04/12/2018
à soixante et dix ans il faut bien perdre quelque chose
... Amis retraités, soyez aussi philosophes que l'ami Voltaire à la santé défaillante, et consentez à perdre modestement quelques revenus pour le bien de l'Etat , avec ou sans gilet jaune .
Certains d'entre vous ont déjà perdu bien davantage : la raison .
N'oubliez pas que pour l'économie de quelques centimes on vient de faire,-- et on continue,-- pour des millions de dégats , qui, s'ils ne sont pas pris par le fisc le seront i-né-luc-ta-ble-ment par nos compagnies d'assurance auxquelles on ne peut échapper ; cherchez l'erreur ! Qui, en zone inondable par exemple ou qui se gare habituellement aux Champs Elysées, osera se dispenser de payer ses traites d'assurances gonflées au maximum ? Hein ! qui ?
« A Jean-Robert Tronchin, Fermier
général
En son hôtel
à Paris
8è décembre 1763 1
Si vous recevez, monsieur, un paquet qu'on vous a adressé sous l'enveloppe de monsieur le contrôleur général, je vous prie de le lire à votre loisir, et de m'en dire votre avis .
S’il vient chez vous un M. Gébelin 2, je vous supplie de vouloir bien lui donner vos conseils .
Si les effets royaux reprennent leur faveur, je vous prie encore de vouloir bien me le dire .
Je perds un peu la vue, mais à soixante et dix ans il faut bien perdre quelque chose . Je ne croyais pas quand je vis le docteur pour la première fois que j'irais jusqu’à 70 .
Mme Denis, et tout ce qui est à Ferney vous fait les plus tendres compliments . Mme Dupuits augmentera la famille de quelque petit neveu, ou nièce de Corneille, dans quelques mois . Portez-vous bien, vivez heureux, et conservez vos bontés pour le plus attaché et le plus tendre de vos serviteurs .
V. »
1 Tronchin a noté sur le manuscrit la date de sa réponse, 26 décembre .
2 Antoine Court de Gébelin est allé à Paris pour mettre en place un réseau protestant clandestin d'entraide, de renseignements et de propagande . Voir lettre du 9 décembre 1763 à Manoël de Végobre : « […] M. Court est à Paris sous un autre nom . J'ai peur qu'il ne veuille précipiter le succès de ce que j'ai entrepris en faveur des protestants du royaume ; et que son zèle très louable ne demande trop tôt ce qu'on doit attendre que dans quelques années . [...]»
10:03 | Lien permanent | Commentaires (0)
03/12/2018
Rien ne pouvait augmenter mon respect et mon attachement pour votre République
... ô Français, et tout a été fait pour que mon aversion pour les manifestations violentes s'accroisse , et que mon dégoût pour les jeteurs d'huile sur le feu n'ait que l'embarras du choix parmi les vaincus des urnes, de droite comme de gauche, qui cherchent le pouvoir via la rue [sic].
« A Friedrich von Mülinen
Conseiller d’État, Banneret de la
République
à Berne
Au château de Ferney 8è décembre 1763
Monsieur,
Permettez que j'aie l'honneur de vous présenter, aussi bien qu'à la Société d'agriculture, mes très humbles remerciements . Rien ne pouvait augmenter mon respect et mon attachement pour votre République ; mais la faveur dont vous m'honorez augmente ma reconnaissance . Je n'ai rien à désirer, sinon que ma santé me permette de venir vous présenter mes remerciements .
J'ai l'honneur d'être avec bien du respect
monsieur,
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire . »
09:24 | Lien permanent | Commentaires (0)
02/12/2018
J’espère pouvoir bientôt vous envoyer la Tolérance
... zéro !
Ce qui, selon moi, devrait être la réaction normale face aux délits permis par l'indiscipline des Gilets jaunes .
Au passage, j'admire la franche hypocrisie de tous ces automobilistes qui affichent leur sympathie aux Gilets jaunes, trop heureux de ne pas être bloqués trop longtemps . Mes chers compatriotes, au volant, vous êtes d'une lâcheté qui n'a d'égal que votre mauvaise humeur dans les bouchons quotidiens .
Cassez, détruisez, brûlez, blessez, tuez pendant que vous y êtes, insensés ! Qui paiera ? Vous et moi, inéluctablement . J'aimerais tant qu'enfin on casse les casseurs .
« A Élie Bertrand, Premier pasteur de l’Église
française, membre de plusieurs académies
à Berne.
8è décembre 1763, à Ferney
J'ai cru, mon cher monsieur, devoir écrire à M. de Mulinen . Je vous renouvelle mes sincères remerciements, et vous prie toujours de les présenter à la Société . J’espère pouvoir bientôt vous envoyer la Tolérance ; M. Cramer m'a promis qu'il vous ferait tenir une Histoire générale ; je voudrais pouvoir vous apporter tout cela moi-même .
J'ai écrit à Mgr l’Électeur palatin 1. Ne doutez jamais ni de mon zèle, ni de ma tendre amitié . Ne m'oubliez point, je vous en supplie, auprès de M. et de Mme Defreüdenrich .
V. »
1 Lettre inconnue .
09:54 | Lien permanent | Commentaires (0)
01/12/2018
vous avez même Ce qui plait aux dames
... disent les producteurs de L'Amour est dans le pré à nos amis provinciaux tentés de rompre avec le célibat sous le regard voyeur/voyou de leurs concitoyens moqueurs ou envieux .
« A Etienne-Noël Damilaville
7è décembre 1763
Mon cher frère, permettez que je vous envoie ces deux lettres ouvertes pour M. Crommelin, et pour M. Mariette, avec un gros mémoire pour vous, que je vous supplie de faire lire à M. Crommelin quand vous l'aurez lu .
Je me flatte que vous avez reçu tout ce qui ne vous était pas encore parvenu, et que vous avez même Ce qui plait aux dames . Je vous embrasse le plus tendrement du monde .
Écr l'inf. »
15:47 | Lien permanent | Commentaires (0)
jugez combien nous sommes flattés de l'honneur que vous nous avez fait
... diront en fin de journée les Gilets jaunes marseillais à Mélenchon, qui , indésirable sur les Champs-Elysées, se replie, la queue entre les jambes et la bave au menton, dans la seconde ville de France .
... reprendront en choeur les Gilets jaunes de Tulle à Hollande , qui, inutile à tous, joue les mouches du coche .
Ces deux zozos , que font-ils pour que leurs concitoyens n'aient plus l'obligation d'avoir recours aux Restos du coeur ? Rien ! Qu'ils aillent au diable !
« A Antoine Legat de Furcy
Le suffrage de Mme Denis, monsieur, doit être plus précieux que le mien . Souffrez pourtant que je joigne mes remerciements à son approbation 1 . Vous faites parvenir le bon goût et le plaisir jusqu’au pied des Alpes . Nous ne nous attendions pas qu'un homme qui réussit à la cour daignât songer à nos déserts ; jugez combien nous sommes flattés de l'honneur que vous nous avez fait . Recevez, monsieur, les sensibles remerciements de votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
gentilhomme ordinaire du roi .
Au château de Ferney en Bourgogne
par Genève, 7 décembre 1763. 2»
1 Legat de Furcy a envoyé à V* ses Soirées de Choisy-le-Roi, 1763, recueil de chansons et musique . Voir : https://data.bnf.fr/14983185/antoine_legat_de_furcy/
et : https://imslp.org/wiki/Category:L%C3%A9gat_de_Furcy,_Antoine
2D'après l'édition « Lettre de M. de Voltaire à M. Legat de Furcy, qui lui avait envoyé son recueil des Soirées », Mercure de France, Janvier 1764 . Le fait qu'un billet aussi insignifiant ait paru dans les Mercure de France montre à quel point est arrivée la renommée de V*, et ce que vaut un mot de compliment émanant de lui .
09:42 | Lien permanent | Commentaires (0)
30/11/2018
quand on peut servir son prochain sans risque, on est coupable devant Dieu de se tenir les bras croisés
... Devant Dieu ou pas, même combat .
N'oublions pas de répondre favorablement aux Restos du Coeur cette fin de semaine et encore ensuite .
J'ose espérer que ceux qui alimentent si volontiers les gilets jaunes auront encore quelques sous à consacrer à ceux qui n'ont plus même les moyens de crier au secours .
https://www.youtube.com/watch?v=diWNp9Fb5TU
« A Etienne-Noël Damilaville, Premier commis des
bureaux du vingtième
quai Saint-Bernard
à Paris
6è décembre 1763 1
Je croyais que vous aviez des Tolérance, mon très cher frère. Un jeune M. Turrettin de Genève s’est chargé d’un paquet pour vous, il est digne de voir les frères, quoiqu’il soit petit-fils d’un célèbre prêtre de Baal. Il est réservé, mais décidé, ainsi que sont la plupart des Genevois. Calvin commence dans nos cantons à n’avoir pas plus de crédit que le Pape ; le bon grain lève de tous côtés, malgré l’abominable ivraie qui couvre nos campagnes depuis si longtemps.
Vous avez sans doute vu la petite Lettre du Quakre. Je connaissais depuis longtemps le livre attribué à Saint-Evremond 2. Ce n’est pas assurément son style, et Saint-Evremond d’ailleurs n’était pas assez savant pour composer un tel ouvrage. Il est de Du Marsais ; mais il est fort tronqué et détestablement imprimé. Quand trouvera-t-on quelque bonne âme qui donne une jolie édition du Meslier, du Sermon, et du Catéchisme de l’honnête Homme ?3 Ne pourrait-on pas en faire tenir, sans se compromettre, au bon Merlin ? Je ne voudrais pas qu’un de nos frères hasardât la moindre chose ; mais quand on peut servir son prochain sans risque, on est coupable devant Dieu de se tenir les bras croisés.
Il doit vous arriver une Tolérance par une autre voie que celle que je prends pour vous écrire. Je suis zélé , mais j’aime à prendre quelques petites précautions, afin de ne point donner d’ombrage à la poste par de trop gros paquets, portant le timbre de Genève. On dit que toutes les affaires financières et parlementaires vont s’arranger.
Dieu soit béni ! Et vive le roi, et Pompignan !
Ecr. l’inf. »
1 L'édition Correspondance littéraire donne une version incomplète et n'identifie pas le destinataire .
2 L'Analyse de la religion chrétienne , attribuée à Saint Evremond .. Voir lettre de 1761-1762 à Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/12/31/rien-ne-pouvait-etre-plus-douloureux-pour-moi-que-le-contret-5892914.html
3 Bien entendu V* finit par préparer cette édition lui-même ; voir lettre du 24 novembre 1764 à François-Louis-Claude Marin : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-38.html
01:19 | Lien permanent | Commentaires (0)
29/11/2018
ce prince reste là pendant cinq actes comme un grand nigaud, sans savoir de quoi il s’agit
... Le prince Charles d'Angleterre ? ça lui va comme un gant !
Il finira gâteux à l'épilogue, sans gloire , ni autre fait remarquable que d'avoir été, un temps , l'époux de . Et dire qu'on le paye pour ça !
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
6è décembre 1763
Mes divins anges sauront qu’un jeune M. Turrettin 1 devait leur apporter des Tolérances, il y a environ quinze jours, que ce jeune Turrettin, d’ailleurs fort aimable, s’est arrêté à Lyon, et qu’il n’arrivera avec son paquet que dans quelques jours.
De plus, on n'a pas manqué d'envoyer des Tolérance sous le couvert de M. le duc de Praslin ; en voici une nouvelle dont mes anges disposeront comme il leur plaira 2.
Je crois avoir dit à mes anges que cette petite requête de l’humanité et de la raison avait fort bien réussi auprès de Mme de Pompadour et de M. le duc de Choiseul ; c’est pourtant un ouvrage bien théologique, bien rabbinique. Mais comme il ne faut pas être toujours enfoncé dans la Sainte Écriture, vous aurez des contes tant que vous en voudrez ; vous n’avez qu’à dire.
Faites-moi donc un peu part de votre conspiration. Vous me traitez comme Léontine et Exupère en usent avec Héraclius 3. Ils font tout pour lui, et ne lui en disent pas un mot. Mais c’est, à mon sens, un grand défaut, dans Héraclius, que ce prince reste là pendant cinq actes comme un grand nigaud, sans savoir de quoi il s’agit. Mais je m’en remets entièrement à ma Léontine et à mon Exupère, et je vous donne même la préférence sur ces deux personnages , et je me mets entièrement à l'ombre de vos ailes .
V. »
1 Voir lettre du 12 novembre 1763 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2018/11/05/si-ses-depeches-lui-laissaient-le-temps-de-lire-6102660.html
2 Choiseul écrit à V* le 27 novembre 1763 : « Mme de Pompadour, Mme de Gramont, tous ceux qui ont lu, ou liront le livre de votre prêtre, en ont été enchantés ; chacun se dira après l'avoir lu : il faut convenir qu'il a raison, et j'ai toujours pensé de même ; je me garde bien de vous dire mon avis sur le fond de la matière ( car le livre m'a fait un plaisir infini à lire ) ».
Il est clair que ces mots de Choiseul visent le Traité sur la tolérance, et doivent être datés du 27 novembre 1763, et non du 27 juillet comme l'a fait l'éditeur Calmettes ; c'est dans la même lettre que Choiseul expose à V* un plan – du reste très utopique – de la colonisation de la Guyane, qui amènera ce dernier à proposer à son tour qu'on y envoie les protestants condamnés aux galères ; ceux-ci refusèrent d'ailleurs la solution imaginée par V* pour leur éviter ce châtiment .
3 Dans la pièce de ce nom de Corneille ; https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9raclius_(Corneille)
09:59 | Lien permanent | Commentaires (0)