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06/10/2017

Il me manque deux choses, monsieur, pour répondre avec exactitude

... C'est une phrase que je recommande à tout étudiant de mettre en tête de toute copie, à condition de bien trouver les "deux choses" qui donneront un peu d'intérêt et de valeur à une absence de réponse, et éviteront le 0 ( la bulle) fatidique .  L'humour et le savoir ne sont pas incompatibles, mais il ne faut pas se tromper d'emploi, c'est ma seconde et dernière recommandation aux usagers de l'impasse . Le correcteur peut diablement manquer du premier , ou alors en user lui aussi , et noter : "Fatal error 414, Game over, Try again !"

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« A Alexis-Jean Le Bret

24 novembre 1762 au château de Ferney près de Genève

Il me manque deux choses, monsieur, pour répondre avec exactitude, de la santé et du loisir , sans cela vous auriez plus souvent de mes nouvelles . Il est impossible que les Cramer puissent commencer à imprimer votre dictionnaire de Bayle avant un an etc. etc. 1»

Je m’amuse à peindre les sottises des hommes, et je vais jusqu’à l’année présente . La matière est abondante

... Einstein dira même que c'est la seule chose qui est réellement infinie .

  http://www.leglobelecteur.fr/wordpress/wp-content/uploads/2013/02/lucien_jerphagnon_la_sottise_m.jpg

http://www.leglobelecteur.fr/piste-4-la-sottise-89

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin

22 novembre [1762] à Ferney 1

Bénies soient vos excellences, qui aiment notre tripot, et qui l’aiment au point de vouloir bien payer un port exorbitant pour une pièce médiocre 2! Le titre en est beau, je l’avoue ; mais je tiens avec vous, monsieur l’ambassadeur, qu’il vaut mieux être possesseur de madame de Chauvelin que d’avoir le droit des prémices de toutes les filles de village.

Quand vous serez bien las de cette comédie, ne pourriez-vous pas l’envoyer à M. d’Argental, sous l’enveloppe de M. le duc de Praslin ? Il pourra, en qualité d’amateur du tripot, se donner l’amusement de la faire jouer, pour divertir les Anglais qui sont à Paris.

Vous êtes un vrai ministre. Vous avez vite envoyé à M. d’Argental certain quatrième acte tragique sans m’en rien dire ; mais je m’en suis bien douté, et je vous jure que je vous ai pardonné ce tour de tout mon cœur. Je sens bien qu’il serait bon [que]3 ce quatrième acte fût aussi plein de fracas que les autres . Je veux laisser reposer quelque temps la pièce et moi. Les choses ont souvent besoin d’être quittées pour être senties. Vous avez un goût infini . Je suis aussi charmé de vos judicieuses réflexions que de vos bontés. Si j’avais autant de génie que vous avez de lumières, je vous assure qu’on verrait beau jeu. Mais avouez que le rôle d’Olympie ferait un effet merveilleux dans la bouche de madame l’ambassadrice, à Ferney. Vous m’avez promis de revenir à la paix ; la voilà faite. Quand ferons-nous venir les violons pour l’orchestre ? passerez-vous votre vie à Turin ? Vos amis de Paris n’auront point de repos s’ils ne vous revoient. La société de ce pays-là a besoin de vous ; vous en faites le charme, et il faut surtout que vous aidiez au bon goût à se maintenir . On dit qu’il va un peu en décadence. Vous me réchaufferez en passant. Je crois que je suis à présent le seul vieillard qui fasse des tragédies et qui plante. Je vous donne rendez-vous au printemps, moi, mes arbres, et mon théâtre. S’il me vient quelques idées bien tragiques cet hiver, je vous consulterai sur-le-champ ; mais à présent c’est le quartier de l’histoire. Je m’amuse à peindre les sottises des hommes, et je vais jusqu’à l’année présente . La matière est abondante. Adieu, monsieur ; conservez-moi des bontés qui font la consolation de ma vieillesse, de ma retraite, et de mes travaux. Je me mets aux pieds de madame l’ambassadrice.

V. »

1 L'éditeur a hésité entre 1762 et 1763 .

2 Le Droit du seigneur .

3 V* a oublié que qui s'impose ici .

05/10/2017

trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ?

... Heu ! comment dire ? franchement : NON !

Ce serait même plutôt le contraire, le commerce de l'armement est florissant, le Rafale français et toutes les munitions et armes de tous pays sont encore de bon rapport pour les balances commerciales ; on n'est pas près de forger des charrues avec . Il va falloir se faire encore à cette idée de manger des fruits amers , et pire encore s'en trouver bien, par défaut .

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Message reçu !

 

« A Ami Camp, Banquier

à Lyon

Ferney 21è novembre 1762

Mon cher correspondant, trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ? Vous me feriez plaisir de me dire si on compte en effet sur la cession de la Floride et si vous en avez quelques nouvelles positives ?

Je ne peux vous dire encore si j'aurai recours à vos bontés pour mon métier d'agriculteur . Je vous prierai seulement de vouloir bien me dire à votre loisir ce que coûte le quintal de bon frumental .

Je vous supplierai de défalquer sur les 120 louis de chaque mois les fournitures dont vous me permettez que Mme Denis et moi nous vous importunons afin que les 180 000 livres restent intactes .

C'est toujours en supposant que M. de Laleu paie avec la régularité qu'il a promise . Je suppose que vous touchez exactement ces 120 livres par mois, et que cela n'a rien de commun avec les 44 740 livres que vous m'avez fait toucher . Si ces objets étaient mêlés ensemble je vous prierais de m'en vouloir bien fournir une note . Mais il me semble qu'ils sont absolument séparés . Ainsi mes comptes en deviendront plus faciles en défalquant de mois en mois ce que vous pourriez avoir payé sur les 120 louis . Je tâcherai d'user avec discrétion de la bonté que vous avez de permettre que nous recourions à vous dans nos petites nécessités . Mme Denis et moi nous vous renouvelons notre tendre attachement, et Mlle Corneille en dit autant à son docteur .

V. »

n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ?

... Si, bien sûr ! la liste remonte à l'antiquité et n'a pas de fin .

Sinon ce serait trop beau d'avoir des ministres attentifs à tous les problèmes et trouvant des solutions adéquates .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

21 novembre [1762]

O mes anges ! n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ? n’avez-vous jamais vu un avocat plaider trois ou quatre causes sans s’en mettre en peine, et les juges prononcer sans les entendre ? Vous croyez donc qu’il en est de même de votre créature des Alpes ? Il me faut à la fois faire imprimer, revoir, corriger une Histoire générale, une Histoire de Pierre-le-Grand ou le cruel, et Corneille avec ses commentaires, et passer de cet abîme à une tragédie. Le tripot, le tripot doit l’emporter, j’en conviens ; mais, encore une fois, je n’ai qu’une âme logée dans un chétif corps usé, sec, et souffrant. J’avais mis votre Olympie en séquestre, afin de la revoir avec un œil sain et frais. Il était nécessaire de laisser tomber les grosses taies que l’enthousiasme étend sur les prunelles d’un auteur, dans la première ivresse d’une composition rapide. Je vous donnerai votre Olympie pour votre carême ; c’est un temps tout à fait sacerdotal, et digne d’une pièce dont l’action se passe dans un couvent. L’Opéra-Comique célébrera gaiement, au commencement de l’hiver, les plaisirs de la paix, et Paris aura mon grave hiérophante pour sa quadragésime. Ne trouvez-vous pas cet arrangement tout à fait convenable ? Puisque je suis à présent enfoncé dans l’historique, permettez-moi de vous demander simplement le secret de l’État, qui est le secret de la comédie. Les Espagnols cèdent-ils bien réellement la Floride ?1 la chose m’intéresse. Une famille suisse, qui m’est très recommandée, veut aller s’établir dans ce pays-là, et ne veut point vendre son petit fonds helvétique sans être sûre de son fait. Ne négligez pas, je vous en prie, ma question . Elle peut être hasardée, mais elle est charitable, et vous êtes anges du temporel comme du spirituel.

Avez-vous à Paris M. de La Marche ? c’est encore un point dont je vous supplie de m’instruire.

Le philosophe épouseur 2 arrivera donc. Nous requinquerons Cornélie-Chiffon, nous la parerons. Elle prétend qu’elle pourra savoir un peu d’orthographe : c’est déjà quelque chose pour un philosophe. Enfin nous ferons comme nous pourrons . Ces aventures-là s’arrangent toujours d’elles-mêmes . Il y a une providence pour les filles.

J’avais bien deviné que M. de Chauvelin m’avait trahi. Vous vous entendez comme larrons en foire. Il a sans doute beaucoup d’esprit et de goût. Plus vous en avez, mes chers anges, plus vous sentez combien une tragédie est une œuvre difficile, surtout quand le goût du public est usé.

Je voudrais bien que M. le duc de Bethfort 3 vît Tancrède, et qu’il souscrivît pour mademoiselle Corneille.

Zulime est de mediocribus.4

Mille tendres respects. »

1 Par le traité, la Grande-Bretagne restituait La Havane et Manille, et obtenait en échange la Floride et diverses autres compensations ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Paris_(1763)

et : http://mjp.univ-perp.fr/traites/1763paris.htm

3 Ministre plénipotentiaire anglais , le duc de Bedford .

4 Médiocre .

04/10/2017

régler ses comptes avec son père

... Marine, qu'attends-tu ?

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Même seule tu seras mal accompagnée .

 

« A Joseph-Marie Balleidier, Procureur

d'office de Ferney

à Gex

J'ai fait ce ma monsieur Balleidier demande . J'espère aussi qu'il fera ce que je lui demande depuis longtemps, qui est d'arranger l’affaire de la dame Burdet, et de régler ses comptes avec son père . Je lui serai très obligé .

Voltaire . 

Ferney 17è novembre 1762.1»

1 Balleidier a endossé la date et noté « Reçue le 21 dud[it] ».

Si je me marie, et si j'ai un fils, je vous promets de l'élever sur les principes de l'auteur à qui je vous prie de faire mes très sincères compliments .

... C'est fort bien M. Fanfoué Hollande, j'en dirai deux mots à Julie, ça la fera bien rire , si comme moi elle a l'esprit un peu à l'humour et qu'elle considère que l' "auteur" cité n'est autre que le père de ce fils espéré . Autosatisfaction qui est une seconde nature chez cet ex-président .

 Résultat de recherche d'images pour "hollande et julie mariage"

Hoax ! un de plus .

 

 

« A Gabriel Cramer

Il se trouve caro qu'il y aura plus d'une demi-feuille pour compléter l’Histoire générale . On pourrait même finir au moment présent de la signature des préliminaires ; cette histoire étant plutôt celle des mœurs que celle des faits .

Renvoyez-moi s'il vous plait la deuxième feuille czarienne, il faut que je la revoie .

J'ai lu L’Éducation physique 1. Si je me marie, et si j'ai un fils, je vous promets de l'élever sur les principes de l'auteur à qui je vous prie de faire mes très sincères compliments .

V.

16 novembre [1762] 2»

1 Jacques Ballexserd, Dissertation sur l'éducation physique des enfants, 1762 . On retrouvera peut-être des souvenirs de cet ouvrage dans L'Homme aux quarante écus . Voir : https://books.google.fr/books?id=Ots04VEFMowC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false

et : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F19723.php

2 Le manuscrit est relié dans un exemplaire de l'Essai sur l'Histoire générale, 1756 .

03/10/2017

l'espérance d'être récompensé s'il rend gloire à la vérité et s'il écoute la nature, ne pourront-ils rien sur lui ?

... Ceci est un petit message adressé en particulier à Mr Donald Trump !

[ NDLR - James est  : 1° un parfait exemple d'optimiste qui croit encore qu'un président nord-américain, capitaliste à outrance, borné et menteur est capable de s'améliorer , 2° un outrecuidant qui croit que Mr Donald le lit .]

 

 

« A Philippe Debrus

[vers le 15 novembre 1762]

Ce malheureux Louis Calas 1 fait soulever le cœur . Mais le biais de lui faire écrire par un des avocats de sa mère et l'espérance d'être récompensé s'il rend gloire à la vérité et s'il écoute la nature, ne pourront-ils rien sur lui ?

Le voyage de M. de Lassalle 2 à Paris me comble d’espérance et de joie . J'ai été tenté cent fois de lui écrire . Je lui écrirai dès qu'il sera à Paris . Je veux qu'il soit en liaison avec M. d'Argental, cela est important .

Qu'on nous envoie vite la pauvre servante . On trouvera bien quelqu’un à Genève qui entendra son jargon 3. On la fera déposer juridiquement à Gex 4, et on pourra tirer un très grand parti de cette bonne créature .

Toute cette abominable affaire m'intéresse tous les jours de plus en plus . J'embrasse de tout mon cœur monsieur Debrus .

V. »

1 Louis est l'aîné des fils Calas qui s'était converti au catholicisme . V* qui ne l'aimait pas venait peut-être de recevoir son Mémoire justificatif, 1762 ; le même avait publié précédemment une Déclaration , datée « A Toulouse, ce 2 décembre 1761. » Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Calas

et : http://www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/proces-historiques-10411/laffaire-calas-22774.html

2 Joseph-Mathieu de Lassalle est le seul membre du parlement de Toulouse qui eût publiquement soutenu Calas ; les Observations pour le sieur Jean Calas, la dame de Cabibel, son épouse, et le sieur Pierre Calas, leur fils, 1762 , signées « Duroux, fils » (voir page 72 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10406841.r=&rk=429186;4 ) sont en réalité de lui .

3 Le dialecte languedocien .Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Occitan

4 à Gex ajouté par V* entre les lignes .