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12/04/2017

Le travail, qui était ma consolation, m’est interdit

... se désole Pénélope F*** . Compatissons ô happy taxpayers ! Qu'elle se rassure , son  mari va bientôt revenir au bercail et lui apporter toute la consolation qui lui est due .

 pyramide-maslow

Quel besoin lui est nécessaire ?

 

 

« A Pierre-Robert Le Cornier de Cideville, ancien

Conseiller du Parlement de Rouen

Rue Saint-Pierre du Rempart

à Paris

et s'il n'y est pas

renvoyer à sa terre de

Launay par Rouen

Aux Délices 24è mai 1762 1

Mon cher et ancien ami, nous commençons l’un et l’autre à être dans l’âge où il faut s’occuper soigneusement de conserver les restes de sa machine. Nous avons vu mourir notre cher abbé du Resnel 2; vous avez été malade, mais vous êtes né heureusement. Vous êtes un chêne, et je suis un arbuste ; je me sens encore de la tempête que j’ai essuyée ; je parie que vous buvez du vin de Champagne quand je bois du lait, et que vous mangez des perdrix et des turbots quand je suis réduit à une aile de poularde. Vous allez chez de belles dames, vous courez de Paris à votre terre, et moi je suis confiné.

Le travail, qui était ma consolation, m’est interdit. Je ne peux plus me moquer de frère Berthier, de Pompignan, et de Fréron. Je baisse sensiblement. L’édition de Corneille ira pourtant toujours son train.

Il y avait une grande dispute pour savoir si Corneille avait pris Héraclius de Calderon. Pour terminer la dispute, j’ai traduit cette farce espagnole, qu’on appelle tragédie. Il a fallu me remettre à l’espagnol, que j’avais presque oublié : cela m’a coûté quelques peines ; mais je vous assure que j’en ai été bien payé. Il est bon de voir ce que c’était que ce Calderon tant vanté : c’est le fou le plus extravagant et le plus absurde qui se soit jamais mêlé d’écrire. Je ferai imprimer sa drôlerie à côté de L'Héraclius de Corneille, et toutes les nations de l’Europe, qui souscrivent pour cet ouvrage, pourront juger que le bon goût n’est qu’en France. Ce n’est pas qu’il n’y ait des étincelles de génie dans Calderon, mais c’est le génie des Petites-Maisons.

Au reste, je suis bien sûr que vous ne pensez pas que mon commentaire soit à la Dacier 3; je critique avec sévérité, et je loue avec transport. Je crois que l’ouvrage sera utile, parce que je ne cherche jamais que la vérité. Mademoiselle Corneille n’entendra point mon commentaire : elle récite assez joliment des vers ; nous en avons fait une actrice ; mais il se passera encore bien du temps avant qu’elle puisse lire son oncle.

Voilà son père réformé avec M. de Chamousset 4, son protecteur. Il est déjà venu chez nous, il y revient encore ; nous lui avons donné quelque petite avance sur l’édition. Il va à Paris. Qu’y deviendra-t-il quand il n’aura que son nom ?

Adieu, mon cher ami ; j’espère que ma lettre vous trouvera ou à Paris ou à Launay. Madame Denis doit vous écrire. Nous sommes deux ici à qui vous coûtez bien des regrets. Je vous embrasse tendrement.

V.

Pardon si je ne vous écris pas de ma main ; je suis d’une faiblesse extrême. »

1 Sur le manuscrit une main étrangère a remplacé l’adresse par « M. Trotel rue du Saint-sacrement à Rouen » . V* répond à une lettre de Cideville du 11 mai à Paris disant notamment : « […] la nouvelle effrayante de votre maladie me tire de mon anéantissement . On nous a dit que vous aviez été très mal d'une inflammation […] Qui désormais [disaient les gens de lettres] portera cette égide invincible et terrible aux sots et nous garantira des attentats des Frér..., et des Pompi... ? […] d'autres criaient, qui nous peut remplacer le conteur facile et badin de La Pucelle, le Molière nouveau, l'auteur de Nanine et de tant d'autres jolies comédies ? […] [Je] courais aussi les rues, en mêlant mes larmes sincères à ces frayeurs du public, quand enfin j'ai trouvé mon consolateur, M. Crommelin m'a montré une lettre de Genève datée du 3 qui nous rappelle tous à la vie en nous assurant que la vôtre est en sûreté […] Je serai encore le reste du mois à Paris […] « 

 

11/04/2017

Je suis très affligé de ce contretemps . Nous en parlerons, et nous verrons quel parti on pourra prendre

... "Détournement de fonds publics, complicité et recel d'abus de biens sociaux", excusez du peu, ma chère Pénélope, on vient de me rappeler que , contrairement à ce que j'ai déjà affirmé, je  vous ai payée dès 1982 et non pas 1986, mais où avais-je la tête ô ma bien aimée . Evidemment, comme il y a prescription, je m'en fiche comme de ma première sortie de route , je suis un rebelle, vous savez, -golden boy, mais rebelle, oui . Dès que je ne suis pas élu, on en discute ; rendez-vous au manoir fin avril .

Fanfoué Fillon

 Image associée

How shocking ! Pénélope en apprend -encore- de belles .

 

 

« A Gabriel Cramer

23è [mai 1762] 1

Quand je renvoyai [à monsieu]r Cramer la lettre qui avait été apportée avec les autres, arrivée par la poste, je ne pouvais pas deviner qu'elle fut de M. Corneille . Je suis très affligé de ce contretemps . Nous en parlerons, et nous verrons quel parti on pourra prendre .

Les banquiers de Genève, chargés de payer les souscriptions de Dannemarck, sont venus me trouver, et n'ont voulu payer qu'à moi . Je leur ai donné un billet par lequel ils pouvaient payer à messieurs Cramer, ils ont ordre de payer ce qu'on demandera . Il est au choix de messieurs Cramer de recevoir la moitié, ou le total, peut-être le total est-il plus convenable, attendu les évènements qu'on peut craindre pour le Dannemarck ; les banquiers sont M. Mussard et compagnie . »

1 La date est confirmée par une mention dans le grand-livre des Cramer et par la situation militaire en Europe du nord .

 

10/04/2017

on respecterait encore plus votre patrie quand on verrait un homme de votre mérite, orné des plus belles connaissances, et fait pour réussir dans toutes les cours

... Qui cela peut-il être à l'heure où les premiers clips de nos politiciens viennent de nous être dévoilés ?

D'entrée de jeu, Marine la poissarde : out , fille à papa, bornée de "belles connaissances" ( tels : son père -étant tout sauf beau-, Philippot, and C°  ) .

Restent dix candidats . Faits pour "réussir dans toutes les cours"? Alors, direction cours de récréation et éjection de Cheminade, Lassalle, Asselineau , Dupont-Aignan , à inviter pour discours de noces et banquets , les occasions de rire n'étant pas à négliger .

"Homme de mérite" ? Fanfoué Fillon mérite un coup de pied au cul, ça pourrait toujours l'aider à monter dans les sondages, car il a dit clairement "je vous demande de me soutenir", dont acte .

Quant au reste de la troupe, je garde une certaine sympathie pour deux CSBI [Candidats Sincères Bien Identifiés] : Nathalie Arthaud et Philippe Poutou .

Les autres non cités ici , à voir plus en détail, si possible .

Par curiosité, voir : http://candidat-2017.fr/candidats.php

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« A Ivan Ivanovitch Schouvalov

21 mai 1762 , aux Délices 1

Monsieur, j’ai reçu la lettre dont vous m’honorez du 17 mars v.st. Je suppose que toutes celles que je vous ai écrites vous sont parvenues, tant par la voie de la poste ordinaire que par celle de M. de Czernicheff .

Votre Excellence pourra me faire parvenir le paquet qu'elle a la bonté de me faire espérer, par les banquiers qui le feront tenir à des correspondants de Genève .

J’ai été à la mort depuis que je n’ai eu l’honneur de vous écrire, et j’ai perdu une partie de ma fortune par le contre-coup de nos malheurs publics ; mais j’oublie cette dernière disgrâce, et dès que j’aurai un peu réparé l’autre en reprenant un peu de santé, je me remettrai avec courage et avec plaisir à l’Histoire de Pierre-le-Grand.

J’avoue, monsieur, que je serais bien encouragé, si je pouvais en effet me flatter d’avoir l’honneur de vous voir et de vous posséder dans mes petites retraites ; il est digne de vous  d’imiter Pierre-le-Grand, en voyageant comme lui. Vous devez bien sentir que vous seriez accueilli partout comme vous devez l’être, votre voyage serait un triomphe continuel ; et on respecterait encore plus votre patrie quand on verrait un homme de votre mérite, orné des plus belles connaissances, et fait pour réussir dans toutes les cours.

J’aurais souhaité que vous eussiez pris le parti d’être ambassadeur : cela m’aurait du moins rapproché de Votre Excellence ; et, tout malade que je suis, j’aurais volé tôt ou tard pour avoir la consolation de vous voir.

Je suis mortifié de n’avoir aucune nouvelle de M. de Soltikoff 2 depuis son départ : je l’aimais véritablement, et j’avais eu pour lui toutes les attentions qu’il mérite.

Vous ne m’avez point dit, monsieur, si vous aviez reçu la lettre que je vous avais adressée par monsieur le grand-maître de l’artillerie 3. Il est triste d’avoir toujours à craindre que les paquets ne soient perdus. Je crois que le meilleur parti est d’écrire tout simplement par la poste. On doit savoir d’ailleurs que je ne vous parle point d’affaires d’État ; on ne fait point la guerre à la littérature.

Adieu, monsieur ; j’ai l’honneur d’être avec les sentiments les plus respectueux et les plus tendres,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Manuscrit original avec dernière ligne et signature autographe , celles-ci manquent dans les éditions .

La lettre à laquelle répond V* doit être celle du 19/30 mars 1762 où Shouvalov écrit notamment : « L'empereur m'ayant confié la direction du noble corps des cadets, dont il a été chef jusqu'ici, je me suis occupé sans relâche des arrangements qui peuvent avoir rapport à [ce] poste […] ; Il m'a fallu […] remplir les devoirs d'un emploi au-dessus de mon ambition et de mes forces et […] entrer dans les détails qui ne sont guère analogues à la philosophie dont je voudrais faire mon unique étude . Pardonnez [moi] donc […] de ne vous point avoir envoyé encore les remarques sur la condamnation du czarewitz. ». Il termine ainsi : « Une santé altérée, le dégoût pour tout ce qui fait le charme des esprits mondains, le désir de vous voir […] m'engageront à solliciter auprès de Sa Majesté impérial la permission de voyager, et de chercher loin du faste des cours , cette heureuse tranquillité de l'âme […] ; je sais que c'est au château de Ferney qu'elle a établi son séjour, c'est là que je l'irai trouver […] . »

2 Voir les lettres de Soltikof de février-mars 1762, et de Schouvalov du 1er/12 mai 1762 .

3 Celui-ci était mort le 16 janvier 1762 , voir lettre à d'Argental du 8 mars 1762 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2010/03/08/1.html

 

les hommes sont fous du midi au nord

... Attentats du nord au sud, de l'est à l'ouest . Que faire ? Peut-on répondre à ces meurtriers par les armes seulement, je ne crois pas, et Voltaire, à juste titre, trouverait cette solution insuffisante comme sa détestation des guerres le prouve .

Est-il encore temps, sommes-nous capables de rétablir une paix durable ? Difficile à envisager quand on connait nos capacités de fabricants d'armes : "Diable, ma bonne dame, mon bon mossieur, il faut bien qu'elles servent, des milliers d'emploi en dépendent !"

Ô sainte hypocrisie en cette semaine dite Sainte ! Il va y avoir embouteillage dans les confessionnaux ,  et comme disait mon cher Brassens "mettez genoux à terre, priez et implorez, faites  semblant de croire et bientôt vous croirez !"

 chapie hebdo

 

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

21è mai 1762 aux Délices 1

Madame, j’ai été sur le point d’aller voir si l’on fait autant de sottises dans l’autre monde que dans celui-ci. Tronchin et la nature m’ont fait différer le voyage. Voilà ce qui m’a privé de l’honneur d’écrire à Votre Altesse Sérénissime. Je la suppose actuellement entourée d’officiers français qui lui font la cour, en attendant que des Prussiens viennent se présenter à son audience ; car il me paraît que toutes les nations font ce qu’elles peuvent pour venir vous faire leur révérence, et que vous n’avez pas toujours le choix. Les Russes pourront bien venir aussi à Gotha prendre des leçons de politesse.

Sérieusement, madame, j’aime mieux le temps où j’étais si paisible dans votre palais, et où il n’y avait dans vos États d’autres troupes que les vôtres. Votre Altesse Sérénissime permettra-t-elle que je prenne la liberté de lui adresser ma réponse à madame la comtesse de Bassewitz 2? Je ne sais où la prendre, et j’ignore à quelle armée appartient actuellement son château. Dieu veuille renvoyer bientôt à la culture de la terre tant de gens qui la désolent et qui l’ensanglantent, sans savoir pourquoi ! On dit que si nous avions la paix, j’aurais le bonheur de voir à Genève les princes vos fils. Ce serait pour moi la plus grande des consolations dans la douleur où je suis de sentir que je suis privé, probablement pour jamais, de la présence de leur adorable mère. Cette paix me paraît encore bien éloignée. Le feu a pris aux deux bouts de l’Europe. On bat le tambour depuis Gibraltar jusqu’à Archangel . Cela prouve que les hommes sont fous du midi au nord. Que votre auguste famille soit tranquille au milieu de tant d’orages , que la grande maîtresse des cœurs se souvienne du pauvre malade , que Votre Altesse Sérénissime reçoive avec sa bonté ordinaire mon profond respect, etc. »

1 Le même jour, Paul.-Henri. Mallet [voir : https://books.google.fr/books?id=EvQOAAAAQAAJ&pg=PA12&lpg=PA12&dq=p+h+mallet+1762&source=bl&ots=QzLfNqeoFc&sig=U96TgHrKVRkycQaS8YdD0DnYX3k&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwi0vsOsxJjTAhUBkxQKHXRyCh0Q6AEIHDAA#v=onepage&q=p%20h%20mallet%201762&f=false

] écrit au comte Bernstorff de Genève [Voir : https://books.google.fr/books?id=Kd9rTJ__hbgC&pg=PA93... ] : « Cette ville ou plutôt son voisinage a failli de perdre tout récemment M. de Voltaire, et quoique rétabli à peu près on juge que sa dernière maladie doit naturellement hâter sa fin . Nous ne le voyons presque plus ici et l'éloignement réciproque devient toujours plus grand et , je crois, plus juste de notre part . Mais il s'est mis à l'abri de tout par les marques qu'il s'est fait donner en deux ou trois occasions de la protection de M. le duc de Choiseul, protection si déclarée [q]uelle aurait dû en imposer à un État plus puissant que nous . »

2 Cette lettre de V* à la comtesse n'est pas connue .

 

09/04/2017

Je les félicite de vivre ensemble, et surtout de vivre à la campagne dans un temps aussi malheureux, où les plaisirs sont aussi dérangés que les affaires

... Je vous laisse le soin de définir les couples intéressés, mais non intéressants, vivant "la campagne" (présidentielle, comme vous savez ) et non pas seulement "à la campagne" , complètement "dérangés" (crazy, nuts ) à cause de leurs "affaires" . Je vous mets sur la voie : deux couples de droite cherchant à décrocher le pompon, ce sont , ce sont ...  OK !

 Le Grand Débat

Le Couple légitime ...

 

 http://blog.causeur.fr/bonnetdane/files/2016/10/MLP-1.jpg

Le couple illégitime

 

 

« A Marie-Elisabeth de Dompierre de Fontaine, marquise de Florian

20 mai 1762, aux Délices

Je suis encore assez mal, mais tous mes maux sont adoucis par l’idée que M. et madame de Florian sont heureux 1. Je les félicite de vivre ensemble, et surtout de vivre à la campagne dans un temps aussi malheureux, où les plaisirs sont aussi dérangés que les affaires.

Je ne sais si M. de Florian a entendu parler de l’horrible aventure de la famille des Calas en Languedoc. Il s’agit de savoir si un père et une mère ont pendu leur fils par tendresse pour la secte de Calvin, et si un frère a aidé à pendre son frère ; ou si les juges ont fait expirer sur la roue un père innocent par amitié pour la religion romaine. L’un ou l’autre cas est digne des siècles des Malagrida, des Damiens, et des billets de confession. Heureux les philosophes qui passent leur vie loin des fous et des fanatiques !

Je suppose que M. l’abbé Mignot est dans votre beau château d’Hornoy, et qu’il partage votre bonheur. N’avez-vous pas aussi un oncle de M. de Florian ? Voilà un heureux oncle. Ceux qui sont malades, et surtout à cent cinquante lieues de vous, ne sont pas si heureux. Je sens très bien qu’un beau lac, un paysage de Claude Lorrain, un château d’une architecture charmante, un théâtre des plus jolis de l’Europe, ne font pas la félicité, et qu’il vaudrait mieux achever sa vie avec toute sa famille.

Ma chère nièce, il est triste d’être loin de vous. Lisez et relisez Jean Meslier ; c’est un bon curé. »

 

 

08/04/2017

On a trouvé vos saucissons excellents

... Ceci n'est pas un message publicitaire pour un certain Justin B*** ou une certaine Monique R***, mais un hommage à quelques charcutiers qui faisaient bien leur métier dans le beau pays de Gex, du temps que j'y étais, et je souhaite qu'il en reste encore au moins un . Le sauc's de supermarché, on les subit plus qu'on ne les choisit, un peu comme nos députés et nos présidents !

Et pour vous prouver que j'aime la poésie :

 https://www.youtube.com/watch?v=wUabz5ggpNc

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 Oui, Bernadette, j'aime ça !

 

 

« A François-Achard Joumard Tison, marquis d'Argence

par Angoulême

En son château de Dirac

20è mai 1762, aux Délices 1

Non seulement je suis paresseux, monsieur, mais il s'est joint à ce vice une maladie qui a passé quelque temps pour mortelle . Je suis encore très faible . Je ne peux avoir l'honneur de vous écrire de ma main . On a trouvé vos saucissons excellents, pour moi, j'ai été bien loin d'en pouvoir manger, mais je vous en remercie, au nom de tout ce qui est aux Délices .

Que vous êtes sage et heureux, monsieur, d'habiter dans vos terres, et de ne point voir de près tous les malheurs de la France ! Notre seule félicité consiste à chasser les jésuites, et à conserver environ quatre vingt mille autres moines qui dévorent le peu de substance qui nous reste . Il est bien ridicule d'avoir tant de moines, et si peu de matelots . Adieu, monsieur, un malade ne peut faire de longues lettres ; je regrette toujours que les Délices et Ferney soient si loin d’Angoulême, et je vous regretterai toute ma vie . Comptez que vous n'avez point de serviteur plus inviolablement attaché que V. »

1 Le même jour, George Keate écrit à Bonnet : « A l'égard de mon livre sur votre gouvernement [ voir lettre à Keate du 10 février 1762 : ] , il [ne] me servira à rien de vous en parler davantage, dès qu'on a défendu la traduction de M. de Vol[tai]r[e] à cause de certains défauts, qu'on refuse de me communiquer . […] on s'est conduit à Genève vis-à-vis de moi avec toute la finesse possible dans l'instant que je témoignai m[on] zèle et mon attachement à votre État . Je croyais jusqu'à présent que c'était dans la république de Genève que l'erreur fut corrigée, et ceux qui s'étaient égarés furent ramenés à la vérité . Comment donc ai-je péc[hé] au delà de toute grâce d'étre excommunié, et de perdre un droit que tout le monde avait ? »

 

07/04/2017

Tronchin dit toujours que je me relèverai. Je voudrais qu’on pût en dire autant de la France

... Ami Voltaire, puisses-tu être entendu, il y a urgence !

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Mes divins anges, je suis un peu retombé,1 mais Tronchin dit toujours que je me relèverai. Je voudrais qu’on pût en dire autant de la France et de la comédie ; je les crois pour le moins aussi malades que moi ; je crois Lekain furieusement occupé. Il était naturel qu’il écrivît un petit mot à madame Denis, qui ne l’a pas mal reçu ; mais les héros négligent volontiers les campagnards.

Me permettrez-vous de vous adresser cette lettre d’un Anglais 2 pour M. le comte de Choiseul ? Il demande un passeport pour s’en retourner en Angleterre par la France ; je ne sais si cela s’accorde, et si vous permettez à vos vainqueurs d’être témoins de votre misère. Au reste, le suppliant ne vous a jamais battus ; c’est un jeune homme qui aime tous les arts, et qui jouait parfaitement du violon dans notre orchestre. Je doute, malgré tout cela, qu’il lui soit permis de passer par Calais. Je serais bien fâché de demander à M. le comte de Choiseul quelque chose qui ne fût pas convenable.

Je vous supplie d’ailleurs de lui dire combien je suis touché de la bonté qu’il a eue de s’intéresser pour mon triste état.

Vous ne me répondez jamais sur l’œil de madame de Pompadour ; cependant je m’y intéresse : j’ai vu, il y a quinze ans, cet œil fort beau, et je serais fâché de sa perte. Dites-moi donc aussi quelque chose de la comédie de Henri IV 3 ; il me semble qu’elle doit tourner la tête à la nation.

Je me flatte de voir M. Pont de Veyle à La Marche au mois de juillet ; mais si ma mauvaise santé et Pierre Corneille me privent de ce plaisir, je lui conseillerai de passer par Ferney en s’en retournant par Lyon, et je lui donnerai la comédie.

Adieu, mes adorables anges. Tronchin nous quitte probablement au mois d’octobre pour M. le duc d’Orléans, et il fait fort bien ; et moi je veux prendre le prétexte un jour de l’aller consulter, afin de n’avoir pas à me reprocher de mourir sans avoir eu la consolation de vous revoir. 

V.»

1 Ce même jour, François-Gratien Micheli du Crest écrit à Bertand : « Voltaire a eu une rechute ces jours passés, et s'en tirera dit-on aussi comme de l'autre. ». Voir : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F28568.php?topdf=1

2 Probablement John Hayes ; voir de Beer-Rousseau, p. 54 .Voir aussi  : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F28568.php?topdf=1