04/08/2023
soutenons toujours la bonne cause quelque temps qu'il fasse
... Le problème étant que la plupart du temps chacun défend sa propre cause au mépris de celle qui serait bonne pour la survie sur la planète .
« A Charles-Frédéric-Gabriel Christin fils,
Avocat en Parlement
à Saint-Claude
Mon cher ami, nous sommes à cent lieues l'un de l'autre, quoique nous soyons fort près . Je ne sais comment font les courriers pour porter les lettres . Tout le monde gèle de froid, ou est malade . J'ai été dans l'un et l'autre cas . Il n'y a pas moyen de parler d'affaires . Tous ceux qui doivent de l'argent disent qu'il fait trop froid pour payer . On me parle toujours d'arrangements et on n’arrange rien . Je vois bien qu'il faudra que je pâtisse tant que dix pieds de neige couvriront la terre . Mais aussi je ferai la guerre, et j'entrerai en campagne à la belle saison .
Bonsoir, mon cher philosophe, soutenons toujours la bonne cause quelque temps qu'il fasse .
V.
9è janvier 1768. »
10:39 | Lien permanent | Commentaires (0)
les Anglais ont souvent pris nos ridicules
... Et nous ceux des amerloques !
D'où ce qui précède ...
« A Henri Panckoucke 1
A Ferney le 8è janvier [1768]
Vous ne sauriez croire, monsieur, combien j'aime le stoïcien Caton 2, tout épicurien que je suis. Vous avez bien raison de penser que l'amour serait fort mal placé dans un pareil sujet. La partie carrée des deux filles de Caton, dans Addison, fait voir que les Anglais ont souvent pris nos ridicules. Je suis très aise que vous ne vous soyez point laissé entraîner au mauvais goût. Les Français ne sont pas encore dignes d'avoir beaucoup de tragédies sans amour, et je doute même que la mode en vienne jamais . Mais vous me paraissez digne de mettre au jour les vertus morales et héroïques sur le théâtre.
J'ai l'honneur d'être, avec tous les sentiments d'estime que vous méritez, monsieur, votre, etc. »
2 Henri Panckoucke, cousin de l'éditeur du même nom, a manifestement envoyé à V* sa tragédie, La Mort de Caton,1768, imitée d'Addison, qui ne fut jamais représentée .Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5458583t/f5.item
00:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
03/08/2023
je ne peux pas assurer que je suis en vie
...puisque officiellement je suis mort " , c'est ce que peut se dire un mien neveu qui se trouve dans ce cas, comme un certain nombre de faux défunts qui vaquent pourtant bien à leurs occupations ; voir par exemple : https://www.tf1info.fr/justice-faits-divers/video-declare...
Ces walking deads ne font pas peur, au contraire ; seuls les rond-de-cuir ont le vrai pouvoir de vie et de mort sur nous, ces demi-dieux malfaisants .
« A George Keate
8è janvier 1768
Vous voulez, monsieur, que je vous écrive vivo et valeo 1. Je ne peux en conscience vous écrire ainsi, je mentirais . Je suis dans mon lit depuis trois mois, et je ne peux pas assurer que je suis en vie . Tout ce que je puis vous dire, c'est que ma dernière volonté est de vous aimer et de vous lire .
Je compte vous envoyer le recueil que vous voulez bien demander 2 . Dites-moi à quel correspondant de Hollande vous ordonnez que je l'adresse .
Je n'ai point reçu de lettre de Bruxelles 3. Le commerce a été interrompu pendant plus de six mois entre Genève et le pays que j'habite ; nous avons eu des troupes, et il y a eu beaucoup d'infidélités dans les Postes .
Il n'y a point eu de vrai trouble à Genève, mais seulement beaucoup de mauvaise volonté et beaucoup de brochures fort ennuyeuses . D'ailleurs tout a été tranquille . Les deux partis opposés ont plaidé devant leurs juges ; les magistrats ont gagné leur cause, mais les Représentants n'ont point acquiescé au jugement 4 . On cherche des moyens de conciliation .
Envoyez-nous vite, monsieur, le poème que vous nous promettez 5 pour nous consoler de l'ennui des tracasseries de Genève . Ne doutez pas de l'estime infinie et de l'attachement sincère avec lesquels je serai toute ma vie, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur .
V.
A Ferney par Genève 8è janvier 1768. »
1 Je vis et je me porte bien .
2 Dans un post scriptum d'une lettre à V* du 22 décembre 1767, Keate écrit à V* : « Je voudrais savoir si MM. Cramer ont imprimé en temps réguliers les ouvrages que vous avez écrits, depuis que les dix-sept volumes étaient donnés . »
3 Keate a écrit à V* de Bruxelles le 10 août 1767 ; sa lettre est conservée et publiée . Il annonce en particulier qu'il a vu à Saint-Omer sa tragédie des Scythes « bien représentée ».
4 Le Prononcé des puissances garantes du règlement de 1738, conclu à Soleure, 1767 ; voir : https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiXwJSPqr6AAxU6TaQEHRHhAPoQFnoECA8QAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.unige.ch%2Fsciences-societe%2Fsocio%2Fcarnets-de-bord%2Fpdf%2F5_46.pdf&usg=AOvVaw2yfT3H8FiOfKOVyigUKzZW&opi=89978449
5 Dans une lettre du 22 décembre 1767, Keate annonce l'envoi de son poème Ferney, an Epistle to M. de Voltaire, 1768 . : https://books.google.fr/books?id=oz1WAAAAYAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
00:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
02/08/2023
Nouveaux Mélanges
Cuisant constat
« A Albrecht Friedrich von Erlach 1
[8 janvier 1768] 2
[L 'informe qu'il a donné des ordres pour que le volume IV de ses œuvres et les Nouveaux Mélanges lui soient envoyés .]
2 Cette lettre n'est connue que par la réponse d'Erlach, lequel remercie V* pour l'envoi du « quatrième volume de ses œuvres » et demande encore, pour compléter sa collection , l' « histoire de Pierre Ier et la philosophie de l'histoire » qui lui manquent .
Voir lettre du 9 février 1768 : http://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1170101a1c/?letters=decade&s=1760&r=15852
08:37 | Lien permanent | Commentaires (0)
01/08/2023
l'hôte, l'hôtesse, et toutes les filles du cabaret, sont à vos ordres
... On ne peut dire mieux à tous les vacanciers .
« A Philippe-Charles-François-Joseph de Pavée, marquis de Villevielle
Il y a des occasions, monsieur, où il faut chanter des Te Deum au lieu de De Profundis. Les âmes de ces deux braves gens sont immortelles sans doute, puisqu'elles ont eu tant de lumières et tant de courage. J'espère bientôt avoir l'honneur de mourir comme eux, quoique des faquins aient poussé la calomnie jusqu'à dire que j'allais à confesse. Il faut être bien méchant et avoir l'âme bien noire pour inventer de pareilles impostures.
Agréez mes respects et présentez-les, je vous prie, à MM. Duché 1 et Venel 2. Je serais bien trompé si le titre d'encyclopédiste vous avait nui auprès de feu M. de Guerchy 3; mais je vous suis bien caution que le titre d'encyclopédiste ne vous fera aucun tort auprès de M. du Châtelet 4.
Nous avons essuyé un froid si excessif, et j'ai été si malade, que je n'ai pu répondre encore à Mme Cramer.
On m'a envoyé quelques petites brochures intéressantes échappées aux griffes de l'Inquisition. Ayez la bonté de me mander si on pourrait vous faire tenir quelques-unes de ces fariboles sous l'enveloppe de monsieur l'intendant, ou du premier secrétaire, ou sous une enveloppe quelconque. Gardons-nous la fidélité et le secret que se doivent les initiés aux sacrés mystères. Quand vous irez faire des revues, ce qui est une chose infiniment agréable, n'oubliez pas, monsieur, votre ancienne auberge ; l'hôte, l'hôtesse, et toutes les filles du cabaret, sont à vos ordres.
V.
8è janvier 1768.»
1 Le peintre Gaspard Duché de Vancy , mais plus probablement un autre Duché ( le peintre n'ayant alors que douze ans ! ); voir lettre du 23 mars 1767 à Villevielle : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/09/09/il-est-vrai-que-le-diable-est-dechaine-6400196.html
Voir : https://fr.artprice.com/artiste/146208/gaspard-duche-de-vancy/biographie
2 Sans doute le docteur Gabriel-François Venel ; collaborateur de l'Encyclopédie : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gabriel_Fran%C3%A7ois_Venel
et : http://enccre.academie-sciences.fr/encyclopedie/contributeur/venel
3 Claude-Louis-François de Regnier, comte de Guerchy ambassadeur de France en Angleterre , mort le 17 août 1767
Voir : http://el.enc.sorbonne.fr/cataloguevente/notice35.php?print
et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Louis_Fran%C3%A7ois_de_R%C3%A9gnier_de_Guerchy
4 Le futur duc succédant à Guerchy , ne rejoindra son poste qu'après le 30 janvier 1768
09:40 | Lien permanent | Commentaires (0)
31/07/2023
me soucie fort peu de voir cette platitude
... Laquelle ? je ne sais pas encore, mais elle se trouve à coup sûr dans la liste suivante , je vous laisse entre les plumes de critiques plus cinéphiles que moi :
https://www.senscritique.com/films/toujours-a-l-affiche
A priori, je mettrai de côté puis jetterai aux oubliettes The House, Ils ont cloné Tyrone, Limbo, Le Manoir hanté, Barbie ( - Ô Barbie ! comme tu as de longues jambes ! - C'est pour mieux fuir Ken , mon enfant ! ). Mais c'est à vous de voir .
https://www.senscritique.com/top/resultats/les_meilleurs_...
« A Etienne-Noël Damilaville
8 janvier [1768]
Mon cher ami, je n'ai point vu la facétie de la Sorbonne , et me soucie fort peu de voir cette platitude ; mais j'ai lu l'arrêt du Conseil contre le Parlement 1, et la vengeance de M. Chardon, de laquelle j'ai été fort édifié. Pourvu que ces tracasseries parlementaires ne nuisent point aux Sirven, je suis content.
Le froid est excessif. Mes paroles sont gelées, et la main de celui qui écrit est transie.
Je suppose que M. d'Alembert a reçu la lettre d'Italie que j'ai fait chercher à Genève. Voulez-vous bien avoir la bonté d'envoyer l'incluse à M. de La Harpe 2, rue du Battoir?
Portez-vous bien, et quand vous serez à la tête des vingtièmes, écrasez l'inf... »
1Cet arrêt du Conseil, en date du 26 décembre 1767 annulait la délibération du 23 décembre ; mais le Parlement n'en maaintint pas moins ses objections contre Chardon ; voir lettre du 4 janvier 1768 à d'Argental : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/07/27/nous-manquons-d-hommes-en-bien-des-genres-mon-cher-ange-cela-6454327.html
2 Elle manque.
18:07 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je lui remontrai l'énormité et l'ingratitude de ce procédé
... se plaint M. Dupont-Motetti à Mme Borne en apprenant la décision de la cour de cassation qui doit le mener à un procès tout à fait justifié pour prise illégale d'intérêts : https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/28/la-cour...
Cet homme , vindicatif , orgueilleux et avide de pouvoir , --comme bien des avocats politiciens,-- n'a pas résisté à la tentation d'user et abuser de sa fonction ministérielle ; qu'il en paye les conséquences , sinon, qu'on ne parle plus de justice en France .
https://www.lopinion.fr/politique/soupcons-de-prise-illeg...
« A Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu
6è janvier 1768 à Ferney
M. Hennin, résident à Genève, me mande, monseigneur, qu'il a eu l'honneur de vous écrire au sujet de Gallien. Vous avez vu, par mes lettres, que je n'espérais pas que ce jeune homme se maintînt longtemps dans ce poste. Il s'est avisé de faire imprimer une mauvaise pasquinade 1, dans le style d'un laquais, sur les affaires de Genève et il a eu la méchanceté inepte de me l'attribuer, en l'imprimant sous le nom d'un vieillard moribond, et en ajoutant à ce titre des qualifications peu agréables.
M. Hennin m'a envoyé l'ouvrage, et m'a instruit en même temps qu'il était obligé de le renvoyer, et qu'il vous en écrivait.
Mon respect pour la protection dont vous l'honorez m'avait fait toujours dévorer dans le silence les perfidies qu'il m'avait faites. Il allait acheter à Genève tous les libelles qu'il pouvait déterrer contre moi, et les vendait à ceux qui venaient dans le château. Je lui remontrai l'énormité et l'ingratitude de ce procédé. Je voulus bien ne l'imputer qu'à sa curiosité et à sa légèreté. Je ne voulus point vous en instruire. J'espérai toujours que le temps et l'envie de vous plaire pourraient corriger son caractère. Je vois, par une triste expérience, que mes ménagements ont été trop grands et mes espérances trop vaines.
Je pense qu'il serait convenable qu'il allât en Dauphiné pour y faire imprimer l'histoire de cette province, qu'il a entreprise. Il est du village de Salmorans, dont il a pris le nom, et il avait toujours témoigné le désir d'y aller voir ses parents.
Peut-être l'article de ses dettes sera-t-il un peu embarrassant avant qu'il parte de Genève. On prétend qu'elles vont à plus de cent louis . C'est ce que j'ignore . Mais je sais qu'il répond aux marchands que c'est à vous à payer la plupart des fournitures. J'ai déjà payé deux cents livres, dont je vous avais envoyé les quittances, et que vous avez eu la bonté de me rembourser.
Je vous ai mandé que je ne paierais rien de plus sans votre ordre précis, et j'ai tenu parole, à un louis près. Peut-être voudriez-vous bien encore accorder une petite somme, afin qu'un jeune homme que vous avez daigné faire élever avec tant de générosité ne partît pas de Genève absolument en banqueroutier.
Tous les esprits sont violemment irrités contre lui à Genève. Cette affaire est très désagréable; mais, après tout, l'âge peut le mûrir. Tout ce que vous avez daigné faire pour lui peut parler à son cœur et, quelque chose qui arrive, vous aurez toujours la satisfaction d'avoir exercé les sentiments de votre caractère noble et bienfaisant.
Le thermomètre est ici à treize degrés et un quart au-dessous de la glace . L'encre gèle ; mais quoique Gallien m'intitule vieillard moribond, je sens que mon cœur a encore quelque chaleur. Elle est tout entière pour vous , elle anime le profond respect avec lequel je. vous serai attaché jusqu'au dernier moment de ma vie.
V. »
1 Voir lettre du 4 janvier 1768 à Hennin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/07/28/je-sais-a-quel-point-il-est-dangereux.html
07:49 | Lien permanent | Commentaires (0)