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25/07/2015

J'ai jugé que vous souffrez comme moi des outrages faits à la littérature et à la philosophie, en plein théâtre et en pleine académie

... Sachez-le, en cette deuxième session de confinement face au Covid-19 (je déteste le nom de LA Covid 19; pourquoi a-t-on pris ce féminin pour désigner cette maladie qui tue ? je garde le masculin ! ) en ce mois de novembre 2020, les librairies sont fermées car ne faisant pas partie des commerces indispensables . Seule bouffée d'oxygène, la possibilité de commander par le Net , le Clic and Collect . C'est peu pour tous ces libraires, à nous de faire en sorte qu'ils aient la préférence plutot qu'Amazon and Co .

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 25/7/2015

 

 

« A Charles Pinot Duclos 1

[25 juillet 1760]

Je dois vous dire, monsieur, combien je suis touché des sentiments que vous m'avez témoignés dans votre lettre .

J'ai jugé que vous souffrez comme moi des outrages faits à la littérature et à la philosophie, en plein théâtre et en pleine académie . Je crois que la plus noble vengeance qu'on pût prendre de ces ennemis des mœurs et de la raison serait d'admettre dans l'Académie M. Diderot . Peut-être la chose n'est-elle pas aussi difficile qu'il le parait au premier coup d’œil . Je suis persuadé que si vous en parliez à Mme de Pompadour, elle se ferait honneur de protéger un homme de mérite persécuté . Il pourrait désarmer les dévots dans ses visites et encourager les sages . Je m'intéresse à l’Académie comme si j'avais l'honneur d'assister à toutes ses séances . Il me parait que nous avons besoin d'un homme tel que M. Diderot et que dans sa situation il a besoin d'être membre de notre compagnie . Le pis-aller serait au moins d'avoir plusieurs voix pour lui, et d'être comme désigné pour la première place vacante ; cette démarche serait honorable pour les lettres, elle ferait voir que l'Académie ne juge point d'après de vaines satires et de fausses allégations ; enfin , vous pouvez prendre avec M. Diderot et vos amis les mesures qui vous paraitront convenables . Si vous approuvez mon ouverture, et si on a besoin d'une voix, je ferai volontiers le voyage, après quoi je retournerai à ma charrue et à mes moutons .

Je vous supplie de me dire ce que vous en pensez, et de compter sur l'estime sincère et l'inviolable attachement de votre etc . »

1 Cette lettre est certainement celle qui est jointe à la lettre du même jour à d'Argental .

Mon Dieu ! Qu'on a été bête !

...Mis en ligne le 28/01/2022 pour le 25/7/2015 .

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental 1

A Ferney 25 juillet 1760

Mon cher ange saura d'abord que toute ma joie est finie . Nous sommes plus battus dans l'Inde qu'à Minden . Je tremble que Ponticheri ne soit flambé . Il y a trois ans que je crie Ponticheri, Ponticheri ! Ah quelle sottise de se brouiller avec les Anglais pour un ut et Annapolis 2 sans avoir cent vaisseaux ! Mon Dieu ! Qu'on a été bête ! Mais est-il vrai qu'on a un peu pendu vingt jésuites à Lisbonne ? C'est quelque chose, mais cela ne rend point Ponticheri !

Pour me consoler il faut que je vous parle d'un petit garçon de douze ans . Il s'appelle Bussi 3. Il est fils d'une comédienne, il a de grands yeux noirs, joue joliment Clistorel 4, chante, a une jolie voix, est fait à peindre, est doux, poli , et bien élevé, et réduit je crois à l'aumône . Corbi n'a-t-il pas l'Opéra-Comique ? Corbi n'est-il pas votre protégé , ne pourrai-je pas lui envoyer ce petit garçon , il ferait une bonne emplette . Daignerez-vous lui en parler ?

Est-il vrai que vous vous êtes opposé à la réception de la petite Durancy 5 ; pourquoi ? Il me semble qu'on en peut faire une très jolie laideron de soubrette ?

Puisque je vous parle d'acteurs, je veux bien vous parler de pièce . Jouera-t-on l’Écossaise , ne sera-ce point un crime de mettre Frélon sur le théâtre après qu'il a été permis d'y jouer Diderot par son nom ?

Je ne sais plus que devenir . Je suis entre Socrate, L’Écossaise, Médime, Tancrède, et Le Droit du Seigneur . Vous avez réglé l'ordre du service . Tous les plats sont prêts . Mais non ne peut mettre en vers Socrate, à cause de la multiplicité des acteurs .

Un petit mot de l'abbé de Morellet . Ne le protégez-vous pas ? Ne parlez-vous pas pour lui à M. le duc de Choiseul ? Mme la duchesse de Luxembourg ne s'est-elle pas jointe à vous ? Et Diderot ? Pourquoi ne pas faire une bonne brigue pour le mettre de l'Académie ? Quand il n'aurait pour lui que quelques voix, ce serait toujours une espérance pour la première occasion, ce serait un préliminaire . Il n'aurait qu'à prévenir le public qu'il ne veut point entrer cette fois mais faire voir seulement qu'il est digne d'entrer . Eh qui sait s'il n'entrera pas tout d'un coup , s'il ne fléchira pas les dévots dans ses visites, si Mme de Pompadour ne se fera ps un mérite de le protéger, si M. le duc de Choiseul ne se joindra pas à elle ?

Mon divin ange, jouez ce tour à la superstition, rendez ce service à la raison, mettez Diderot de l'Académie . Il n'y a que Spinoza que je pusse lui préférer .

Mille respects aux anges .

Est-il permis d'insérer dans votre paquet cette lettre pour Duclos ? »

1 Les éditions et le manuscrit olographe, à la suite de la copie Beaumarchais omettent la dernière phrase .

2 V* a déjà discuté cette formule litigieuse et sa traduction comme aussi Annapolis ; voir lettre du 21 mai 1760 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/05/23/m... ; à cette date , Pondichery n’était pas encore prise .

3 Ce personnage n'est pas exactement connu ; voir cependant Lyonnet , I, 270

4 Rôle dans Le Légataire universel, de Regnard .

5 Magdeleine Durancy ; ce passage infirme Lyonnet qui dit que V* ne la prit sous sa protection qu'en 1767 .

24/07/2015

Il aura sûrement dix ou douze voix, et ce sera un triomphe d'autant plus grand, qu'il passera pour ne les avoir pas demandées

... Attendez-vous à voir à l'automne 2020 ce gnaffron de Mélenchon demander le soutien de 150 000 signataires pour le conforter dans sa course à l'Elysée en 2022 .  Fanfaron , petit joueur dégonflé, bien évidemment il les a eues ces infimes signatures , et il peut se poser en élu du peuple et éliminer du même coup tout candidat de son parti qui désirerait être président , calife à la place du calife . Bouffon !

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 24/7/2015

 

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay 1

(Madame de La Live d'Epinay)

place Vendôme

à Paris

24è juillet 1760

Si vous n'avez point répondu, madame, sur l'honneur que je veux que M. Diderot fasse à l'Académie, vous avez tort ; si vous m'avez écrit, votre lettre est en chemin . En attendant qu'elle m'apprenne ce que je dois penser, je pense qu'il faut absolument que M. Diderot fasse ses visites quand il en sera temps ; je pense qu'alors il faut qu'il déclare dans le public qu'il ne prétend point à la place , mais qu'il veut seulement préparer la bonne volonté des académiciens pour la première occasion . Il aura sûrement dix ou douze voix, et ce sera un triomphe d'autant plus grand, qu'il passera pour ne les avoir pas demandées ; mais il pourra fort bien les avoir toutes si, en allant voir les dévots, il les persuade de sa religion . Ils croiront l'avoir converti, et ce sera lui qui triomphera d'eux ; il est très vraisemblable qu'il sera protégé par Mme de Pompadour ; en un mot, ou il entrera, ou il se préparera l'entrée ; et dans l'un et l'autre cas, il aura le public pour lui . Je souhaite, ma belle philosophe, que vous soyez de mon avis .

Je ne vous parle point de la ridicule idée qui a passé par la tête d'un seul homme que le chef de l'Encyclopédie était désigné dans Le Pauvre Diable ; cette sottise ne mérite pas qu'on y pense .

Je regarde comme un coup de partie 2 la tentative de l'Académie . Est-il possible que tous les gens qui pensent ne se tiennent pas par la main, et qu'ils soient la victime des fripons et des sots ?

Est-il vrai madame qu'on a pendu vingt-deux jésuites à Lisbonne ?3 Je n'en demande que deux à Paris avec deux jansénistes, seulement pour l'édification. »

1La dernière phrase , Je n'en demande... manque dans les éditions .

2Ce qui signifie un coup décisif .

3 Nouvelle prématurée et en réalité exagérée .

23/07/2015

j’écrirais fortement, moi chétif ; les petits réussissent quelquefois en donnant de bonnes raisons

... L'union fait la force , oui, oui, mais tout dépend du gouvernement, raisonnable ou pas .

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 23/7/2015

 

 

« A Jean le Rond d'Alembert

24 de juillet [1760]

Je vous demande pardon, mon très cher philosophe, tout grand homme que vous êtes, c'est vous qui vous trompez, c'est vous qui êtes éloigné, et c'est moi qui suis réellement sur les lieux . Il y a plus d'un an que la personne 1 dont vous me parlez daigne m'écrire assez souvent avec beaucoup de bonté et un peu de confiance ; je crois même avoir mérité l'une et l'autre par mon attachement , par ma conduite et par quelques petits services que le hasard, qui fait tout, m'a mis à portée de rendre . Je suis sûr, autant qu'on peut l'être, que cette personne pense très noblement ; la manière dont elle en a usé envers Marmontel 2 en est une preuve évidente . C'est peut-être avoir agi en trop grand seigneur que d'avoir protégé Palissot et sa pièce, sans considérer qu'en cela il faisait tort à des personnes très estimables . C'est un malheur attaché à la grandeur de regarder les affaires des particuliers comme des querelles de chiens qui se mordent dans la rue .

Il avait donné à Palissot de quoi avoir du pain, parce que Palissot est le fils de son homme d'affaires mais, ayant depuis connu l'homme, il m'a mandé ces propres mots ( que je vous supplie pourtant de tenir secrets ) : On peut donner des coups de bâton à Palissot, je le trouverai fort bon .3

Il doit donc vous être moralement démontré (supposé qu'il y ait des démonstrations morales ) que ce ministre, véritablement grand seigneur, aurait plus protégé les lettres que M. d'Argenson .

Je vous l'ai déjà dit, je vous le répète, six lignes très imprudentes de La Vision ont tout gâté . On en a parlé au roi ; il était déjà indigné contre la témérité attribuée à Marmontel, d'avoir insulté M. le duc d'Aumont . L'outrage fait à Mme la princesse de R[obecq] a augmenté son indignation, et peut lui faire regarder les gens de lettres comme des hommes sans frein, qui ne respectent aucune bienséance .

Voilà, mon cher ami, l'exacte vérité . Je doute fort que Mme la duchesse de Luxembourg demande la grâce de l'abbé Morellet, lorsque la cendre de sa fille est encore chaude ; et quand elle la demanderait, elle ne l'obtiendrait peut-être pas plus que la classe 4 du parlement de Paris n'a obtenu le rappel des exilés de la classe de Besançon . Cependant, il faut tout tenter ; et si Jean-Jacques n'a pu disposer Mme de Luxembourg à parler fortement, j’écrirais fortement, moi chétif ; les petits réussissent quelquefois en donnant de bonnes raisons ; je saurai du moins précisément ce qu'on peut espérer sur l'abbé Morellet ; c'est un devoir de tout homme de lettres de faire ce qu’il pourra pour le servir 5.

L'admission de M. Diderot à l'Académie ne me parait point du tout impossible ; mais si elle est impossible, il la faut tenter 6. Je regarde cette tentative, tout infructueuse qu'elle peut être, comme un coup essentiel . Je voudrais qu'au temps de l'élection il fît ses visites, non pas comme demandant la place précisément, mais comme espérant la première vacance, quand ses principes et sa conduite seront mieux connus . Je voudrais que dans ses visites il désarmât les dévots et ameutât les sages . Il dirait en public qu'il ne prétend rien ; il aurait au moins une douzaine de voix, ce serait un triomphe préliminaire . Il y a plus ; il se peut que Mme de Pompadour le soutienne, qu'elle s'en fasse un mérite et un honneur , qu'elle désabuse le roi sur son compte, et qu'elle se plaise à confondre une cabale qu'elle méprise .

Je suis encore assez impudent pour écrire à Mme de Pompadour, si vous le jugez à propos ; et elle est femme à me dire ce qu'elle peut et ce qu'elle veut .

C'est donc à vous, mon cher philosophe, à préparer les voies, à être le vrai protecteur de la philosophie . Mettez-vous deux ou trois académiciens ensemble, prenez la chose à cœur ; si vous ne pouvez pas obtenir la majorité des voix, obtenez-en assez pour faire voir qu'un philosophe n’est point incapable d'être de l'académie dont vous êtes . Il faudrait après cela le faire entrer dans celle des sciences .

Le cousin Vadé, le sieur Alétof, le père de la doctrine chrétienne 7, n'ont rien à se reprocher ; ils ont fait humainement tout ce qu'ils ont pu pour rendre les ennemis de la raison ridicules ; c'est à vous à rendre la raison respectable . Tâchez, je vous en conjure, d'être de mon avis sur la démarche que je vous propose ; vous la ferez avec prudence ; elle ne peut faire aucun mal, et elle fera beaucoup de bien .

Serait-il possible que cinq ou six hommes de mérite qui s'entendront, ne réussissent pas après les exemples que nous avons de douze faquins qui ont réussi ?8 Il me semble que le succès de cette affaire vous ferait un honneur infini . Adieu ; je recommande surtout la charité aux frères, et l'union la plus grande ; je vous estime comme le plus bel esprit de la France , et vous aime comme le plus aimable . »

1 On connait effectivement une douzaine de lettres de Choiseul à V* pour l'an qui précède

2 Choiseul pour dédommager Marmontel (voir lettre du 4 janvier 1760 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/05/est-ce-l-infame-amour-propre-dont-on-ne-se-defait-jamais-bie.html ) lui avait procuré une rente de 3000 francs .

3 Choiseul a écrit exactement , le 16 juin 1760 : « Je l'abandonne à la malédiction de la philosophie et des philosophes et même aux coups de bâton qu'il pourra mériter . ». Ce n’était qu'indifférence et non encouragement .

4V* souligne ce terme qui était un néologisme employé dans les textes du gouvernement pour désigner les différents parlements .

5 D'Alembert écrit le 18 juillet 1760 : « ... vous pouvez rendre un grand service à la philosophie en intercédant auprès de M. de Ch. Pour le pauvre abbé Morellet . Il y a quinze jours que Mme de Robecq est morte, il y a six semaines qu'il est à la Bastille . »

6 D'Alembert écrit encore : « j'aurais plus d'envie que vous de voir Diderot à l'académie . Je sens tout le bien qui en résulterait pour la cause commune ; mais cela est plus impossible que vous ne pouvez l'imaginer . Les personnes dont vous me parlez le serviraient peut-être, mais très mollement, et les dévots crieraient et l’emporteraient . »

8 Allusion aux douze apôtres, dans le ton du Pot-Pourri .

de la façon dont l'Europe est arrangée, quiconque voudrait être conquérant s'en trouverait très mal à la longue

...Compte tenu de la flambée d'islamisme qui arme des terroristes, je serais bien content que ça ne soit pas "à la longue", mais tout de suite que ces conquérants imbéciles se trouvent défaits . En tout cas, Voltaire a raison, c'est une tâche européenne et non pas seulement nationale, si on veut réussir .

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 23/7/2015

 

 

« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches, colonel

major des gardes etc.

À Lausanne

Aux Délices 23è juillet 1760

Si j'avais, monsieur, votre jeunesse, votre santé et vos beaux talents, j'irais souvent faire ma cour aux dames de Lausanne ; je passerais ma vie à voyager sur les bords de ce beau lac ; vous me verriez courir de mes petites retraites à Hermenches ; je volerais du théâtre de Tournay à celui de Monrepos, et celui de Monrepos aurait surtout la préférence , mais je suis vieux et malade ; la vie sédentaire m'est devenue nécessaire .

Mme Denis est d'une si horrible paresse qu'il faut borner nos voyages à une demi-lieue ; ce qui me console un peu dans le parti que j'ai pris, c'est que nous nous flattons que vous viendrez quelquefois chez monsieur votre frère dans notre voisinage ; il n'y a rien de si joli que sa maison ; nous avons l'honneur de le voir souvent, et il daigne quelquefois s'amuser avec nous sur notre petit théâtre de Tournay ; je peux encore jouer les vieillards pourvu que ce ne soit pas de ces vieillards verts, qui ont encore des passions ; nous avons ici un homme 1 qui donne des dents aux messieurs et aux dames ; mais je n'ai pas la coquetterie de prendre de sa main ce que la nature m'a ôté ; on peut fort bien sans dents jouer encore le bonhomme Orgon ou le bonhomme Cassandre .

Je crois, comme vous, monsieur , que le roi de Prusse perdra la Silésie , ses beaux hommes et son argent . Je me souviens d'avoir prédit il y trente ans dans l'Histoire de Charles XII, que de la façon dont l'Europe est arrangée, quiconque voudrait être conquérant s'en trouverait très mal à la longue . Le conseil de Cinéas à Pyrrhus était excellent, mais les conseils sont inutiles . Ce monde-ci n'est gouverné que par des passions ; je voudrais bien savoir si le landgrave de Hesse est en effet plus prisonnier qu'il ne l'était depuis quatre ans . Adieu, monsieur, le solitaire des Délices est aux pieds du seigneur du mont Jura,2 de madame d'Hermenches, et de toute votre adorable famille .

V. »

1 Lécluze, comédien devenu dentiste ; voir lettre du 1er avril 1760 à Cramer : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/04/02/il-faut-punir-les-insolents-mordieu.html

 

 

22/07/2015

J'avais deux Russes, on me les a pris . J'en retrouverai

... Poutine et Depardieu ? 

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 22/7/2015

 

 

« A Octavie Belot

22 juillet 1760

J'ai reçu une lettre du 2 juillet non datée, non signée . Je la crois de Mme de Sévigné .

Je ne suis rien de ce qu'on me dit, je ne suis qu'un laboureur, mais j'ai l’honneur d'être en relation avec Mlle Vadé, et avec un père de la doctrine chrétienne 1. J'envoie leurs vers à la personne du monde qui écrit le mieux en prose . J'avais deux Russes, on me les a pris . J'en retrouverai . Il n'y a rien qu'on ne fasse pour Mme de Sévigné à qui je souhaite autant de bonheur qu'il y a de ridicule de Montauban à Paris .

Je signe V. et Mme de Sévigné devrait signer B car on est quelquefois embarrassé à reconnaître l'écriture, et cela peut produire des méprises . »

21/07/2015

I wish you good health, long life , vous devez avoir tout le reste par vous-même

... Je ne peux mieux dire .

 

Mis en ligne le 13/11/2020 pour le 21/7/2015

 

 

« Au marquis Francesco Albergati Capacelli 1 senatore

à Bologna

Carissimo signore, ella ricevera il Shaftsbury quando piacera a domenedio . Il libro e mandato a un valente mercante di Genevra . O dio ! rendi ma la gioventu, ed jo portero tutti j miei libri inglesi al mio senatore .2

Oui la nature a raison quand elle dit que Carlo Goldoni l'a peinte . J'ai été cette fois-ci le secrétaire de la nature 3. Vraiment le grand peintre fera bien de l'honneur au petit secrétaire s'il daigne mettre son nom quelque part . Il peut me compter au rang de ses plus passionnés partisans . Je serai très honoré d’obtenir une petite place dans son catalogue .

Nous n'avons point encore ouvert notre théâtre à cause des grandes chaleurs . Nous jouerons, comme Thespis, dans le temps des vendanges .

Je lis actuellement La Figlia obbediente 4 . Elle m’enchante . Je veux la traduire, je ne jouerai pas mal Il Pantalone .

Plus j'avance en âge et plus je suis convaincu qu'il ne faut que s'amuser, et quel plus bel amusement que celui des Sophocles et des Menandres !

Je me flatte que le cygne de Padoue, l'aimable Algarotti est avec vous . Dieu vous rende heureux l'un et l'autre autant que vous méritez de l'être . On s'égorge en Allemagne, on s'ennuie à Versailles, on ne s'occupe à Londres que des fonds publics, on fait des processions à Rome 5 ; et grâce à vous monsieur on se divertit à Bologna la grassa .

Il n'y a de sages que ceux qui se réjouissent, mais se réjouir avec esprit, questo è divino . I wish you good health, long life 6, vous devez avoir tout le reste par vous-même .

Yr most humble obed sr,7

Le Suisse V.

Aux Délices 21 juillet [1760] »

1 Le manuscrit porte la mention « f[ran]co Milano »..

2 Très cher monsieur, vous recevrez le Shaftsbury quand il plaira à Dieu . L'ouvrage est confié à un franc marchand de Genève . Ô Dieu ! Rends-moi la jeunesse, et je proterai tous mes livres anglais à mon sénateur .

4 C'est une commedia buffa en prose de Goldoni .

5 Ces six derniers mots manquent dans les éditions qui ont suivi le manuscrit 2 .

6 Cela est divin . Je vous souhaite bonne santé, longue vie .

7 Votre très humble obéissant serviteur .