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15/09/2016

venir dîner avec ses amis

... A ce moment, je ne pense pas qu'on doive ajouter plus d'un couvert pour accueillir le candidat Sarkozy .

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Belle brochette de faire-valoir .

 

 

 

« A Jacob Vernes

[septembre-octobre 1761]1

Monsieur Vernes devrait bien venir dîner avec ses amis ; il est prié de renvoyer le petit cahier de M. de La Persillière qui doit lui être très inutile, puisqu'il ne contient que des choses que monsieur Vernes sait mieux que M. de La Persillière . »

1 La date proposée s'appuie sur la mention de La Persillière dans la lettre de septembre à Vernes : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/08/25/interim-vale-deum-adora-superstitionem-fuge-amicos-ama-et-vi-5839852.html

 

Il est bien cruel que nous ne nous soyons pas entendus

... Dira Fanfoué, au soir de son éviction (prévisible) des primaires, à Emmanuel Macron . Bon , il faut que j'arrête mon délire avant eux, ne serait-ce que pour leur donner le bon exemple (NDLR : bel exemple de modestie blogger  James ! ) .

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« A Gabriel Cramer

[septembre-octobre 1761]

Le public se soucie bien de l'enlèvement de Clarice 1! On veut Le Cid, les Horaces, Cinna, Pompée, Rodogune .

J'ai toujours dit et toujours écrit que je commencerais par ces pièces . J'ai travaillé en conséquence . Il est bien cruel que nous ne nous soyons pas entendus avec M. Gravelot pour qui j'ai une estime singulière . Je ne peux prendre à présent . »

 

14/09/2016

Ceci, monsieur, n'est pas académique, c’est chicane, mais le tout pourra vous amuser

...

 

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Le ton du thon de tonton tinte faux .

 

 

« A Germain-Gilles-Richard de Ruffey

A Ferney par Genève 30 septembre [1761]

Ceci, monsieur, n'est pas académique, c’est chicane, mais le tout pourra vous amuser . Je prends pour arbitres monsieur le premier président, monsieur le procureur général et M. Le Bault . Le fétiche en veut-il faire autant .

Je consens à lui rendre Tournay et à lui donner Ferney si dans toute la province de Bourgogne il se trouve un seul homme qui approuve son procédé .

Je vous quitte pour Corneille . Quand vous voudrez venir nous voir avec madame de Ruffey nous vous donnerons la comédie .

Je vous embrasse très tendrement et sans compliment.

V.

 

FAIT

Quand M. le président De Brosses vendit la terre de Tournay à vie, à François de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, âgé alors de soixante et six ans 1, l'acquéreur qui ne connaissait point cette terre s'en remit entièrement à la probité et à la noblesse des sentiments de M. le président De Brosses . M. le président avait fait ci-devant un bail de trois mille livres par année de cette même terre avec le sieur Chouet, fils du premier syndic de Genève, qui était son fermier . Mais le sieur Chouet y avait perdu de notoriété publique vingt-deux mille francs, et la terre ne rapporte pas douze cents livres dans les meilleurs années . Monsieur le président exigea de l'acquéreur à vie âgé de 66 ans trente cinq mille six cents livres , argent comptant, et douze mille francs en réparations à faire au château et à la terre en trois années de temps ; l'acquéreur fit en trois mois pour dix-huit mille livres de réparations dont il a les quittances .

Il y a dans cette petite terre de Tournay un bois que monsieur le président lui donna pour un bois de cent arpents 2 dans l'estimation de la terre . Les ingénieurs qui sont venus mesurer, par ordre du roi, toutes les terres de France, ont trouvé que ce bois mesuré géométriquement, ne contient pas quarante arpents , et l’acquéreur a entre les mains le plan des ingénieurs du roi .

Non seulement l'acquéreur essuya ces pertes considérables, qui ruinent sa fortune, mais monsieur le président lui persuada, avant de lui faire signer le contrat, qu'il avait vendu en dernier lieu à un négociant de Genève, une partie de sa forêt qui était abattue, et qu'il ne pouvait rompre ce marché . Il fut stipulé dans la contrat passé au mois de novembre 1758, que M. de Voltaire aurait la jouissance entière de la terre de Tournay, et des bois qui sont sur pied, et non vendus . L’acquéreur ne pouvant pas douter sur la parole de monsieur le président qu'il y eût une vente véritable, signa le contrat de sa ruine .

Ayant bientôt vu à quel excès il était lésé dans son marché, il s'en plaignit modestement à monsieur le président, et lui demanda par ses lettres pourquoi il avait vendu ces bois qui devaient appartenir à l'acquéreur ; monsieur le président lui répondit par sa lettre du 12 janvier 1759 : Il est vrai qu'on a mis un certain nombre de chênes au niveau des herbes, pour certaines rasons à moi connues ; mais à quoi la faim de l'or ne contraint-elle pas les poitrines mortelles ?

L'acquéreur fut bien surpris quelque temps après, quand toute la province lui appris que monsieur le président n'avait point du tout vendu ces bois . Il les faisait vendre, exploiter en détail, pour son compte, par un paysan du village de Chambésy, nommé Charles Baudy, lequel Charles Baudy son commissionnaire, compta avec lui de clerc à maître . Il est triste d'être obligé de dire que l'acquéreur manquant de bois de chauffage, lorsqu'il acheta la terre de Tournay, eut en présence de toute sa famille, parole de monsieur le président qu'il lui serait loisible de prendre douze moules de ces bois prétendus vendus, pour se chauffer . Il en prit quatre, ou cinq, tout au plus .

Enfin au bout de trois années, monsieur le président lui intente un procès au bailliage de Gex sous le nom de Charles Baudy son commissionnaire, pour paiement de deux cent quatre-ving[t] et une livres de bois ; et voici comme il s'y prend .

Il assigne Charles Baudy son commissionnaire qu'il fait passer pour son marchand, et il dit dans cette assignation du 2 juin que Charles Baudy lui retient 281 livres de bois, parce qu'il a fourni à M. de Voltaire pour 281 livres de bois, et Charles Baudy au bas de cet exploit assigne François de Voltaire .

Le défendeur ne veut pour preuve de l'injustice qu'il essuie que l'exploit même de monsieur le président . Il est clair par l’assignation donnée par lui à Charles Baudy, que ce Charles Baudy compte avec lui de clerc à maître, comme toute la province le sait . Monsieur le président dit dans son exploit que Charles Baudy et lui firent un marché ensemble en l'année 1756. est-ce ainsi qu'on s'explique sur un marché véritable ? n'exprime-t-on pas la date et le prix du marché ?

Ladite assignation porte en général une certaine quantité d'arbres . Ne devait-on pas spécifier cette quantité ? ladite assignation porte que ces bois furent marqués . Mais s'ils avaient été marqués juridiquement , n'en saurait-on pas le nombre ? N'est-ce pas un garde-marteau qui devrait avoir marqué ces bois ? Peut-on les avoir marqués sans la permission du grand maître des Eaux et Forêts ? On ne produit ni permission, ni marque de bois, ni acte passé avec ledit Baudy .

Il est donc clair comme le jour que monsieur le président n'a point fait de vente réelle, que par conséquent tous lesdits bois injustement distraits du forestal 3, sous prétexte d'une vente simulée, appartiennent légitimement à l'acquéreur de la terre . Baudy en a vendu pour 4800 livres .

Partant, François de Voltaire est bien fondé à demander la restitution de la valeur de quatre mille huit cents livres de bois .

Plus l'indemnisation des dommages causés par l'enlèvement de ces bois , au mois de mai 1759, contre les ordonnances, comme il est même spécifié dans l’exploit de monsieur le président qui porte que Baudy exploita et tira ces bois de la forêt jusqu'au mois de mai 1759 .

le défendeur se réservant ses autres droits sur la lésion de plus de moitié qu’il a essuyée quand monsieur le président lui a vendu quarante arpents pour cent arpents . »

1 En fait soixante quatre ans en 1758 .

3 Mot ancien , donné par Godefroy, variante de forestel, diminutif de forêt ; il existe encore comme nom propre .

 

13/09/2016

Il ne faut se refuser aucune des petites consolations qui peuvent rendre la vie plus douce à notre âge

... Lu et approuvé !image

 

 

 

« A Marie-Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg

Au château de Ferney par Genève 30è septembre 1761

Vous écrivez de votre main , madame, et je ne puis en faire autant . Comment n'avez-vous pas un petit secrétaire, pas plus gros que rien, qui vous amuserait, et qui me donnerait souvent de vos nouvelles ? Il ne faut se refuser aucune des petites consolations qui peuvent rendre la vie plus douce à notre âge .

Vous ne me mandez point si vous aviez votre amie 1 avec vous . Elle aura dû être bien effrayée du sacrement dont vous me parlez . Je vous crois de la pâte du cardinal de Fleury et de celle de Fontenelle . Nous avons à Genève une femme de cent trois ans 2, qui est de la meilleure compagnie du monde , et le conseil de toute sa famille . Voilà de jolis exemples à suivre . Je vous y exhorte avec le plus grand empressement .

Je vous remercie de tout mon cœur, madame, du portrait de Mme de Pompadour, que vous voulez bien m'envoyer . Je lui ai les plus grandes obligations depuis quelque temps ; elle a fait des choses charmantes pour Mlle Corneille .

Je ne suis point actuellement aux Délices . Figurez-vous que M. le duc de Villars occupe cette petite maison avec tout son train . Je la lui ai prêtée pour être plus à portée du docteur Tronchin, qui donne une santé vigoureuse à tout le monde, excepté à moi .

M. le duc de Bouillon ne vous écrit-il pas quelquefois ? Il a fait des vers pour moi, mais je le lui ai bien rendu 3.

Recevrez-vous des nouvelles de M. le prince de Bauffremont ? Je voudrais bien le rencontrer quelquefois chez vous . Il me paraît d'une singularité beaucoup plus aimable que celle de monsieur son père . Mais, madame, avec une détestable santé, et plus d'affaires qu'un commis de ministre , il faut que je renonce pour deux ans , au moins, à vous faire ma cour et si je ne vous vois pas dans trois ans, ce sera dans quatre ; je ne veux pour rien au monde renoncer à cette espérance .

J'ai actuellement chez moi le plus grand chimiste de France, qui sans doute me rajeunira , c'est M. le comte de Lauraguais 4; c'est un jeune homme qui a tous les talents et toutes les singularités possibles, avec plus d'esprit et de connaissances qu'aucun homme de sa sorte . Adieu, madame, plus je vois de gens aimables, plus je vous regrette . Mille tendres respects .

V. »

1 Mme de Brumath .

2 Mme Lullin .

4 Il faut se souvenir que Louis-Félicité, duc de Brancas, comte de Lauraguais avait débarrassé la scène des petits-maîtres qui l’encombraient .

 

 

12/09/2016

pour vous amuser pendant les vendanges, souffrez que je vous prenne pour arbitrer conjointement avec monsieur le premier président et monsieur le procureur général

... Je ne veux que votre bien, évidemment, Nicolas Sarkozy, -vous qui affectez de ne pas boire de vin,- souffrez que vous ayez votre mot à dire au tribunal (la vérité pour une fois, ça nous changerait ) , péroreur lassant, cheval de retour même pas bon pour faire des raviolis . Présumé non coupable selon la formule consacrée, mais bon à mettre au rebut : soit vous saviez pour les dépenses excessives de votre campagne, et vous êtes un foutu salopard menteur, soit vous ne saviez rien, et vous êtes un profiteur de première grandeur , un gaspilleur irresponsable indigne des suffrages de ceux qui vous payent  .

Hier soir, ayant choisi de regarder Les Incorruptibles (sans doute, inconsciemment, pour contrebalancer les informations qui précèdent) quelle ne fut pas ma surprise mêlée d'un rire salutaire, de voir Robert de Niro-Al Capone faire une déclaration grand-guignolesque dans le style de Nico le racoleur : le ton , les gestes, les tics tout y était , à se demander si ce n'était pas notre ex-président qui avait servi de modèle à l'acteur . 

 Autre petit exemple (je n'ai pas trouvé celui dont je parle ci-dessus ) : https://www.youtube.com/watch?v=dgoDvnebHRw

 

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 "Je suis à un doigt d'être le meilleur acteur " : Nicolas dixit .

 

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault

A Ferney par Genève 30 septembre 1761 1

Monsieur, pour vous amuser pendant les vendanges, souffrez que je vous prenne pour arbitrer conjointement avec monsieur le premier président 2 et monsieur le procureur général 3. Le procédé de M. le président De Brosses vous surprendra peut-être, mais il ne surprend ici personne . J'en suis fâché pour lui plus que pour moi .

J'ai l'honneur d'être avec bien du respect

monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

1 Selon l'édition Correspondance inédite, 1836, la lettre était accompagnée d'un mémorandum qu'on trouvera après la lettre du même jour à de Ruffey .

2 Le jeune Fyot de La Marche Jean-Philippe .

 

11/09/2016

Je prends une plus grande liberté . Je me soumets à votre arbitrage

... L'arbitrage du peuple . Si j'en crois les derniers chiffres de sondages, plus de 60% d'électeurs se disent prêts à participer aux élections des primaires ! Ha !  la belle affaire !

Français vous êtes vraiment inconséquents . Voter pour des primaires , vous le pouvez et puis pfutt ! plus personne pour la suite, comme si vous aviez achevé les travaux d'Hercule simplement  avec vos petits doigts sur vos IPhones (bouffeurs de temps et de cervelles, qui engraissent des multinationales).  

Petit rappel :

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En savoir plus , et pourquoi pas : https://www.youtube.com/watch?v=u6PfBfDIUEI

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« A Jean-Philippe Fyot de La Marche

A Ferney, par Genève, 28 septembre 1761

Monsieur, je crois rendre ce que je dois à votre probité et en même temps montrer mon respect pour vous et pour le parlement en vous instruisant du procès et du procédé de M. le président De Brosses 1. Je ne sais quel fétiche le possède 2. Mais j'ose vous supplier, monsieur, de lire ma réponse à l'assignation qu'il m'a donnée . Je prends une plus grande liberté . Je me soumets à votre arbitrage . Monsieur votre père, qui m'a fait l'honneur de passer quelques jours dans ma cabane, est instruit de toute cette affaire . Elle est exactement telle que le mémoire ci-joint la présente . Je n'ai altéré aucune circonstance . Jugez s'il est convenable à un homme qui a l'honneur d'être de votre respectable corps de s'exposer à de telles vérités . Sa conduite me fait autant de peine pour lui que pour moi-même et je demande votre pitié pour lui et pour moi . Il est dur de plaider contre lui et il est triste qu'il plaide . Il ne doit qu'apaiser les différends et non en avoir . Celui-ci est d'une nature bien étrange ; je crois lui rendre un très grand service en prenant la liberté de m'adresser à vous . Et s'il veut s'en remettre à votre jugement, je m'y soumets comme je le dois .

Je suis avec beaucoup de respect,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire . »

1 Le procès de V* avec De Brosses au sujet du paiement du bois qu'il s'était fait livrer le premier avait été déféré le 24 septembre devant le bailliage de Gex . Voir : https://archive.org/stream/laquerelleduprs01cunigoog/laquerelleduprs01cunigoog_djvu.txt

2 De Brosses avait écrit un ouvrage sur les « dieux fétiches » ; voir lettre du 12 décembre 1759 à De Brosses : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/12/21/et-parcus-victus-cum-deficiente-crumena-et-une-vie-frugale-e-5517378.html

 

10/09/2016

il faut que je rie, pour me distraire du chagrin que me donnent les sottises de ma patrie.

... J'ai choisi la phrase la moins pessimiste de cette lettre, où j'avais le choix de constats et craintes désagréables .

Rions .

Réjouissons-nous .

Admirons les humains qui donnent le meilleur d'eux-mêmes à Rio et partout dans le monde , diminués dans leur corps mais exemplaires par leur volonté et leurs talents, je n'ai pas de mots pour exprimer mon admiration pour ceux qui sont sur tous les écrans et pour tous ceux qui au quotidien surmontent leurs handicaps .

 Oublions un moment les sottises, il en viendra bien encore assez, nos politiciens et syndicalistes en sont grands pourvoyeurs à petit mental, grandes gueules .

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

28 septembre 1761 1

O mes anges ,

Tout ce que j’ai prédit est arrivé. Au premier coup de fusil qui fut tiré, je dis : En voilà pour sept ans. Quand le petit Bussy alla à Londres (1)2, j’osai écrire à M. le duc de Choiseul qu’on se moquait du monde, et que toutes ces idées de paix ne serviraient qu’à amuser le peuple. J’ai prédit la perte de Pondichéry, et enfin j’ai prédit que le Droit du Seigneur de M. Picardet réussirait 3. Mes divins anges, c’est parce que je ne suis plus dans mon pays que je suis prophète. Je vous prédis encore que tout ira de travers, et nous serons dans la décadence encore quelques années, et décadence en tout genre ; et j’en suis bien fâché.

On m’envoie des Gouju (2)4 ; je vous en fais part.

Je crois avec vous qu’il y a des moines fanatiques, et même des théologiens imbéciles ; mais je maintiens que, dans le nombre prodigieux des théologiens fripons, il  n’y en a jamais eu un seul qui  ait demandé pardon à Dieu en mourant 5, à commencer par le pape Jean XII, et à finir par le jésuite Letellier et consorts. Il me paraît que Gouju écrit contre les théologiens fripons qui se confirment dans le crime en disant : la religion chrétienne est fausse ; donc il n’y a point de Dieu. Gouju rendrait service au genre humain, s’il confondait les coquins qui font ce mauvais raisonnement. Mais vraiment oui, Dieu, qui savez punir, qu’Atide me haïsse 6, est une assez jolie prière à Jésus-Christ ; mais je ne me souviens plus des vers qui précèdent ; je les chercherai quand je retournerai aux Délices.

J'étais désespéré, je jurais quand Mlle Clairon disait :

On croit qu'à Solamir mon cœur se sacrifie 7.

Eh pauvre femme, il s'agit bien ici de ton cœur, il s'agit de n'être pas pendue ! pourquoi parles-tu de Solamir ? personne n'a dû t'en parler . Si tu crois que tu vas être pendue pour lui, pourquoi dis-tu au quatrième acte en parlant de ton cher Tancrède :

Que veut-il, quelle offense excite son courroux,

De qui dans l'univers peut-il être jaloux ?8

Enfin il y a mille raisons qui doivent faire réprouver ce détestable vers qui commence par ces mots comiques on croit . Qu'on ait la bonté de me faire apercevoir de mes défauts , je remercie à genoux, mais qu'on gâte ma pièce par des vers qui me donnent la fièvre ! je vous avoue que j'en mourrais de chagrin . Au nom du bon goût et de mes vives douleurs empêchez que Mlle Clairon ne dise ce vers que j'ai en horreur .

Je lui ai envoyé une de mes notes sur Corneille, qui regarde sa profession, elle est certainement plus convenable et plus utile que la ridicule consultation du pauvre Huerne .

Je travaille sur Pierre, je commente, je suis lourd. C’est une terrible entreprise de commenter trente-deux pièces, dont vingt-deux ne sont pas supportables, et ne méritent pas d’être lues.

Les estampes étaient commencées. Les Cramer les veulent. Je ne me mêlerai que de commenter, et d’avoir raison si je peux. Dieu me garde seulement de permettre qu’ils donnent une annonce avant qu’on puisse imprimer . Je veux qu’on ne promette rien au public, et qu’on lui donne beaucoup à la fois. Mes anges, j’ai le cœur serré du triste état où je vois la France ; je ne ferai jamais de tragédie si plate que notre situation .

Je me console comme je peux. Qu’importe un Picardet ? ou Rigardet ? il faut que je rie, pour me distraire du chagrin que me donnent les sottises de ma patrie. Je vous aime, mes divins anges ; et c’est là ma plus chère consolation. Je baise le bout de vos ailes.

V. 

N.B.  – Qu’importe que M. le duc de Choiseul ait la marine ou la politique ! Mellin de Saint-Gelais, auteur du Droit du Seigneur, ne peut-il pas dédier sa pièce à qui il veut ? »

1L'édition de Kehl et suivantes supprime tout le passage : J'étais désespéré ….. Huerne . Le P.S. est écrit dans la marge du bas .

2 Le 23 mai 1761 ; sur la mission de Bussy voir lettre du 1er juin 1761 à Chennevières, où V* ne dit d'ailleurs pas exactement ce qu'il prétend avoir prévu ; voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/05/01/j-ai-ete-accable-de-mille-petites-affaires-qui-font-mourir-e-5795742.html

3 La pièce n'a pas encore été représentée .

5 Première référence conservée de V* au curé Meslier depuis 1735 .

6 Zulime, variante, Ac. III, 5 .

7 Tancrède, II, 7 ; le passage contenant ce vers a été remplacé par un autre .

8 Tancrède, IV, 5 .