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02/06/2016

Vos vers sont charmants mon cher ami

... Et vos citations choisies me touchent infiniment ma chère amie  Mam'zelle Wagnière .

 

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To you !

 

 

 « A François de Chennevières, Premier

Commis des bureaux de la guerre etc.

à Versailles

27 juin [1761] 1

Vos vers sont charmants mon cher ami . Vous n'en avez fait jamais de si jolis . Je ne m'occupe plus à présent que des vers des autres .

Me voici enfoncé dans ceux du grand Corneille . J'entreprends avec l'agrément de l'Académie une magnifique édition de ses pièces de théâtre avec des remarques sur la langue et sur l'art qu'il a créé . Je fais établir une souscription . Le produit sera pour M. Corneille et pour sa fille qui n'ont d'autre bien que le nom de Corneille . Le prix de chaque exemplaire orné de très belles vignettes ne sera que de 40 livres et on ne les paiera qu'en recevant le livre . Je souscris moi-même pour six exemplaires, presque tous nos académiciens en font autant . Nous nous flattons que le roi permettra que son nom soit à la tête des souscripteurs . Ne pourriez-vous me dire, vous qui êtes du pays, comment on s'y prend auprès de M. de La Vauguyon 2 pour obtenir de monseigneur le dauphin une action généreuse ? Je crois la chose très aisée, mais je suis absolument inconnu de M. le duc de La Vauguyon . Si vous connaissez quelque belle âme qui veuille pour 40 et même pour 80 livres , se mettre au rang des bienfaiteurs du sang de Corneille, et voir son nom imprimé avec celui du roi, comme lorsqu'on a vendu sa vaisselle, [nommez-]3 moi ce noble personnage .

Mille respects à la sœur du p[ot] .

1 L'édition Cayrol date de février 1761, corrigée par Georges Avenel .

3 Le manuscrit étant abimé, les mots entre crochets ont été restitués d'après la copie Boissy d'Anglas (Clarke) .

 

01/06/2016

qu'on voie leurs noms imprimés à la tête du programme, et qu'ils encouragent la nation à faire du bien

... Que tous les candidats à des élections (syndicales comprises) suivent quelques principes de base dont celui-ci :

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« A Anne-Robert-Jacques Turgot, 1 Maître

des Requêtes

En son hôtel

à Paris

Au château de Ferney par Genève

26è juin 1761 2

Il me faut tous les Turgot, monsieur, car il s'agit d’une bonne oeuvre . Il est question de montrer aux Anglais que nous savons comme eux honorer les beaux-arts, et le sang des grands hommes . M. d'Alembert vous aura dit peut-être quelle est mon entreprise . Je veux expier mes médiocrités et celles de mon siècle, en donnant une édition de Pierre Corneille avec des notes qui ne seront peut-être pas sans utilité . L'édition sera magnifique, et l'exemplaire ne coûtera que quarante livres ; elle se fait par souscription au profit des seuls descendants de Corneille qui portent son nom, et qui n'ont que ce beau nom pour héritage . Chaque académicien souscrit pour plusieurs exemplaires . Nous nous flattons que le roi, comme protecteur, sera à la tête des souscripteurs . Au reste nous sommes fiers, nous ne demandons point d'argent, on n'en donnera qu'en recevant le livre ; et on le recevra bientôt s'il se trouve beaucoup d'âmes nobles . Si Bernard, fils de Bernard, ne m'avait pas fait une horrible banqueroute, je ne serais pas dans cette peine . Donnez-nous des Turgot, monsieur, vous dis-je , et quelques-uns de leurs amis, qu'on voie leurs noms imprimés à la tête du programme, et qu'ils encouragent la nation à faire du bien .

Ayez la bonté d'envoyer votre réponse à M. Jannel qui me la fera tenir .

Mille respects.

Le Suisse V. »

2 L'édition Lettres inédites date à tort du 20 juin . Une autre main a noté sur le manuscrit : « Turgot 3/ ch[evalie]r Turgot 1 / abbé de Cacé [ ?] / abbé de Véri auditeur de Bot. à Rome / [ces deux lignes ensuite rayées sur manuscrit] Me Blondel 1 / M. Trud[aine de ] Mon[tigny] 1 / Me Dupré 1 / m[arqu]is de Cl[ermont] d'Amb[oise] 1/9. »

 

 

31/05/2016

Puisse la paix donner à l’Europe le loisir de cultiver les arts de toute espèce !

... Hier ...

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Aujourd'hui ...

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 Pourvu que ça dure !

 

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha

Au château de Ferney par Genève

26 juin 1761

Madame, mon silence doit avoir dit à votre Altesse Sérénissime que je n’étais pas en état d’écrire. J’avais presque perdu la vue, en conservant la plus forte envie de revoir Gotha et sa souveraine. J’occupe ma vieillesse, et je trompe mes maux par un travail très agréable pour lequel je demande votre protection.

L’Académie française agrée que je fasse une édition des bonnes tragédies du grand Corneille, avec des notes sur la langue et sur l’art qu’elle a créés. Cet ouvrage sera principalement utile aux étrangers. Il se fait par souscription, et l’édition sera magnifique. Le produit de cette entreprise est pour tirer de la misère les restes de la famille du grand Corneille, famille noble, et qui languit dans la pauvreté. Nous imprimons les noms des souscripteurs : je supplie Votre Altesse Sérénissime de permettre que son nom honore cette liste. Chaque académicien souscrit pour six exemplaires. Ce livre sera du moins un monument de générosité, si de ma part ce n’est pas un monument de science et de goût. Puisse la paix donner à l’Europe le loisir de cultiver les arts de toute espèce ! Ce long fléau détruit tout. Hélas ! au premier coup de canon, je dis : En voilà pour sept ans ! Puissé-je me tromper au moins d’une année !

M. Stanley 1 est à Paris ; il est assidu à nos spectacles ; il voit nos géomètres. Il ne parle point de paix : c’est apparemment par politesse qu’il ne nous parle point de nos besoins.

Je me mets à vos pieds, madame, et à ceux de toute votre auguste famille. Grande maîtresse des cœurs, recevez mes hommages, et présentez-les à la divine Dorothée.

Le Suisse V. »

1 Hans Stanley, chargé par le cabinet de Saint-James de conférer avec le cabinet de Versailles . Voir lettre du 1er juin 1761 à Chennevières : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/05/01/j-ai-ete-accable-de-mille-petites-affaires-qui-font-mourir-e-5795742.html

Voir : https://en.wikipedia.org/wiki/Hans_Stanley et : https://en.wikisource.org/wiki/Stanley,_Hans_%28DNB00%29

 

30/05/2016

il faut faire oublier toutes nos médiocrités de ce siècle, en rendant justice aux chefs-d'oeuvre

... L'oubli, le bienheureux oubli  des médiocrités est journalier, sinon comment admettre l'emballement médiatique, -the buzz on the net-, effaçant le buzz précédent tout aussi inepte, en attendant le pire si tant est que ce soit possible .

Chef d'oeuvre :

Non seulement je suis fan de Klimt, mais de plus je trouve ici un double chef-d'oeuvre, la peinture exploitant les folles cicatrices de la guerre, et le génie de Tammam Azzam :

http://www.unpaondemur.com/article9.php

Trouver des chefs-d'oeuvre en ce XXIè siècle, et les faire admirer, voilà qui est bien ardu . Du moins à mes yeux , car aux yeux des critiques professionnels on trouve une palanquée d'oeuvres ad-mi-raaaa-bleueueu, sublaïme ma chérie ! C'est sans doute que mes revenus ne dépendent pas de mon opinion, qui au demeurant, vous intéresse comme mon premier rôt .

 

Chef d'oeuvre vivant ...

... Et pour mon amie Mam'zelle Wagnière, ce lien pour une anecdote sur la Grande Catherine :

http://jeudi.lu/au-musee-de-lermitage-des-chats-tiennent-...

 

 

 

« A Claude-Philippe Fyot de La Marche

Au château de Ferney par Genève

26 juin 1761

Il faut, monsieur, que je vous serve suivant votre goût . Il faut que je prenne la liberté de vous mettre à la tête d'une bonne action qui se fera dans votre Bourgogne .

J'étais à Londres quand on apprit qu'il y avait une fille de Milton qui était dans la dernière pauvreté, et incontinent elle fut riche .

J'ai mis dans ma tête de faire voir aux Anglais que nous savons comme eux honorer les beaux-arts et le sang des grands hommes . J’ai imaginé de faire une magnifique édition des tragédies de Pierre Corneille, avec des notes qui seront peut-être utiles aux étrangers, et même aux Français . Je finirai ma carrière en élevant un monument à mon maître, et en procurant un établissement à sa petite fille . Le profit de l'édition sera pour elle et son père . Je n'ai pas beaucoup de bien libre ; mon malheureux château, et mon église me ruinent, et Dieu seul me saura gré de cette église car l'évêque allobroge ne m'en sait aucun . J'espère que la nation sera un peu plus contente de l'édition de Corneille . C'est presque le seul moyen de laisser à sa descendance une fortune digne d'elle . Toute l'Académie concourt à cette entreprise, et je me flatte que le roi sera à la tête des souscripteurs . Je souscris pour six exemplaires 1, plusieurs académiciens en font autant, d'autres suivront . L'édition sera uniquement pour ceux qui auront souscrit , on ne paiera rien d'avance . Ce sera un monument qui restera dans la famille de chaque souscripteur . Ils permettront qu'on imprime leurs noms, parce que ces noms qui seront les premiers du royaume encourageront les autres . Je demande le vôtre , et celui de monsieur votre fils . M. de Ruffey donnera le sien ; je taxe M. De Brosses à deux exemplaires, à quarante livres pièce, c'est marché donné, pour une terre qu'il m'a vendue un peu chèrement . Nos confrères les académiciens de Paris, qui ont à expier leur asservissement au cardinal de Richelieu, et leur censure du Cid 2, doivent prendre plus d'exemplaires que les autres .

Je ne demande pas que messieurs de Dijon, qui ne sont point coupables, retiennent un aussi grand nombre d'exemplaires ; il suffira d'un ou de deux pour chacun . Je voudrais que l'évêque fût du nombre, l'auteur de Polyeucte le mérite .

Je vous recommande Corneille et son sang . Je finis , car Cinna et Cornélie m'appellent ; il faut faire oublier toutes nos médiocrités de ce siècle, en rendant justice aux chefs-d'oeuvre du siècle de Louis XIV . Permettez-moi la liberté de vous embrasser, et de vous assurer de mon très tendre respect .

Voltaire . »

1 En fait V* souscrivit pour cent exemplaires .

 

29/05/2016

Nièce, et Cornélie-chiffon, et V., vous disent tout ce qu’il y a de plus tendre

... Bonne fête MAMANS !

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N'oublions pas que le petit Voltaire perdit sa maman à sept ans .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

Ferney 26 juin 1761

Je n’ai guère la force d’écrire, parce que, depuis quelque temps, j’écris jour et nuit. Mes anges sauront que je rends grâces au corsaire qui a fait imprimer Zulime. L’impression m’a fait apercevoir d’un défaut capital qui régnait dans cette pièce ; c’était l’uniformité des sentiments de l’héroïne, qui disait toujours j’aime : c’est un beau mot, mais il ne faut pas le répéter trop souvent ; il faut quelquefois dire, je hais. Je commence à être moins mécontent de cet ouvrage que je ne l’étais, et je me flatte enfin qu’il ne sera pas tout à fait indigne des bontés dont mes anges l’honorent. Il sera prêt quand ils l’ordonneront. Je n’abandonnerai pourtant ni les moissons, ni mon église, ni ma petite négociation avec le pape.

Je relis cet infâme et excommunié Corneille avec une grande attention. Je l’admire plus que jamais en voyant d’où il est parti. C’est un créateur ; il n’y a de gloire que pour ces gens-là ; nous ne sommes aujourd’hui que de petits écoliers. Je suis persuadé que mes notes au bas des pages des bonnes pièces de Corneille ne seront pas sans utilité et sans agrément ; elles pourront former une poétique complète, sans avoir l’insolence et l’ennui du ton dogmatique.

Je suis résolu à ne faire imprimer que le nombre des exemplaires pour lesquels on aura souscrit Les petites éditions seront au profit des libraires ; et s’il y a, comme je le crois, quelque amour de la véritable gloire dans la nation, la grande édition assurera quelque fortune aux héritiers du nom du grand Corneille. Je finirai ainsi ma carrière d’une manière honorable, et qui ne sera pas indigne de l’ancienne amitié dont mes anges m’honorent. Je les supplie de vouloir bien me procurer sans délai le nom de M. le duc d’Orléans par M. de Foncemagne, afin que je l’imprime dans le programme.

Je voudrais avoir celui de M. le premier président 1; il me le doit en dédommagement de la banqueroute que son beau-frère 2 m’a faite. Jamais mon entreprise ne vaudra au sang de Corneille la moitié de ce que Bernard m’a volé. Je crois avoir déjà prévenu M. le comte de Choiseul 3, l’ambassadeur, que je ne doutais pas qu’il n’honorât ma liste de son nom, et j’attends ses ordres. Je demande la même grâce à M. de Courteilles, à M. de Malesherbes , à madame sa sœur, et à tous les amis de mes anges.

Je désirerais passionnément la souscription du président de Meynières, et de quelques membres du parlement, pour expier les sottises de maître Le Dains et de maître Omer.

Je n’ai point encore écrit à M. le duc de Choiseul sur cette petite affaire. Je supplie M. le comte l’ambassadeur d’avoir la bonté de lui en parler : ils sont aussi tous deux mes anges. Je vous baise à tous le bout des ailes, et je recommande à vos bontés Cinna, Horace, Sévère, Cornélie 4, et la cousine issue de germaine de Cornélie. Si on me seconde avec quelque vivacité, cette édition ne sera qu’une affaire de six mois.

Nièce, et Cornélie-chiffon, et V., vous disent tout ce qu’il y a de plus tendre. »

3 Ambassadeur à Vienne, on n'a pas la lettre que V* lui adressa ?

4 On sait que Sévère et Cornélie sont respectivement des personnages de Polyeucte et de La Mort de Pompée ; il est significatif que V* préfère désigner la première de ces deux pièces par le nom du personnage qu'il admire plutôt que par celui de son véritable héros .

 

28/05/2016

Je veux la gloire de la France et de l'Académie

... Ce n'est pas ce que j'ai cru comprendre dans les rodomontades de l'orgueilleux et grande gueule Mélenchon qui a fait son numéro à la télé ! et dire qu'il se croit indispensable ! tout comme la détestable et destructrice CGT = Conglomérat de Grands Tarés, et consorts . Il ne leur reste plus qu'à affirmer, comme certains débiles,  qu'il nous faudrait "une bonne guerre" pour tout remettre en ordre .

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« A Pierre-Joseph Thoulier d'Olivet

[vers le 25 juin 1761]

Facundissime et carissime Olivete 1,

Lisez ce programme simple et court à l'Académie . Si on l'approuve, je l’envoie à M. le duc de Choiseul, à Mme de Pompadour . Je veux que le roi souscrive, je veux que le président Hénault fasse souscrire la reine . Je me charge des princes d’Allemagne, et du parlement d'Angleterre . Je veux la gloire de la France et de l'Académie .

Je crois que je pourrai hardiment dans un programme imprimé donner les noms de tous les académiciens que je mettrai immédiatement après les princes attendu qu'ils sont les confrères de Corneille .

Renvoyez-moi s'il-vous-plait mon programme approuvé . Nec patres conscripti concidant nec deficiant 2.

Il serait convenable que chacun signât mon programme .

M. le duc de Nivernais a déjà souscrit pour dix exemplaires ; qui sera le brave académicien qui se chargera de la souscription de ses confrères à croix d'or, à cordons bleus, etc . ?

Ciceronis amator, Cornelium tuere. 3»

1 Très éloquent et très cher Olivet .

2 Les pères conscrits ne s’effondrent ni n'abandonnent .

3 Amateur de Cicéron , protège Cornelius . Le « Corneille » est bien sûr l'édition entreprise par V* .

 

27/05/2016

Il me semble que j’ouvre une porte d’or pour sortir du labyrinthe des colifichets où la foule se promène

... Le "labyrinthe des colifichets", nous y sommes à longueur de journée, le Minotaure se régale de notre fièvre acheteuse , lui qui n'a à craindre que la fièvre aphteuse . Plus besoin de colporteurs, les écrans/vitrines sont partout . Les gogos ne sont pas une espèce en voie de disparition .

Le fil d'Ariane est bien ténu, difficile à trouver et suivre pour s'en sortir . On peut, avec encore un éclair de lucidité, garder  Voltaire comme un de ces guides utiles dont il est peu .

http://mytaratata.com/taratata/127/hugues-aufray-knock-kn...

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« A Charles-Jean-François Hénault

25 juin 1761

Mon cher et respectable confrère, je crois qu’il s’agit de l’honneur de l’Académie et de la France. Il faut fixer la langue, que vingt mille brochures corrompent ; il faut imprimer, avec des notes utiles, les grands auteurs du siècle de Louis XIV, et qu’on sache à Pétersbourg et en Ukraine en quoi Corneille est grand, et en quoi il est défectueux. Vous encouragez cette entreprise, qui ne réussira pas si vous ne permettez que je vous consulte souvent. Je pense qu’il sera honorable pour la France de relever le nom de Corneille dans ses descendants. J’étais à Londres quand on apprit qu’il y avait une fille de Milton aveugle, vieille, et pauvre ; en un quart d’heure elle fut riche. La petite-fille d’un homme très supérieur à Milton n’est, à la vérité, ni vieille, ni aveugle, elle a même de très beaux yeux, et ce ne sera pas une raison pour que les Français l’abandonnent. Il est vrai qu’elle est à présent au-dessus de la pauvreté ; mais à qui mieux qu’elle appartiendrait le produit des Œuvres de son aïeul ? Les frères Cramer sont assez généreux pour lui céder le profit de cette édition, qui ne sera faite que pour les souscripteurs.

Nous travaillons donc pour le nom de Corneille, pour l’Académie, pour la France. C’est par là que je veux finir ma carrière. Il en coûtera si peu pour faire réussir cette entreprise ; quarante francs, chaque exemplaire, sont un objet si mince pour les premiers de la nation, qu’on sera probablement empressé à voir son nom dans la liste des protecteurs de Cinna et du sang de Corneille.

Je me flatte que le roi, protecteur de l’Académie, permettra que son nom soit à la tête des souscripteurs. Je charge votre caractère aussi bienfaisant qu’aimable, de nous donner la reine. Qu’elle ne considère pas que c’est un profane qui entreprend ce travail ; qu’elle considère la nation dont elle est reine.

Qui sont les noms de vos amis que je ferai imprimer ? pour combien d’exemplaires souscriront nos académiciens de la cour ? Comptez que les Cramer ne tireront que le nombre des exemplaires souscrits, et que ce livre restera un monument de la générosité des souscripteurs, qui ne sera jamais vendu au public. Fera des petites éditions qui voudra, mais notre grande sera unique. Vous pouvez plus que personne ; et il sera digne de celui qui a si bien fait connaître la France de protéger le grand Corneille, quand il n’y a pas un seul acteur digne de jouer Cinna, et qu’il y a si peu de gens dignes de le lire . Il me semble que j’ouvre une porte d’or pour sortir du labyrinthe des colifichets où la foule se promène.

Recevez les tendres et respectueux sentiments de Voltaire .

Mille pardons à madame du Deffand, cette entreprise ne me laisse pas un moment, et j’ai des ouvrages immenses, des moutons et des procès à conduire. »