Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/12/2013

J’ai mes raisons pour renoncer au système de l'optimisme

..."Je pars du principe que tous les hommes sont des salauds et que parfois il en est qui ne le sont pas "  Je cite (aussi bien que je m'en souvienne) ce cher Kouchner, Médecin du monde , fort décrié ( à juste titre ? oui ! je crois, mais bon, la balance du bien fait par rapport à ses couillonneries mesquines reste à l'équilibre ) .

 

loptimiste-se-dit3.jpg

 

 

« A Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck

Aux Délices 9 décembre 1758

J'ai bien reçu l'honneur de votre lettre d'Auxbourg ma très gracieuse dame, comme disent les Allemands . Vous êtes une femme charmante, comme disent les Français . Les Lorrains sont enchantés de vous . Le roi Stanislas compte sur votre souvenir et le jésuite Menoux sur votre conversion . Mais vous allez tout oublier auprès de Marie-Thérèse la divine, et auprès du laborieux, du ferme, du généreux ministre qui ne veut pas absolument qu'il y ait deux Césars en Allemagne, et que le margrave de Brandenbourg soit un des deux Césars . Il y aura encore bien des faubourgs de brûlés, bien des femmes grosses écrasées, et des princesses évanouies, et des familles réduites à la mendicité, et des héros à cinq sous par jour massacrés, avant que les choses soient comme elles doivent être . Le meilleur des mondes possibles de Joseph Leibnitz , est un petit enfer, et tout paraît assez mal sur ce petit globe ou globule 1, dans lequel Pope prétend que tout est bien . J’ai mes raisons pour renoncer au système de l'optimisme, mais si vous êtes heureuse je pardonnerai un peu au diable qui se mêle des affaires de ce monde . Mme Denis la martyre de Francfort, et l'ermite des Délices, fait toujours comme moi mille vœux pour vous, et pour le héros de la maison du triangle et pour Mme la duchesse de Carinthie 2 à qui vous êtes si attachée .

Il n'y a guère dans cette Histoire générale dont vous me parlez, d'évènement plus frappant et plus singulier que ce qui se passe aujourd'hui en Europe . Si les jeunes gens que vous protégez veulent lire l'Histoire que vous protégez aussi, j'aurai l'honneur de la leur envoyer . Il ne me manque que leur adresse . Peut-être en tireront-ils quelque profit, s'ils aiment mieux la peinture des mœurs qu'un fatras de dates et de généalogies . Si Dieu prolonge encore ma vie de quelques années, je prolongerai de mon côté l'histoire des malheurs du genre humain jusqu'au moment qui finira cette horrible guerre .

J'attends paisiblement dans ma retraite suisse la conclusion de tant d'horreurs et de tant de vicissitudes . Je sens bien que ce pays que j'ai choisi n'est pas fait pour vous . J'ai beau bâtir à Ferney une maison plus agréable que Coppet, vous ne l'honorerez pas de votre présence . Il vous faut des cours et même des cours auliques . Gagnez tous vos procès, et que le héros du triangle gagne le sien . Vous connaissez les sentiments de mon cœur et quelle franchise vous m'inspirez . Je suis encore fort poli avec certaines gens, mais avec vous je ne suis que vrai, et rien n'est plus vrai assurément que je vous suis attaché pour la vie avec le plus tendre respect .

V. »

2 Respectivement Kaunitz ( voir lettre du 9 septembre 1758 à la comtesse Bentinck : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/10/22/tout-le-monde-avoue-qu-il-faut-etre-philosophe-qu-il-faut-et.html )

et Marie-Thérèse d'Autriche .

 

Je suis un peu mécontent des bouquins nouveaux; mais je me console cum veterum libris

... A la vérité je ne peux franchement être mécontent des bouquins nouveaux car je ne les lis plus . Je me souviens seulement  avoir été écoeuré du succès des 55 couleurs de gris , mais pas vraiment surpris vu le succès du porno dit "chic" ; et dire qu'il en est qui en lisent la suite .

Je me console, à la vérité, avec Voltaire et quelques revues hebdomadaires et garde sous le coude un bon nombre de livres lus, à relire (éventuellement à relier) et d'autres à découvrir ; ce sera pour les longues soirées d'hiver ( l'hiver de ma vie) .

 

nouveaux-livres.jpg

 

 

« A Nicolas-Claude THIERIOT 1.

A Ferney, 6 décembre [1758].

Ce Ferney dont je vous écris, mon ancien ami, est une terre au bord de ce lac que je ne puis abandonner; c'est le supplément des Délices. Ex nitido fit rusticus 2; mais, au milieu de vingt maçons qui me rebâtissent un château, et parmi les laboureurs à qui je donne de nouvelles charrues à semoir, je n'oublie point mon atlas 3. Je veux avoir la terre entière présente à mes yeux dans ma petite retraite; et, tandis que je me promène des Délices à Ferney et à Lausanne, je veux que mes yeux se promènent sur la Lusace et sur la Bohême, sur Louisbourg et sur Pondichéry. Di grazia 4, amusez-vous à me faire un bel atlas, bien complet, bien relié, ayez la bonté de me l'envoyer, par le carrosse de Lyon, à mon ami Tronchin, non pas Tronchin l'inoculateur, mais Tronchin le banquier, qui m'est aussi utile que l'autre. Mme de Fontaine vous payera les déboursés que vous aurez eu la bonté de faire. Vous aimez les livres et vos amis; ainsi je compte vous servir à votre goût, en vous faisant exercer votre double métier d'obliger et de bouquiner. Je suis un peu mécontent des bouquins nouveaux; mais je me console cum veterum libris 5. Dites de moi Felix nimium! sua nam bona novit 6. Quelle nouvelle sottise avez-vous dans votre pays? Interim, vale 7.

V. »

2 De petit maître, il se fit jardinier ; Horace, Épîtres I, vii, 83 .

3 Voir lettre du 18 octobre 1758 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/10/22/cartes-de-geographie-c-est-peut-etre-le-seul-art-dans-lequel.html

Celui-ci répondit le 12 novembre 1758 : « […] voici ce qui me paraît vous convenir .

I° La bohème, la Silésie, la Moravie que Covens et Mortier ont fait graver à Amsterdam […] [voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Covent_%26_Mortier ] II° une petite carte du Brandebourg en particulier par Julien [JULIEN Roche-Joseph] fort estimée . III° La Poméranie de Homann [voir :http://www.maphouse.co.uk/cartographer/family-homann/

]chez Julien . IV° La Saxe […] il n'y a point de carte qui vaille réduite en une,ou deux feuilles […] . V° Landgrawiat de Hesse par Homann chez Julien . VI° Nouvelles cartes d'Hanovre, Bremen etc . 4 petites feuilles chez Julien . VII° […] il faut avoir la carte que M. Danville vient de publier en deux grandes feuilles contenant la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et les iles britanniques [voir : http://danville.hypotheses.org/] ».

4 De grâce .

5 Avec des livres des Anciens .

6 Trop heureux homme, qui connait son bonheur ; Virgile, Georgiques II, 458 .

7 En attendant porte-toi bien .

 

21/12/2013

je vais tâcher de faire un peu de bien dans un pays où je ne vois que du mal

...Combien sont-ils à dire et faire la même chose ?

Voltaire joindra le geste à la parole, et, après cela il en est encore qui osent parler d'un Voltaire pingre ! Ignorants que vous êtes ! Il n'y a pas que des Guéant et Cahuzac and C° sur cette terre .

 vignoble.JPG

 

 

 

« A Antoine-Jean-Gabriel LE BAULT

conseiller au parlement

à Dijon

Aux Délices, 4 décembre [1758].

Je vous remercie de vos bontés, monsieur, et de vos quatre tonneaux à double futaille 1, que nous boirons à votre santé dans nos ermitages. Je suis accommodé avec monseigneur le comte de La Marche, et je vais tâcher de faire un peu de bien dans un pays où je ne vois que du mal. Je compte parmi les bonnes œuvres des plants de Bourgogne : ceux dont vous avez bien voulu me gratifier promettent beaucoup. Pourriez-vous pousser la bienfaisance jusqu'à m'en faire avoir un millier? Mais je veux le payer il ne faut pas être à charge à ceux qui ont la bonté de nous abreuver.

Je suis avec la plus respectueuse reconnaissance, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Voltaire »

 

 

20/12/2013

Une femme, quand elle est jolie, est mieux coiffée pour un écu qu'une laide pour mille pistoles.

...Ce que vous confirmeront les coiffeurs et coiffeuses (voyez comme on peut être politiquement correct , je respecte la parité! ) qui sont aux pièces en cette période de fête où le paraitre est diablement important ; les laides verront l'aimable sourire des designers capilliculteurs qui touchent alors le jack pot .

coiffure.jpg

Illumination après un passage dans la crèche !

 

« A M. le marquis Francesco- Albergati CAPACELLI 1

Aux Délices, 4 décembre [1758].

Monsieur, benedetto sia il cielo che vi a inspirato il gusto del più divino trastullo, che e valenti uomini e le virtuose done passano godere, quando sono più di due insieme 2. Vous vous adressez 3 tout juste à un homme qui ne rougit point, à son âge, de jouer encore la comédie avec ses amis. Nous avons à Lausanne un très-joli théâtre j'en fais bâtir un à une terre 4 que j'ai en France, à quelques lieues de la campagne où je suis à présent ; mais nous nous gardons bien mes amis et moi de nous habiller à la française quand nous sommes grecs ou persans . Il faut pourtant vous épargner des frais, et voici comme on peut s'y prendre . 1° une cuirasse de carton peinte, au lieu de veste, la cuirasse peut coûter trois paoles, et une veste pourrait coûter vint sequins . 2° un casque de carton qui peut coûter encore trois paoles, au lieu d'un chapeau qui est plus cher . 3° un brodequin à la jambe, composé d'un ruban qui peut coûter un ou deux paoles 5.

Les femmes se mettent comme elles veulent, sans beaucoup de dépense; surtout point de cornettes; un petit diadème de perles fausses, quelques rubans, des boucles, ou un petit bonnet. Une femme, quand elle est jolie, est mieux coiffée pour un écu qu'une laide pour mille pistoles.

Questo sia detto per i viventi; vengo adesso a i morti 6.

Quand j'ai fait jouer Sémiramis, j'ai fait placer l'ombre dans un coin, au fond du théâtre elle montait par une estrade, sans qu'on la vît monter; elle était entourée d'une gaze noire,7 tout dépend de la manière dont sont placées les lumières. Cela fait un terrible effet, quand tout est bien disposé, car

Segnius irritant animos demissa per aurem,

Quam quae sunt oculis subjecta fidelibus.8

Vous me demandez, monsieur, si on doit entendre, au premier acte, les gémissements de l'ombre de Ninus; je vous répondrai que, sans doute, on les entendrait sur un théâtre grec ou romain mais je n'ai pas osé le risquer sur la scène de Paris, qui est plus remplie de petits-maîtres français, à talons rouges 9, que de héros antiques. Je ne conseillerais pas non plus qu'on hasardât cette nouveauté sur un petit théâtre resserré, qui ne laisse pas de place à l'illusion.

Le grand prêtre Oroès ne donne point l'épée de Ninus à Arsace, dans le premier acte; il la lui donne dans le quatrième. Je sauvai à l'acteur l'embarras de ceindre une épée et d'ôter la sienne, en le faisant venir sans épée sur le théâtre.

Le tonnerre est aisément imité par le bruit d'une ou deux roues dentelées qu'on fait mouvoir derrière la scène sur des planches; les éclairs se forment avec un peu d'orcanson 10.

Voilà, monsieur, tout ce que je peux répondre aux questions que vous avez bien voulu me faire; mais je ne pourrais jamais répondre dignement à l'honneur que je reçois de vous, ni vous exprimer assez les sentiments que je vous dois.

Je crois que vous voyez M. Algaroti ; oserai-je  lui présenter ici mes obéissances, aussi bien qu'à toute votre société ?

J'ai l'honneur d'être, monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur .

Voltaire

gentilhomme ordinaire du roi »11 

1Albergati en envoyant les copies des lettres de V* à l'édition de Kehl les fit précéder d'une note dans laquelle il expliquait que cette relation épistolaire avait pris naissance lorsqu'il avait écrit à V* pour lui demander des conseils sur la , représentation de Sémiramis non encore jouée en Italie, qu'il projetait de faire sur son théâtre de campagne . Il précisait aussi que les lettres envoyées ne représentaient pas l a totalité de la correspondance échangée . Voir : http://fr.wikisource.org/wiki/Biographie_universelle_ancienne_et_moderne/1re_%C3%A9d.,_1811/Albergati-Capacelli_%28le_marquis_Fran%C3%A7ois%29

2 Béni soit le ciel qui vous a inspiré du goût pour le divertissement le plus divin dont les hommes de valeur et les femmes vertueuses puissent tirer du plaisir quand ils sont plus de deux ensemble .

3 Dans la lettre initiale d''Albergati du 22 novembre 1758 .

4 A Tournay .

5 Depuis « mais nous nous gardons bien », la fin du paragraphe manque dans les autres éditions . La paole (en italien , paolo) était une monnaie des États pontificaux valant un peu moins d'une livre de France .

6 Cela soit dit pour les vivants, j'en viens maintenant aux morts .

7 Noire est ajouté de la main de Voltaire au dessus de la ligne .

8 L'esprit est moins vivement touché par ce qui lui est transmis par l'oreille que par ce qui lui est présenté par les yeux fidèles .

9 Ils disparurent en 1759, grâce au comte de Lauraguais; voir page 405 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4113219/f407.image

10 En citant cet exemple, Littré suggère qu'il y a ici une faute d’impression pour arcanson . Mais le mot revient sous cette forme dans une lettre à Bordeaux du 4 septembre 1763 . Définition d'arcanson selon Littré : « Galipot [résidu de térébenthine] liquéfié dans des chaudières, filtré et coulé dans des moules creusés au milieu du sable, pour lui donner la forme de pains . » De nos jour on le nomme colophane .

11 Depuis « je crois ... » la fin manque dans toutes les éditions .

 

19/12/2013

Il est triste d'avoir en même temps mal à la bouche et au cul

... Et moi qui n'ai mal ni à l'une ni à l'autre, je me marre en lisant ça . Superbe tête à queue . Pas de langue de bois avec ce sacré Volti .

 Beaucoup plus de franchise que ces élus ou futurs élus à la tête de l'état qui jouent les costauds en camouflant les ratés de leurs faibles machines , Nicolas mou du palpitant, et François pelé de la  châtaigne .

 mal au cul lapins.jpg

 

« A Gabriel Cramer

Il est triste d'avoir en même temps mal à la bouche et au cul, mais la nature humaine est faite pour souffrir par tous les bouts .

Je prie instamment monsieur Cramer de mander à Mme d'Epinay que j'aime mieux donner un louis d'or pour ne pas avoir Lancelot du Lac que de donner quatre louis pour un pareil bouquin , et qu'ainsi elle ait la bonté de rompre le marché ; je ne sais aucune nouvelle .

J'aurais voulu savoir, si on mettra au pilori l'homme qui se plaignait qu'on mit la faucille dans sa moisson 1.

3 décembre [1758] »

1 Allusion à une lettre de Vernet du 15 avril 1754 . comme Gagnebin, le premier éditeur de cette lettre l’avait déjà signalé, V* rapporte dans la Lettre curieuse de M. Robert Covelle que , lorsque Vernet avait appris l'intention des Cramer de publier l'Essai sur les Mœurs, il avait écrit à V* : « Voici encore de nos libraires qui mettent la faucille dans notre moisson [...] » éd. Moland, XXV, 495 : http://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome25.djvu/505

Voir aussi : http://books.google.fr/books?id=2sVDAAAAYAAJ&pg=PA48&lpg=PA48&dq=vernet+voltaire&source=bl&ots=2v_3DeiePD&sig=_478IBc-tXs43XW5zqli1bghbeI&hl=fr&sa=X&ei=rf2yUoTlAYmX1AXqs4GQDw&ved=0CE4Q6AEwBQ#v=onepage&q=vernet%20voltaire&f=false

 

 

C'est à vous d'écrire sous lui

... Me dit-on !

- Mais sous qui ? dites donc !

Sous Volti !

- Ah oui ?

J'ai  connu plus difficile .

- Mais pas plus agréable , certes .

Alors continuons ...

 

ecrire-pour-le-web1.jpg


 

 

 

« A Saverio Bettinelli 1

aux balances

[vers le 30 novembre 1758]

Compatriote de Virgile

Et son secrétaire aujourd'hui ,2

C'est à vous d'écrire sous lui :

Vous avez son âme et son style . »

1  Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Saverio_Bettinelli

« Lettere di Diodoro Delfico a Lesbia Cidonia sopra gli epigrammi » (de Bettinelli), Continuazione del nuovo giornale de' letterati d'Italia, 1787 . D'après l'agenda de Bettinelli , il avait séjourné à Genève du 27 novembre au 5 décembre environ . La date ici proposée vient de la mention portée par Bettinelli sur le manuscrit : « Billet reçu pendant mon séjour à Genève où je passai le [un blanc] décembre 1758 en revenant de Paris. » Le 4 janvier 1759 Bettinelli écrira à V* pour le « remercier de toutes les bontés » dont il l'a « honoré à Genève » et lui demander ses « commissions pour la Provence ». Voir aussi : http://www.monsieurdevoltaire.com/article-poesie-au-pere-bettinelli-121540621.html

2 Les Dieci lettere di Publio Virgilio Marone, de Bettinelli avaient paru quelques mois auparavant, sans date ni nom d'auteur .

 

18/12/2013

Je joue avec la vie . Voilà la seule chose à quoi elle soit bonne et ce qui la rend encore plus agréable ce sont des amis comme vous

... Pour me ruiner, le fisc suffit à mon bonheur, c'est un jeu où les dés sont pipés . Heureusement, c'est une activité trop peu ludique pour y consacrer beaucoup de temps .

Le vie réserve heureusement d'agréables rencontres amicales, et Mam'zelle Wagnière est la plus importante de ma vie . Continuons à jouer avec Voltaire !

 DSCF3902 la vie est un jeu.png

 

 

« A Jean-Robert Tronchin

à Lyon

Aux Délices 27 novembre [1758]

Voici encore , mon cher monsieur,un prêtre 1 qui m'emprunte 50 louis . A la bonne heure ; il faut avoir des amis partout . Je lui donne une lettre de change que Panchaud de Berne tirera sur vous . Cela sera rendu probablement dans le paradis .

J'ai encore besoin d'une de vos bontés . Il me faut de la monnaie d'argent du roi très chrétien et un peu d'or . Si vous avez trois cents louis dont vous ne sachiez que faire, deux cent cinquante en or, et cinquante en pièces de vingt-quatre sous, de douze sous, vous me donneriez grande facilité pour mes états de Ferney où l'on ne connait guère ce vil métal .

Je me ruine, je le sais bien , mais je m'amuse . Je joue avec la vie . Voilà la seule chose à quoi elle soit bonne et ce qui la rend encore plus agréable ce sont des amis comme vous .

V. »

1  Bertrand, de Berne ; voir lettre du 9 décembre 1758 à Jean-Robert Tronchin :