avaient embrassé le dogme de l'existence d'une âme aérienne et éternelle qui devait se rejoindre au corps après une multitude de siècles. C'est pour cette raison qu'on embaumait les corps afin que l'âme les retrouvât, et qu'on bâtissait des tombeaux en pyramides. L'idée de l'immortalité de l'âme et d'un enfer se retrouve dans l'ancien Zoroastre, contemporain de Moïse, dont les rites et les opinions nous ont été conservés dans le Sadder. La même opinion est confirmée dans les poésies d'Homère. Il est vrai qu'on n'avait pas l'idée d'un esprit pur. L'âme chez tous les Anciens était un air subtil, mais il n'importe qu'elle fût son essence. Le grand intérêt des sociétés demandait qu'elle fût immortelle, et qu'après la mort on pût lui demander compte. Démocrite, Épicure et plusieurs autres combattirent ce sentiment. Ils prétendirent que les honnêtes gens n'avaient pas besoin de l'enfer pour être vertueux, que l'idée de l'enfer faisait plus de mal que de bien, que l'âme n'est pas un être à part , que c'est une faculté de sentir, de penser, comme les arbres ont de la nature la faculté de végéter, qu'on sent par les nerfs, qu'on pense par la tête, comme on touche avec les mains et qu'on marche avec les pieds.

 

Pour Platon et Socrate il est indubitable qu'ils croyaient l'âme immortelle. Ce dogme a été le plus universellement répandu. Il paraît le plus sage, le plus consolant et le plus politique. Pour peu que vous lisiez, Monsieur, les bons livres traduits en notre langue, vous en saurez beaucoup plus que je ne pourrais vous en dire, et avec l'esprit juste que vous avez, vous vous formerez des idées saines de toutes ces choses qui nous intéressent véritablement. Vous avez grande raison de rejeter toutes les idées populaires . Jamais les sages n'ont pensé comme le peuple. Saint Crépin est le saint des cordonniers, sainte Barbe des vergetiers [ii], mais la vérité est le saint des philosophes . En voilà beaucoup pour un vieillard qui ne connait plus que sa charrue et ses vignes. Je trouve que la meilleure philosophie est celle de cultiver ses terres. Je me croirais fort heureux si je pouvais avoir l'honneur de vous recevoir dans un de mes ermitages.

 

Je suis avec respect

Monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

 

Voltaire

gentilhomme ordinaire du roi. »

 

iDans ses Dissertations sur l'union de la religion, de la morale et de la politique, tirées de Warburton par Etienne de Silhouette, 1742.

http://books.google.fr/books?id=0qgUAAAAQAAJ&printsec...

 

ii Fabricants de brosses à nettoyer.

 

 

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je me ferai un devoir, à la première occasion, d'ajouter tout ce qui pourra servir à sa gloire et plaire à sa fille

jouvent justice.jpg

 

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jouvenet

 

 

 

« A Élisabeth-Anne Lordelot

Aux Délices, route de Genève

1er octobre [vers 1758]

 

Madame,

 

Votre lettre m'a fait relire le petit article qui regarde M. Jouvenet [i]. Je vois qu'il y est regardé comme un bon peintre, quoique inférieur en quelques parties à Le Brun . Il est vrai qu'il avait quelquefois un coloris un peu jaune ; et ce léger défaut est moindre que celui de Le Brun et du Poussin qui étaient souvent beaucoup trop rembrunis . Les Sept sacrements du Poussin sont devenus si noirs qu'ils sont plus beaux aujourd'hui que dans les estampes. Chaque peintre, comme chaque écrivain a ses défauts. Je serais très mortifié de compter parmi les miens celui de ne pas rendre justice aux grands talents [ii]. J'ai appelé M. Jouvenet bon peintre, c'est un éloge que je confirmerai toujours et je me ferai un devoir, à la première occasion, d'ajouter tout ce qui pourra servir à sa gloire et plaire à sa fille,[iii] dont j'ai reconnu tout le mérite dans la lettre dont elle m'honore.

 

Je suis avec respect, Madame, votre très humble et très obéissant serviteur.

 

Voltaire. »

 

iDans

Le Siècle de Louis XIV : « Jean JOUVENET, né à Rouen en 1644. éléve de Le Brun, inférieur à son maître quoique bon peintre. Il a peint presque tous les objets d'une couleur jaune. Il les voiait de cette couleur par une singuliére conformation d'organes. m. en 1717. » Dans cet article V* n'a pas modifié sa norice sur Jean Jouvenet, non plus que sa date de naissance inexacte .

http://c18.net/vo/vo_textes_siecle.php?div1=42


 

ii V* parlait en connaisseur, en août, des Van der Meulen et du Van Dyck de feu Klinglin.

iii Il ne rajoutera rien . Elisabeth-Anne, née en 1684 , avait épousé Bernerd-Claude Lordelot . Gaêtan Guillot, dans un article intitulé "La femme et le s filles du peintre Jouvenet dans l'oeuvre du peintre", 1914, affirme qu'elle mourut en 1719 . En fait comme l'avait montré TH. Lhuillier dans "Note relative à Jean Jouvenet et à ses filles ", elle vivait encore bien des années après cette date .