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26/02/2017

La nouvelle est qu'on vous prévient

... Fanfoué Hollande reconnait "le travail important des agriculteurs" . Qui donc l'a prévenu qu'il y a urgence à ne pas laisser sombrer cette filière nourricière ? Sait-il que des paysans crèvent , ruinés , paradoxalement sur des terres qui valent une fortune et qui sont finalement la proie des banques et de margoulins immobiliers ?

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Cette main là vous nourrit monsieur le président, ne l'oubliez pas, ni vous, ni ceux qui vous succèdent

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 15 mars 1762]

Louis Wagnière, et Guillaume Corbot ont fini leur Cassandre ; quand mon cher Gabriel la voudra déclamer devant gens idoines à l'entendre, on l'enverra sur-le-champ, à condition que mon cher Gabriel la rende immédiatement après la séance .

Interim il sera convenable que j'entretienne mon cher Gabriel à fond sur Pierre, et que les deux frères redoublent de zèle . »

 

 

 

« A Gabriel Cramer

[mars 1762] 1

La nouvelle est qu'on vous prévient . Ainsi mon cher ami hâtons-nous . Quels livres 2 vous faut-il ? Presto presto, e mui atrevido 3. »

1 Daté selon l'hypothèse quasi sûre qu'il s'agit de La Pucelle .

2 V* a d'abord écrit chants, ce qui est significatif concernant La Pucelle .

3Espagnol ; vite, vite, et avec beaucoup d'audace . Suivant les Mémoires secrets, La Pucelle était à Paris le 15 avril 1762 .

 

25/02/2017

mais aussi pourquoi êtes-vous condamnés à demeurer dans votre vilaine ville de Paris ?

... Oui, pourquoi ? qu'avez-vous fait au bon Dieu pour mériter une telle peine ?

N'avez-vous pas entendu Donald le-Malfaisant-à-Houpette-pisseuse et sa vision de notre capitale ?

Que ne fuyez-vous une ville si dangereuse pour vous et tous les touristes ! Seuls Georges Clooney et son épouse seraient des Américains assez aveugles pour trouver du charme à notre capitale , ne pas être de l'avis de leur Grand Timonier [titre pompeux de Mao] ? Le jour où l'on fera un bêtisier Trump, on aura une idée de l'infini .

 

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Paris selon Trump

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ArgentaI

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'ArgentaI

[vers le 15 mars 1762] 1

Ô mes anges daignez recevoir pour vos œufs de Pâques ce Droit du seigneur que je crois dans son cadre . Je vous demande en grâce qu'ils soit joué tel qu'il est . J'ai malgré toute ma modestie la sincérité insolente de vous dire que je le crois très bon . Tâchez de penser comme moi, car depuis l'effet que cette pièce a fait sur mes Suisses et sur mes Savoyards, j'aurai bien mauvaise opinion de vos pauvres Français s'ils ne rient pas, et s'ils ne son pas touchés . Je veux qu'une comédie soit intéressante, mais je la tiens un monstre si elle ne fait pas rire .

Je ne mets pas encore Olympie à vos pieds, j’attends que nous l'ayons jouée, et que je puisse vous rendre compte du jugement de nos Allobroges, et de la manière admirable dont nous disposons notre vestibule, notre temple, nos autels et notre bûcher . Ce bûcher servira à jeter la pièce au feu si elle n'est pas reçue avec transport par nos montagnards . Vous êtes bien à plaindre de ne pas voir nos fêtes, mais aussi pourquoi êtes-vous condamnés à demeurer dans votre vilaine ville de Paris ?

Au lieu d'Olympie je vous supplie d'agréer le présent mémoire . Pouvez-vous mes divins anges, avoir la bonté de le faire recommander par M. le comte de Choiseul ? Le frère du capitaine 2 qui veut tirer du canon contre les Hanovriens et Prussiens, est connu de M. le comte de Choiseul, et reçoit quelquefois des ordres de lui pour nos limites .

On ne demande qu'un mot . Ce mot est juste . L'officier qui a la rage de servir est très bon . Enfin je vous demande instamment cette grâce .

Je ne sais plus que penser de mon Shouvalow . On n'a rien fait pour lui . Il voulait voyager et il reste à sa cour . Je suis encore très incertain sur le traité des Borusses 3 avec les Russes . Qui vous eût dit, quand nous étions petits, qu'un jour ces Scythes tiendraient la balance de l’Europe ? Pauvres petits Français, ce n'est pas vous encore qui la tenez . Il faut espérer que nous ne serons pas toujours dans la boue , mais jusqu’ici nous jouons un triste rôle malgré le prodigieux succès de la farce italienne .

Divins anges continuez vos bontés à la marmotte des Alpes .

V. »

1 Malgré la mention de d'Argental « 10 avril 1762 » la lettre est datée d'après la représentation d’Olympie à Ferney le 24 mars et d'après la lettre du 4 avril 1762 par laquelle V* remercie les « anges » pour l'intervention de Choiseul en faveur de « notre artilleur» : voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-annee-1762-partie-11-122935273.html

2 Il pourrait avoir été l'un des membres de la famille Gallatin ; voir lettre de Choiseul du 11 avril 1762 où celui-ci parle de « votre jeune Gallatin ».

3 Les Prussiens .

 

Il me faut les suffrages de ma nation pour mériter le vôtre

... Mise sous une forme interrogative, cette affirmation correspondrait tout à fait à une demande de parrainage pour un candidat aux présidentielles, raisonnant par l'absurde ( évidence : l'absurde étant monnaie courante pour la majorité des candidats ) : " Faut-il que j'obtienne les suffrages de ma nation pour obtenir le vôtre ?"

 

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« A Ivan Ivanovitch Schouvalov

Au château de Ferney 15 mars ns. 1762 1

Monsieur, Je reçois la lettre dont vous m'honorez en date du 14/25 janvier . J'avais eu l'honneur d'écrire à Votre Excellence par la voie de M. le comte de Caunits qui eut la bonté de se charger de mon paquet . Je vous écrivis trois lettres 2 dès que je sus la triste nouvelle qui m'a fait verser des larmes . Je crois que des trois lettres vous en avez reçu deux . La troisième qui accompagnait un gros paquet a eu un sort funeste . Le maître de poste de Nuremberg à qui il était adressé m'a mandé que le courrier qui le portait a été assassiné par des inconnus qui ont pris l'argent dont il était chargé, un paquet destiné pour Vienne, et un autre pour la Suède . J'en rends compte à M. le comte de Caunits qui sans doute en est déjà informé .

Je vois monsieur par votre lettre que vous prenez un parti bien digne d'un philosophe, vous voulez vous berner à cultiver les lettres . Vous serez l'Anacharsis 3 moderne . Mais puisque vous avez une intention si sage et si noble , pourquoi ne feriez-vous pas comme Anacharsis ? pourquoi ne voyageriez-vous point ? Je parle un peu pour mon intérêt . Je me trouverais peut-être sur votre route , j'aurais le bonheur de vous voir et d'entretenir celui dont les lettres m'ont fait tant de plaisir . Il serait difficile qu'en passant d'Allemagne en France ou en Italie, vous ne vous trouvassiez pas à portée de mes ermitages . Je vous en ferais les honneurs de mon mieux et ce serait le cœur qui les ferait . Je suis trop vieux pour venir vous trouver . Vous êtes jeune et si votre santé est un peu altérée, ce voyage dans des climats plus doux que le vôtre la raffermirait . Je vois avec douleur que si la nature donne à vos compatriotes une constitution robuste elle leur accorde rarement une longue vie ; voyez à quel âge meurent tous vos souverains . Aucun n'atteint une heureuse vieillesse . Je souhaite que l'empereur régnant et dont vous faites un si bel éloge ait ce nombre de jours que je souhaitais à l'impératrice que je pleure 4. Il mérite de vivre longtemps, lui et son auguste épouse, puisqu'ils ne vivent que pour le bonheur des hommes .

Sans doute, monsieur, il vous attachent l'un et l'autre à Petersbourg ; et d'ailleurs je sens bien que vous ne voulez pas quitter une patrie qui vous aime, et que vous illustrez .

Si vous êtes toujours, monsieur, dans le dessein d'achever le monument auquel vous avez bien voulu que je travaillasse , je vous prierai de faire adresser les gros paquets à M. de Czernichev à Vienne qui les remettra à notre ambassadeur M. le comte du Châtelet 5. Il aura la bonté de me les faire parvenir 6 par le courrier qui passe par Strasbourg . J'en préviens M. le comte de Czernischew . Je suis obligé de prendre ces précautions .

Je suis charmé que vous daigniez monsieur accepter le témoignage public que je veux vous donner de ma très respectueuse et très tendre estime . Si le petit ouvrage dont il est question est reçu favorablement du public, je vous le présenterai avec plus de confiance . Il me faut les suffrages de ma nation pour mériter le vôtre . Votre Excellence sait combien je lui suis dévoué pour jamais .

Votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire .

J'ajoute que depuis trois mois Votre Excellence doit avoir reçu quatre paquets pour l'Histoire et huit lettres 7. »

1 A partir de la formule, la fin , omise dans l'édition de Kehl manque dans les éditions suivantes ; le post-scriptum est écrit dans la marge du bas de la quatrième page .

2 Aucune de ces trois lettres ne nous est parvenue .

4 De fait, Pierre III fut détrôné le 9 juillet et assassiné le 18 juillet 1762 .

6 Depuis par le courrier..., la phrase biffée sur la copie Beaumarchais manque dans les éditions .

 

24/02/2017

Je ne vous ai point remercié mon cher ami de toutes vos attentions

... Aussi , je tiens à vous remercier publiquement pour cette nouvelle attention envers les automobilistes, - caste des taillables et corvéables à merci,- et envers les chomeurs et les Uberisés qui vont avoir un nouveau job (égal à celui des conducteurs de moto-crottes) : chauffeur de voiture radar-tirelire . Il va devenir difficile de conduire, un oeil sur le tachymètre (NDLR - James se la pète un peu avec des termes techniques ) et l'autre sur le rétroviseur, avantage à ceux qui ont un strabisme divergent . Nous sommes sur le chemin des polices privées pour nantis, prochaine étape du désistement public . A suivre .

 

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« A François de Chennevières

De Ferney du 14 mars [1762] 1

Je ne vous ai point remercié mon cher ami de toutes vos attentions ; nous avons été occupés à jouer la comédie . Il a fallu faire le théâtre, la pièce et les acteurs . J'en excepte Mme Denis que la nature a fait une excellente actrice . Mlle Corneille l'est devenue . Je ne m'étais pas attendu qu'elle développerait un talent si marqué . Elle dit des vers, comme son oncle les faisait . Nous avons un théâtre digne d'elle, mieux entendu, mieux orné, plus éclairé que celui de Paris ; et ce qui est fort extraordinaire, nous avons un auditoire composé de très bons juges . Il y a beaucoup d'esprit dans l'enceinte de nos montagnes, et point de cabales ; on ne vient à notre spectacle que pour avoir du plaisir ; que ne pouvons-nous jouir de celui de vous y avoir . Je vous embrasse, etc. »

1 Pour l'année, voir la référence à Mlle Corneille dans la lettre du même jour à Thibouville : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2017/02/24/les-anges-ni-vous-ni-moi-ne-connaissaient-la-piece-il-y-a-qu-5914624.html

 

 

 

 

Les anges ni vous ni moi ne connaissaient la pièce il y a quinze jours . Je ne réponds de rien . Si elle ne fait pas d'effet telle qu'elle est à présent, elle n'en fera jamais

... Se disent Hamon et aussi  Macron suite à leurs alliances qui confirment qu'ils sont réellement pour le mariage pour tous, y compris celui de la carpe et du lapin . La chasse aux voix est ouverte .

Fillon ne trouve pas d'alliés spontanés, juste des soutiens par défaut . La Marine, magnifique exemple de courage et d'honnêteté fuit la justice mieux que le plus effronté dealer ; qui peut encore voter pour "ça" ?

 

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Au moins un couple de héros , qui (r)assure

 

 

« A Henri Lambert d'Herbigny, marquis de Thibouville

Ferney 14 mars [1762]

Mon cher Catilina vous êtes trop bon et moi trop vif . Cela est honteux à mon âge . De quoi me suis-je avisé d'envoyer une esquisse où les couleurs et les attitudes manquaient entièrement ? Mais je voulais consulter, je voulais voir si de cette esquisse on pouvait faire un tableau . L'ouvrage enfin est prêt d'être terminé . Le rôle d'Olympie est sans contredit le plus beau, et son amour nous paraît si touchant que nous craignons que Statira ne révolte, et qu'on ne la regarde comme une mauvaise religieuse, comme une dévote implacable qui meurt de rage de ce que sa fille aime un très bon mari, très repentant de ses fautes de jeunesse . Nous répétons la pièce, nous la jouons incessamment sur le théâtre le mieux décoré, le mieux éclairé, avec les plus beaux habits, les plus jolies prêtresses, la plus grande illusion . La pompe, la décence, la magnificence, rien ne nous manquera qu'une bonne tragédie . Les anges ni vous ni moi ne connaissaient la pièce il y a quinze jours . Je ne réponds de rien . Si elle ne fait pas d'effet telle qu'elle est à présent, elle n'en fera jamais . On a bien de l'esprit dans notre voisinage et on a l'esprit de se laisser aller à l'impression que les choses doivent faire . Si on n'est pas ému, je tiens la pièce perdue sans ressource, et je la condamne au portefeuille . Voilà mon cher marquis à quel point nous en sommes 1.

Je ne vois pas pourquoi je ne donnerais pas le profit à des acteurs choisis, puisque M. Picardin de l'académie de Dijon a donné le revenant bon du Droit du seigneur à Thieriot . Il me semble que les deux cas sont absolument semblables . Mais c'est à mes amis de me conduire dans tous les cas . Mme Denis vous fait les plus tendres compliments . Elle joue Statira supérieurement . Nous avons une assez bonne Olympie, un bon Cassandre, un bon hiérophante, un bon Antigone . Mlle Corneille dit des vers comme son oncle les faisait , mais par une singularité malheureuse, elle n'aime guère les vers de Pierre . Elle dit qu'elle n'entend point le raisonner 2, et qu'elle ne peut jouer que le sentiment . Elle est née actrice comique, tragique ; c'est un naturel étonnant . Dieu nous la devait . Elle a joué Colette dans le Droit du seigneur à faire mourir de rire . Je suis trop heureux sur mes vieux jours, mais il me manque le bonheur de vous revoir . »

1 Adapté de Cinna, I, 3 : « Voilà, belle Émilie, à quel point nous en sommes. » : http://units.georgetown.edu/french/opsis/SEME/textes/cinna1.htm#I,3

2 Le premier exemple que donne Littré de cet emploi est de Voltaire, mais un peu plus tardif : 1764 . Voir Alexis François : Histoire de la langue française, IV, p. 1303.

 

Nous espérons que ce prince nous donnera la paix, et que la Russie deviendra la bienfaitrice de l'Europe

... Raté ! au moins pour l'instant ... On est plutôt enclins à jouer Casse Noisettes à guichet fermé dans nos ambassades, et le temps est à la neige : https://www.youtube.com/watch?v=anIkwFNHVvc

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Un des rares bienfaits de nos voisins orientaux ...

 

 

« A François-Pierre Pictet

A Ferney 12 mars 1762 1

Mon cher géant je suis très édifié que vous vouliez bien vous ressouvenir de moi au milieu de vos belles neiges, et que le voisinage du cercle polaire n'ait pas refroidi votre amitié . Vos compatriotes célèbrent comme vous les louanges de votre nouvel empereur : la plus grande louange qu'on puisse donner à un souverain tout puissant est celle d'être aimé d'un peuple libre . Nous espérons que ce prince nous donnera la paix, et que la Russie deviendra la bienfaitrice de l'Europe . En attendant nous en goûtons les fruits par avance dans notre petit château de Ferney . Nous y jouons des pièces nouvelles sur un assez joli théâtre ; nous donnons le bal à vos dames et nous vous regrettons au milieu de nos plaisirs . J'ai dit aux Cramer que leur liste devait s’honorer du nom de Strogonof pour trois exemplaires . À l’égard de M. le chambellan Ivan de Shouvalof je lui ai écrit trois lettres, et il y en avait une toute entière à votre honneur et gloire . Il ne m'a fait réponse ni sur vous, ni sur le second volume de Pierre le Grand qu'il avait tant à cœur ni sur les compliments que je lui ai faits . Vous voyez que je ne suis pas vain, et que je conviens très naïvement du peu de cas qu'on fait des seigneurs de Ferney à la cour de Russie . Si vous voyez M. de Shouvalou je vous prie de lui dire que je n'ai point de rancune . Toute la troupe du château vous embrasse de tout son cœur . »

1 La Revue de littérature comparée, Paris avril-juin 1931, donne pour destinataire « le comte Strogonof » . Pictet avait écrit une longue lettre à V* le 2 mars 1762 : voir page 12 : http://www.archivesfamillepictet.ch/bibliographie/documents/VoltaireetRousseau.pdf

 

23/02/2017

Je crois rendre par ces notes un très grand service au christianisme que les impies attaquent de tous côtés

... Ce qui est dit est dit !

 

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Laïcité , c'est bien vu !

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

9 mars 1762 1

À mes frères en Belzébuth

Mes frères, vous avez le diable au corps . Un peintre fait en six jours l’esquisse d'un tableau, et avant d'y mettre les couleurs et d'en arrêter toute l’ordonnance, il le fait voir à des amateurs . Comment peuvent-ils s'étonner que le tableau n'ait pas été achevé ? comment peuvent-ils critiquer des couleurs qui ne sont pas encore sur la toile ? Comment mes frères ont-ils pu imaginer que la pièce était faite ? Est-ce parce que ce léger croquis a été dessiné en vers au lieu de l'être en prose?mais ne savez-vous pas que je fais toujours toutes mes esquisses en vers, parce que la prose me glace ? N'en parlons plus, et attendez . Mais songez , comme dit Rabelais, qu'il y a des choses profondes sous cette écorce 2. On a voulu mettre au théâtre la religion des prétendus païens, faire voir dans des notes que notre sainte religion a tout pris de l'ancienne, jusqu'à la confession et à la communion à laquelle nous avons seulement ajouté avec le temps la transsubstantiation, qui est le dernier effort de l'esprit . Je crois rendre par ces notes un très grand service au christianisme que les impies attaquent de tous côtés . Ainsi, mes frères, priez Dieu que la pièce réussisse pour l'édification publique .

On joua samedi dernier Le Droit du seigneur sur un théâtre un peu mieux entendu et mieux décoré que celui de la Comédie-française . Tous les gens qui se piquent d'avoir de l'esprit depuis Dijon jusqu'à Turin vinrent à cette fête . La pièce fut très bien jouée . Nous avions un excellent Mathurin . Mlle Corneille était Colette elle-même . C'était la nature pure . Je doute que Mlle Dangeville ait plus de talent ; elle ne peut avoir que plus d'art .

Tout ce qu'on a ridiculement retranché à la police de Paris a été rétabli à la nôtre . Aussi n'a-t-on jamais tant ri ; et Acanthe de son côté n'a jamais tant intéressé . Le bailli conduisait la noce sur le théâtre . Six femmes jolies, habillées en bergères, six jeunes gens très galants, précédés de violons, se présentaient avec les acteurs devant Monseigneur . C'était un tableau de Teniers 3.

Nous jouons dans six jours Cassandre, qui commence a être colorié . Nous verrons l'effet qu'il fera avant que nous terminions l'ouvrage . La nature est la même partout . Ce qui aura touché les bons esprits de ce pays-ci, et il y en a beaucoup, touchera sans doute à Paris . Ce qui aura déplu, aura dû déplaire et sera réformé . On ne peut pas prendre un parti plus sûr . Jouez une pièce en société, vous n'avez que des flatteurs ; jouez-la devant quatre cents personnes, vous avez des critiques ; et quatre cents personnes assemblées sont comme quatre mille . Les juges de ce pays-ci valent bien ceux de Paris .

N.B. – Frère Thieriot me dit qu'il m'envoie le discours de l'avocat général La Chalotais, et au lieu de ce discours intéressant il m'envoie des chiffons hebdomadaires . Je le prie de ne plus se tromper à ce point 4.

Valete, fratres : estote fortes contra fanaticos 5. »

1 L'édition de Kehl et suivantes changent la date en 8 mars .

2 Réminiscence du prologue de Gargantua : « vous devez être sage, pour sentir, appréhender et estimer ces beaux livres au contenu de grande tenue, léger et hardi au premier abord, puis par l’apprentissage curieux et les méditations fréquentes, rompre l’os et sucer la substantifique moelle. » : http://www.ferrarilycee.com/pages/ballades-litteraires-sur-les-grands-textes/denouement-don-juan-moliere/rabelais-gargantua-prologue-translate-en-francais-moderne.html

4 Allusion au Compte rendu des constitutions des jésuites les 1, 3, 4 et 5 décembre 1761 (au parlement de Bretagne}, 1762, in-12. , de La Chalotais .

Et voir : https://books.openedition.org/pur/110552?lang=fr

et : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57191626/texteBrut

5 Portez-vous bien frères ; soyez forts contre les fanatiques .