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28/06/2024

vous avez le droit de demander de l’emploi

... Et si vous n'avez pas le coeur et l'esprit trop fragiles vous pouvez aller subir la médiocrité faite homme et la vulgarité d'Hanouna : https://www.francetvinfo.fr/culture/tv/cyril-hanouna/

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Vrai parasite puant !

 

 

« A Nicolas Christiern de Thy, comte de Milly

À Ferney 21 décembre 1768 1

J’ai été malade deux mois entiers, monsieur ; on m’a cru mort : il s’en faut peu que je ne le sois. C’est ce qui fait que je ne vous ai point répondu. J’ai soixante-quinze ans : il y en a environ vingt-cinq que je n’ai vu M. le duc de N*** 2. Je n’ai aucune relation avec lui, encore moins avec le ministre : vous avez le droit de demander de l’emploi. Vous êtes à portée de mettre M. le duc de N*** dans vos intérêts, étant dans sa ville. Que peut un homme mort au monde, et enterré sous les montagnes des Alpes ? J’ai l’honneur d’être, avec tous les regrets possibles de n’être qu’un mort inutile, etc. »

2 Sans doute Louis, duc de Noailles ( 1713-1793 ), maréchal de France en 1775 . Il vient d'écrire à V* le 10 décembre . Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_de_Noailles

Je sais pourtant qu’il y a encore des Hottentots, même à Paris ; mais, dans dix ans, il n’y en aura plus : croyez-moi sur ma parole. Quoi qu’il en soit, madame, buvez et dormez

... Résumé de programme et acte de foi et allégeance de Bardella, chouchou de Marine qui a trouvé plus néfaste qu'elle -- si c'est possible --  et tremplin pour 2027 .

Bien joué l'embobinage ! ou comment se faire avoir jusqu'au trognon ! les Français croient tous qu'ils ont gagné des tours gratuits en tirant la queue du Mickey . La boîte à milliards est , disent-ils, évidemment pleine et n'attend que d'être répartie . Tournez manèges et cramponnez-vous bien, de gauche ou de droite, quelque soit le sens vous allez souffrir, le vertige et la gueule de bois vous attendent, les poches sous les yeux seront les seules qui seront encore pleines .

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https://www.lopinion.fr/de-qui-se-moque-t-on/dessin-barde...

 

 

« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand

21è décembre 1768

Madame, les imaginations ne dorment point ; et quand même elles prendraient, en se couchant, une dose des oraisons funèbres de l'évêque du Puy 1 et de l’évêque de Troyes 2, le diable les bercerait toujours. Quand la marâtre nature nous prive de la vue, elle peint les objets avec plus de force dans le cerveau ; c’est ce que la coquine me fait éprouver. Je suis votre confrère des Quinze-Vingts dès que la neige est sur mon horizon de quatre-vingts lieues de tour . Le diable alors me berce beaucoup plus que dans les autres saisons. Je n’ai trouvé à cela d’autre exorcisme que celui de boire ; je bois beaucoup, c’est-à-dire demi-septier à chaque repas, et je vous conseille d’en faire autant ; mais il faut que ce soit d’excellent vin . Personne, de mon temps, n’en avait de bon à Paris.

L’aventure du président Hénault est assurément bien singulière. On s’est moqué de moi avec des Beloste et des Belestat. On m'assure aujourd'hui que c'est un homme d'un très grand nom, et que vous connaissez. Je ne veux ni rien croire, ni même chercher à croire. L’abbé Boudot a eu la bonté de fureter dans la bibliothèque du roi. Il en résulte qu’il est très vrai qu’aux premiers états de Blois, dont vous ne vous souciez guère, on donna trois fois aux parlements le titre d’états généraux au petit pied 3. Je ne pense point du tout que les parlements représentent les états généraux, sur quelque pied que ce puisse être ; et quand même j’aurais acheté une charge de conseiller au parlement pour quarante mille francs, je ne me croirais point du tout partie des états généraux de France. Mais je ne veux point entrer dans cette discussion, et m’aller brouiller avec tous les parlements du royaume, à moins que le roi ne me donne quatre ou cinq régiments à mes ordres. De toutes les facéties qui sont venues troubler mon repos dans ma retraite, celle-ci est la plus extraordinaire.

L’A, B, C est un ancien ouvrage traduit de l’anglais, imprimé en 1762 4. Cela est fier, profond, hardi . Cette lecture demande de l’attention. Il n’y a point de ministre, point d’évêque en deçà de la mer, à qui cet A, B, C puisse plaire ; cela est insolent, vous dis-je, pour des têtes françaises. Si vous voulez le lire, vous qui avez une tête de tout pays, j’en chercherai un exemplaire, et je vous l’enverrai ; mais l’ouvrage a un pouce d’épaisseur. Si votre mère a ses ports francs, comme votre beau-père 5, je le lui adresserai pour vous.

Il faut que je vous conte ce qu’on ne sait pas à Paris. Le singe de Nicolet 6, qui demeure à Rome, s’est avisé de canoniser, non-seulement madame de Chantal 7, à qui saint François de Sales avait fait deux enfants, mais il a encore canonisé un frère capucin nommé frère Cucufin d’Ascoli 8. J’ai vu le procès-verbal de sa canonisation . Il y est dit qu’il se plaisait fort à se faire donner des coups de pied dans le cul par humilité, et qu’il répandait exprès des œufs frais et de la bouillie sur sa barbe, afin que les profanes se moquassent de lui, et qu’il offrait à Dieu leurs railleries.

Raillerie à part, il faut que Rezzonico soit un grand imbécile . Il ne sait pas encore que l’Europe entière rit de Rome comme de saint Cucufin.

Je sais pourtant qu’il y a encore des Hottentots, même à Paris ; mais, dans dix ans, il n’y en aura plus : croyez-moi sur ma parole. Quoi qu’il en soit, madame, buvez et dormez ; amusez-vous le moins mal que vous le pourrez, supportez la vie, ne craignez point la mort, que Cicéron appelle la fin de toutes les douleurs 9. Cicéron était un homme de fort bon sens. Je déteste les poules mouillées et les âmes faibles. Il est trop honteux d’asservir son âme à la démence et à la bêtise de gens dont on n’aurait pas voulu pour ses palefreniers. Souvenons-nous des vers de l’abbé de Chaulieu :

Plus j’approche du terme, et moins je le redoute.
Sur des principes sûrs mon esprit affermi,
Content, persuadé, ne connaît plus le doute :
Des suites de ma fin je n’ai jamais frémi
10.

Adieu, madame ; je baise vos mains avec mes lèvres plates, et je vous serai attaché jusqu’au dernier moment. »

1 Jean-Georges Lefranc de Pompignan ; voir lettre du 7 décembre 1768 à Mme Du Deffand : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/06/15/il-faut-chercher-la-paix-de-l-ame-dans-la-verite-et-fouler-a-6503124.html

 

5 Le duc et la duchesse de Choiseul .

6 Le singe de Nicolet historique ; voir lettre du 4 mars 1767 à Florian : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/08/12/en-verite-il-s-agit-dans-cette-affaire-de-l-honneur-de-la-fr-6396068.html

Mais bien entendu l'expression est ici plaisante et doit être prise au sens figuré : il s'agit du pape Clément XIII.

7 Sur la canonisation de Jeanne de Chantal, voir lettre du 4 septembre 1768 à Vernes : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/03/23/il-y-a-certainement-un-attentat-contre-les-droits-des-souver-6490924.html

La suite du texte est une impertinence voltairienne .

8 Voyez la Canonisation de saint Cucufin, quine semble pas avoir été publiée avant mars-avril 1769 , quoique imprimée sans doute plus tôt . Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Voltaire_-_%C5%92uvres_compl%C3%A8tes_Garnier_tome27.djvu/427

9 Dans la Pro Cluentio, CLXXI . Cicéron, dans une lettre à Toranius (ad familiares, VI, xxi), dit que la mort est la fin de toutes choses ; et cela à l’occasion d’un malheur qu’il craint. Horace, livre I, épître xvi, vers 79, appelle la mort ultima linea rerum.

10 On a le premier quatrain de la seconde des Trois Façons de penser sur la mort de Chaulieu, mais V* modifie de façon significative le dernier vers, qui est ainsi conçu chez Chaulieu ,dans sa iie épître à La Fare , 1774 :

· · · · · · · · · · ne connaît plus de doute.
Je ne suis libertin ni dévot à demi.

Voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Sur_la_mort,_conform%C3%A9ment_aux_principes_du_D%C3%A9isme

27/06/2024

Tant qu’en ces lieux surtout je pourrai commander, N’espérez pas me nuire et me déposséder

... Also sprach (du moins je le souhaite ) Emmanuel Macron . Tenez-vous-le pour dit ô détestables candidats payés grassement par vos partis de malfaisants .

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

21 décembre 1768

Mais, mon cher ange, l’empereur dit à la dernière scène 1 précisément ce que vous voulez qu’on dise dans votre lettre du 15 ; mais cela est annoncé dès la première scène dans les dernières additions ; mais le troisième acte finit par la prière la plus touchante et la plus orthodoxe ; mais il n’y a plus le moindre prétexte à l’allégorie. Oubliez-moi ; que Marin m’oublie ; mettez-vous bien tous deux La Touche dans la tête, et vous verrez qu’il n’y a pas la moindre ombre de difficulté à la chose. Me trompé-je ? ai-je un bandeau sur les yeux ? Mahomet et le Tartuffe n’étaient-ils pas cent fois plus hardis ? Quel est l’homme dans le parterre et dans les loges qui ne soit pas de l’avis de l’auteur, et qui ne le bénisse ? quel est dans la capitale des Welches le porte-Dieu ou le gobe-Dieu qui ose dire : « C’est moi qu’on a voulu désigner par les prêtres de Pluton » ? Quel rapport peut-on jamais trouver entre les juges d’Apamée et les chanoines de Notre-Dame ? Vous avez toujours l’auteur sur le bout du nez, et vous croyez l’ouvrage hardi, parce que cet auteur a une fort méchante réputation.

Mais, au nom de Dieu, ne pensez qu’à La Touche ; il vous a écrit un petit mot 2, en vous envoyant les trois premiers actes retouchés, sous l’enveloppe de M. le duc de Praslin. Vous trouverez sa lettre dans le paquet. Ma foi, ces trois actes raccommodent tout, et les deux anges doivent être très édifiés.

Je suis très fâché que votre fromage de Parmesan ne puisse être arrondi par Castro et Ronciglione 3. Je m’imaginais que l’aîné laisserait ces rognures à son cadet, d’autant plus qu’elles sont extrêmement à sa bienséance.

Je suis encore plus fâché que ce Tanucci 4 soit une poule mouillée. Que peut-il craindre ? Est-ce qu’il n’entend pas les cris de l’Europe ? Est-ce qu’il ne sait pas que cent millions de voix s’élèveront en sa faveur ?

Avez-vous vu la Riforma d’Italia 5, mes divins anges ? Les livres français sont tous circonspects et honnêtes en comparaison. Quand l’auteur parle des moines, il ne les appelle jamais que canailles. Enfin tous les yeux sont éclairés, toutes les langues déliées, toutes les plumes taillées en faveur de la raison.

Damilaville était le plus intrépide soutien de cette raison persécutée ; c’était une âme d’airain, et aussi tendre que ferme pour ses amis. J’ai fait une cruelle perte, et je la sens jusqu’au fond de mon cœur. Faut-il qu’un tel homme périsse, et que Fréron vive !

Vivez longtemps, mon cher ange. Vous devez, s’il m’en souvient, n’avoir que soixante-sept ans : j’étais bien votre aîné, et je le suis encore. Je vous aimerai jusqu’à ce que ma drôle de vie finisse.

Cependant que penseriez-vous si, au premier acte 6, Iradan parlait ainsi à ces coquins de prêtres :

Nous sommes ses soldats, j’obéis à mon maître ;
Il peut tout.

Le grand prêtre.

Oui, sur vous.

Iradan.

Sur vous aussi peut-être.
Les pontifes divins, des peuples respectés,
Condamnent tous l’orgueil, et plus, les cruautés.
Jamais le sang humain ne coula dans leurs temples.
Ils font des vœux pour nous, imitez leurs exemples.
Tant qu’en ces lieux surtout je pourrai commander,
N’espérez pas me nuire et me déposséder
Des droits que Rome attache aux tribuns militaires.7

etc., etc.

Que peut-on dire de plus honnête et même de plus fort en faveur des prêtres ? Cela ne prévient-il pas toutes les allusions, et, s’il faut qu’on en fasse, ces allusions ne sont-elles pas alors favorables ?

Ces quatre vers ajoutés ne s’accordent-ils pas parfaitement avec les additions déjà faites dans la première scène ? n’êtes-vous pas parfaitement content ?

Toute cette affaire-ci ne sera-t-elle pas extrêmement plaisante ? Ma foi, ce La Touche était un bon garçon. Voici le papier tout musqué pour le premier acte ; il n’y aura qu’à l’ajuster avec quatre petits pains. 

V.»

1 Dans la tragédie des Guèbres.

7 Les Guèbres, Ac. I, sc. 3, quelque peu modifiée .

26/06/2024

Je mourrai consolé en voyant la véritable religion, c’est-à-dire celle du cœur, établie sur la ruine des simagrées ...Avec ces sentiments, je brave le diable, qui n’existe point, et les vrais diables fanatiques, qui n’existent que trop

... Le Pen, Bardella, Mélenchon, Ciotti and Co sont les fanatiques actuels à éradiquer impérativement, avant qu'il soit trop tard et que l'on vive sous leur régime en bramant le "si j'aurais su !" de p'tit Gibus .

 

 

« A Philippe-Charles-François-Joseph de Pavée, marquis de Villevielle

20 décembre 1768

Non, mon cher marquis, non, les Socrates modernes ne boiront point la ciguë. Le Socrate d’Athènes était, entre nous, un homme très imprudent, un ergoteur impitoyable, qui s’était fait mille ennemis, et qui brava ses juges très mal à propos.

Nos philosophes aujourd’hui sont plus adroits, ils n’ont point la sotte et dangereuse vanité de mettre leurs noms à leurs ouvrages ; ce sont des mains invisibles qui percent le fanatisme d’un bout de l’Europe à l’autre avec les flèches de la vérité. Damilaville vient de mourir ; il était l’auteur du Christianisme dévoilé 1, et de beaucoup d’autres écrits. On ne l’a jamais su ; ses amis lui ont gardé le secret tant qu’il a vécu, avec une fidélité digne de la philosophie. Personne ne sait encore qui est l’auteur du livre donné sous le nom de Fréret 2. On a imprimé en Hollande, depuis deux ans, plus de soixante volumes contre la superstition. Les auteurs en sont absolument inconnus, quoiqu’ils puissent hardiment se découvrir. L’Italien qui a fait la Riforma d’Ilalia 3 n’a eu garde d’aller présenter son ouvrage à Rezzonico 4; mais son livre a fait un effet prodigieux. Mille plumes écrivent, et cent mille voix s’élèvent contre les abus et en faveur de la tolérance. Soyez très sûr que la révolution qui s’est faite depuis environ douze ans dans les esprits n’a pas peu servi à chasser les jésuites de tant d’États, et a bien encouragé les princes à frapper l’idole de Rome, qui les faisait trembler tous autrefois. Le peuple est bien sot, et cependant la lumière pénètre jusqu’à lui. Soyez bien sûr, par exemple, qu’il n’y a pas vingt personnes dans Genève qui n’abjurent Calvin autant que le pape, et qu’il y a des philosophes jusque dans les boutiques de Paris.

Je mourrai consolé en voyant la véritable religion, c’est-à-dire celle du cœur, établie sur la ruine des simagrées. Je n’ai jamais prêché que l’adoration d’un Dieu, la bienfaisance, et l’indulgence. Avec ces sentiments, je brave le diable, qui n’existe point, et les vrais diables fanatiques, qui n’existent que trop. Quand vous irez à votre régiment, n’oubliez pas mon petit château, qui est votre étape.

Je ne veux point mourir sans vous avoir embrassé. »

1  Le Christianisme dévoilé, ou Examen des principes et des effets de la religion chrétienne, dont la première édition porte la date de 1756, quoiqu’elle ne soit, que de 1761. Barbier attribue l’ouvrage au baron d’Holbach ; voyez n° 2317 de la seconde édition du Dictionnaire des Anonymes.

Cette attribution est généralement acceptée ; pour la publication de cet ouvrage, voir lettre du 15 décembre 1766 à Mme de Saint-Julien : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/03/16/il-est-entierement-oppose-a-mes-principes.html

2 L’Examen critique des apologistes de la religion chrétienne ; voir lettre du 22 janvier 1768 à Morellet : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2023/08/28/une-si-bonne-cause-defendue-par-de-si-mauvaises-raisons-6458471.html

4 Le pape Clément XIII .

25/06/2024

il n’y a plus rien à changer que le titre de la tragédie

... Au lieu de l'appeler "Elections législatives" nommons-la "Triomphe des bonimenteurs" ou "Désastre pour le bon sens" .

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

19 décembre 1768

Mon cher ange, les mânes de La Touche se recommandent à votre bonté habile et courageuse. Je me trompe fort, ou il ne reste plus aucun prétexte a l’allégorie. La fin du IIIè acte pouvait en fournir ; on l’a entièrement retranchée. Ces prêtres mêmes étaient trop odieux, et n’attiraient que de l’indignation lorsqu’il fallait inspirer de l’attendrissement. C’était à la jeune Guèbre à rester sur le théâtre, et non à ces vilains prêtres qu’on déteste. Elle tire des larmes ; elle est orthodoxe dans toutes les religions ; son monologue est un des moins mauvais qu’ait jamais faits La Touche. Les prêtres ne paraissent plus dans les trois derniers actes ; et leur rôle infâme étant fort adouci dans les deux premiers, il me paraît qu’un inquisiteur même ne pourrait s’élever contre la pièce.

Voici donc les trois premiers actes, dans lesquels vous trouverez beaucoup de changements. Les deux derniers étant sans prêtres, il n’y a plus rien à changer que le titre de la tragédie. La Touche l’avait intitulée Les Guèbres ; cela seul pourrait donner des soupçons. Ce titre des Guèbres rappellerait celui des Scythes, et présenterait d’ailleurs une idée de religion qu’il faut absolument écarter. Je l’appelle donc Les Deux Frères. On pourra l’annoncer sous ce nom, après quoi on lui en donnera un plus convenable.

Lekain peut donc la lire hardiment à la Comédie. Il ne s’agit plus que d’anéantir dans la tête de Marin le préjugé qui pourrait encore lui donner de la timidité : c’est un coup de partie, mon cher ange ; il faut ressusciter le théâtre, qui faisait presque seul la gloire des Welches. Je vous avouerai de plus que ce serait une occasion de faire certaines démarches que sans cela je n’aurais jamais faites 1. Je n’ai plus que deux passions, celle de faire jouer Les Deux Frères, et celle de revoir les deux anges.

J’ai encore une demi-passion, c’est que l’opéra 2 de M. de La Borde soit donné pour la fête du mariage du dauphin. La musique est certainement fort agréable. Je doute que M. le duc de Duras puisse trouver rien de mieux. Dites-moi si vous voulez lui en parler, et si vous voulez que je lui en écrive.

Mme la comtesse de B. aime-t-elle la musique 3?

sub umbra alarum tuarum 4. »

1  V* , comme dans la lettre du 17 décembre 1768 à Mme Denis, semble songer à un retour à Paris ; voir : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2024/06/22/les-personnages-odieux-sont-toujours-a-la-glace-6504070.html

3 Cette phrase où il est sans doute question de Mme Du Barry est omise dans l'édition de Kehl et toutes éditions postérieures .

4 Psaume xvi, 8. : à l'ombre de tes ailes : https://www.aelf.org/bible/Ps/16#:~:text=08%20Garde-moi%2....

24/06/2024

Je ne vous ai vu qu'un moment

... et c'est déjà bien trop M. Bardella, vous partagez ma détestation avec l'inénarrable candidat au califat : Mélenchon . Allez tous deux au diable (pour cette fois je souhaite qu'il existe )!

 

 

 

« A Jacques Necker

A Ferney par Genève 18è décembre1768 1

Un heureux hasard, monsieur, veut que j'aie avec vous une petite affaire . Vous verrez de quoi il est question par le billet ci-joint de M. de Beaumont, votre correspondant . Je saisis cette occasion pour présenter mes respects à Mme Necker . Il ne s'agit que de billets de loterie dans la lettre de M. de Beaumont, le meilleur lot que l'on ait jamais eu est celui de Mme Necker et le vôtre . Je ne vous ai vu qu'un moment à Ferney sans vous connaître ; si j'avais su qui vous étiez, j’aurais fait tous mes efforts pour vous voir plus longtemps .

J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments qui vous sont dus, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Original signé (château de Broglie ).

Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Necker

23/06/2024

Les personnages odieux sont toujours à la glace

... Toujours vrai. Voir Poutine et Kim Jung-un, modèles de jovialité n'est-ce pas ?

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Nous sommes joyeux ! Vive les pompes funèbres !

 

 

 

« A Marie-Louise Denis

17è décembre 1768

Je dois vous confier, ma chère nièce, que défunt La Touche m'apparut hier au soir, dans le temps qu'on cachetait ma lettre qui doit vous être parvenue par Lyon 1 . Il me dit qu'il avait fait jouer chez Pluton, comme de raison, sa rapsodie, et qu'il avait remarqué que la fin du IIIè acte qui n'est qu'une satire des prêtres plutoniques, avait glacé l’auditoire .  « On a trouvé des vers assez bien faits, me dit-il, mais cela ne suffit pas, il faut attendrir les diables, et faire pleurer les furies . Les personnages odieux sont toujours à la glace. J'aurais dû faire parler la pauvre Arzame à laquelle on s'intéresse, au lieu de ces prêtres d'enfer qui révoltent . »

Alors il me montra ce qu'il avait substitué à la fin de ce IIIè acte . Cette nouvelle leçon m' a paru infiniment supérieure à l'autre ; elle est touchante ; elle est neuve, et en expliquant le système de la religion des Perses, elle est orthodoxe dans toutes les religions du monde .

Je vous avoue que nous avons pleuré, Wagnière et moi, quand La Touche nous récitait ce petit morceau . Le meilleur effet qu'il puisse faire c'est d’écarter toute idée de satire, et de repousser toutes les allusions indiscrètes . Par là M. Marin est bien plus à son aise . Sa bonne volonté ne peut plus être combattue par la crainte de donner prise à la malignité .

Il y a encore un parti à prendre pour prévenir toutes les chicanes, c'est de ne point intituler la pièce Les Guèbres, mais si l'on veut, Les Deux frères, ou Les Deux Officiers, tragédie, dont la plupart des acteurs sont de simples citoyens, dans le goût des tragédies bourgeoises . Voilà comment on pourrait l'annoncer à peu près au théâtre . L'intitulé des Guèbres ressemble trop à celui des Scythes, et pourrait être trop dangereux .

Je vous prie de communiquer aux anges le changement que La Touche a fait en enfer . Il y a encore quelques petits point d'aiguille . La Touche avoue qu'il n' a jamais pu s'empêcher de faire ses pièces en douze ou quinze jours, mais qu'il a mis ensuite beaucoup de temps à les corriger. Je crois que celle-ci peut avoir un grand succès, il ne s'agit que de jouer naturellement et avec onction . Non seulement ce succès serait une chose très plaisante et très amusante pour vous, mais il peut procurer des choses très agréables . Je ne vois plus nulle difficulté à la lire aux comédiens et à la jouer . Je pense qu'il faut que je renvoie les trois premiers actes bien copiés par Bigex dont on ne connaît point l'écriture . À l’égard des deux derniers, je pense qu'il n'y a plus rien à faire .

Voilà tout ce que je peux vous dire aujourd’hui sur cette facétie dont peut-être on peut tirer un grand parti .

Voici un petit billet pour les deux enfants 2. Mme de Florian est-elle arrivée ?

Je vous embrasse le plus tendrement du monde.

 

Changements pour le IIIè acte.

Scène 4è

après ces vers

Cesene

Va, dans ce jour de sang je juge que nous sommes

Les plus infortunés de la race des hommes,

( ôtez tout ce qui suit et mettez ainsi )

Cesene

Va, dans ce jour de sang je juge que nous sommes

Les plus infortunés de la race des hommes. –

Va fille trop fatale à ma triste maison,

Objet de tant d'horreurs, de tant de trahison ;

Je ne me repens point de t'avoir protégée.

Le traître expirera : mais mon âme affligée

N 'en est pas moins sensible à ton cruel destin.

Me pleurs coulent sur toi, mais ils coulent en vain ;

Tu mourras : aux tyrans rien en peut te soustraire ;

Mais je te pleure encore en punissant ton frère .

( aux soldats )

Allons auprès du mien : donnons-lui nos secours

Et sauvons s'il se peut ses déplorables jours .

 

Scène 5è

Arzame seule

Il va frapper Arzame ; il me plaint, il me pleure !

Mon frère va mourir, il faut bien que je meure

Ou par l'arrêt sanglant de mes persécuteurs

Ou par mes propres mains, ou par tant de douleurs . –

Ô mort ! Ô destinée ! Ô Dieu de la lumière,

Créateur incréé de la nature entière,

Être immense et parfait, seul être de bonté,

Pourquoi tant d’injustice et de calamité ?

Quel pouvoir exécrable infecta ton ouvrage ?

La nature est ta fille et l'homme est ton image.

Arimane a-t-il pu défigurer ses traits

Et créer le malheur ainsi que les forfaits ?

Est-il ton ennemi ? Que ta puissance affreuse

Arrache donc la vie à cette malheureuse.

J'espère encore en toi ; j'espère que la mort

Ne pourra malgré lui détruire tout mon sort .

Oui, je naquis pour toi puisque tu m'as fait naître ;

Mon cœur me l'a trop dit, je n'ai point d'autre maître .

Cet être malfaisant qui corrompt ta loi

Ne m'empêchera pas d'aspirer jusqu'à toi.

Par lui persécutée, avec toi réunie,

J'oublierai dans ton sein les horreurs de ma vie.

Il en est une heureuse et je veux y courir ;

C'est pour vivre avec toi que tu me fais mourir. »

2 Cette lettre aux Dupuits n'est pas connue .