04/11/2017
Il est honteux que cette affaire traîne au conseil si longtemps ; des juges ne doivent pas aller à la campagne quand il s’agit d’une cause qui intéresse le genre humain
... Emmanuel Macron doit avoir ce même sentiment pour être allé à la Cour européenne des Droits de l'Homme , sans pourtant l'exprimer ouvertement ; son rôle ne consistant pas à démolir une institution par de vaines critiques, il en reconnait l'utilité particulièrement importante dans cette ère de terrorisme qui impose des mesures draconiennes .
http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/10/31/le-plaid...
« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine, marquise de Florian
29 décembre 1762
J’ai tort, ma chère nièce ; je n’ai pas rempli mon devoir : mais si vous saviez tout ce qui m’est arrivé, vous me pardonneriez. Je vous souhaite à vous et au grand écuyer de Cyrus toute la félicité que vous méritez tous deux. On dit que d’Hornoy a le ventre d’un président, et qu’il ne sera pourtant pas conseiller au grand-conseil 1. L’abbé 2 est donc en retraite, dans son abbaye, avec une fille et des livres . Je suis fort content de son Irène, et je le trouve très avisé, étant sous-diacre, de n’avoir pas donné au concile de Nicée tous les ridicules qu’il mérite. Pour moi, qui n’ai pas l’honneur d’être dans les ordres sacrés, je n’épargne pas les impertinences de l’Église quand je les rencontre dans mon chemin. Je me suis fait un petit tribunal assez libre, où je fais comparaître la superstition, le fanatisme, l’extravagance, et la tyrannie. Je vous enverrai quelque jour Olympie, qui est dans un autre goût. Vous la verrez à peu près telle que nous l’avons jouée devant notre premier gentilhomme de la chambre, M. le maréchal de Richelieu.
Je m’occupe à présent de la tragédie des Calas, et je crois que le dénouement en sera heureux. Le ministère a déjà élargi ses filles. Ce mot d’élargir ne convient guère, mais cela veut dire qu’on les a tirées de la prison appelée couvent où on les avait renfermées. C’est un gage infaillible du gain du procès : car si le ministère ne croyait pas Calas innocent, il n’aurait pas rendu les filles à la mère. Il est honteux que cette affaire traîne au conseil si longtemps ; des juges ne doivent pas aller à la campagne quand il s’agit d’une cause qui intéresse le genre humain.
Je vous pardonne de tout mon cœur, ma chère nièce, de ne m’avoir point écrit quand vous étiez dans vos terres, car il faut que les lettres aient un objet ; et quand on a mandé qu’on a achevé son salon et meublé un appartement, on a tout dit. Mais à Paris, les nouvelles publiques, les pièces nouvelles, les nouvelles folies, les sottises nouvelles, sont un champ assez vaste, et vous peignez tout cela très joliment.
Il n’y a pas d’apparence que je puisse aller dans votre bruyante ville ; ni ma mauvaise santé, ni l’édition de P. Corneille, ni mes bâtiments, ni un parc d’une lieue de circuit, que je m’avise de faire, ne me permettent de me transplanter sitôt. Il faut au moins remettre ce voyage à une année, si la nature m’accorde une année de vie. Soyez sûre que toutes celles qui me pourront être réservées seront employées à vous aimer. Votre sœur vous embrasse aussi de tout son cœur. »
1Le fils de Mme de Florian Alexandre de Dompierre deviendra président plus tard : voir : https://gw.geneanet.org/pierfit?lang=fr&n=de+dompierr...
2 L'abbé Vincent Mignot a publié sous anonymat Histoire de l'impératrice Irène, 1662 [sic] . L'année précédente il avait publié une Histoire des Rois catholiques Ferdinand et Isabelle, 1761 . Voir : http://data.bnf.fr/14572485/vincent_mignot/
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03/11/2017
Vous avez vu qu'à Paris on est plus éclairé, et plus humain qu'à Toulouse, et que la raison l'emporte sur le fanatisme, au lieu qu'en province, le fanatisme l'emporte sur la raison
... Bien !
Ceci étant dit, chers lecteurs parisiens et provinciaux, ne prenez pas la grosse tête -pour les premiers-, ni ne vous fâchez - pour les seconds . La raison n'est pas l'apanage de la capitale, non plus que le fanatisme le vice du Capitole , ça se saurait, non ?
A propos, chers, très chers bordelais, quelle mouche vous a piqué que vous nous fassiez une poussée de fièvre anti-parisiens, vous plaignant que la vie enchérit à cause de ces nordistes : ridicule et mauvaise foi, de vendanger vous venez (comme dit Yoda) ; qui est le vendeur/profiteur qui fait monter les prix ? un parisien ou un bordelais ? CQFD .
N. B. - A contrario, pour ceux qui ont l'esprit bien tourné, je recommande ceci , pour le 12 novembre au château de Voltaire : http://url.123.ch.snd59.ch/visu-517BBB6D-01F5-43F5-A7E7-0...
Etre utile en se faisant plaisir !
« A Anne-Rose Calas, née Cabibel
à Paris
29è décembre 1762, à Ferney
L'élargissement de vos filles, madame, est un gage infaillible du succès de la cause de la vertu contre le fanatisme ; le conseil a trop d’honneur et trop de justice, pour ne pas venger le sang de votre mari, et pour ne pas signer l’arrêt que toute l'Europe a déjà dicté .
Je me flatte que j'apprendrai bientôt que la révision a été ordonnée, et cette révision est le gain du procès . Vous avez vu qu'à Paris on est plus éclairé, et plus humain qu'à Toulouse, et que la raison l'emporte sur le fanatisme, au lieu qu'en province, le fanatisme l'emporte sur la raison .
Persévérez dans votre généreuse entreprise, vous serez secondée par tous ceux qui ont quelque humanité . Je serai toujours, dans cette confiance, votre très humble et très obéissant serviteur .
V.1 »
1 Sur le manuscrit original, seule l'initiale est autographe .
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02/11/2017
Et qu'il lui dit d'injures qui ne prouvent rien !
... Ou plutôt si, elles prouvent la bêtise de l'insulteur . Oui, M. Wauquiez, ce n'est pas en insultant le président que vous aurez l'estime du peuple ; vous vous ridiculisez par vos outances mélenchonesques et lepenniques . Gare au retour de flamme , vous n'y échapperez pas, les LR sont loin d'être bienfaisants ! Quant à devenir calife à la place du calife, mon cher Iznogoud bis, vous rêvez !
« Au ministre Paul-Claude Moultou
à Genève
25è décembre 1762 1
Je vous ai une grande obligation, monsieur, des lumières que vous répandez sur le chaos informe que vous savez . Et le public vous en aurait une plus grande si vous vouliez travailler sur ce sujet qui est la cause de tous les hommes . J’aurai l'honneur de vous renvoyer les livres que vous avez bien voulu me prêter . Doduel 2 me paraît avoir bien raison et le compilateur Ruinant 3 avec ses actes sincères est sincèrement un imbécile . Pour Simon 4, quel fatras ! et comme il se défend mal contre Leclerc 5! Et qu'il lui dit d'injures qui ne prouvent rien !
Continuez le grand et bel ouvrage que vous avez entrepris 6. Votre philosophie sera souvent aux prises avec les égards pour les opinions reçues, incedis per ignes suppositos cineri doloso 7. Mais marchez hardiment sur ce feu . Vous ne vous brûlerez pas . Qu'avez-vous à craindre dans un siècle philosophique à qui vous direz la vérité ? Vous vous comblerez de gloire ; et si quelque pédant murmure, ce sera l'esclave derrière le char du triomphateur . Vous avez d'ailleurs un grand avantage . Vous écrivez avec clarté et avec éloquence . Vous embellirez tout ce que vous toucherez . Les discussions les plus épineuses deviendront intéressantes entre vos mains . J’ai un désir extrême de voir quelque chose de votre ouvrage, et un plus grand de vous revoir . Tout ce qui était à Ferney a été charmé de vous . Ne pourriez-vous pas nous accorder encore la même faveur ? Soyez persuadé de ma respectueuse estime , et permettez-moi d'y joindre l'amitié .
V. »
1 L'édition Georges Méautis « Un lettre inédite de Voltaire à Moultou », dans la Revue d'histoire littéraire y est peu exacte .
2 Comme V* cite ensuite Ruinart, l'ouvrage dont il parle ici est Dissertationes Cyprianicae, 1684 , d'Henricus Dodwellus [Henri Dodwell]
3 Theodoricus [Thierry] Ruinart, Acta primorum martyrum sincera et selecta […] [His] praemittitur praefatio generalis in qua refellitur dissertatio XI cyprianica Henrici Dodwelli de paucitate martyrum, 1689 ; c'est l'édition originale . V* avait en sa possession la traduction française, Les véritables actes des martyrs, traduits par Jean-Baptiste Drouet de Maupertuy, 1708 .
4 L'Histoire critique du Vieux Testament, dont l'édition de Paris, 1678 fut supprimée puis rééditée à Amsterdam en 1680, puis à Rotterdam en 1685 ; V* avait cette dernière édition .
5 Jean Leclerc à la suite des travaux de Richard Simon avait publié les Sentiments de quelques théologiens de Hollande sur l’Histoire critique du Vieux Testament composée par le père Richard Simon, 1685 ; cet ouvrage fut suivi d'une Réponse au livre intitulé Sentiments de quelques théologiens de Hollande, 1686 , une autre édition , de Richard Simon, provoqua à son tour une Défense des sentiments de quelques théologiens, 1686 . Il s'ensuivit une foule d'écrits divers de moindre importance .
6 Moultou travaillait à une histoire de l’Église qui ne fut jamais publiée .
7 Tu t'avances à travers des feux cachés sous une cendre trompeuse ; Horace, odes, II, i, 7-8.
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01/11/2017
Il faudra bien qu'elle triomphe
... La langue française si malmenée de nos jours .
http://www.lepoint.fr/societe/on-a-decrete-qu-il-ne-falla...
« A Philippe Debrus
derrière le Rhône
J'envoie à monsieur Debrus ce paquet de factums 1 avec une lettre de Mme Calas . Ce mémoire fait un grand effet sur le public . Ceux de MM. Mariette et Beaumont n'en font pas moins sur l'esprit des juges .
Les demoiselles Calas ne sont point encore relâchées 2 malgré la promesse de M. de Saint-Florentin . Je n'en suis fâché que pour la mère . Il faudra bien qu'elle triomphe, et alors ses filles sortiront de leur prison par une belle porte .
Mille compliments à MM. de Végobre 3.
V.
23 [décembre 1762]4 »
1 C'est assurément le Mémoire pour Donat, Pierre et Louis Calas, signé Loyseau de Mauléon : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10406485.r=Affaire%20Calas&rk=236052;4
2 Elles avaient reçu la permission de sortir du couvent le 8 décembre 1762, mais V* n'en était peut être pas informé .
3 Charles Manoël de Végobre , avocat à Genève [voir page 455 : https://books.google.fr/books?id=0nnxGEXYcR0C&pg=PA45... ]et son cousin François-Aymar de Manoël de Nogaret, avocat [voir : https://gw.geneanet.org/carnac?lang=fr&n=manoel+de+nogaret&nz=maurin&ocz=3&p=francois+aymar&pz=guillaume ]
4 Manuscrit olographe avec endos « 1763-1764 » et d'après le catalogue B. M. vers le 10 décembre 1762 ; l'édition Lettres inédites date entre le 17 octobre et le 25 décembre 1762 . Elle est ici datée d'après l'identification des « factums » .
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31/10/2017
je ne vois pas comment on pourrait supposer que des Anglais (qui se piquent aujourd’hui d’être une nation généreuse) pussent faire une telle proposition
...http://tempsreel.nouvelobs.com/brexit/20160609.OBS2248/br...
Le doute pouvait subsister au jour de parution de cet article, mais désormais le Brexit prononcé relativise la "générosité" britannique .
« A Charles-Augustin Ferriol , comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
A Ferney 23 décembre 1762
Je ne peux rien ajouter, mes favorables anges, à tout ce que je vous ai dit sur le futur, sinon que je suis content de lui de plus en plus. Les bons caractères sont, dit-on, comme les bons ouvrages , on en est moins frappé d’abord qu’on ne les goûte à la longue ; mais comme il n’a rien, et que de longtemps il n’aura rien, il est difficile de le marier sans la protection de M. le duc de Praslin ; et c’est sur quoi nous attendons vos ordres.
En attendant, il faut que je vous parle de mademoiselle d’Épinay ou de l’Épinay 1 ; ce n’est pas pour la marier. M. le maréchal de Richelieu paraît avoir usé de ses droits de premier gentilhomme de la chambre avec cette infante . Il veut la payer en partie par les rôles qu’avait mademoiselle Gaussin dans les pièces de votre serviteur . Il me demande une déclaration en faveur de la demoiselle, et même au détriment de l’infante Hus. Dites-moi, mes souverains, ce que je dois faire. Jamais je n’ai été moins au fait du tripot, et moins en état d’y travailler. Il faut finir mes tâches prosaïques, et attendre l’inspiration. Je crois que, s’il arrivait malheur aux pièces nouvelles, les comédiens pourraient trouver quelque ressource dans le Droit du Seigneur et dans Mariamne, telle qu’elle est ; car je vous avoue que je trouve très bon que la Salome dise à Mariamne qu’elle ne la regarde plus que comme une rivale 2. C’est précisément cette rivalité dont il s’agit, c’est de quoi Salomé est piquée ; et une femme à qui on joue ce tour dit volontiers à son adverse partie ce qu’elle a sur le cœur.
A l’égard de Zulime, pourquoi l’imprimer, si elle ne peut rester au théâtre ? et il me semble qu’elle ne peut y rester si on ne laisse la fin telle que je l’envoyai, et telle que nous l’avons jouée sur le théâtre de Ferney ? Vous m’avouerez qu’il est dur pour un pauvre auteur qu’on change malgré lui ce qu’il croit avoir bien fait. Il peut se tromper, cela n’arrive que trop souvent ; mais vous savez qu’il n’en est pas moins sensible, et surtout quand il a vu l’effet heureux des choses qu’on veut rayer dans son ouvrage, et qu’on y substitue des corrections dont il est mécontent, il a quelque droit d’être affligé.
Quant au duc de Foix rechangé en un autre personnage 3, n’est-ce pas un peu trop d’inconstance ? Souffrira-t-on plus aujourd’hui une méchante action dans un prince du sang qu’on ne la supporta autrefois ? n’y a-t-il pas des choses qu’il faut placer dans des temps éloignés, et qui révoltent quand elles sont présentées dans des temps éloignés, et qui révoltent quand elles sont présentées dans des temps plus récents ? ne vaut-il pas mieux mettre une proposition sanguinaire et barbare dans la bouche des Maures que dans celle des Anglais ? Ce sont les Maures qui demandent le sang du héros de la pièce ; ce sont eux qui exigent qu’un prince français leur sacrifie son frère. En vérité, je ne vois pas comment on pourrait supposer que des Anglais (qui se piquent aujourd’hui d’être une nation généreuse) pussent faire une telle proposition à un prince de la race qui est à présent sur le trône. Assurément le moment n’est pas propre ; ce n’est pas le temps d’insulter les Anglais. Je crois que nos princes du sang et le duc de Bethford seraient également indignés, et que le public le serait comme eux.
Si cette idée insoutenable est tombée dans la tête de Lekain, vous lui ferez comprendre sans doute à quel excès il se trompe. Cela lui arrive bien souvent. Je confierai volontiers des rôles aux Lekain et aux Clairon, mais je ne les consulterai jamais.
Croyez-moi, encore une fois, qu’ils jouent le Droit du Seigneur et Mariamne, s’ils n’ont rien de nouveau ce carême. Je tâche d’oublier Olympie, afin d’en mieux juger, et de vous l’envoyer plus digne de vous. J’ai presque achevé l’Histoire générale, que j’ai conduite jusqu’à la paix pour ce qui regarde les événements politiques, et jusqu’à l’arrêt singulier du parlement contre l’Encyclopédie pour ce qui concerne l’histoire de l’esprit humain. On finit d’imprimer Pierre-le-Grand. Je serai bientôt libre, et je me rendrai au tripot ; car, entre nous, je l’aime autant que vous l’aimez.
Puissé-je, en attendant, faire un épithalame ! mais cela dépend de M. le duc de Praslin. Voilà bientôt ce qu’on appelle le jour de l’an . Je souhaite à mes anges toutes les félicités terrestres , car, pour les célestes n’y comptons pas.
V. »
1 Mlle de l'Épinay est plus connue sous le nom de Mme Molé (1740-1782) . Pierrette-Claudine-Hélène Pinet avait fait ses débuts le 21 janvier 1761, et fut reçue le 29 janvier 1763 . elle épousa le 10 janvier 1769 le fameux acteur François-René Molé . Si ce que dit V* est vrai, le véritable père de sa fille Elisabeth-Félicité, née le 23 juillet 1760, peut avoir été Richelieu .Voir Dictionnaire des comédiens, de Lyonnet ; voir : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2137871/f442.image
et voir : https://www.comedie-francaise.fr/fr/artiste/mlle-mole
et : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2137871/f440.image
2 Hérode et Mariamne, II, 2 : « Tremblez imprudente rivale ! » ; http://www.theatre-classique.fr/pages/programmes/edition.php?t=../documents/VOLTAIRE_MARIAMNE.xml#A2
3 Rebaptisé en duc de Vendôme .
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30/10/2017
quand voulez-vous Don Sanche d'Aragon, triste pièce
... mais pas autant que celle jouée par Carlos Puigdemont, mi-apprenti sorcier, mi-prétentieux calife .
Photo prémonitoire ? déjà derrière les barreaux !
« A Gabriel Cramer
[vers le 20 décembre 1762]1
Caro Gabrielé m'a oublié . Il m'avait promis la première feuille des Éclaircissements historiques 2 auxquels il y a des choses importantes à ajouter . Je renverrai les deux feuilles à la fois, quand voulez-vous Don Sanche d'Aragon, triste pièce de Pierre ? »
1 Passé à la vente Piot à Paris le 20 juin 1890, collection Portalis .
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29/10/2017
vous voyagerez chez les nations étrangères avec plus de connaissance et de goût que vous n’en trouverez peut-être dans la plupart des pays que vous verrez
... monsieur le président, -soit dit sans vouloir vexer quelque nation que ce soit,- vous en verrez des vertes et des pas mures, et comme disait Shakespeare "il y a quelque chose de pourri" dans un trop grand nombre de pays . Vaille que vaille, il faudra y passer, diplomatie oblige .
Je n'en pense pas moins !
« A Ivan Ivanovitch Schouvalov
19è décembre 1762 , au château de Ferney
Enfin donc, monsieur, j’aurai la consolation de ne point mourir sans avoir eu l’honneur de vous voir. J’étais fort malade quand j’ai reçu par M. le prince de Galitzin, les douces espérances que vous m’avez données 1. Je vous ai déjà dit, je crois, du moins j’ai dû vous dire, que vous êtes, pour les arts de l’esprit et de l’agrément, ce que Pierre-le-Grand a été pour la police de son empire : la différence sera que vous voyagerez chez les nations étrangères avec plus de connaissance et de goût que vous n’en trouverez peut-être dans la plupart des pays que vous verrez. Je me flatte, monsieur, que vous aurez la bonté de m’informer du temps de votre départ. Vous passerez sans doute par l’Allemagne et par Genève pour aller en France . Vous verrez tantôt des cours brillantes, et tantôt des ermitages rustiques. Je suis dans le dernier cas . Vous ne verrez en moi qu’un philosophe champêtre , vous passerez de la magnificence à la simplicité, mais songez que c’est dans cette simplicité champêtre que se trouvent la vérité et l’effusion du cœur ; la vanité vous donnera ailleurs des fêtes , mais la cordialité vous fera les honneurs de Ferney et des Délices. Si vous venez en hiver, vous trouverez autant de neige que chez vous ; si vous venez au printemps, vous trouverez des fleurs.
Comme je suis précisément entre la France et l’Allemagne, je me flatte d’avoir l’honneur de vous voir à votre passage et à votre retour. Ce seront deux époques bien agréables dans ma vie. Cette espérance adoucit tous les maux auxquels la nature me livre ; je les souffre patiemment, et je vous désire ardemment. Votre Excellence doit être bien persuadée des tendres et respectueux sentiments de votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire. »
1 Lettre de Schouvalov du 29 octobre 1762 : « […] vous prenez trop de part à ce qui me regarde pour que je ne vous avertisse que j'ai pris le parti de faire un voyage . Vos sages conseils ont beaucoup contribué à ma résolution . Jugez de ma satisfaction lorsque je me représente d’avance de vous voir […] . Je dois vous dire, monsieur, que depuis l'époque fatale pour moi [il était le favori de l'impératrice Elisabeth, décédée le 5 janvier 1762], je ne suis plus le même, je cherche vainement un bonheur, dont mon cœur ne connait plus ni le choix ni l'effet . Vous me servirez d'oracle . »
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