Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/05/2015

l'histoire ne doit être ni une satire, ni un panégyrique, ni une gazette.

... Qu'on se le dise, qu'on se le grave dans le crâne et dans les textes à l'heure où la réformite aigüe frappe une nouvelle fois l'Education nationale .

Le Siècle des Lumières passant au rang de connaissance "facultative" , entre autres, me fait bouillir .

Une consultation des enseignants est programmée, 800000 enseignants consultés et donc 800000 avis différents, sur lesquels planera l'avis de notre ministre Najat Vallaud Belkacem :    «L'enseignement de l'histoire doit bien être un récit qui raconte notre appartenance à la communauté nationale, pas seulement une succession de dates. Mais il faut veiller à ne pas instrumentaliser ce récit .», et moi je dis "écoutez Voltaire, ça ne peut que vous faire du bien !"

 Suite au prochain numéro !...

m sieur m sieur.jpg

 M'sieur ! M'sieur !

S'il-vous-plait ! ne restez pas dans le flou, éclairez-nous !

 

 

« A Ivan Ivanovitch SCHOUVALOV
Tournay, par Genève, 14 mai [1760]
Monsieur, j'ai reçu aujourd'hui, par les mains du jeune M. de Soltikof, les deux mémoires dont Votre Excellence a bien voulu le charger pour moi. Je me flatte que je recevrai autant d'instructions sur les affaires et sur la guerre que j'en reçois sur les moines et sur les religieuses.

Je présume, monsieur, que vous avez reçu à présent le volume qui va jusqu'à Pultava, et que vous ne laisserez point imparfait le bâtiment que vous avez élevé. Quoique j'aie suivi en tout, dans ce premier volume, les mémoires authentiques que j'ai entre les mains, cependant si je me suis trompé
en quelque chose, ou même si j'ai dit quelques vérités que le temps présent ne permette pas de mettre au jour, il sera aisé de substituer d'autres pages aux pages que vous croirez devoir être réformées. Cette histoire est votre ouvrage plutôt que le mien ; il ne doit paraître que sous vos auspices: ainsi tout doit être muni du sceau de votre approbation. Je suis bien persuadé que vous n'aurez point de vains scrupules ; votre esprit juste en est incapable. Vous savez mieux que moi ce que je vous ai toujours dit, que l'histoire ne doit être ni une satire, ni un panégyrique, ni une gazette. Il faut surtout que l'histoire puisse fouiller dans le cabinet, sans pourtant abuser de cette permission.
J'espère que la paix de l'Europe, qui ne peut nous être donnée que par vos armes victorieuses, sera l'époque de la publication de l'Histoire de Pierre le Grand. Ce sera une grande consolation pour moi de servir à réfuter les calomnies odieuses dont on a osé noircir depuis peu 1 ce héros de votre nation. Mais je suis bien vieux et bien infirme ; il faut que je me hâte et que 2 je ne meure point avec le regret de n'avoir point achevé ce que vous avez fait commencer.

Je n'ai aucune nouvelle des paquets par moi envoyés 3.Je suis toujours à vos ordres.
J'ai l'honneur d'être, avec les plus respectueux sentiments,

monsieur, 4

de Votre Excellence

le très humble et très obéissant serviteur V. »

1 Ce mot manque dans les éditions précédentes .

2 Que manque dans les éditions .

3 Cette phrase manque dans les éditions .

4 La fin de lettre depuis monsieur manque dans les éditions .

 

 

10/05/2015

A vous rendre justice en Europe on s'empresse; Mais parmi tant de sang, de pleurs et d'attentats, L'Europe, abandonnée au démon des combats, Aux meurtres, au pillage, à la fraude traîtresse, Même en vous admirant, ne vous méritait pas.

... A vous Angela Davis , vous qui venez d'un pays où être noir est déja un risque supplémentaire de mort violente et qui plus est de la main de policiers ineptes : http://www.leparisien.fr/flash-actualite-culture/une-sculpture-dediee-a-la-memoire-des-esclavages-inauguree-a-brest-10-05-2015-4760491.php

 angela davis nantes 10 05 2015.jpg

 

 

« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de SAXE-GOTHA.
14 mai [1760]
Que vous avez raison, jeune et belle princesse,
D'aller en Amérique étaler vos appas!
A vous rendre justice en Europe on s'empresse;
Mais parmi tant de sang, de pleurs et d'attentats,
L'Europe, abandonnée au démon des combats,
Aux meurtres, au pillage, à la fraude traîtresse,
Même en vous admirant, ne vous méritait pas.


Madame, ce petit compliment est pour celle qui a daigné honorer et embellir le rôle d'Alzire. Mais que ne dois-je point à son auguste mère! Je lui jure que si j'avais eu un peu de santé, j'aurais fait le voyage, j'aurais été le témoin des talents du prince et de la princesse. Les raisonneurs, les politiques, auraient dit ce qu'ils auraient voulu, j'aurais contenté le plus cher de mes désirs, de venir me mettre encore aux pieds de Votre Altesse sérénissime.
J'ai usé de la permission qu'elle m'a donnée ; j'ai fait partir un petit ballot pour Mme la comtesse de Bassevitz, et je l'ai adressé à Gotha directement à Votre Altesse sérénissime, afin que le respect pour votre nom le fît arriver en sûreté.
Je profite encore des mêmes bontés pour vous supplier, madame, de vouloir bien honorer de votre protection la lettre incluse 1. Je crois mon commerce fini avec le chevalier Pertriset 2. J'ai pris la liberté de lui dire tout ce que j'avais sur le cœur; mon âge, mon ancienne liberté, les malheurs auxquels il s'expose, m'ont autorisé et m'ont peut-être conduit trop loin. Il ne tenait certainement qu'à lui de s'arranger très-bien avec son oncle ; mais il aime mieux plaider. Je suis sûr que Mlle Pertrizet en est fâchée.
Je ne sais rien, madame, des nouvelles publiques. Je plante, je bâtis; je ne me mêle point des affaires des princes; mais il y a une princesse aux pieds de laquelle je voudrais être.
Le Suisse V. »

1 On ne sait de quelle lettre il s'agit ; ce sont ordinairement des lettres à Frédéric II, (le « chevalier Pertriset ») que V* fait passer par la duchesse de Saxe-Gotha .

2 Frédéric II. A propos des sentiments de celui-ci, voir lettre du 12 mai 1760 de Frédéric à V* : page  385: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f399.texte.r=4109

 

09/05/2015

enfin je suis devenu un grand seigneur, c'est-à-dire que j'ai des dettes et point d'argent, avec un gros revenu

...

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'ARGENTAL.
Aux Délices, 11 mai [1760].

Acte 5, scène seconde

MÉDIME , armée; soldats dans l'enfoncement.
(à son père.) (à sa suite.)
Non, n'allez pas plus loin. — Frappez; et vous, soldats,
Laissez périr Médime, et ne la vengez pas.
Vous n'avez que trop bien secondé mon audace;
J'ai mérité la mort, méritez votre grâce ;
Sortez, dis-je.


MOHADAR 1.

Ah, cruelle! est-ce toi que je vois ?

MÉDIME , en jetant ses armes.

Pour la dernière fois, seigneur, écoutez-moi.
….....................................................................

 

.....................................................................
Je baise cette main dont il faut que j'expire;
Mais, pour prix de mon sang, pardonnez à Ramire :
C'est assez vous venger, et ce sang à vos yeux,
Ce sang, qui fut le vôtre, est assez précieux.


Peut-être ces deux derniers vers, prononcés avec une grandeur mêlée de tendresse, pourront faire quelque effet.
N. B. que dans la dernière scène Prohador dit :

J'ai trop vu, je l'avoue, en ce combat funeste.

Il y avait :
J'ai trop vu, malgré moi, dans ce combat funeste 2,


et cela faisait deux malgré moi en deux vers.

Voilà, mon divin ange, de quelle manière j'ai obéi sur-le- champ à votre lettre ; et, si vous n'êtes pas content, je trouverai peut être quelque chose de mieux.
Je sacrifie mes craintes et mes remords aux espérances et à l'absolution que vous me donnez. Allons donc, puisque vous l'ordonnez. C'est déjà quelque chose que Mlle Gaussin ne joue pas Énide; mais gare que Mlle Clairon ne donne de ses tons à Mlle Hus, et qu'au lieu du contraste intéressant de deux caractères opposés on ne voie qu'une écolière répétant sa leçon devant sa maîtresse ! En ce cas, tout serait perdu. Mlle Clairon en sait-elle assez pour enseigner un jeu différent du sien ?
Je suis mortifié, en qualité de Français, d'homme, d'être pensant, de l'affront public qu'on vient de faire aux mœurs, en permettant qu'on dise sur le théâtre des injures atroces à des gens de bien persécutés 3. A-t-on lâché un plat Aristophane contre les Socrates, pour accoutumer le public à leur voir boire la ciguë sans les plaindre? Est-il possible que Mme de La Marck 4 ait protégé si vivement une si infâme entreprise ?
Vous me faites un plaisir sensible, mon cher ange, en donnant le produit de l'impression à Lekain. Il faudra qu'il veille à empêcher les éditions furtives. Vous pouvez promettre le profit de l'édition de Tancrède à Mlle Clairon ; ainsi il n'y aura point de jalousie, et Lekain pourra hautement jouir de ce petit bénéfice, supposé que la pièce réussisse. Vous saurez que Tancrède est corrigé, comme vous et Mme Scaliger l'avez ordonné.
Mais je vous demande une grâce à genoux. Il y a un M. Jacques à Paris. Vous ne connaissez point ce nom-là ; c'est un homme de lettres qui a du talent, et qui est sans pain. Il voulait venir chez moi ; j'ai pris malheureusement à sa place une espèce de géomètre 5 qui me fait des méridiennes, des cadrans, qui me lève des plans; et je n'ai rien pu faire pour M. Jacques. Je lui destinais cinq cents livres sur la part d'auteur que je donne aux comédiens, et deux cents sur l'édition que je donne à Lekain (supposé toujours le succès dont mes anges me flattent) ; au nom de Dieu, réservez 500 livres pour Jacques. Il serait même bon qu'il présidât à l'édition, et qu'il fît la préface.
Vous me direz : Que ne donnez-vous à Jacques 500 livres de votre bourse? Je vous répondrai que je suis ruiné ; que j'ai eu la sottise de bâtir et de planter en trois endroits différents ; que j'ai chez moi trois personnes à qui j'ai l'insolence de faire une pension ; que Mme Denis, après sa réception à Francfort, a droit de ne se rien refuser à la campagne; que la proximité d'une grande ville et le concours des étrangers exigent une grande dépense ; qu'enfin je suis devenu un grand seigneur, c'est-à-dire que j'ai des dettes et point d'argent, avec un gros revenu. Voilà mon cas; il ne faut rien cacher à son ange gardien.
Vous n'avez rien répondu sur la juste haine que je porte à la ville de Paris ; est-ce que je n'ai pas raison ? Mais j'ai bien plus raison de vous aimer jusqu'à mon dernier moment, avec la plus tendre reconnaissance. Madame Scaliger permet-elle qu'on lui en dise autant?
J'ai oublié l'adresse de Jacques. Il demeurait à Paris, rue Saint-Jacques, près la fontaine Saint-Séverin, chez... je ne m'en souviens plus. C'est un M. Audelet ou Audet, homme d'affaires...
On pourrait donner des billets à Jacques.

V. »

1 Le personnage appelé Mohadar dans la pièce, quand elle était intitulée Fanime ou Médime, est nommé Benassar dans Zulime. Les vers rapportés ici sont dans Zulime, acte V, scène II

2 Zulime, acte V, scène III,

3 D'Alembert, Diderot, Duclos, Helvétius, etc., nommés dans la lettre du 9 mai 1760 à Lacombe : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/05/06/j-ai-peine-a-croire-que-notre-nation-legere-soit-devenue-ass-5617399.html

4 Marie-Anne -Françoise de Noailles, comtesse de La Mark ; sur Les Philosophes, voir lettre du 25 avril 1760 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/04/23/est-il-vrai-que-de-cet-ouvrage-immense-et-de-douze-ans-de-travaux-il-revien.html

5 Sans doute Siméon Valette.

 

08/05/2015

il demande délai jusqu'à ce temps

... Indéfini où il pourra se défiler comme à l'accoutumée, Nicolas  Sarkozy-Bismuth , président  de parti, Républicain de paccotille mais  roi de la combinazione .

 http://www.francetvinfo.fr/politique/affaire/trafic-d-influence-les-ecoutes-telephoniques-validees_897729.html

 ecoutes téléphoniques de sarko.jpg

 

« A Jean-François Joly de Fleury,

monseigneur l'intendant de Bourgogne

[vers le 10 mai 1760] 1

François de Voltaire, seigneur actuel de Tournay, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, certifie que dans le traité passé entre le roi et la république de Genève en 1749 il est dit article 2, « la république cède à Sa Majesté tous ses droits de quelque nature qu'ils soient sur les terres et maisons de Saint-Victor et chapitre au pays de Gex ».

Or Saint Victor avait le fief de La Perrière, au pays de Gex . Donc depuis 1749, le roi est possesseur du fief .

S'il faut un plus grand éclaircissement Mgr l'intendant de Bourgogne est supplié de donner ses ordres pour que le requérant demande en son nom à la république de Genève la compulsion des archives ; et il demande délai jusqu'à ce temps . »

 

07/05/2015

J'ai peine à croire que notre nation légère soit devenue assez barbare pour approuver une telle licence.

... Voila ce qu'aurait pu dire notre secrétaire d'État chargée de la famille, Laurence Rossignol, si elle n'avait pas été "extrêmement choquée" par Une petite pipe de et par Patrick Sébastien diffusée à une heure de grande écoute sur une chaîne du service public .

«Ceux qui ont la responsabilité, la chance, d'animer une émission de télévision doivent aussi se comporter dans le respect des familles. (...) Je trouve ça limite incestueux que de faire chanter ça dans une famille, à 20h50», a-t-elle déclaré . Et bien moi , madame,  je vous trouve  dans les limites de l'idiotie ,  sous-ministre ignorante du sens du mot inceste, tout autant que de l'heure réelle de diffusion de ladite chanson ; Mère La Pudeur-Rossignol vous chantez le faux, à votre tour d'être sifflée : "hors jeu" .

 

puritains.jpg

 http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/article/television/86756/une-petite-pipe-de-patrick-sebastien-vue-par-les-humoristes.html

 

 

« A Jacques LACOMBE 1
à Paris
Je recevrai, monsieur, avec une extrême reconnaissance l'ouvrage dont vous voulez bien m'honorer. Votre lettre me donne grande envie de voir votre livre 2; elle est d'un philosophe, et il n'appartient qu'aux philosophes d'écrire l'histoire ; les autres sont des satiriques, des flatteurs, ou des déclamateurs. Je n'ai encore qu'un volume de prêt de l'Histoire de Pierre le Grand. Les mémoires qu'on m'envoie de Pétersbourg viennent fort lentement et de loin à loin ; plusieurs ont été pris en route par les housards. Vous voyez que la guerre fait plus d'un mal. Au reste, je doute fort que cette Histoire réussisse en France; je suis obligé d'entrer dans des détails qui ne plaisent guère à ceux qui ne veulent que s'amuser. Les folies héroïques de Charles XII divertissaient jusqu'aux femmes; des aventures romanesques, telles même qu'on n'oserait les feindre dans un roman, réjouissaient l'imagination ; mais deux mille lieues de pays policées, des villes fondées, des lois établies, le commerce naissant, la création de la discipline militaire, tout cela ne parle guère qu'à la raison.
Ajoutez à ce malheur celui des noms barbares inconnus à Versailles et à Paris, et vous m'avouerez que je cours grand risque de n'être point lu de tout ce que vous avez de plus aimable.
Il se pourra encore que maître Abraham Chaumeix me dénonce comme un impie, attendu que Pierre le Grand n'a jamais voulu entendre parler de la réunion de l'Église grecque à la romaine, proposée par la Sorbonne. Les jésuites se plaindront qu'on les ait chassés de Russie, tandis qu'on a laissé une douzaine de capucins à Astrakan. Nous verrons, monsieur, comment vous vous êtes tiré de ces difficultés.
Je suis aussi indigné que vous qu'on permette à Paris l'affront qu'on fait sur le théâtre à des hommes respectables. Serait-il possible, monsieur, qu'on eût désigné injurieusement dans la pièce nouvelle MM. d'Alembert, Diderot, Duclos, Helvétius, et tant d'autres 3? J'ai peine à croire que notre nation légère soit devenue assez barbare pour approuver une telle licence. Je ne sais qui est l'auteur de cette pièce; mais, quel qu'il soit, il aurait à se reprocher toute sa vie un tel abus de son talent, et les approbateurs 4 auraient encore plus de reproches à se faire. Peut-être la licence qu'on suppose dans cette pièce n'est-elle pas aussi grande qu'on le dit. J'ignore si la pièce a été jouée ; j'ai conservé à Paris peu de correspondances; je sais seulement, en général, qu'on m'y attribue souvent des ouvrages que je n'ai pas même lus. Les vôtres, monsieur, serviront à me désennuyer de ceux qui me sont venus de ce pays-là.
Vous me donnez trop de louanges ; mais vous savez, vous qui êtes avocat, que la forme emporte le fond. Elles sont si bien tournées qu'on vous pardonnerait même le sujet.

 

J'ai l'honneur d'être avec toute l'estime et toute la reconnaissance que votre lettre m'inspire, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

 

Voltaire 

 

Par Genève, aux Délices 9è mai 1760»

 

 

 

 

 

1 Jacques Lacombe, né à Paris en 1724, avocat, reçu libraire en 1766, mort le 16 septembre 1801, auteur de l'Histoire des révolutions de l'empire de Russie, 1760, in-12, etc. Voir : http://data.bnf.fr/12102201/jacques_lacombe/

 

2 Histoire des révolutions de l'Empire de Russie, 1760 ; Mme du Boccage y fait allusion dans une lettre à Algarotti du 15 mai 1760, où, après avoir parlé de Palissot, elle poursuit en se référant à une lettre de V* qui nous est inconnue : « J'ai reçu, il y a peu de jours, une lettre de M. de Voltaire qui déplore avec raison ce déchainement que les auteurs ont l'un contre l'autre, fort nuisible aux lettres . Il est vrai qu'il n'attaque pas le premier, mais comme il a de bonnes armes, il se défend bien . Il ne ma parle point de son histoire du csar et laisse passer les révolutions de Russie qu'on vient de nous donner . »

 

3 Voir lettre du 25 avril 1760 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/04/23/est-il-vrai-que-de-cet-ouvrage-immense-et-de-douze-ans-de-travaux-il-revien.html

V* ne songe apparemment pas à sa propre Écossaise qui commence à courir le monde, ainsi que Choiseul lui en fait la remarque le 12 mai 1760 . Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2015/03/theatre-l-ecossaise-partie-1.html

 

4 C'était Crébillon qui, en qualité de censeur, avait signé l'approbation mise au bas des Philosophes. Il se conforma à l'ordre que le duc de Choiseul lui avait donné de ne rien retrancher. (Beuchot.)

 

06/05/2015

nous avons bien des affaires avec la république

... Ce qui augure mal des relations avec les Républicains qui sont eux-mêmes, et c'est un comble, en délicatesse avec les lois républicaines, nicht wahr Nicolas ?

Je cite ici Nicolas Sarkozy qui me semble vouloir entrer dans le livre des records des affaires foireuses ( collant au cul) d'un ex/président, sans négliger ses prédécesseurs qui ont eu leurs lots d'imperfections .

 

affaires de la Vè république.jpg

 

 

« A François Tronchin

7 mai [1760]

Mon cher confrère, nous avons bien des affaires avec la république, Mme Denis et moi . Nous vous remercions tendrement de vos bontés . Nous supplions M. le trésorier de la seigneurie de vouloir bien nous envoyer un homme avec une quittance 1 ; nous délivrerons cent écus courant .

Nous prions monsieur le trésorier de vouloir bien spécifier dans le reçu les causes de l'échute 2 et la mainlevée, afin que nous produisions cette quittance à Gex pour opérer la liquidation des fonds vendus par le sieur Choudens, à lui non appartenant .

Autre affaire . M. Moussard a eu la bonté de nous promettre certificat en chancellerie des droits de Genève cédés au roi en 1749 sur l'endroit nommé La Perrière, et les accessoires concernant La Perrière ; affaire assez importante pour vos serviteurs . Nous vous prions de vouloir bien témoigner à M. le syndic Moussard notre reconnaissance, et combien nous comptons sur ses bontés .

À l'égard du stellionnat 3 de Choudens, nous espérons que l'affaire sera renvoyée devant ses juges naturels . Nous aimerions assurément mieux être jugés à Genève qu'à Gex . Mais il est impossible que les descentes sur les lieux se fassent par d'autres juges que ceux de France . Nous serions répréhensibles, si nous portions la cause à un tribunal étranger .

Nous sommes pénétrés de reconnaissance pour vous, oncle et nièce .

V. »

1 Les pièces relatives à cette affaire sont conservées dans « La dispute avec Choudens, mai 1760 » qui comprend le reçu du trésorier et un mémoire de l'affaire « pour noble dame Denis ».

2 L'échute était le « droit accordé aux seigneurs de succéder dans certaines circonstances à leurs mainmortables » Littré .

 

05/05/2015

Je vous dis ce que je pense; je vous donne mon sentiment pour mien , et non pour bon

... A la suite de Montaigne et de Voltaire, je me permets de vivre et dire ce qui m'importe , et au diable ceux qui jouent les fauls-culs !

 bal des faux culs.jpg

 Mieux vaut brûler que danser avec les ânes

 

« A Bernard-Joseph SAURIN,
à Paris.
5 mai [1760]
Je vous remercie de tout mon cœur, monsieur. J'aime beaucoup Spartacus 1 : voilà mon homme ; il aime la liberté, celui-là.
Je ne trouve point du tout Crassus petit. Il me semble qu'on n'est point avili quand on dit toujours ce qu'on doit dire. J'aime fort que Noricus tourne ses armes contre Spartacus pour se venger d'un affront : cela vaut mieux que la lâcheté de Maxime, qui accuse son ami Cinna parce qu'il est amoureux d'Émilie. Cet emportement de Spartacus, et le pardon qu'il demande noblement, sont à l'anglaise ; cela est bien de mon goût. Je vous dis ce que je pense; je vous donne mon sentiment pour mien 2, et non pour bon. Peut-être le parterre de Paris aura désiré un peu plus d'intérêt.
Il y a quelques vers diuruscules 3 . Je ne hais pas qu'un Spartacus soit quelquefois un peu raboteux ; je suis las des amoureux élégants. Ma cabale veut donner malgré moi une pièce toute confite en tendresse ; il y a une espèce d'amoureux qui me paraît un grand benêt 4. Cela a un faux air de Bajazet; cela est bien médiocre. J'en ai averti; ils veulent la jouer : je mets le tout sur leur conscience.
Je vous avertis que je n'aime point du tout votre épître à M. Helvétius 5; quand je vous dis que je ne l'aime point, c'est que je ne connais personne qui l'aime. Tout est dit : non, tout n'est pas dit ; et vous auriez dû dire adroitement bien des choses.
J'ignore si on a joué la farce contre les philosophes ; on ne sait comment s'y prendre pour détruire cette pauvre raison. Me Joly de Fleury braille contre elle en parlement , Tamponet 6 en Sorbonne, Chaumeix dans les rues . On la joue à la Comédie. Lui donnera-t-on bientôt la ciguë ? Vous êtes plus fous que les Athéniens. Jansénistes, molinistes, cafés, bordels, tout se déchaîne contre les philosophes ; et les pauvres diables 7 sont désunis, dispersés, timides. En Angleterre, ils sont unis, et ils subjuguent.
Je viens de recevoir le Discours de Lefranc , et les Quand 8. Il me prend envie de les avoir faits. Ce discours est bien indécent, bien révoltant ; il met en colère. Je m'applaudis tous les jours d'être loin de ces pauvretés. Je méprise les hypocrites, et je hais les persécuteurs ; je brave les uns et les autres.

C'est ce coquin de Fréron qui a empêché Lambert de mettre dans Le Siècle de Louis XIV l'article concernant monsieur votre père 9. Il ne voulait pas que Rousseau eût tort . La preuve que Rousseau était un pervers c'est qu'il fit un pèlerinage à Notre Dame de Halle 10 . Je ne connais point de preuve plus complète . Tout cela ne contribue pas à faire aimer les hommes . Il en vient pourtant chez moi beaucoup, et quelques-uns me remercient d'avoir osé être libre, et écrire librement. Pour le peu de temps qu'on a à vivre, que gagne-t-on à être esclave? Je voudrais vous voir, vous et votre ami 11?
Faites-moi le plaisir de me mander le succès de la pièce contre les philosophes, et le nom de cet Aristophane. »

2 Inspirée de Montaigne.

3 Sic, sans doute un lapsus pour duriuscules, mot de la médecine de ce temps et que son emploi dans Le Malade imaginaire a rendu célèbre .

4 Ramire, l'un des personnages de Zulime.

5 A savoir la dédicace de Spartacus, à Helvétius.

6 Tamponet avait pris une part active à la condamnation de l'abbé de Prades ; V* qui le tourna en ridicule dans le Tombeau de la Sorbonne, devait aussi utiliser son nom comme pseudonyme dans Les Questions de Zapata (1767) et le donne encore comme celui du traducteur des Lettres d'Amabed (1769) .

7 V* était alors en train de composer Le Pauvre Diable .

8 Voyez cet écrit : Les Quand étaient sous-titrés : « Notes utiles sur un discours prononcé devant l'Académie Française le 10 mars 1760 » ; ils devaient être suivis des Si et des Pourquoi de Morellet, auxquels succédèrent, à nouveau de V* les Pour, les Que , les Qui, les Quoi, les Oui, les Non et enfin les Car et les Ah ! Ah ![http://www.monsieurdevoltaire.com/article-facetie-les-ah-ah-121590823.html ]

10 La statue de bois miraculeuse de Notre Dame de Halle en Belgique avait retenu dans les plis de sa robe les boulets qui tombaient sur la ville au cours d'un siège ; c'est là une des anecdotes que raconte longuement Julius Lipsius dans ses Diva virgo Hallensis benficia ejus miracula, 1604 . Voir : http://www.mariedenazareth.com/vivre-avec-marie/hal-notre-dame

11 Helvétius.