Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/09/2017

Je ne sais point encore les conditions de la paix . Mais qu'importent les conditions ? On ne peut trop l’acheter .

... Il serait bon que tous les va-t-en-guerre écoutent ceux qui , comme Voltaire, ont une volonté de paix au prix de sacrifices qui, en tout état de cause, ne peuvent pas égaler ceux d'une quelconque guerre, si petite soit-elle .

PNG

https://vn.ambafrance.org/Operations-de-Maintien-de-la-Pa...

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

3 novembre [1762] 1

Mon cher frère, je suis toujours émerveillé que trois vingtièmes 2 ne vous dérobent ni à la philosophie ni à la littérature . Il me semble que cela fait honneur à l'esprit humain . Sera-t-il dit que je mourrai sans vous avoir vu dans ma retraite avec le cher frère Thieriot et l'illustre frère Diderot ?

Voici une lettre pour un digne frère 3; ce n'est pas un Omer . Je vous supplie de la faire tenir . Que Dieu nous donne des procureurs généraux qui ressemblent à celui-là ! Notre cher frère saura qu'on est honteux sur cette méprise de cette belle lettre anglaise . J'ai bien crié, et je le devais . Il n'est pas mal de mettre une bonne fois le ministère en garde contre les calomnies dont on affuble les gens de lettres .

Je ne sais point encore les conditions de la paix . Mais qu'importent les conditions ? On ne peut trop l’acheter .

L'affaire des Calas n'avance point ; elle est comme la paix . Puissions-nous avoir pour nos étrennes de 1763 un bon arrêt et un bon traité ! Mais tout cela est fort rare .

Poursuivez l'infâme . Je ne fais point de traité avec elle .

Et frère Thieriot où dort-il ? Valete, fratres . »

1 La copie Beaumarchais est sans les deux derniers mots . Cette lettre n'est certainement pas authentique sous cette forme . Comment V* pourrait-il se plaindre que Thieriot ne vienne pas le voir alors qu'il venait de passer cinq mois à Ferney ? Pourtant , le milieu de la lettre semble correctement daté .

2 L'impôt du vingtième (5%) était passé progressivement à 2 puis 3 vingtièmes (15%).Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vingti%C3%A8me

3 Sans doute celle du 6 novembre 1762 à La Chalotais , datée du 3 dans l'édition de Kehl : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/05/correspondance-annee-1762-partie-30.html

 

27/09/2017

puisque vous avez des ouvriez qui chôment

... Sans vouloir faire de mauvais esprit, il me semble que les cyclones et tremblements de terres ont fourni plus d'un motif de bâtir et d'emplois pour un bon moment . Qu'en sera-t-il effectivement ? Qui va se mettre à l'oeuvre sans tarder ?

 Résultat de recherche d'images pour "chomeurs reconstruction et cyclones humour"

"Je vous ai à l'oeil ", dit cette saleté de cyclone !

 

« A Gabriel Cramer

[vers le 1er novembre 1762]

Eh bien, caro, puisque vous avez des ouvriez qui chôment commençons le second tome de Pierre 1.

Il y aura une préface qui tiendra peut-être une ou deux feuilles en chiffres romains . »

1 Histoire de l'empire de Russie sous Pierre le Grand .

Je supputais hier avec des Anglais qu'ils doivent plus de livres tournois qu'il n'y a de minutes depuis la création du monde, et je crois que nous autres Français nous ne nous éloignons pas trop de ce compte .

... Brexit d'Outre-Manche avec dette britannique,   dette nationale française, histoires de gros sous qui échappent à mon entendement de vulgum pecus , complètement ignare au delà de premier million . Comment s'endetter de moult milliards sans se faire mettre en prison, se faire expulser, se faire mettre en tutelle, comme on en use pour citoyen de base ? Débiteurs et créanciers se tiennent par la barbichette d'une main, un couteau sur la gorge de l'autre ; rire n'est alors pas bien vu .

 Image associée

 

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin

[aux Délices 1er novembre 1762] 1

Puisque Votre Excellence aime notre tripot à ce point, puisqu'elle se prête avec tant de bonté à nos tragiques bagatelles, voici la scène qui finit l’acte 3, et voici tout le 4è acte . Il n'y a plus à la vérité tant 2 de fracas à la fin de cet acte 4è . C'est un beau sujet de tableau, qu'une femme mourante, sa fille à ses pieds, un amant furieux venant enlever cette fille qui le repousse, l'amant saisi d'horreur et de pitié, tous les assistants empressés etc. C'est même pour parvenir à produire ce tableau sur la scène que j'avais arrangé toute la pièce, mais il est impossible que cette situation subsiste . Je me suis aperçu que Statira n'était là qu'un trouble-fête . Elle venait après une scène intéressante des deux amants, on souhaitait qu'elle pardonnât, mais au contraire , elle se réjouissait avec sa fille de ce qu'on allait tuer son amant . Elle s'évanouissait quand sa fille lui remontait qu’une religieuse ne doit pas être si vindicative . Alors Statira devenait presque odieuse, et sa mort était très froide . Ainsi tout ce spectacle préparé pour émouvoir ne faisait qu'un effet ridicule . De plus le retour de Cassandre auprès d'Olympie n’était pas vraisemblable . Pourquoi quitter le combat ? comment Antigone ne le suivait-il pas ? Mille raisons enfin concouraient pour faire supprimer une situation qui belle en elle-même était très mal placée .

Nous venons de jouer Le Droit du seigneur avec un prodigieux succès pour le pays de Gex ! mais quel pays au mois de novembre ! et que mes montagnes sont vilaines en hiver quand on ne joue pas la comédie !

Je n'enverrai à mes anges d'Argental notre Olympie (vos bontés la font vôtre) que quand vous et moi seront contents . Je trouve que cette pièce est comme la paix ; elle me paraissait faite et à mesure qu'on avance elle est difficile à faire . Je supputais hier avec des Anglais qu'ils doivent plus de livres tournois qu'il n'y a de minutes depuis la création du monde, et je crois que nous autres Français nous ne nous éloignons pas trop de ce compte .

Notre troupe se prosterne devant Vos Excellences, et moi je joins la plus tendre reconnaissance à mon respect . »

1 Le manuscrit olographe de quatre pages, non daté, est passé à la vente Libreria Banzi à Bologne en 1968 .

2 Quelques lignes en fac similé dans la vente ci dessus se terminent par ce mot .

26/09/2017

Il faudrait que je fusse un monstre pour parler mal du ministère dans de telles circonstances

... où MM. Martinez et Mélenchon jouent à savoir qui a la plus grosse [NDLR : manifestation, bande de malotrous !] en prétendant défendre des droits que personne ne connait vraiment totalement dans cette foule de piétons à banderoles (qui les paye ?) et grévistes routiers . Les soi-disant Insoumis sont en fait diablement soumis à leur gourou Jean-Luc Ier , tous derrière et lui devant, rêvant d'un pouvoir de président de république bananière .

 Résultat de recherche d'images pour "manifestations mélenchon martinez septembre 2017"

Rappel : "S'aimer ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder tous deux dans la même direction "

 http://www.huffingtonpost.fr/2017/09/06/jean-luc-melencho...

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

Aux Délices 1er novembre [1762]

Mon très digne philosophe, n'est-ce pas Mécène qui disait , non omnibus dormio 1? Et moi chétif je vous dis non omnibus argroto 2. J'étais au moins fort aise que M. le duc de Choiseul sût à quel point il m'avait chagriné . Il avait pu me soupçonner d'être ingrat . Je lui ai les plus grandes obligations, c'est à lui seul que je dois les privilèges de ma terre . Toutes les grâces que je lui ai demandées pour mes amis , il me les a accordées sur-le-champ . Je suis d'ailleurs attaché depuis vingt ans à M. le comte de Choiseul . Il faudrait que je fusse un monstre pour parler mal du ministère dans de telles circonstances . Vous avez parfaitement senti combien cette infâme accusation retombait sur vous . On voulait nous faire regarder nous et nos amis comme de mauvais citoyens et rendre notre correspondance criminelle . Cette abominable manœuvre a dû m'être infiniment sensible . Mon cœur en a été d'autant plus pénétré que dans le temps même que M. le duc de Choiseul me faisait des reproches , il daignait accorder à ma recommandation le grade de lieutenant-colonel à un de mes amis 3. C'était Auguste qui comblait Cinna de faveurs . J'en ai eu le cœur percé, et je ne lui pardonne pas encore de nous avoir pris pour des conjurés . Je ne conçois pas comment il a pu imaginer un moment que cette infâme et sotte lettre fût de moi . Je lui ai envoyé la véritable avec votre petit billet 4. Il verra à qui il a à faire, et que nous sommes dignes de son estime et de ses bontés .

Je persiste à croire que le parlement de Toulouse doit réparation à la famille des Calas, qu'Omer doit faire amende honorable à la philosophie et que ce n'est pas assez d'abolir les jésuites quand on a tant d'autres moines .

Nous sommes au sixième tome de Corneille le sublime et le rabâcheur . Sa nièce joue la comédie très joliment et me fait plus de plaisir que son oncle . Nous avons à Ferney des spectacles toutes les semaines, et en vérité d'excellents acteurs . Il y a beaucoup à travailler à Olympie . L'ouvrage des six jours était fait pour que l'auteur se repentit . Il m'a fallu mettre un an à polir ce qu'une semaine avait ébauché . Les difficultés ont été grandes . Nous verrons si j'en serai venu à bout . Au bout du compte il est assez plaisant de faire les pièces, le théâtre, les acteurs, les spectateurs . Les déserts du pays de Gex sont fort étonnés . L'infâme commence à y être fort bafouée . Rendez-lui toujours le petit service de la montrer dans tout son ridicule et dans sa laideur . Le curé d'Étrepigny fait de merveilleux efforts en Allemagne . J'ai lu le Dictionnaire des hérésies 5. Je connais quelque chose d'un peu plus fort 6.

Dieu nous aidera . Adieu, je vous embrasse tendrement .

V. »

1Je ne dors pas pour tout le monde ; ces mots sont attribués à l'hôte de Mécène ; ce dernier faisait une cour pressante à la femme de son hôte, lequel feignait d'être endormi . Un esclave tenta de dérober une coupe d'or, et c'est alors que son maître prononça les paroles en question .

2 Je ne suis pas malade pour tout le monde .

4 Le 26 octobre 1762 d'Alembert a écrit à V* : « Je crois, mon cher et illustre confrère, avoir fait encore mieux que vous ne me paraissez désirer, vous me demandiez il y a huit jours copie de la lettre que vous m'avez écrite le 29 mars, et je vous ai envoyé l'original même ; vous me priez aujourd’hui d’envoyer l'original à M. le duc de Choiseul, vous êtes à portée de le lui faire parvenir, si vous le jugez à propos (…) . Nous sommes fort heureux, vous et moi, que l'imbécile et impudent faussaire ait conservé quelques phrases de votre lettre du 29 mars ; il vous a fourni les moyens, en produisant l'original, de mettre l'imposture à découvert . Il est certain, mon cher confrère, qu'il a couru des copies de ce véritable original ; j'en ai vu une il y a trois ou quatre mois entre les mains de l'abbé Trublet . On les vendait manuscrites, à ce qu'il m'a dit lui-même, à la porte des Tuileries, où il avait acheté la sienne ; de vous dire comment ces copies ont couru, c'est ce que j'ignore, ce qu’il y a de certain c'est que je n'en ai donné ni laissé prendre à personne (…) . Il me paraît bien difficile, pour ne pas dire impossible, de remonter jusqu'au fabricateur de la lettre en question ; on pourrait savoir de l'auteur du journal anglais où elle a été imprimée, de qui il l'a reçue ; pour moi, j'imagine que c'est l'ouvrage de quelque maraud de Français réfugié à Londres (…) . Adieu mon cher et illustre philosophe, vous ne mériteriez pas ce dernier nom, si une plate calomnie, facile à confondre, avait pu vous rendre malade (…) . Quand aurons-nous Corneille, la suite du Czar, Olympie, etc., etc. ? Voilà ce qui mérite de vous occuper, et non pas des atrocités absurdes . »

Choiseul écrira à V* , de Fontainebleau, le 12 novembre : « Je n'ai pas eu le temps de vous répondre, ma chère marmotte ; j’ai été occupé tout ce mois-ci à finir une petite tracasserie dont mon maître était occupé et qui effectivement commençait à devenir fastidieuse à tout le monde, hors à votre héros qui me paraît n'en être pas las ; je suis son serviteur, mais à présent le jeu ne vaudra pas la chandelle . Vous avez raison, vous n'avez point écrit la lettre supposée ; personne n'en parle, ni ne songe actuellement à vous l'imputer . Paix ou guerre, ma chère marmotte, je vous aimerai toujours de tout mon cœur . »

6 Le Dictionnaire philosophique, comme on le verra ensuite .

25/09/2017

je suis extrêmement content de votre manière de penser équitable et tolérante

... A qui peut-on encore dire cela ?

 

 

« Au ministre Paul-Claude Moultou

[octobre-novembre 1762] 1

J'ai le malheur , monsieur, de n'être pas plus content des lettres de Warburton que du livre de Bollingbroke 2. Mais je suis extrêmement content de votre manière de penser équitable et tolérante, et très reconnaissant de votre bonté .

Je persiste toujours à croire que M. Bruce 3 gronde un peu trop notre pauvre Mme Calas . Il ne changera pas le caractère de cette femme, et il ne lui donnera point d'esprit . Plaignons-la, servons-la, et ne la contristions point . L'affaire va cent fois mieux que je n'avais osé l'espérer . Je vous avoue que si on réforme , comme je le crois , l'abominable arrêt des assassins visigoths en robe noire, ce sera pour moi une consolation bien touchante .

Je deviens bien sourd, mais je n'en suis pas moins sensible . Je le suis surtout à votre extrême mérite .

Je vous prie, monsieur, de vouloir bien dire à Mme la duchesse d'Anville que sans mes oreilles, je serais à ses pieds tous les jours . Soyez bien persuadé de ma respectable estime .

V.

1 L'édition Taillandier est incomplète et date de mars 1763 ; Lettres inédites place la lettre entre deux autres des 2 et 7 mars . Pour la date retenue ici, on observera que la duchesse d'Anville quitta Genève peu après le 13 novembre 1762 .

 

je souffre mon mal plus patiemment , puisque le vôtre diminue .

... Sympathie, empathie, des qualités voltairiennes que certains disent chrétiennes alors qu'elles ne sont , normalement,  d'aucune obédience religieuse .

 Image associée

 

 

« A Philippe Debrus

[octobre-novembre 1762] 1

Je suis bien consolé, mon cher monsieur, par votre convalescence, et je souffre mon mal plus patiemment , puisque le vôtre diminue .

J'ose vous prier de ménager un peu la sentimentalité 2 et la faiblesse de cette pauvre Mme Calas . Il me paraît qu'elle fait tout ce qu'elle peut . Jouissons de la satisfaction que nous devons attendre de voir bientôt l'infâme arrêt de Toulouse réformé, et ne troublons point une espérance, si bien fondée, par de vaines craintes . M. d'Argental a la bonté de me rendre compte de tout ce qui se passe . En vérité, les choses vont beaucoup mieux que je n'osais l'espérer . Je vous dirai bien des choses, dès que je pourrai sortir . »

1 Original avec endos « 1762 août », suivi par les éditions, mais c'est trop tôt par rapport aux espérances dont il fait état ici .

2 Les lexicologues datent l'apparition de ce mot du début du XIXè siècle, à tort ; cet usage par V* leur a échappé .

pour arriver à la paix que nous attendons, et qui clora le tout, il faut un peu de temps

...

 

 

« A Gabriel Cramer

[octobre-novembre 1762]

Mon cher Gabriel saura que je n'ai ici rien de l'état de l'Europe depuis Louis XIV .

Qu'il faut un peu de temps pour insérer la guerre de 1741 dans ce fatras, et que pour arriver à la paix que nous attendons, et qui clora le tout, il faut un peu de temps .

Qu'il faut songer à Corneille sérieusement, et presser la cadence, qu'il faut faire parler aux gros souscripteurs à Paris .

Qu'il faut m'employer pour les 25 exemplaires Shouvalow artillerie .

Mon cher Gabriel est prié d'imprimer et faire distribuer la feuille patriotique 1 ci-jointe .

On dit une certaine dame borgne 2 et un certain homme aveugle . »

2 Mme de Pompadour dont les yeux étaient atteints ; l' « aveugle » est-il alors le roi ?