21/09/2011
Qui jamais approuvera un ouvrage dont on fait des applications qui condamnent notre conduite ?

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
Colmar, le 21 septembre [1754]
Je vous obéis avec douleur, mon cher ange ; l'état de ma santé me rend bien indifférent sur une pièce de théâtre, et ne me laisse sensible qu'au chagrin d'envisager que peut-être je ne vous reverrai plus . Mais je vous avoue que je serai infiniment affligé si j'étais exposé à la fois à des dégoûts à l'Opéra et à la Comédie , immédiatement après l'affliction que cette Histoire prétendue universelle m'a causée . Amusez-vous, mon cher ange, avec vos amis, de mes Tartares et de mes Chinois, qui ont au moins le mérite d'avoir l'air étranger . Ils n'ont que ce mérite là ; ils ne sont point faits pour le théâtre ; ils ne causent pas assez d'émotion . Il y a de l'amour, et cet amour, ne déchirant pas le cœur, le laisse languir . Une action vertueuse peut être approuvée, sans faire grand effet . Enfin je suis sûr que cela ne réussirait pas , que les circonstances seraient très peu favorables , et que les allusions de la malignité humaine seraient très dangereuses . Les personnes sur lesquelles on ferait ces applications injustes se garderaient bien, je l'avoue, de les prendre pour elles, de s'en fâcher, d'en parler même ; mais , dans le fond du cœur, elles seraient très piquées, et contre moi, et contre ceux qui auraient donné la pièce . Elles la feraient tomber à la cour ; c'est bien le moins qu'elles pussent faire . Qui jamais approuvera un ouvrage dont on fait des applications qui condamnent notre conduite ? Je vous demande donc en grâce que cet avorton ne soit vu que de vous et de vos amis . J'ai donné mon consentement à la représentation de ce malheureux opéra de Prométhée, comme je donne mon consentement à mon absence, qui me tient éloigné de vous . Je souffre avec douleur ce que je ne peux empêcher . On m'a fait assez sentir que je n'ai aucun droit de m'opposer aux représentations d'un ouvrage imprimé depuis longtemps, dont la musique est approuvée des connaisseurs de l'Hôtel de Ville, et pour lequel on a déjà fait de la dépense . Je sais assez qu'il faudrait une dépense royale et une musique divine pour faire réussir cet ouvrage ; il n'est pas plus propre pour le théâtre lyrique que les Chinois pour le théâtre de la Comédie . Tout ce que je peux faire, c'est d’exiger qu'on ne mette pas au moins sous mon nom les embellissements dont M. de Sireuil a honoré cette bagatelle . Je vois qu'on est toujours puni de ses anciens péchés . On me défigure une vieille Histoire générale ; on me défigure un vieil opéra . Tout ce que je peux faire à présent, c'est de tâcher de n'être pas sifflé sur tous les théâtres à la fois . Vous jugerez, mon cher ange, de la nature du consentement donné à Royer par la lettre ci-jointe . Je vous supplie de la faire passez dans les mains de Moncrif, si cela se peut sans vous gêner .
J'ai encore pris la précaution d'exiger de Lambert qu'il fasse une petite édition de cette Pandore avant qu'on ait le malheur de la jouer, car la Pandore de Royer est toute différente de la mienne, et je veux du moins que ces deux turpitudes soient bien distinctes . Je vous supplie d'encourager Lambert à cette bonne action, quand vous irez à la Comédie . Je vous remercie tendrement de Mahomet et de Rome . Vous consolez mon agonie . Mme Denis et moi, nous nous inclinons devant les anges . Adieu, mon cher et respectable ami . »
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20/09/2011
Le combat des dieux et des géants est au rang de ces grandes choses qui deviennent ridicules, et qu'une dépense royale peut sauver à peine

Cette image n'est pas sans évoquer l'actualité politique française qui voit ses combats de coqs et poules, mais aussi les affres dûs à l'euro au pays des anciens dieux et demi-dieux qui n'est plus qu'un pays de nains et humains de plus ou moins mauvaise volonté, la Grèce .
Je peux vous assurer qu'ils ne jouent pas à "je te tiens, tu me tiens par la barbichette !"
Nom de Zeus ! comment celà va-t-il finir ?
Ce jour de 1754, Volti , en ménageant les "faiseurs de double croches," est fort mal à l'aise en voyant son enfant défiguré, lui qui aime le travail bien fait .
« A Joseph-Nicolas-Pancrace Royer1
Le 20 [septembre 1754]
J'avais eu, monsieur, l'honneur de vous écrire, non seulement pour vous marquer tout l'intérêt que je prends à votre mérite et à vos succès, mais pour vous faire voir aussi quelle est ma juste crainte que ces succès si bien mérités ne soient ruinés par le poème 2 défectueux que vous avez vainement embelli . Je peux vous assurer que l'ouvrage sur lequel vous avez travaillé ne peut réussir au théâtre . Ce poème, tel qu'on l'a imprimé plus d'une fois, est peut-être moins mauvais que celui dont vous vous êtes chargé ; mais l'un et l'autre ne sont faits ni pour le théâtre ni pour la musique . Souffrez donc que je vous renouvelle mon inquiétude sur votre entreprise, mes souhaits pour votre réussite, et ma douleur de voir exposer au théâtre un poème qui en est indigne de toutes façons, malgré les beautés étrangères dont votre ami, M. de Sireuil,3 en a couvert les défauts . Je vous avais prié, monsieur, de vouloir bien me faire tenir un exemplaire du poème tel que vous l'avez mis en musique, attendu que je ne le connais pas . Je me flatte, monsieur, que vous voudrez bien vous prêter à la condescendance de M. de Moncrif,4 examinateur de l'ouvrage, en mettant à la tête un avis nécessaire, conçu en ces termes :
« Ce poème est imprimé tout différemment dans le recueil des ouvrages de l'auteur ; les usages du théâtre lyrique et les convenances de la musique ont obligé d'y faire des changements pendant son absence . »
Il serait mieux, sans doute, de ne point hasarder les représentations de ce spectacle, qui n'était propre qu'à une fête donnée par le roi, et qui exige une quantité prodigieuse de machines singulières . Il faut une musique aussi belle que la vôtre, soutenue par la voix et par les agréments d'une actrice principale, pour faire pardonner le vice du sujet et l'embarras inévitable de l’exécution . Le combat des dieux et des géants est au rang de ces grandes choses qui deviennent ridicules, et qu'une dépense royale peut sauver à peine .
Je suis persuadé que vous sentez comme moi tous ces dangers ; mais si vous pensez que l'exécution puisse les surmonter, je n'ai auprès de vous que la voie de représentation 5. Je ne peux, encore une fois, que vous confier mes craintes ; elles sont aussi fortes que la véritable estime avec laquelle j'ai l'honneur d'être, etc . »
1 Né en Savoie en 1705, Royer fut nommé parLouis XV , inspecteur général de l'Opéra en 1753, et compositeur de la chambre du roi en 1754 ; il mourut le 11 janvier 1755 .
2 Pandore ou Prométhée , que V* appelait ironiquement Le Péché originel: http://baroquelibretto.free.fr/pandore.htm
Cet opéra fut répété en octobre 1752, mais non encore joué ni publié .
3 Voir l'évolution de l'opinion de V* au sujet de Royer et Sireuil : http://operabaroque.fr/LA_BORDE_PANDORE.htm
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18/09/2011
Le mieux est de vivre pour soi, pour son plaisir, et pour ses amis ; mais tout le monde ne peut pas faire ce mieux, et chacun est dirigé par son instinct et par son destin
Ceci est le leitmotiv de Volti ; il néglige de signaler qu'il travaille sans cesse , peut-être met-il cette activité dans le "vivre pour soi, pour son plaisir" ?
Ce journal ne fait pas partie de mes lectures, mais il a le mérite d'avoir trouvé une formule évocatrice .
En cette période électorale, qui invite tous les candidats à glisser des peaux de bananes sous les pas des concurrents avec boules puantes à gogo, la lecture d'une lettre de Frédéric II de Prusse, du 12 octobre 1740 , me réjouit par ces quelques vers encore actuels :
Vos politiques hollandais
Et votre ambassadeur français
En fainéants experts critiquent et réforment,
D’un fauteuil à duvet sur nous lancent leurs traits,
Et sur le monde entier tranquillement s’endorment.
Je jure qu’ils sont trop heureux
D’être immobiles dans leur sphère ;
Ne faisant jamais rien comme eux,
On ne saurait jamais mal faire.
Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-correspondance-avec-le-roi-de-prusse---partie-34-84570605.html
Vous modifiez les deux premiers vers à votre convenance, bien entendu !
Mise en ligne pour le 12 septembre 2011 d'une lettre du 12 septembre 1754 à Mme Marie-Elisabeth de Fontaine, rédigée ce jour :
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17/09/2011
on est encore si attaché à des erreurs qui devraient être indifférentes qu'on ne pardonnera pas à qui dira la vérité
Mise en ligne ce jour d'une lettre du 8 septembre 1754 à d'Argental :
07:23 | Lien permanent | Commentaires (0)
15/09/2011
l'amitié embellit les lieux les plus sauvages
Voici un lieu des plus sauvages, où visiblement règne l'amitié la plus sincère !
"Tuez-les" ! crié sans doute dans un souci d'abréger les souffrances de ces grands dadais en short qui doivent leur piètre succès à des supporters aussi cons !
Je garde encore assez de lucidité pour me garder d'y mettre les pieds, et réserve mes yeux pour de plus belles choses .

http://x-pression.20minutes-blogs.fr/tag/stade%20de%20foot
Le titre de cette note n'est pas une citation de Volti, mais de sa chère nièce Marie-Louise qui est , en ce temps là, pile-poil en accord avec la pensée et la vie de celui-ci ; le temps de la révolte viendra, sans toutefois sacrifier l'amitié . A suivre ...
Mise en ligne ce jour, pour le 27 août 2011, d'une lettre du 27 août 1754 à Thibouville :
http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/09/15/je-vous-en-dirais-mon-avis-avant-les-representations-c-est-l.html
Un bon tango , comme je les aime : Mil miliones : http://www.deezer.com/listen-5664309
23:45 | Lien permanent | Commentaires (0)
14/09/2011
Vous m'avouerez qu'à mon âge trois fois sont bien honnêtes

Non seulement bien honnêtes, mais aussi très performantes ! trois actes, et complets, s'il vous plait ! Qu'en dites vous ?
Volti sait se montrer grivois à juste titre . Qui veut s'en plaindre ? Pas moi .
http://www.youtube.com/watch?v=61klageOn-4

Lettre du 27 août 1754 à d'Argental, rédigée ce jour pour parution le 27 août 2011 :
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13/09/2011
les trois ont de gros ventres comme les Chinois
Au moins trois !
Oui, mais elle n'est pas la seule ... en voici deux autres !

Et rassurez-vous (si tant est que cela puisse rassurer ), l'opposition n'est pas mince non plus ....
Martine, par exemple, dont le dossard pourrait facilement comporter son numéro de Sécu sur le seul coté face

Et un faux maigre qui doit beaucoup à son tailleur (his taylor is rich ! ) capable de gommer une belle bouée grâce à une coupe de veste , impeccable , habituellement fermée = trompe-couillon ! Si la cravate est en avant, ce n'est pas dû au vent . On dit familièrement "il ne se sent plus pisser" pour les imbus de leurs personnes, pour François, je pense qu'on peut ajouter "il ne se voit plus pisser !" . Laissons-le tout à sa joie ...

Après ces démagogues médiatisés à outrance, j'en reviens quand même à un opposant à l'injustice, maigre par le tour de taille, géant pour le talent, inégalable, Voltaire
Rédaction ce jour d'une lettre du 22 août 1754 à Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine pour mise en ligne du 22 août 2011 :
J'en reste songeur , mais non boudeur ...

22:57 | Lien permanent | Commentaires (0)

