10/01/2014
Tout passe; la vertu reste voilà ce qui vous soutient
... Et un moment de honte est si vite passé que la presse people peut affirmer tout et n'importe quoi pour vendre sa paperasse illustrée : Fanfoué et Julie sont dans un bateau, Fanfoué tombe à l'eau, qui reste au port ? Valérie ( à Dieu va't ! ).
Il serait quand même temps que la direction du pays passe avant, et au dessus de, la braguette, avec ou sans prostate .
Il vaut mieux écouter Alex Décotte : http://www.rts.ch/la-1ere/
dans l'émission Détours du 10 janvier 2014 à 13h06: http://download-audio.rts.ch/la-1ere/programmes/detours/2014/detours_20140110_full_detours_02252765-121b-4e05-973d-52121b1bbda8-128k.mp3
et faire un plus qu'agréable détour sur son site (un de ses sites ) : www.bourlingue.net
Et puisque l'on évoque actuellement la censure, voyons un peu au jour le jour ce qu'elle dit ( ou fait taire ) , toujours avec Alex (je me demande comment il fait pour mettre à jour autant de pages ) : http://blog.voltairopolis.org/
« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de SAXE-GOTHA
Aux Délices, près de Genève, 25 décembre 1758.
Madame, que je plains Votre Altesse sérénissime ! et qu'elle a besoin de toute la sérénité de sa belle âme! Quoi! sans cesse entre l'enclume et le marteau! Obligée de fournir son contingent pour le malheur de son pays, entourée d'États dévastés, et n'ayant que des pertes à faire dans une confusion où il n'y a rien à gagner pour elle! Où est le bel optimisme de Leibnitz ? Il est dans votre cœur, et n'est que là.
Le roi de Prusse me mande toujours qu'il est plus à plaindre que moi et il a très-grande raison. Je jouis de mes ermitages en repos, et il n'a des provinces qu'au prix du sang de mille infortunés. Au milieu des soins cruels qui doivent l'agiter sans cesse, il me paraît bien autrement touché de la mort de sa sœur que de celle de son frère 1. Votre Altesse sérénissime connaissait-elle Mme la margrave de Bareith? Elle avait beaucoup d'esprit et de talents; je lui étais très-attaché, et elle ne s'est pas démentie un moment à mon égard. Vos vertus, votre mérite, vos bontés, font ma consolation et mon soutien, après la perte d'une princesse à qui j'avais les plus grandes obligations.
Je la suivrai bientôt ; ma caducité et mes continuelles infirmités ne me permettent pas d'espérer de pouvoir encore me mettre à vos pieds. Quand je saurai que la tranquillité est revenue dans vos États, quand j'apprendrai que les horreurs de la guerre n'approchent plus de votre charmante cour, et que le vilain dieu Mars ne trouble plus le séjour des Grâces, alors je m'écrierai Tout est bien! avec la grande maîtresse des cœurs. Je présente mes vœux et mon respect à toute votre auguste famille. Le règne du cardinal de Bernis n'a pas duré longtemps. Tout passe; la vertu reste voilà ce qui vous soutient, madame. Je me mets à vos pieds avec le plus profond et le plus tendre respect .
V. »
1 Auguste Guillaume , frère cadet de Frédéric II, était mort à Oranienbourg cette même année 1758 : http://fr.wikipedia.org/wiki/Auguste-Guillaume_de_Prusse_%281722-1758%29
16:45 | Lien permanent | Commentaires (0)
09/01/2014
Nous serons plus heureux vous et moi dans notre sphère que des ministres exilés, peut-être même que des ministres en place
...Non pas "peu-être", mais surement ! N'est-ce pas Mam'zelle Wagnière ?
Copyright Bugg Toxic -my youngest son.
« A Nicolas-Claude THIERIOT.
Chez madame la comtesse de Montmorency
rue Vivienne
à Paris
24 décembre [1758] aux Délices
Vous vous trompez mon ancien ami, j'ai quatre pattes au lieu de deux . Un pied à Lausanne dans une très belle maison pour l'hiver, un pied aux Délices près de Genève où la bonne compagnie vient me voir, voilà pour les pieds de devant . Ceux de derrière sont à Ferney et dans la comté de Tournay que j'ai achetée par bail emphytéotique du président de Brosses .
M. Crommelin se trompe beaucoup davantage sur tous les points . La terre de Ferney est aussi bonne qu'elle a été négligée . J'y bâtis un assez beau château . J'ai chez moi la pierre et le bois, le marbre me vient par le lac de Genève . Je me suis fait dans le plus joli pays de la terre trois domaines qui se touchent . J'ai arrondi tout d'un coup la terre de Ferney par des acquisitions utiles . Le tout monte à la valeur de plus de dix mille livres de rente , et m'en épargne plus de vingt puisque ces trois terres défrayent presque une maison où j'ai plus de trente personnes et plus de douze chevaux à nourrir .
Nave ferar magna an parva, ferar unus et idem.1
Je vivrais très bien comme vous, mon ancien ami, avec cent écus par mois , mais Mme Denis, l'héroïne de l'amitié, et la victime de Francfort, mérite des palais, des cuisiniers, des équipages, grande chère et beau feu . Vous fites très sagement d'appuyer votre philosophie de deux cents écus de rente de plus .
Tractari mollior œtas , Imbecilla volet 2, et il vous faut Mundus victus, non déficiente crumena.3 Nous serons plus heureux vous et moi dans notre sphère que des ministres exilés, peut-être même que des ministres en place . Jouissez de votre doux loisir . Moi je jouirai de mes très douces occupations, de mes charrues à semoir, de mes taureaux, de mes vaches.
Hanc vitam in terris Saturnus agebat.4
Quel fracas pour le livre de M. Helvétius! Voilà bien du bruit pour une omelette5! quelle pitié! Quel mal peut faire un livre lu par quelques philosophes? J'aurais pu me plaindre de ce livre, et je sais à qui je dois certaine affectation de me mettre à côté de certaines gens 6. Mais je ne me plains que de la manière dont l'auteur traite l'amitié 7, la plus consolante de toutes les vertus. Envoyez-moi, je vous prie, cette abominable justification de la Saint-Bartliélemy 8; j'ai acheté un ours, je mettrai ce livre dans sa cage. Quoi! on persécute M. Helvétius, et on souffre des monstres !
Je ne connais point Jeanne, je ne sais ce que c'est; mais je me prépare à mettre en ordre les matériaux qu'on m'envoie de Russie, pour bâtir le monument de Pierre le Créateur, et j'aime encore mieux bâtir mon château. Je vous remercie tendrement des cartes de ce malheureux univers 9.
Tuus
V. »
1 Que l'esquif qui me porte soit grand ou petit, je ne serai toujours qu'un seul et même passager .Horace, Épîtres, II, 200 .
2 V* a transformé mollius en mollior ; un âge affaibli exigera un traitement plus doux. Horace , Satires, II, 85-86
5 Voir lettre à d'Argental du 4 novembre 1743 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2009/11/06/il-n-y-a-point-de-fautes-qui-ne-soient-bien-cheres-quand-le.html
6 Allusion à De l'Esprit, livre II, chap. xii, où Helvétius écrit « pour former les esprits des Corneille, des Racine, des Crébillons et des Voltaire. » ; voir page 272 : http://books.google.fr/books?id=DlRFAAAAYAAJ&pg=PA261&lpg=PA261&dq=De+l%27Esprit,+livre+II,+chap.+xii+helvetius&source=bl&ots=Ezskek_M0Q&sig=lwfDHcJg5TU4Ah--FGQnRPwQWPY&hl=fr&sa=X&ei=_sfOUpvHMqPF0QXN1IDgBg&ved=0CEEQ6AEwAw#v=onepage&q=voltaire&f=false
7 Voir lettre du 17 décembre 1758 à Helvetius : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/01/01/votre-livre-est-dicte-par-la-saine-raison-partez-vite-et-qui-5260293.html
8 Jean Novi de Caveirac [qui figure parmi les voués à l'enfer, sur le tableau dit Triomphe de Voltaire, au château de Ferney-Voltaire] : Apologie de Louis XIV et de son conseil, sur la révocation de l’Édit de Nantes […] avec une dissertation sur la journée de la St Barthélémy , 1758 . V* a noté sur son exemplaire « ouvrage abominable […] par un abbé de Caveirac . Presque tous les faits sont déguisés, les raisonnements faux, le style déclamatoire, et les principes affreux . »
9 Voir lettre du 6 décembre 1758 à Thieriot : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/12/22/je-suis-un-peu-mecontent-des-bouquins-nouveaux-mais-je-me-co-5253291.html
17:28 | Lien permanent | Commentaires (0)
Tant d’exils ont l'air d'une plaisanterie, mais ce qui n'est point plaisant c’est l'épuisement de la France
...On peut rire de l'exil doré d'un Johnny ou d'un Gégé, -artistes déglingués-.
On peut s'attrister de l'exil tout aussi volontaire (en quête d'ors) de Français de valeur, ce qu'on nomme parfois la fuite des cerveaux (ce qui ne peut arriver à Nabila, ni à Dieudonné, hélas !) .
Pauvre France, il n'y a pas que ton café qui fout le camp !
Mais n'ayons crainte, ces exilés volontaires de grande qualité sont un atout pour notre pays, qu'ils reviennent dans la mère patrie ou non . De toute manière, n'oublions pas que nous sommes aussi un pays d'accueil de diplômés étrangers, ce qui nous sauve dans bien des domaines, dont un qui touche tout le monde un jour ou l'autre, celui de la médecine .
Inspirez fort et dites 33 en roumain !
« A Jean-Robert Tronchin
23 décembre [1758]
Pardon des minuties mon cher monsieur, ayez la bonté de faire affranchir celle-ci .
Le cardinal de Bernis a de quoi se consoler 1, s’il digère et s'il est philosophe . Tant d’exils ont l'air d'une plaisanterie, mais ce qui n'est point plaisant c’est l'épuisement de la France . Je vous embrasse tendrement .
V. »
1 Après la défaite de Rossbach en novembre 1757, Bernis qui se voulait conciliateur dans le conflit reçut quinze jours plus tard une lettre de cachet du roi, lui enjoignant de se rendre sous deux jours dans sa résidence de Vic-sur-Aisne et de n’en plus sortir. C’était l’exil.
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08/01/2014
La plupart des gens de lettres de l'Europe me reprochent déjà que je vais faire un panégyrique, et jouer le rôle d'un flatteur; il faut leur fermer la bouche en leur faisant voir que je n'écris que des vérités utiles aux hommes
... Flatteur ? je ne le suis pas .
Ecrire des vérités ? oui . Utiles ? je n'ai pas cette prétention, si ce n'est d'être un pourvoyeur des écrits de Voltaire qui, eux, valent le coup d'être connus .
« A Ivan Ivanovitch SCHUVALOV
à Moscou
Aux Délices près de Genève
24 décembre 1758
Monsieur, j'eus l'honneur de vous écrire il y a quatre ou cinq jours 1. J'ai reçu, le 21 de décembre, la lettre dont vous m'honorez, du 23 d'octobre 2, et je ne sais à quoi attribuer un si long retardement. Je vous réitère mes prières, et je vous fais mes très-humbles remerciements sur vos nouveaux mémoires. Vous les intitulez Réponses à mes objections . Permettez-moi d'abord de dire à Votre Excellence que je n'ai jamais d'objections à faire aux instructions qu'elle veut bien me donner; que je fais simplement des questions, et que je demande des éclaircissements à l'homme du monde qui me parait le plus savant dans l'histoire.
Nous ne sommes encore qu'à l'avenue du Grand Palais que vous voulez bâtir par mes mains, et dont vous me tracez l'ordonnance. Il y a dans cette avenue quelques terres incultes, quelques déserts qu'il faut passer vite. Il est moins question de savoir d'où vient le mot de tsar que de faire voir que Pierre Ier a été le plus grand des tsars. Je me garderai bien de mettre en question si le blé de la Livonie vaut mieux que celui de la Carélie, j'observerai seulement ici, monsieur, que l'agriculture a été très-négligée dans toute l'Europe jusqu'à nos jours.
L’Angleterre, dont vous me parlez, est un des pays les plus fertiles en blé; cependant ce n'est que depuis quelques années que les Anglais ont su en faire un objet de commerce immense. La nouvelle charrue et le semoir sont d'une utilité qui semble devoir désormais prévenir toutes les disettes. J'en ai vu beaucoup d'expériences, et je m'en sers avec succès dans deux de mes terres en France dans le voisinage de Genève. Vous voyez par là que les arts ne se perfectionnent qu'à la longue; et je vois aussi quelles obligations votre empire doit avoir à Pierre le Grand, qui lui a donné plusieurs arts, et en a perfectionné quelques uns.
Je me servirai du mot Russien, si vous le voulez; mais je vous supplie de considérer qu'il ressemble trop à Prussien, et qu'il en parait un diminutif ce qui ne s'accorde pas avec la dignité de votre empire. Les Prussiens s'appelaient autrefois Borusses, comme vous le savez, et, par cette dénomination, ils paraissaient subordonnés aux Russes. Le mot de Russe a d'ailleurs quelque chose de plus ferme, de plus noble, de plus original, que celui de Russien; ajoutez que Russien ressemble trop à un terme très-désagréable dans notre langue, qui est celui de ruffien; et, la plupart de nos dames prononçant les deux ss comme les ff, il en résulte une équivoque indécente qu'il faut éviter.3 Après toutes ces représentations, j'en passerai par ce que vous voudrez; mais le grand point, monsieur, l'objet important et indispensable, devant lequel presque tous les autres disparaissent, est le détail de tout ce qu'a fait Pierre le Grand d'utile et d'héroïque. Vous ne pouvez me donner trop d'instructions sur le bien qu'il a fait au genre humain. La plupart des gens de lettres de l'Europe me reprochent déjà que je vais faire un panégyrique, et jouer le rôle d'un flatteur; il faut leur fermer la bouche en leur faisant voir que je n'écris que des vérités utiles aux hommes.
J'espère aussi, monsieur, que vous voudrez bien me faire parvenir des mémoires fidèles sur les guerres entreprises par Pierre Ier, sur ses belles actions, sur celles de vos compatriotes, en un mot, sur tout ce qui peut contribuer à la gloire de l'empire et à la vôtre.
J'ai l'honneur d'être, monsieur,
de Votre Excellence
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire »
1 Voir lettre du 16 décembre 1758 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/12/30/je-vous-souhaite-une-annee-remplie-de-toutes-les-felicites-q-5258648.html
3 Dans la lettre du 3 octobre 1758, Schouvalov fait à V* la remarque suivante : « Je vous prierai aussi instamment monsieur toutes les fois qu'il s'agira de notre nation de vouloir bien au lieu de Russes dire les Russiens . Ce mot est plus voisin de notre langue et paraît être meilleur […] . » La prononciation dont parle V* n'est guère attestée en dehors du fait connu que les petits-maîtres affectaient une sorte de zozotement . Ce qui est certain, c'est que dans l'écriture les deux s longs se confondaient aisément avec deux f . On nommait rufian ou rufien un débauché .
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07/01/2014
J'ai le cœur plus tendre qu'un autre, parce qu'heureusement je suis loin des rois et des courtisans qui l’endurcissent
... http://www.deezer.com/track/64213532
« Au comte Hermann Karl von Keyserlingk 1
[23 décembre 1758]
Monsieur, après avoir eu l'honneur de vous écrire, et de vous envoyer une lettre pour M. de Showalow votre ami, j'ai reçu celle dont vous m'honorez 2 . Je suis sensiblement touché de votre perte et de votre affliction 3 ; je ne savais pas lorsque je vous souhaitais toutes les félicités dont vous êtes si digne que vous eussiez essuyé un si grand malheur ; je n'ai l'honneur de vous connaître que de réputation, on m'a dit combien vous êtes aimable, et plus vous avez été aimé de madame votre femme, plus la sensibilité de votre cœur vous rend à plaindre . La philosophie est quelquefois bien impuissante dans de pareilles occasions ; la société seule de vos amis peut soulager votre douleur . Il paraît que personne n'est plus fait pour avoir des amis que vous , si on peut en avoir à la cour . J'ai le cœur plus tendre qu'un autre, parce qu'heureusement je suis loin des rois et des courtisans qui l’endurcissent . Ce cœur s'intéresse véritablement à tout ce qui vous regarde, et je voudrais pouvoir vous en donner des preuves .
Voici ma réponse aux papiers que vous avez bien voulu avoir la bonté de m'envoyer de la part de M. de Schowalow ; j'use de la liberté que vous me donnez .
J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je dois à Votre Excellence . »
1 Baron , puis comte en 1742, au service de la Russie , (1695ou 96- 1764 ou 65) . On dit qu'il est associé aux fameuses Variations Goldberg que Bach aurait composées afin de bercer les insomnies du comte Hermann Karl von Keyserlingk .
Reichsgraf Hermann Carl von Keyserlingk who was the Russian ambassador to Saxony helped Johann Sebastian Bach to get the title Court composer to the King of Poland and the Elector of Saxony, received from Frederick Augustus I of Saxony in 1733.
Voir : http://en.wikipedia.org/wiki/Herman_Karl_von_Keyserling
3 Nous avons ici une vraie lettre de condoléances ; vois page 5 : http://digitalcommons.unl.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1015&context=modlangfrenc
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06/01/2014
Votre Altesse Sérénissime, madame, daigne m'honorer d'un présent unique. Il me semble qu'il n'y a point de princesse qui pût en donner autant
...
« A Caroline-Louise de Hesse-Darmstadt, margravine de Baden-Durlach 1
Aux Délices 23 décembre 1758
Je baise à deux genoux la main
Qui crayonna ce rare ouvrage.
Votre tableau paraît divin ;
Mais le portrait du peintre eût charmé davantage .
Ah que ne puis-je peindre à la postérité
La grandeur sans orgueil, la douceur sans faiblesse !
Et les charmes de la beauté
Ornant le front de la sagesse !
Je connais mon modèle ; on verrait trait pour trait
Les grâces, les talents et les vertus ensemble .
Que dirait-on de ce portrait ?
Qu'il est faible, mais qu'il ressemble .
Votre Altesse Sérénissime, madame, daigne m'honorer d'un présent unique 2. Il me semble qu'il n'y a point de princesse qui pût en donner autant . Je conserverai toute ma vie, madame, avec la plus respectueuse et la plus vive reconnaissance, ce monument de vos talents et de vos bontés . Je ne désire que de recouvrer un peu de santé pour être en état de venir remercier Votre Altesse Sérénissime et de me mettre encore une fois à ses pieds et à ceux de monseigneur le margrave . Je ne cesse de parler du séjour de Carlsrue . La nature a rendu ce lieu bien agréable . Vous l'embellissez par les arts, et quiconque en a vu la souveraine désire passionnément de lui faire encore sa cour . Lorsque j'avais l'honneur d'être dans le palais de Vos Altesses Sérénissimes j’étais confirmé dans l'idée que l'Allemagne est aujourd'hui ce qu’était l'Italie du temps des ducs de Ferrare, et des Médicis . Faut-il que tant de malheurs ravagent un pays qu'on embellissait avec tant de peine ? Mme la margravine de Bareith qui aimait comme vous tous les arts et dont le mérite approchait du vôtre meurt au milieu de sa carrière après les plus violents chagrins . Mme la duchesse de Gotha voit ses États dévastés . La Saxe est en proie à tous les fléaux . Toute l’Allemagne souffre . Carlsrue est très bien nommé dans ces temps horribles . C'est en effet l’asile du repos . Puisse-t-il longtemps l'être . Puissiez-vous madame, vous et monseigneur, et toute votre auguste famille jouir de la tranquillité que de princes ont perdue . Puissiez-vous être aussi heureuse que vous le méritez .
Je suis avec le plus profond respect madame
de Vos Altesses Sérénissimes
le très humble et très obéissant serviteur
Voltaire »
2 Le 8 décembre 1758, la margravine écrivait à V* : « Le coche qui va à Lausanne et qui partit samedi d'ici, est chargé de vous remettre, monsieur, mon méchant ouvrage que vous m'avez permis de vous envoyer . » Il s'agissait peut-être du « pastel » que la margravine dit être « en ouvrage » le 17 août 1758 , et qu'elle avait dû commencer lors du séjour de V* à la cour de l’Électeur palatin de juillet-août 1758 .
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05/01/2014
Cela renvoie loin mais le président n'attend pas après pour avoir de quoi boire
... Cette phrase est aisément applicable à tous les discours de voeux des président(e)s de tous pays de ce globule sur lequel nous grouillons .
S'ils ne manquent pas de quoi boire, eux, je trouve qu'ils nous coupent l'appétit .
« A Jean-Robert TRONCHIN
à Lyon
Aux Délices, 22 décembre [1758].
Excès de précaution, mon cher monsieur, est quelquefois nécessaire. Ce chien ne mord pas, disait le cardinal Mazarin, mais il peut mordre 1. Ma petite précaution est bonne, et, quoiqu'on m'ait un peu chicané, j'ai signé le traité. Vous paierez non seulement les 16 mille, et les 19 mille livres, mais encore six cents livres de vin du marché 2. J'ai fais le billet au paiement de Pâques . Cela renvoie loin mais le président n'attend pas après pour avoir de quoi boire .
Je suis content de mes acquisitions. Les bords de votre lac m'enchantent plus que jamais; vos amis et la bonne compagnie de Genève ne me permettent pas la solitude. Mes terres ne me permettent pas l'oisiveté; je goûte le plus parfait bonheur dont on puisse jouir à mon âge, et je plains plus d'un roi et plus d'un ministre. On dit que les Russes entrent dans Dantzig . Je n'en crois rien mais avouez qu'il vaut mieux négocier à Lyon qu'en Allemagne . Bonsoir mon cher correspondant .
V.
J'ai chez moi un mien parent mousquetaire du roi qui tiraille comme vous calculez . Je voudrais lui donner deux fusils pour ses étrennes . On en 3 fait dans le Forez d'excellents et à bon marché . Or dites moi mon cher monsieur comment il faut faire pour en avoir, car en vérité je suis honteux de fatiguer à la fois vos bontés pour des cent mille écus et pour des bagatelles . »
2 Le pot-de-vin dû à la femme du président de Brosses « un cent d'épingles »; voir lettre du 18 novembre 1758 à de Brosses : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/12/10/nous-n-avons-pas-de-grands-genies-a-gex-mais-les-boeufs-sont-5243350.html
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