04/03/2022
j’en suis réduit là. Je suis comme les habitants de nos colonies *, qui ne savent plus comment faire quand ils attendent de l’Europe des aiguilles et des peignes
... Conclusion temporaire après discussion du président Macron avec le dictateur-menteur Poutine : https://www.bfmtv.com/international/europe/tu-te-racontes...
* Ex-colonies (NDLR).
« A Charles Michel, marquis du Plessis-Villette
J’ai une plaisante grâce à vous demander. Je remarquai, lorsque vous me faisiez l’honneur d’être dans mon taudis, que vous ne soumettiez jamais votre visage à la savonnette et au rasoir d’un valet de chambre qui vient vous pincer le nez et vous échauder le menton. Vous vous serviez de petites pincettes fort commodes, assez larges, ornées d’un petit ciseau qui embrasse la racine du poil sans mordre la peau. J’en use comme vous, quoiqu’il y ait une prodigieuse différence entre votre visage et le mien. Mais il faut que cet art soit bien peu en vogue, puisque je n’ai pu trouver à Genève ni à Lyon une seule pince supportable ; il n’y en a pas plus que de bons livres nouveaux. Je vous demande en grâce de vouloir bien ordonner à un de vos gens de m’acheter une demi-douzaine de pinces semblables aux vôtres. Il n’y aurait qu’à les envoyer à M. Tabareau, en le priant de me les faire parvenir à Genève.
Il est vrai que voilà une commission très ridicule. J’aimerais bien mieux pincer tous les mauvais poètes, tous les calomniateurs, tous les envieux que de me pincer les joues. Mais enfin j’en suis réduit là. Je suis comme les habitants de nos colonies, qui ne savent plus comment faire quand ils attendent de l’Europe des aiguilles et des peignes. Enfin les petits présents entretiennent l’amitié, et je vous serai très obligé de cette bonté.
A Ferney, ce 1er décembre 1766 .1 »
1 Copie contemporaine incomplète de la dernière phrase du dernier paragraphe ; éditions Œuvres du marquis de Villette, 1782 . Cette lettre est placée par erreur , par Beuchot, en date du 8 juillet 1765 : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1765/Lettre_6061
18:59 | Lien permanent | Commentaires (0)
Hélas, mon cher monsieur, que puis-je faire pour vous du fond de mes déserts ?
... Je pense bien avoir gagné mon pari d'hier matin: "Mais avec clarté et engagement j’expliquerai notre projet, notre volonté de continuer à faire avancer notre pays avec chacun d’entre vous." Macron -3/03/2022 à 20h.
« A Jean-Baptiste-Jacques Élie de Beaumont
1er décembre 1766 1
Vous allez être une seconde fois, mon cher Cicéron, le protecteur de l'innocence la plus pure et la plus opprimée ; je pense toujours que vous en aurez beaucoup plus de faveur auprès du Conseil dans l'affaire de Canon, lorsqu’on verra que celui qui plaide pour lui-même a plaidé avec tant d'éloquence, de désintéressement et de noblesse pour les autres .
Hélas, mon cher monsieur, que puis-je faire pour vous du fond de mes déserts ? La mort m'a enlevé presque tous mes amis . M. le maréchal de Richelieu qui aurait pu me donner sa protection est à Bordeaux . Ma faible voix se fera entendre sûrement aux peu de connaissances qui me restent .
Je prend même la liberté d'envoyer par cet ordinaire un mémoire de cinq ou six lignes à M. le duc de Choiseul ; il ne les faut pas plus longs à un ministre chargé de tant d'affaires et de tant de détails .
Vous m’avez fait la grâce de m'envoyer deux mémoires sur l'affaire de Canon . Vous croyez bien que je les ai lus tous deux avec la plus grande attention , et l’intérêt le plus vif .
Vous me demandez le secret sur des choses que vous voulez bien me confier concernant cette affaire ; et moi je vous le demande bien davantage . Il faut vous dire que ce sont précisément MM. Tronchin qu'on a violemment prévenus contre vous , et principalement Tronchin le médecin qui a beaucoup de crédit dans la maison d'Orléans, dans celle de La Rochefoucauld et dans quelques autres . Je pense qu'il est très convenable que Mme de Beaumont aille trouver les deux Tronchins, elle réussira en se montrant et en parlant . Il est nécessaire de les détromper, et de leur faire voir que ce ne sont point des catholiques avides qui veulent dépouiller des protestants à la faveur et à l'appui d'une loi barbare ; que c'est précisément le contraire . Vous pourrez alors avoir dans M. Tronchin le fermier général un solliciteur auprès de M. Bertin, au lieu d'un adversaire . M. d'Argental parlera à M. le duc de Praslin .
Je pense qu’il ne serait pas mal que Mme de Beaumont se fit présenter à Mme la duchesse d'Anville ; qu'elle lui donnât d'abord votre mémoire en faveur des Sirven, qu'ensuite, dans une seconde visite, elle lui confiât le secret de votre affaire, les dispositions de M. de Béranger, etc. Elle se ferait de Mme d'Anville une protectrice très puissante et très vive , qui pourrait déterminer M. de Saint-Florentin en votre faveur . C'est principalement de M. de Saint-Florentin que ces affaires dépendent ; c'est lui qui les rapporte au conseil du roi .
Je voudrais bien savoir quel est l'auteur de l'écrit sur les commissions . Si ce n'est pas vous, il y a donc quelqu'un dans l'ordre des avocats qui a autant d'esprit que vous .
Adieu, mon cher ami, protecteur de l'innocence .
V. »
1 Original ,date et initiale autographes (Mme Jean de Mézerac, château de Canon ) ; édition Lettres inédites, 1897.
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03/03/2022
ils seront fort aises de voir leur créature lécher continuellement son oursin
... Et si la créature était Poutine , et l'oursin sa politique de cinglé assassin ?
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
1er décembre 1766
Je connais mes anges ; ils ne me sauront point mauvais gré de mes corrections ; au contraire, ils seront fort aises de voir leur créature lécher continuellement son oursin 1. Ils sont donc suppliés de faire mettre sur la pièce toutes ces corrections par un brave secrétaire qui ne haïsse pas les vers.
Peut-être le lundi 1er décembre, jour auquel j’écris à mes anges le matin, recevrai-je un mot de leur main bienfaisante ou foudroyante.
Je leur ai déjà mandé que l’exemplaire était parti le 19, adressé à M. le duc de Praslin ; que force corrections avaient suivi de poste en poste ; que j’avais envoyé à M. Jeannel un nouvel exemplaire du Commentaire sur les Délits pour M. le duc de Praslin. Enfin j’ai fait mon devoir à chaque courrier. Hier, je fis lire la pièce au coin de mon feu à Cramer, non pas à Philibert Cramer, le prince, mais à Gabriel Cramer, le marquis ; lequel est très bon acteur, et sent ce qui doit faire effet. Il a pleuré et frémi.
Mais ce qui me fait frémir, moi, c’est que les comédiens de Paris vont jouer Les Suisses 2, et que mes Scythes, venant après, ne paraîtront qu’une copie ; je perds à la fois le piquant de la nouveauté et l’agrément de mon alibi. Voilà probablement bien de la peine inutile.
Au reste, mes anges, vous serez farcis de pièces nouvelles cette année. Vos plaisirs sont assurés ; mais moi misérable, je n’ai d’autre consolation que celle de chercher à mériter votre suffrage.
Enfin donc, nous allons avoir le mémoire pour les Sirven. Je recommande cette véritable tragédie à vos bontés.
Respect et tendresse.
V.»
1 Le mot oursin vient d'être admis dans le Dictionnaire de l'Académie de 1762 pour désigner l'échinoderme, et non l'ourson . On le trouve cependant employé pour désigner un bonnet à poil, comme un doublet d'ourson . Voir : https://www.bertrand-malvaux.com/fr/p/30075/bonnet-a-poils-de-sous-officier-des-grenadiers-a-pied-de-la-garde-imperiale-modele-1808-1815-premier-empire.html
2 Le Guillaume Tell de Le Mierre : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k68345x
. Voir lettre du 22 novembre 1766 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/02/24/mais-voici-bien-une-autre-paire-de-manches-6368007.html
18:42 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je ne veux rien avoir de caché pour vous
... Je tiens le pari que ceci figure dans la "lettre" du candidat Macron . Chiche !
« A Etienne-Noël Damilaville
1er décembre [1766]
Mon cher ami, j’ai prié M. d’Argental de vous mettre dans la confidence d’un drame d’une espèce assez nouvelle. Je ne veux rien avoir de caché pour vous. Je crois que cet ouvrage était absolument nécessaire pour confondre la calomnie, cette calomnie dont je vous parlais si souvent en vous disant : « écrasons l’infâme ».
Vous savez avec quel acharnement elle m’impute, presque tous les mois, quelque mauvais livre bien scandaleux que je n’ai jamais lu et que je ne lirai jamais. Les mauvais poètes ne sachant plus comment s’y prendre pour me perdre, après m’avoir immolé à Crébillon, m’ont voulu immoler aux jansénistes ; ils se sont avisés de faire de moi un théologien, et ils prétendent, avec l’abbé Guyon et l’abbé Renoard 1, que je traite continuellement la controverse. Or certainement un homme qui fait une tragédie n’a guère le temps de controverser. Une tragédie 2 demande un homme tout entier, et le demande pour longtemps. Non seulement je me suis remis à faire des pièces de théâtre, mais j’en fais faire. Je m’occupe beaucoup de celle à laquelle La Harpe travaille actuellement sous mes yeux, et j’en ai de grandes espérances. J’ai dans ma vieillesse la consolation de former des élèves : je rends par là tout le service que je puis rendre aux belles-lettres.
Il me semble que je ne mérite pas les cruelles persécutions que j’essuie depuis si longtemps.
Mandez-moi donc à qui on attribue le petit livre savant et éloquent 3 que vous m’avez envoyé avec une note de M. Thieriot. L’auteur de ce livre ne me traite pas comme les Guyon et les Fréron : je voudrais bien connaître cet honnête homme.
Savez-vous quel est le polisson qui a fait le plat ouvrage intitulé la Justification de J .-J., et qui prétend que J.-J. est le seul philosophe dont la conduite soit conforme à ses principes ?
Les affaires de Genève doivent finir bientôt. Ce petit État devra au roi toute sa félicité, outre quatre millions cinq cent mille livres de rente dont les Genevois jouissent en France. M. le chevalier de Beauteville leur a donné un projet qui est la sagesse même. S’ils ne l’acceptaient pas, il faudrait qu’ils fussent plus fous et plus méchants que J.-J.
Je vous embrasse tendrement, mon très cher ami. Remerciez bien pour moi M. Thieriot de son attention, et faites quelquefois mention de moi avec Tonpla 4.
M. Boursier est toujours dans les mêmes sentiments ; il dit qu’il se tiendra toujours prêt 5.
N. B. -- L’avocat de Besançon, auteur du Commentaire sur les lois, concernant les Délits, a beaucoup augmenté son ouvrage 6. L’édition est entièrement épuisée. Pourriez-vous demander à M. Marin si on permettra dans Paris l’entrée d’une nouvelle édition conforme à ce qui a déjà été imprimé, et très circonspecte dans ce qui sera ajouté ? »
1 L’un, Claude-Marie Guyon ,auteur de l’Oracle des philosophes : https://fr.wikisource.org/wiki/Livre:Guyon_-_L%E2%80%99Or... ; l’autre, rédacteur du Journal chrétien.
Beuchot a corrigé ce nom en Dinouard . Joseph-Antoine-Toussaint Dinouard est en effet, avec l'abbé Trublet, le rédacteur du Journal chrétien . Voir : https://data.bnf.fr/fr/documents-by-rdt/12001651/te/page1?
Voir : L'Art de se taire ,principalement en matière de religion : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k64999j.image.f30
et Le Triomphe du sexe -Ouvrage dans lequel on démontre que les femmes sont en tout égales aux hommes : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71935s.image
2 Par « saut du même au même », copie et édition de Kehl omettent n'a plus guère le temps de controverser . Une tragédie […].
3 Comme l'indique une lettre de Thieriot du 2 décembre 1766, ce livre est intitulé Petit Traité sur les commissions en matière criminelle , attribué à Pierre-Louis Chaillou (1740-1806), avocat au parlement de Bretagne , ouvrage en faveur de La Chalotais . Voir note 59 (page 166 -suiv.) sur https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00391106/PDF/AffairedeBretagne.pdf
4 Cette phrase n'est donnée que par la copie et l'édition de Kehl .
5 Le paragraphe n'est donné que par la copie tardive et la Correspondance littéraire .
6 Cet ouvrage est de Voltaire .
12:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
On a besoin de la plus extrême diligence pour des raisons extrêmement pressantes
... On ne peut remettre au lendemain l'accueil de ces malheureux Ukrainiens qui nous rappellent l'exode de nos compatriotes en trente-neuf, avec ces conditions aggravantes qu'ils doivent fuir hors de leur pays . Au passage, il ne faut pas infliger un système discriminatoire en refusant la fuite à ces étudiants africains pris entre le marteau et l'enclume : https://www.france24.com/fr/europe/20220228-exode-%C3%A0-la-fronti%C3%A8re-ukraine-pologne-ils-nous-refoulent-juste-parce-qu-on-est-noirs
« [Voltaire] et Jean-Louis Wagnière
à Gabriel Cramer
[novembre-décembre 1766]
On vous envoie, monsieur, l'épître dédicatoire, et la préface de la tragédie . On a besoin de la plus extrême diligence pour des raisons extrêmement pressantes .
À l'égard de l'ouvrage de M. d'Alembert, on vous conseille de faire revoir les feuilles par un homme intelligent ; car M. de Voltaire est trop malade pour les revoir et pour les bien corriger .
Tout ce qu'il peut faire dans l'état où il est, c'est de revoir les feuilles de la tragédie qu'il connait, ainsi que l'épître dédicatoire, la préface et l'avis du lecteur, que l'on envoie dans ce paquet .
On vous fait mille tendres compliments . »
10:32 | Lien permanent | Commentaires (0)
consolez-vous et travaillons
... Je me permets de donner cette conclusion au discours présidentiel d'hier soir, heureusement bien préférable au cynique "armons-nous et partez" que certains va-en-guerre osent clamer sans vergogne : https://www.youtube.com/watch?v=DuKMxpI1Vmk
Alea jacta est .
« A Gabriel Cramer
à Genève
[novembre-décembre 1766]
Mon cher Caro, consolez-vous et travaillons . Je vous demande en grâce de hâter Philibert si vous lui avez donné le d'Alembert à imprimer, et hâter surtout Les Scythes . Cela est d'une importance extrême pour moi, et ne sera pas inutile pour vous . Je vous demande la plus extrême diligence . »
10:06 | Lien permanent | Commentaires (0)
Voilà mon avis, dont je ne démordrai point
... Courageux , messieurs les présidents Macron et Zelensky .
« A Pierre-Michel Hennin
Dimanche au soir, 30è novembre 1766
Point du tout, monsieur, la lettre est de M. le duc de Choiseul 1, et il n’est point du tout question de M. le duc de Praslin, qui n’a point encore reçu mon paquet. Je soupçonne sur cela la chose la plus singulière et la plus plaisante, laquelle est en même temps très bonne à savoir.
Ut ut est 2. J’ai relu le projet de la médiation, et je tiens qu’il faut être ou plus fou, ou plus malin que Jean-Jacques, pour ne le pas accepter avec des acclamations de reconnaissance. Voilà mon avis, dont je ne démordrai point. Je serais très fâché que mes quatre poteaux tombassent sur mon ami Vernet , je les relèverai en sa faveur, dût-on l’y faire attacher .
Interim vale et nos ama, quia te amamus .3
V. »
1 Ces mots répondent à la première phrase de la lettre de Hennin du 29 novembre 1766 ; voir : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1766/Lettre_6596
2 Quoi qu'il en soit .
3 En attendant, porte-toi bien et aime nous, parce que nous t'aimons .
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